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que nous propoferons au Chrétien, qui renouvelle fon Alliance avec Dieu 'dans le Sacrement de la fainte Cene. Ce fera le premier paralléle, que nous ferons entre les Juifs du temps de Jofué, & les Chrétiens communians. Jofué n'étoit que le type de Jésus Chrift Médiateur de P'Alliance, que nous fefons avec Dieu dans. l'Euchariftic. Ce que St. Paul difoit à l'égard d'une des parties du Miniftére de Jofué, qu'elle n'avoit en quelque forte rien de réel, quand on la comparoit avec le Ministére de Jélus Christ, nous le dirons fans héfiter à l'égard de toutes: Ce n'est pas Jofué, dit l'Apôtre, qui a Hebr. IV. introduit le peuple de Dieu dans le véritable repos: c'eft Jéfus Chrift. Ce n'eft point Jofué, qui a eu des communications intimes avec Dieu: c'eft Jéfus Chrift. Ce n'eft pas Jofué, qui a livré des combats pour fon peuple, & qui a remporté des victoires: c'eft Jésus-Chrift. Ce n'eft pas Jofué, qui a expofé fa vie & fa perfonne pour les vrais Ifraëlites: c'eft Jéfus Chrift. Ce n'eft pas Jofué, qui a conduit les Fidelles dans la Terre de Canaan: c'est Jéfus Chrift.

8.

9.

Il vient à nous dans de certaines circonftances heureuses de notre vie: il vient après avoir obtenu un nom par dessus tout nom, afin qu'au nom Philip. II. de Féfus tout genou fléchiffe: il vient après avoir triomphé de nos ennemiş: il vient couvert de ce fang qu'il repandit pour nous, & de ces plaies qu'il reçût dans les redoutables combats, qui lui furent livrez pour notre falut: il nous fomme par ces objets de remplir les claufes de notre Alliance avec Dieu. Si nous avions l'esprit pénétré de ces grandes véritez, rien ne feroit capable d'arrêter l'activité de notre déyotion. Nous ne pourrions recevoir les

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X11.25.

fceaux de notre union avec Dieu fans être agitez d'un falutaire tremblement, & fans nous fouvenir de ces fententieufes paroles d'un ApôHebr. tre: Prenez garde que vous ne méprifiez celui qui parle, car fi ceux qui méprifoient celui qui parloit fur la Terre ne font pas échapez, (c'eft ainfi que St. Paul défigne Jofué & tous les anciens Légiflateurs des Juifs) nous ferons punis beaucoup plus févérement encore, fi nous méprifons celui qui nous parle des Cieux.

Jofué 14, &c.

XXIV.

Notre feconde réflexion fur le renouvellement de l'Alliance de Dieu avec l'ancien peuple roule fur la liberté des contractans. Voici de quelle maniére Jofué leur parla: Craignez PEternel. Servez le avec intégrité & avec vérité : ôtez les Dieux que vos Péres ont fervi au-delà du fleuve, & en Egypte. Que s'il ne vous plait pas de fervir PEternet, choififfez aujourd'hui qui vous voulez fervir, ou des Dieux, que vos Péres ont fervi au-delà du fleuve, ou des Dieux des Amorrhéens. dans le païs defquels vous habitez. Jofué expofe ainfi devant les yeux des Ifraëlites toutes les Religions qui leur étoient connûes. Il y en avoit trois principales: celle des Chaldéens; celle des Egyptiens; & celle du païs de Ca

naan.

Celle des Chaldéens, d'où Tharé & Abraham avoient été tirez, eft exprimée de cette maniére, les Dieux que vos Pères ont fervi au-delà du fleuve, c'eft à-dire, au-delà de l'Euphrate. • Nous avons vû dans notre Difcours fur la

Voca

6 Dans le I. volume de nos Difcours, Difc. XI. pag. 163.

7 HERODOT. lib. III. cap. 16. pag. 167.

8 STRABO lib. XV. pag. 1064. Voi, auffi Q. CURT. lib. IV. cap. 20.

vocation d'Abraham, que le feu étoit adoré dans la Chaldée: ce culte paffa probablement des Chaldéens aux Perfes. Du moins il paroit par divers paffages des Auteurs profanes, & en particulier 7 d'Hérodote & de Strabon, que le feu étoit la Divinité de ces derniers, & qu'ils l'adoroient fous le nom de Mithras, au fujet duquel on peut voir des recherches très-profondes & très- ingénieufes dans l'Ouvrage de 9 Monfaucon.

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10

La feconde Religion, dont parle Jofué, est celle des Egyptiens. Elle eft clairement exprimée dans ces paroles: Otez les Dieux que vos Pères ont fervi en Egypte. Nous n'avons pas des monumens affez anciens pour déterminer quels Dieux on adoroit en Egypte, dans le temps que les Ifraëlites y étoient efclaves. 1° Hérodote & Diodore de Sicile, qui font ceux de tous les anciens Auteurs, qui ont parlé le plus pertinemment de ce genre d'idolatrie, ont vêcu bien des fiècles après Moyfe: quelque vénération que la postérité ait eue pour leurs Livres, on y trouve ce défaut, qu'on auroit peine à pardonner aujourd'hui aux Hiftoriens les plus médiocres, c'eft qu'ils ne marquent pour l'ordinaire ni l'époque ni les garans des faits qu'ils racontent. Mais à juger des Divinitez, qu'on adoroit en Egypte du temps de Moyfe, par celles qu'on y eût après lui, on ne peut que s'en former d'affreufes idées. Les Chats, les Chiens, les Singes, les Ibis, les Serpens, les Aulx,

9. MONTFAUCON Antiquitez tom. 2. part. 2. pag. 400.

IO HERODOT. lib. II. cap. 37. pag. 103. &c.
II DIODOR. SICUL. lib. I. pag. 10.

Aulx, les Oignons, toutes les parties du corps humain, tout ce qu'il y a de plus vil dans la Nature étoit rangé parmi les Dieux, ainfi que plufieurs Savans l'ont prouvé, & comme on s'en convaincra fur-tout en jettant les yeux fur la Table Ifiaque de Pignorius, & fur le riche Ouvrage du Père 3 Montfaucon, que nous avons déjà cité.

12

Enfin la troifiéme forte de Religion, que Jofué met devant les yeux des Ifraelites; c'eft celle du pais de Canaan: afin que fi une avidité infatiable d'idolatrie leur fefoit trouver que la Chaldée, d'où leurs Ancêtres étoient venus, & que l'Egypte, où leurs Pères avoient été affervis pendant fi longtems, ne leur fournis foient pas affez d'Idoles, ils l'affouviffent en adoptant toutes les fauffes Religions des peuples, que Dieu venoit d'exterminer devant leurs yeux. Ces Divinitez font appellées les Dieux des Amorrhéens, & ce dernier terme doit fe prendre là dans un fens vague, qui exprime tous les peuples de Canaan, dont les Amorrhéens formoient un des plus confidérables, ainfi que nous 14 avons déja eu occafion de le remarquer. Ceux qui voudront s'inftruire à fonds fur les noms de ces Dieux des Cananéens, fur leur origine,fur le culte qu'on leur rendoit, n'ont qu'à puiser dans les riches fources que nous leur montrons. Jofué oppofe toutes ces Religions à celle du Dieu du Ciel & de la Terre, & laiffant au choix des Ifraëlites celle qui leur paroitroit

la

12 Tabula Ifsaca LAURENTII PIGNORII, pag. 16. &c.

T

13 MONTFAUCON. ibid. tom. II. part. 2. depuis la page 270. jufqu'à 355.

la plus digne de leur attachement & de leurs hommages, il leur dit: Cboififfez qui vous vou→ lez fervir.

C'eft cette liberté des contractans, qui fournit un second sujet à nos réflexions, & qui doit être obfervée dans le renouvellement de notre Alliance avec Dieu. Nous fommes libres: nous fommes fouverainement libres d'entrer dans P'Alliance, que Dieu nous propofe dans la Religion, ou de n'y pas entrer. Dieu nous pres→ fe, il eft vrai, d'accepter cette Alliance; fes ferviteurs nous preflent comme lui, & ne pouvant nous attirer, ils voudroient fouvent nous arracher aux miféres inévitables, dans lefquelles nous nous jettons, fi nous refufons les graces, que Dieu nous offre dans fa Communion. Nous abufons des tendres foins, qu'on fe donne pour nous fauver. Il nous femble que nous fommes néceffaires à la félicité du Dieu bienheu- 1 Tim. I. reux & qu'il manquera quelque trait aux II. beautez de la Jérufalem célefte, & aux douceurs de la focieté des Saints glorifiez, fi nous en fommes exclus. Erreur groffiére. Dieu eft fuffifant à lui-même. Il a joui fans nous, & lorsque nous n'exiftions pas encore, d'un bonheur parfait, il peut encore en jouir fans nous éternellement. Il eft environné de milliers, de Daniel dix mille milliers, qui le fervent, & qui affiftent vII. 1Ơ. continuellement devant lui pour obéir à ses ordres fuprêmes. Il peut des pierres même faire naitre Matth. des enfans à Abraham, comme l'atteftoit St. Jean III. 9.

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Baptifte,

14 C'eft le fens qu'on doit donner au mot Amerrhéen dans Généfe XV. 16.

15 SELDEN. de Diis Syris Syntagm. 1. cap. 1. pag. 2. & alibi paffim. Vossius de idol. lib. II. cap. 55 pag. 225. & alibi paffim.

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