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étoit plus pure que celle des autres lieux de l'Univers: ils ont dit, que les prémices, qu'on apportoit à Jérufalem, & qui pafloient par le païs des Gentils, contractoient une certaine impureté, & qu'elles étoient fouillées par l'air qui s'attachoit aux tuyaux de la corbeille, où elles étoient renfermées. 14 Ils ont dit, que même au jour de la rélurrection les corps des Juifs, qui étoient dans le païs des Gentils, ne pourroient être réunis à leur ame, qu'après être venus dans la Terre de Canaan par des lieux foûterrains, que Dieu a formez pour les y conduire. C'eft ainfi qu'ils expliquent ces paroles Ezech. d'Ezechiel: Mon Peuple vous faurez que je fuis XXXVII Eternel, quand j'aurai ouvert vos fepulcres, 13. &c. que je vous en aurai tirez, quand j'aurai mis mon Efprit en vous, quand vous revivrez, & que vous Jerez rétablis dans votre pais. 15 Ils ont dit, que cette Terre avoit la vertu de procurer aux coupables le pardon de leurs péchez. Et la-deflus ils debitent cette Fable. 16 Le Rabin Juda & le Rabin Eliezer fe promenoient ensemble hors de la ville de Tibériade tout près d'une de fes portes. Ils virent un Mort, que l'on apportoit du païs des Gentils, pour l'aller enterrer dans la Terre d'Ifraël. Le Rabin Juda demanda à Eliezer, à quoi fert à cet homme, qui eft mort dans une Terre étrangère, d'être enterré dans celle ci? Ne peut-on pas lui appliquer ces paroles de Jéremie: Vous avez rendu mon héritage Jer. II. 7 abominable lorsque vous viviez: & vous l'avez fouillé

14 Voi. Gemara Hierof. tit. Schabbat. fol. 3. col. 4.
15 Berefchith Rabba, fect. 96. cap. 7. fol. 518.
16 Voi. RELAND. Palestina S. lib. I. pag. 26.
17 Gemara Ketuvoth. fol. 3. I,

fouillé après votre mort? Mais le Rabin Eliezer répondit: ce Mort tire un grand avantage d'être enterré ici, c'est par là que les péchez feront expiez: c'est à cela que fe rapporte le paffage du Deuteronome: Il a expié fa Terre & fon Peu Deuter. ple. Ce font les paroles d'Eliezer. Et c'eft une fentence du 7 Talmud, qu'être enterré dans le païs de Canaan, & être enterré fous l'Autel, c'est la même chofe C'cft auffi un mot d'Abarbanel, que celui, qui demeure bors du païs Ifraël, eft femblable à un Athée.

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XXXII.

43.

Il y a quelque chofe de plus folide dans '9 un difcours, où Jofeph Méde examine, comment Dieu eft dit dans les Ecritures être plus dans un endroit que dans un autre.Ce favant Auteur croit, que cette préfence confifte en ce que Dieu eft accompagné de les Anges, dans le lieu où il eft dit être préfent d'une façon finguliére. Il ramaffe divers endroits de l'Ecriture, dans lesquels il eft parlé des lieux où Dieu habite, & il veut prouver que cette habitation, ou cette préfence, at toûjours rélation aux Anges, dont Dieu eft accompagné dans ces endroits-là, comme un Roi l'eft de fes Gardes & de fes Courtifans dans fon Palais. Ainfi Jacob aiant vû cette Echelle miraculeufe, où étoient des Anges qui montoient. & qui defcendoient, dit: Certainement l'Eternel Genel eft ici, & je n'en favois rien que ce lieu ici eft xxvIII. épouvantable: c'eft ici la Maifon de Dieu, c'eft ici la porte des Cieux! De même Dieu eft fouvent repréfenté comme étant defcendu fur Sinaï, lorf

18 A BARBANEL in Zachar. quæft. 1.

que

19 JOSEPH MEDE Difcours Book 2. in Ecclef. V. 5. I. pag. 383.

16. 17.

Deuter.

que fa Loi y fut publiée: & c'eft encore felon le témoignage de Moyle, celui de St. Etienne & celui de St. Paul, parce que les Anges étoient A&t. vii. fur cette Montagne. Par la même raifon St. Jude repréfente le Seigneur venant avec fes Saints qui font par milliers.

XXXIII. 2.

53. Galat.

III. 19.

Hebr. II.

2.

Jud. 15.

Pf.

I.2.

Jofeph Mède pense, que c'est en ce fens que les Auteurs facrez & leurs anciens Interprétes ont appellé les Temples les Maifons de Dieu. C'eft ainfi que le Roi Agrippa atteftoit le Temple de Dieu & les faints Anges, qu'il avoit fait tous fes efforts pour prévenir la rebellion des Juifs contre les Romains. C'est ainfi que David en parlant du culte, qu'il rendoit à Dieu dans le Temple, difoit: Je me profternerai dans le CXXXVIII. Palais de ta Sainteté je te pfalmodierai en la préfence des Dieux: c'eft-à-dire, felon la Verfion des LXX. & felon la Vulgate, en la préfence des Anges. C'est pour cette raifon felon lui, que fur les courtines du Tabernacle, & fur celles du Temple, on avoit représenté des Cherubins, pour marquer que Dieu habitoit dans ce lieu facré avec fes Anges. C'eft encore l'idée qu'ont les Juifs, lorsque faifant leurs priéres devant l'Armoire, dans laquelle ils renferment le Livre de la Loi, ils difent: 21 O Seigneur Dieu, ces Anges, cette focieté céleste font affemblez ici bas avec votre Peuple d'Ifraël: ils vous couronnent avec leurs louanges, & ils vous disent à cris redoublez, Saint, Saint, Saint eft l'Eternel des Armées, tout ce qui eft dans toute la Terre eft fa gloire.

22

C'eft encore felon la même idée, que ** Jofeph Mède explique deux paflages, qui ont donné

20 JosAPH. de Bello Jud. lib. II. 16. fect 4. pag.

donné bien de la peine aux Interprétes: Le premier eft au Livre de l'Eccléfiafte: Quand tu Ecclef. v. auras fait quelque vœu à Dieu, ne différe point de 4.6. Paccomplir. Ne permets point que ta bouche te faffe pécher, & ne di point devant le Meffager, que c'est ignorance. Il y a dans l'Hébreu, devant l'Ange: c'eft là, felon l'Interpréte que nous citons, un terme collectif qui fignifie les Anges; & toutes ces paroles font une exhortation à ne pas alléguer dans le Temple, en la présence des Anges qui y habitent, de mauvaifes raifons pour fe difculper de n'avoir pas rempli fes vœux.

Le fecond paffage eft celui du Chap. XI. de la 1. Epitre aux Corinthiens: La Femme doit Verf. 10. avoir für fa tête à caufe des Anges, une puissance: c'est-à-dire, une marque de foûmiffion. Pourquoi les femmes doivent-elles être habillées avec plus de décence dans le Temple, que dans les autres endroits, fi ce n'eft, dit Jofeph Mède, parce que les Anges y affiftent plûtôt qu'ailleurs? Voilà comment ce célèbre Auteur explique ce qui eft dit dans l'Ecriture touchant la présence Divine.

Mais fi on ne peut pas lui difputer avec raifon, que la Divinité foit repréfentée comme affiftant d'une façon particuliére dans les lieux où font fes Anges, il ne fauroit auffi, ce me femble, fans trop reftreindre l'idée que l'Ecriture attache à ce terme, en borner ainfi l'explication. Dieu, qui eft immense, doit être fur-tout fenfé préfent dans tous les lieux, où il donne des marques extraordinaires de fa grace ou de la vangeance. Je n'en alléguerai qu'un feul

21 Seder Tephilloth des Juifs de Portugal.
22 JOSEPH. ubi fuprà.

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Efai.

feul exemple: Ainfi a dit l'Eternel, qui eft baut LVII. 15. élevé, qui habite dans l'Eternité, & duquel le nom eft le Saint: j'habiterai dans le lieu haut & faint: mais je ferai auffi avec celui qui a le cœur brifé, qui eft bumble d'efprit, afin de vivifier l'efprit des humbles, & de ceux qui ont le cœur brifé.

Auffi les quarante mille hommes, auxquels Phinées & les dix Chefs de chaque Maison furent envoyez, étoient-ils bien perfuadez que la préfence de Dieu n'étoit pas bornée à ce lieu, où il avoit jugé à propos que l'on dreflât fon Tabernacle. lis témoignèrent qu'ils ne croyoient pas qu'un pais que fes enfans habiteroient, & dans lequel ils lui rendroient le culte qu'il demandoit d'eux, & l'obéïffance qui lui eft due, pût être fouillé. Ils dirent qu'ils n'avoient bâti cet Autel ni par un efprit de rebellion, ni par aucun fcrupule à l'égard du lieu où ils alloient fe fixer, mais afin qu'il fût un figne de l'étroite Alliance, qui feroit éternellement entre eux & ce Peuple, qui offroit à Dieu des facrifices fur un Autel femblable à celui, dont ils venoient eux-mêmes d'imiter la forme. Cette précaution n'étoit pas inutile. Les Juifs ont toûjours fait confifter une partie de leur gloire à former un Peuple à part, à n'avoir aucune liaison avec les nations étrangères. Il étoit à craindre qu'ils ne vinfent par fucceffion de temps à fe renfermer plus encore en eux mêmes, & à regarder comme des étrangers ces Rubenites, ces Gadites, cette demi-Tribu de Manaffé, dont ils étoient féparez par un grand fleuve. Les quarante mille hommes affurérent bien fortement les Députez, que ç'avoit été là l'unique motif, qui les avoit portez à conftruire cet Autel, dont leurs frères étoient fi alarmez. Ils leur repré

fen.

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