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Jent; Allons, fervons les Dieux étrangers qui nous étoient inconnus, vous ferez des perquifitions, vous prendrez toutes les précautions imaginables pour découvrir fi ce rapport eft fondé, & en cas que ce est qu'on vous en a dit foit véritable & prouvé, & qu'une telle abomination ait été commife au milieu de vous, vous ne manquerez point de faire paffer les habitans de cette ville au fil de l'épée vous la détruirez à la façon de l'interdit, avec tout ce qui y fera, vous ferez paffer les bétes même au fil de Pépée vous affemblerez tout fon bien au milieu d'une place: vous brûlerez entiérement cette ville, & toutes les richesses en la présence de l'Eternel votre Dieu en forte qu'on ne la rebâtisse jamais, qu'elle foit pour toûjours un monceau de ruines.

:

من

Les Ifraelites fuivirent ponctuellement cet ordre. Avant que d'infliger des fupplices à leurs frères, ils voulurent favoir plus exactement s'ils les avoient méritez. Ils envoyérent des Députez aux quarante mille hommes. Phinées fut le Chef de cette députation. A qui pouvoit mieux convenir la commiffion d'exaiminer, fi les droits de Dieu venoient d'être violez, qu'à celui qui les avoit lui-même vangez avec tant de zèle dans l'affaire des Madianites? Les autres Députez ne font pas nommez: il est dit feulement, qu'il y avoit avec Phinées, dix Seigneurs de chaque maifon des Pères de toutes les Tribus d'Ifraël, l'Hiftorien ajoûte, qu'il y avoit dans tous les milliers d'Ifraël un Chef de chaque Maifon de leurs Pères, ce qui peut fignifier ou des Chefs de mille hommes, c'est ainsi que l'entend le Rabin Kimchi, ou des Chefs de Tribus, c'eft l'idée que quelques autres Interprètes y ont attachée. Dans

9 KIMCHI in Jos. XXII. 14. fol. 7.

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Dans les Siècles qui fuivirent Jofué on fesoit de femblables perquifitions à l'égard des villes, où il fe trouvoit quelcun qui fefoit des propofitions d'idolatrie. Voici un paffage de Maimonidès Le Sanhedrin envoyoit premiérement des perfonnes dans la ville accufée, afin qu'ils viffent de leurs propres yeux, fi toute la ville, ou fi la plus grande partie de la ville, étoit coupable. On y envoyoit enfuite deux fa es, ou deux perfonnes deftines aux charges politiques, pour l'avertir de fon devoir, & pour travailler à la ramener. Si cette ville déferoit aux exhortations qui lui étoient adreffees, ou fi elle le témoignoit par fon retour au culte du vrai Dieu, on étoit fatisfait de fa conduite. Mais helle perfiftoit avec o ftination dans fa folie, alors le grand Sanhedrin ordonnoit qu'on l'attaquât à force ouverte, & qu'on en fit le fiège dans les formes. Quand on s'en étoit rendu maître, le grand Sanbedrin prépofoit des Juges pour examiner les prévenus. On mettoit à part tous ceux contre lesquels deux témoins avoient déposé. S'il fe trouvoit plus d'innocens que de coupables, ces derniers étoient lapidez, & les autres étoient exempts de peine Mais fi le nombre des coupables furpaffoit celui des innocens, alors on envoyoit des perfonnes au grand Sanhedrin pour lui rapporter ce qu'on avoit trouvé: c' toit à cet augufte Corps qu'il appartenoit de prononcer qu'on pajsât au fil de l'épée les hommes, les femmes, les enfans, & qu'on brulât toutes les richeffes d'une ville, dans laquelle il fe trouvoit plus de perfonnes qui s'étoient abandonnées à l'idolatrie, que de celles qui avoient refufé d'y adhérer: on envelopoit même les étrangers dans ce châtiment, & on les traitoit

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avec

IO MAIMONIDES Halach, aboda zara, cap. 4. fect. 6,

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avec la même rigueur, s'ils avoient fait un féjour d'un mois parmi les coupables. Quand ils y avoient ·été moins de temps, ils étoient bien paffez au fil de l'épée, mais leurs biens vencient à leurs héritiers. Mais foit que ce fut la plus grande, foit que ce fut la moindre partie de la ville, qui eût commis le crime, ceux qui avoient follicité le Peuple à le commettre étoient lapidez. Ce font les paroles de Maimonidès, celui de tous les Auteurs Juifs qui parle le plus judicieufement. Mais il paroit par des palages du " Talmud, qu'on fcfoit des glofes puériles fur les paroles de Moyfe, que nous avons rapportées, & qu'on fe conduifoit à l'égard des villes accufées d'idolatrie avec cet efprit de minutie & de fuperftition, dont les juifs ont toûjours été animez. Le Talmud porte que la fentence contre la ville accufée d'idolatrie ne devoit point être exécutée, à moins que ceux qui l'avoient feduite ne fuflent de cette ville même & de la même Tribu. La raison de cette conduite, c'eft qu'il eft dit, fi quelques méchans hommes fortis du milieu de vous, & non venus de debors. La fentence ne devoit pas être exécutée, fi on s'étoit laiffé furprendre par un feul feducteur. La raifon en eft qu'il eft dit, non au fingulier, fi quelque méchant homme, mais fi quelques méchans hommes font fortis, &c. La fentence ne devoit pas être exécutée, fi c'étoient des femmes qui avoient feduit la ville, parce qu'il eft dit non, fi quelques méchantes femmes, mais fi quelques méthans hommes font fortis, &c. De même, fi la ville n'avoit point de place publique, il falloit qu'on en fit une, parce que la Loi portoit, qu'on as

femblät

II Talmud tit. Sanhedrin cap. 11. fec. 4. 5. 6. voi. auffi JARCHI in Deuter, XIII. 12. pag. 1377.

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femblât tout le butin dans la place. Si les richeffes de la ville étoient à la campagne, il falloit les faire apporter dans la ville, parce que la Loi portoit, qu'on les brûlat dans la place. Si c'étoit un bourg, qui fût dans le cas, il devoit être épargné, parce que Moyfe ne parloit pas d'un bourg, mais d'une ville. Si la ville accufée étoit une ville de refuge, elle ne devoit pas non plus fubir la rigueur de cette fentence, parce qu'il eft dit, quand tu entendras, non dans quelcune des villes de refuge, mais dans quelcune de tes villes. Si la ville étoit limitrophe du païs de Canaan, elle devoit auffi être exempte de ce châtiment parce que la Loi portoit, non f quelque ville qui eft dans vos limites, mais fi quelque ville qui eft au milieu de vous. Et ce qu'il y a de plus fingulier & de plus extravagant, c'est que la ville coupable étoit épargnée, fi ceux qui l'avoient feduite s'étoient fervis d'un autre formulaire que de celui qui eft rapporté dans la Loi, à favoir, allons après des Dieux étrangers & fervons les.

Les perfonnes, qui furent députées vers les quarante mille hommes, leur repréfentérent la furprife que cet Autel, qu'ils venoient de batir, avoit caufée à tout Ifraël: ils rappellérent à leur mémoire les fleaux que Dieu avoit envoyez fur les Ifraelites, lorfqu'ils avoient enfraint les loix qui leur avoient été données : furtout ils les firent penfer aux peines qu'il leur avoit infligées, lorfqu'à la follicitation des filles Nomb. Moabites ils avoient rendu des honneurs religieux

XXV. I.

&c.

12 MAIMONIDES Halach. aboda zara, cap. 14. 5. voi. auffi SALDEN. de Synedr. lib. III. cap. 5. pag.

Jof.

gieux à Baal Pehor. Ils leur dirent que fi le feul crime d'Hacan avoit attiré la vangeance divine fur tout le Peuple, à plus forte raison Dieu alloit-il être embrafé de courroux, lorfque deux Tribus & demie feroient coupables d'une revolte générale. Mais ce qu'il y cut de plus fingulier dans le difcours des Députez, ce furent ces paroles, que je rapporterai telles quelles font dans le Livre de Jofué: Si la Terre que xxx. 19. vous poffedez, dirent-ils aux quarante mille hommes, eft fouillée, paffez dans celle qui eft dans la poffeffion de l'Eternel, où eft le pavillon de l'Eternel, ayez votre poffeffion parmi nous, ne vous revoltez point contre l'Eternel, en vous bâtiffant un Autel différent de celui de notre Dieu. Il est évident que c'est la présence du Tabernacle, qui fefoit foupçonner les Députez que les quarante mille hommes regardoient la Terre de Canaan comme plus fainte que celle de Galaad, qui leur avoit été affignée. Les Juifs ont auffi eu ces idées. Ils ont donné communément le nom de Terre fainte à la Judée. Ils le pouvoient à jufte titre mais que n'ont-ils point dit fur la fainteté qu'ils attribuent à cette Terre ? 3 Ils ont dit, que l'on recevoit bien dans le Temple des obla- Exod. tions du provenu de tous les autres païs, mais XII. 22. que le bouquet d'hyfope, dont on fe fervoit pour arrofer les linteaux & les poteaux des portes, devoit être pris du produit de la Terre de Canaan, de même que les deux pains, qui devoient être offerts à Dieu dans la Fête de Pentecôte. Ils ont dit, que la poudre de ce païs étoit

:

13 Mifchna tit. Menachot, cap. 7. fect. 1. pag. 89. Voi. auffi la note de R. Mos CHE Fil. MAIM. ibid.

Levit.

XXIII. 17.

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