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difficultez, qui s'oppofoient au but qu'ils avoient de prendre une Carte générale des païs, que les lfraël res n'avoient pas encore fubjuguez.

La folution, que nous venons d'appliquer aux deus difficultez, que nous nous étions faites, eft fuffisamment juftifiée par la nature de la chofe, à quelle nous l'appliquons. Ce n'est pourtant pas for nature de la chofe feulement que nous Pavons fondée. Elle eft appuyée fur plufieurs faits rapportez dans l'Hiftoire fainte. Je n'en alléguerai qu'un fcul. Il eft dit dans le Chapitre XIX. de Jofué, que l'héritage des enfans de Siméon fut pris du lot de ceux de Juda; parce Verf. 9. que la portion, qui avoit été affignée à ces derniers, étoit trop grande pour eux. Comment la portion de la Tribu de Siméon fut-elle prife de la Tribu de Juda, fi Dieu avoit déclaré par le fort celle qui devoit écheoir à cette derniére? C'est cela même que nous avons avancé; Dieu ne décidoit que d'une maniére générale par le fort le partage de chaque Tribu, & il laiffoit à la prudence des perfonnes, qu'il y avoit prépofées, à le régler en détail. On peut tirer la même conféquence du cas des filles de Tfelophcad, que nous rapporterons bien-tôt.

Mais quoique nous attribuions à ceux qui étoient prépofez au partage de la Terre promife, tant d'influence fur la maniére dont elle fut partagée, nous fommes convaincus que ce n'eft point à leur décifion, mais à celle du fort miraculeufement dirigé, qu'on doit attribuer l'harmonie, qui fe trouve entre les portions qui échûrent à chaque Tribu, & les Oracles qui les avoient prédites. On ne peut s'empêcher d'être frapé MASIUS in Jofuam XIV. 1--5. dans le 11.

१३

frapé de cette harmonie, quand on compare les paroles de Jacob, & celles de Moyfe mourant, avec ce que l'Auteur du Livre de Jofué raconte, & ce que l'expérience nous apprend fur ce fujet. 13 Mafius, à qui nous devons le plus riche Commentaire qui ait été fait fur Josué, a énergiquement exprimé cette penfée; & nous tranfcrirons ici fes paroles: Les portions échûrent à châque Tribu, dit-il, felon que Facob l'avoit déclaré deux cens cinquante ans auparavant, dans les derniers momens de fa vie,& Moyfe immédiatement avant que de mourir. Car il échût à la Tribu de Fuda une terre abondante en vignes & en pâtura-, ges: à Zabulon & à Ifachar, it échût des Ports de mer. Il y avoit dans celle d'Afer beaucoup d'huile, de froment & de metaux. Celle de Benjamin fut proche du Temple; en forte que cette Tribu étoit entre les épaules de la Divinité. Ephraïm & Manaffe furent diftinguez par un terroir extraordinairement bénit du Ciel. Le païs de Nephthali s'étendoit depuis l'Occident jufques au Midi de la Judée. Enfin Levi fe vit deshérité: & le partage de Siméon fut enclavé avec celui de Juda. Puis donc que le fort répondit fi bien à ces prédictions, il fau droit porter l'infalence ou la ftupidité au plus haut degré, pour refufer de reconnoitre l'infpiration de Dieu dans les paroles de Jacob, & dans celles de Moyfe, pour ne pas voir l'action de la Divinité dans le fort, & fa Providence dans l'événement, G dans les Oracles qui Pavoient prédit.

5. Nous devons examiner ce qui concerne le partage des Levites. En recueillant ce que nous avons eu occafion de dire fur leur fujet dans divers endroits de nos Difcours, on éclair

vol. des gr. Critiques pag. 1796.

cira

H

Josué
XIX. I.

cira ce qu'il peut avoir de plus difficile. 4 Nous
avons vû, dans l'hiftoire de l'enlevement de
Dina, le maflacre que Siméon & Levi.firent
dans la ville de Sichem.
le même endroit

Nous avons vû dans que Jacob leur en fit les reproches les plus cuifans. Nous avons remarqués ailleurs , que ce Patriarche rappella leur fanguinaire conduite dans fon lit de mort & qu'il leur en dénonça la puniGénése tion. Je les diviferai en Jacob, je les difperXLIX. 7. Ferai en Ifraël. C'est-à-dire que la postérité de Siméon & de Levi ne feroient pas partagées comme celles de leurs autres frères dans la diftribution de la Terre promife. Sentence, qui fut exécutée à la rigueur envers les defcendans de Siméon, dont le partage fut enclavé dans c lui de Juda. Mais l'Hiftoire fcandaleufe de Pidolatrie du Veau d'or 16 nous a montré la poftérité de Levi, effaçant par des exécutions, que le zèle pour la gloire de Dieu avoit infpirées, ce qu'il y avoit eu de noir dans celles que evangeance de ce Patriarche avoit produites. Dieu oublia les excès de la vangeance, en confidération des beaux effets du zèle. Il ne revo qua pas entiérement la fentence prononcée contre Levi, mais il changea la deftination. Il fit que ce qui étoit d'abord une flétriffure, devint une marque d'honneur. Les defcendans de ce Patriarche ne furent pas partagez comme les autres Tribus. Ils furent divijez en Jacob, & difperfez en Ifraël, felon l'Oracle de Jacob, mais Nombr. Dieu fut lui-même leur portion & leur héritage. XVIII. Il les choifit pour fes Miniftres, & il voulut

20.

qu'en

14 Dans notrel. vol. Difcours xxxIII. pag, 436.
15 lbidem Difc. XLI. pag. 509.

&c.

qu'en étant répandus parmi le refte de leurs Frères, ils puffent aifément leur enseigner fes Loix, & leur fignifier fes volontez. Il y avoit, trois familles de cette Tribu, lorsqu'on divifa Josué la Terre promife; celle de Kéhath, celle de xxI. 4. Guerfchon, & celle de Merari, La premiére eut treize villes, fituées dans le territoire de Juda, dans celui de Siméon, & dans celui de Benjamin. La feconde eut treize villes dans le territoire des Tribus, qui avoient eu leur partage au-delà du Jourdain ; quatre dans celui d'Iffachar; quatre dans celui d'Afer, & trois dans celui de Nephthali. La troifiéme eut douze villes dans le territoire de Zabulon, de Ruben & de Gad; la difperfion des Levites étant comme un monument deftiné à conferver la mémoire du zèle de leurs pères, & de la récompenfe, dont Dieu l'avoit couronné,

6. Il y eut trois fortes de perfonnes, qui furent diftinguées dans le partage, (& c'eft ce que nous devons examiner dans un fixiéme article) 1. Jofué; 2. Caleb; 3. Les Filles de Tielophcad.

Le partage de Jofué n'eft remarquable que par la modération de ce Général. Après avoir effuyé tant de travaux, après avoir couru tant de périls, après avoir fait tant d'exploits, il étoit en droit de demander quelque portion éclatante dans un païs, à la conquête duquel il avoit eu tant de part. Il fe contenta pourtant d'une petite ville dans fa Tribu, ce fut celle de Jofué Timnath-Serah, encore eft-il dit qu'il la bâtit XIX. 50. lui-même avant que d'y habiter.

16 Dans notre II. vol. Difcours LIII. pag. 190.

On

6.

Σιν. 24.

On peut trouver quelques difficultez dans ce qui eft rapporté touchant la portion de Caleb, Jof. xiv. qui eft appellé Kénéen ou Kénizéen, fans que nous en puiffions découvrir la raison. Il rappella à Jofué la promefle, qui lui avoit été faite, lorfqu'il reprima les efpions, qui avoient voulu infpirer leur lâcheté & leurs terreurs aux Ifraëlites. Cette promeffe portoit, que Caleb posfederoit une Montagne, fur laquelle étoit fituée la ville d'Hebron & fon territoire. L'Auteur du Livre de Jofué dit que cela lui fut accordé, On objecte 1. qu'il n'eft fait aucune mention Nombr. de cette promefle dans les Ecrits de Moyfe: qu'il y eft dit feulement en général, que Dieu avoit promis à Caleb de le faire entrer dans le païs de Canaan, & de l'y affermir avec fa poftérité. Mais cette objection s'évanouit, quand on confronte la promeffe faite à Caleb, avec ce que l'Hiftoire fainte rapporte, que ce faint homme avoit pénétré jufques à Hebron, lorsqu'il fût envoié pour reconnoître la Terre promife. XIII. 23. 2. Voici une difficulté, qui paroit d'abord plus confidérable. La ville d'Hebron eft mife Jofuéx. parmi celles que Jofué avoit prifes avant le par36. tage. Cependant il paroit qu'elle étoit encore entre les mains des Cananéens, quand elle fut accordée à Caleb, & que toute la prérogative qu'il demandoit, c'étoit de la poffeder, après qu'il l'auroit conquife. C'eft l'idée que réveilJof. xiv. lent ces paroles: Donne moi cette Montagne, dont l'Eternel parla en ce jour-là; car tu entendis alors que les Hanakins étoient là, & qu'il y avoit de grandes villes fortes peut-être que l'Eternel fera avec moi, & que je les dépoffederai, comme PEternel en a parlé. C'eft fur-tout ce qui paroit clairement établi dans le Livre des Juges, où

Voi.

Nombr.

12.

il

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