Verf. 6. le Clerc, qui a fait valoir cette penfée, & qui lui a donné toute la force, dont elle étoit fufceptible. Enfin le fentiment le plus généralement reçû, c'est que la caufe phyfique, qui produit la durée des jours ordinaires, fut altérée par une action extraordinaire de la Providence. Mais parmi ceux mêmes, qui font dans cette derniére penfée, il y a une célébre Controverfe. On demande, fi ces paroles de Jofué, Soleil arrête toi à Gabaon, doivent être prifes à la lettre, ou dans un fens d'accommodation par rapport aux idées du fiécle, dans lequel elles ont été prononcées. On demande fi l'on doit rectifier par ces paroles l'opinion la plus univerfellement reçûe parmi les Aftronomes, & felon laquelle c'eft la Terre qui tourne autour du Soleil, non le Soleil autour de la Terre ou fi cette opinion des Aftronomes doit être rectifiée par les paroles du Texte, qui difent expreffément que ce fut, non la Terre, mais le Soleil & la Lune qui s'arrêtérent. C'eft fur quoi il n'eft pas poffible de fe déterminer fans ouvrir le flanc ou aux coups des Théologiens, ou aux objections des Philofophes. D'un côté les Théologiens preffent ces paroles de l'Original, le Soleil s'arréta 51 à Gabaon. Ils alléguent le Pfeaume XIX. dans lequel le Pfalmifte femble établir le même fyftême que celui de Jofué à l'égard du cours du Soleil. Là cet Aftre eft comparé à un Epoux, qui fort de fon cabinet nuptial, & qui s'égaie comme un homme vaillant, & prêt à faire une course. Son départ ajoûte le Pfalmifte, eft de l'un des boats des Cieux juf 51 Voi. entre plufieurs autres la differt. de CALMET, 9 1 C d XL. 21. b Pf. CIV. jufqu'à l'autre bout, il les atteint l'un & l'autre. Qui foutiendra fans témérité, après des décifions fi expreffes, que le Soleil eft à-peu-près immobile? Bien plus, difent-ils encore, non feulement les Auteurs facrez représentent cet Aftre comme toûjours entrainé par un mouvement rapide, mais ils établiffent clairement que la Terre eft immobile. De là ces expreffions fi ordinaires dans leurs Ecrits, les a Fondemens, a Efaie les b Bafes, les Pilotis, les 4 Piliers de la Terre. Jerem. Ils exaltent cette fermeté de la Terre, comme xxx1.37. une des plus grandes merveilles du Créateur: Pleau. Eternel tu as fondé la Terre; tu l'as affermie, & LXXXII.5. elle demeure ferme. C'étoient fut-tout les idées du 5. Prophéte David Salomon fon fils femble a- c Job voir adopté le même fyftême, dans le Livre xxxvIII. des Proverbes. Il met cette différence entre le dr Sam Ciel & la Terre, c'est que le premier de ces 11. 8. Corps eft dans un mouvement perpetuel, au Pfeau. lieu que l'autre eft immobile. C'eft l'idée CXIX: 90: que Proverb. reveillent ces paroles de l'Ecclefiafte: Une Gé- 111. 19. nération paffe: l'autre Génération vient mais la Ecclef. Terre demeure toûjours ferme. Le Soleil Je leve; 1. 4. 5. le Soleil fe couche, & il foûpire après le lieu où il Je leve. Quel Dogme de nos Ecritures sera à l'abri de la contradiction, difent les Théologiens dont nous parlons, fi malgré dés décifions fi claires & fi expreffes, il eft permis de s'infcrire en faux contre le Syftême de ceux, qui penfent que c'eft le Soleil qui tourne autour de la Terre, & non la Terre autour du Soleil ? Mais les Philofophes fe prévalent de l'aveu, que les Théologiens font contraints de faire dans diverses occafions; c'eft que le St. Esprit n'a qui eft à la tête de fon vol, fur Jofué; pag. 17. &c. Tom. III. K pas 6. pas voulu que les Auteurs facrez s'exprimaffent avec exactitude fur ce qui concerne les chofes phyfiques: le but, qu'il fe proposoit en les infpirant, n'étoit pas de leur dicter un Cours de Phyfique, où nous puiffions puifer des fecours pour devenir bons Philofophes : il vouloit leur dicter un Cours de Morale & de Religion, où nous appriffions à rectifier les idées de notre efprit, & à régler les mouvemens de notre cœur dans ce qui concerne notre falut. Si l'on eut jamais befoin de cette hypothéfe, c'est particuliérement, difent les mêmes Philofophes, dans ce qui concerne le fyftême du Monde. C'eft la pensée qu'a preffée avec le plus de force un Homme célébre, qui s'eft éloigné des idées reçûes parmi les Chrétiens à l'égard de quelques fujets plus importans que ceux dont il eft ici queftion. Je parle de 3 Guillaume Whiston, & du Livre qu'il a intitulé nouvelle Théorie de la Terre. L'Auteur y foûtient cette propofition: c'est que " l'Hiftoire de la Création rapportée ,, par Moyfe, n'eft pas une Hiftoire exacte & philofophique de l'origine de l'Univers, mais feulement un recit hiftorique de la formation de notre Terre, & des différens changemens qu'elle fubit chaque jour en fe dégageant du Chaos, jufqu'à ce qu'elle fût propre à fervir d'habitation aux hommes. Il prétend que cette Histoire est un Journal des changemens qui arrivérent au Chaos, & des productions de chaque jour tel qu'un fpectateur l'auroit fait, s'il eût été fur la Terre. Ce qu'il y a de plus fingulier & qui paroitra peut-être plus bifarre, 99 وو 52 53 WILLHIAM WHISTON new Theor, of ?? fait dit bifarre, c'eft que fi on lui objecte qu'il n'y avoit point alors de spectateur, qui pût voir les images telles qu'il les conçoit, il répond que le Meffie étoit fpectateur, que c'eft lui qui a ce Journal, & qui l'a donné à Moyfe fur la Les Auteurs facrez, montagne de Sinaï. Mr. Whiston, n'ont pas confidéré les Corps céleftes comme de vaites parties de l'Univers placées dans un grand éloignement de la Terre, difpofées dans un ordre régulier, & décrivant des Orbites avec une certaine pro" portion. Ils ont crû que ces Corps étoient fituez à l'extrémité de notre Athmofphére, & qu'ils dépendoient de notre Globe auffi bien que les nuées. Le fentiment ordinaire touchant l'Hiftoire de la Création eft infoûtenable, ajoûte notre Auteur. Le Chaos ne pouvoit contenir la matiére du Soleil & des ས Etoiles, puisqu'il étoit ténébreux. Selon la ,,fuppofition des Commentateurs, de cent cor», pufcules répandus dans le Chaos, il y en avoit quatre-vingts dix-neuf qui étoient lumineux, & les mêmes, dont les Etoiles & le Soleil étoient compolez. Or comment peut,, on dire que les ténébres couvroient le Chaos, puisque le nombre des particules opaques & obfcures étoit fi peu confidérable, en comparaifon des particules ignées & lumineuses? Selon l'Hypothefe des Commentateurs, ce font encore les paroles de Whifton, quatre jours furent employez à la Création de la Terre, quoiqu'elle ne foit qu'une très petite partie du Monde entier, & le Soleil, la Lune, " " the earth. Voi, la Biblioth. Angloife tom. II. part. 2. pag. 440. &c. Efai. XL. 15. 17. Lune, les Etoiles fixes furent créez en un feul jour. Cependant la quantité de la matiére de la Terre n'est pas la deux centiéme partie de celle de Jupiter : ni la quatre-vingts dixiéme de celle de Saturne: ni la deux cens vingt milliéme de celle du Soleil: mais fi on la compare avec l'Univers entier, avec tout le Systéme des Etoiles, elle n'eft que comme une goutte d'eau qui pend à un seau, & ,, comme la menue pouliére d'une balance. Pour » prouver que Moyfe n'a prétendu parler que de la création de la Terre, Mr. Whifton dit, que toutes les parties du difcours de cet Historien font voir évidemment, que cette création n'eft faite que pour le genre humain. Mais il n'eft rien de plus abfurde que de s'imaginer que l'Univers ait été créé pour l'ufage de l'Homme. Peut-on croire que Dieu eût formé une infinité de célestes en faveur d'un petit nombre de Créatures ,, rebelles, qui ne vivent que peu de temps fur ,, une Planéte peu confidérable? Peut-on croi,, re qu'il ait créé une infinité de Soleils & de ,, Planétes, & qu'il les ait placez dans un fi grand éloignement de la Terre, uniquement » pour l'avantage des Hommes; fur-tout fi l'on " 99 99 corps confidére qu'un très grand nombre de ces ,, corps n'a été découvert que dans ces derniers ,, temps par le moyen du Telescope, & qu'après le Soleil, la Lune nous eft plus utile ,, que tous les autres pris ensemble? Etoit-il ,, raifonnable de faire un Soleil deux cens vingt mille fois plus grand que la Terre, & même davantage, & de le placer à plus de quatrevingts millions de milles, puisqu'un petit Globe lumineux dans le voifinage de la Terre 1 |