Soleil donc s'arrêta, la Lune s'arréta. Ces der: niéres paroles sont de l'Historien, & non du Livre de Jaschar, dont les autres étoient tirées. Quand donc nous avouerions, que style poëtique de ce Livre auroit souffert qu'on eût dit, Soleil arrête toi ; Lune arrête toi : le Soleil & la Lune s'arrétérent : pour dire: que pendant tout le cours de cette journée je triomphe de mes Ennemis. Mais l'Historien, qui ajoûte , le Soleil donc s’ar. réta, parle en Historien, & non en Poëte: ainsi la réflexion prise du style poëtique ne sauroit le regarder. D'ailleurs s'il n'est ici question que des victoires accordées à Josué, que signifieront ces paroles : Il n'y eut jamais auparavant de jour femblable à celui-là, e il n'y en eut point après: PEternel exauçant la voix d'un homme ? Dieu n'avoitil donc jamais accordé auparavant, n'a-t-il jamais accordé depuis , de victoire semblable à celle que ce Général remporta sur les cinq Rois? Nous rejettons donc fans hésiter cette opinion comme peu conforme au sens, que nous offrent naturellement les paroles de PHistorien, & comme contraire au respect que nous devons au St. Elprit, qui dirigeoit la plume. Nous croyons que quand Josué combattit contre les cinq Rois, il y eut un phénoméne inoui, & que le jour des victoires de ce Général fut plus long que ne font les jours ordinaires. Mais quelle fut la cause de ce phénoinéne? C'est sur quoi il y a divers sentimens. Quelques-uns ont crû, qu'une réfraction naturelle des rayons du Soleil, causée par la grêle 46 SPINOSA Tractat. Theolog. Polit. cap. 2. pag. 22. 47 Autor De Praadamitis lib. IV. cap. 5. pag. 215. grêle qui tomboit alors, ou une réverbération des rayons de cet Astre après lon coucher, avoit pû produire cet effet. 46 Spinosa a eu recours à cette premiére hypothéle: 47 l’Auteur du Traité des Préadamites a ayancé la seconde: elles se réunissent en ce point, c'est que la longueur du jour, dont il est ici question, fut produite par des causes purement physiques, lans que l'ordre des Loix naturelles fut altéré.. Mais quoi que l'un & l'autre de ces sentimens paroissent un peu plus conformes que les précédens aux paroles de l'Original, ils y font à- . peu-près aussi contraires. On ne peut contester que la lumiére extraordinaire du jour , dont nous parlons, ne soit rapportée dans l'Histoire sainte comme un miracle accordé aux prières de Josué: même comme un miracle, qui n'avoit jamais eu de semblable avant lui, & qui n'en devoit jamais avoir après. Pourroit-on se former cette idée d'une réverbération des rayons du Soleil, qu'on dit être affez ordinaire dans la Palestine ? Pourroit-on même le former cette idée d'une réfraction, telle qu'on la sup pose ici? On marque plus de respect pour le témoignage du St. Esprit, quand on suppose avec quelques Interprétes, que Dieu produisit, ou qu'il approcha du lieu, dans lequel combattoit Josué, quelque corps de lumiére, qui suppléant à celle du Soleil, lui donna le temps de remporter une victoire complete sur ses Ennemis. C'est l'idée qu'ont attachée aux paroles du Texte les deux 48 Kimchis, 49 Schem Tob,& so Mr. le 48 49 MASIUS in Jor. X. 12. pag. 1702. so La Csac fur JoL X, 12. pag. 24. le Clerc, qui a fait valoir cette pensée, & qui lui a donné toute la force, dont elle étoit suf ceptible. Enfin le sentiment le plus généralement reçû, c'est que la cause physique , qui produit la durée des jours ordinaires , fut altérée par une action extraordinaire de la Providence. Mais parmi ceux mêmes, qui sont dans cette derniére pensée, il y a une célébre Controverse. On demande, fi ces paroles de Josué, Soleil arrête toi à Gabaon, doivent être prises à la lettre, ou dans un sens d'accommodation par rapport aux idées du siécle, dans lequel elles ont été prononcées. On demande si l'on doit rectifier par ces paroles l'opinion la plus universellement reçûe parmi les Astronomes, & selon la. quelle c'est la Terre qui tourne autour du Soleil, non le Soleil autour de la Terre : ou si cette opinion des Astronomes doit être rectifiée par les paroles du Texte , qui disent expressément que ce fut, non la Terre, mais le Soleil & la Lune qui s'arrêtérent. C'est sur quoi il n'est pas possible de se déterminer fans ouvrir le flanc ou aux coups des Théologiens , ou aux objections des Philosophes. D'un côté les Theologiens present ces paVers, 6. roles de l'Original, le Soleil s'arréta s' à Gabaon. Ils alléguent le Pseaume XIX. dans lequel le Psalmiste semble établir le même systême que celui de Josué à l'égard du cours du Soleil. Là çet Astre est comparé à un Epoux, qui fort de Jon cabinet nuptial, e qui s'égaie comme un homme vaillant , & prêt à faire une course. Son départ ajoûte le Pfalmiste, est de l'un des bouts des Cieux jul 51 Voi. entre plusieurs autres la dissert. de CALMET, 9 XL. 21. 5. 6. jusqu'à l'autre bout, il les atteint Pun om l'autre. Qui soutiendra fans témérité, après des décifions fi expresses, que le Soleil est à-peu-près immobile? Bien plus, disent-ils encore, non seulement les Auteurs facrez représentent cet Astre comme toûjours entrainé par un mouvement rapide, mais ils établisfent clairement que la Terre est immobile. De là ces expressions si ordinaires dans leurs Ecrits, les a Fondemens, a Elaic les b Bales, les Pilotis , les d Piliers de la Terre. Jerem. Ils exaltent cette fermeté de la Terre, comme xxx1.37. une des plus grandes merveilles du Créateur : Pseau. Eternel tu as fondé la Terre; tu Pas affermie, & XXII.5. b PfCIV elle demeure ferme. C'étoient lut-tout les idées du Prophéte David Salomon fon fils temblé a-c Job voir adopté le même systeme , dans le Livre xxxvirr. des Proverbes. Il met cette différence entre le di Sam Ciel & la Terre, c'est que le premier de ces 11. 8. Corps est dans un mouvement perpetuel , au Pscau, lieu que l'autre eft immobile. C'est l'idée que Proverb. CXIX: 90. reveillent ces paroles de l'Ecclesiaste: Une Gé III. 19. nération passe : Pautre Génération vient : mais la Ecclef. Terre demeure totijours ferme. Le Soleil se léve ; T. 4. 5. le Soleil se couche, e il foûpire après le lieu où il Je léve. Quel Dogme de nos Ecritures fera à l'abri de la contradiction, disent les Théolo. giens dont nous parlons, fi malgré des décisions si claires & fi expresses, il est permis de s'inscrire en faux contre le Systême de ceux, qui pensent que c'est le Soleil qui tourne autour de la Terre, & non la Terre autour du Soleil ? Mais les Philosophes se prévalent de l'aveu, que les Théologiens sont contraints de faire dans diverses occasions ; c'est que le St.-Esprit n'a pas qui est à la tête de son vol, fur Jofué; pag. 17. &c. Tom. III. K " pas voulu que les Auteurs facrez s'exprimaffent avec exactitude sur ce qui concerne les choses physiques : le but, qu'il se proposoit en les inspirant, n'étoit pas de leur dicter un Cours de Physique, où nous puissions puiser des secours pour devenir bons Philosophes : il vouloit leur dicter un Cours de Morale & de Religion, où nous apprisfions à rectifier les idées de notre esprit, & à régler les mouvemens de notre cæur dans ce qui concerne notre salut. Si l'on eut jimais besoin de cette hypothése, c'est particuliérement, disent les mêmes Philosophes, dans ce qui concerne le système du Monde. C'est la pensée qu'a pressée avec le plus de force 5* un Homme célébre, qui s'est éloigné des idées reçûes parmi les Chrétiens à l'égard de quelques sujets plus importans que ceux dont il est' ici question. Je parle de s3 Guillaume Whiston, & du Livre qu'il a intitulé nouvelle Théorie de la Terre. L'Auteur y soûtient cette proposition : c'est que » l'Histoire de la Création rapportée „ par Moyse, n'est pas une Histoire exacte & philosophique de Porigine de l'Univers , mais seulement un recit historique de la formation de notre Terre, & des différens changemens qu'elle lubit chaque jour en se dégageant du » Chaos, jusqu'à ce qu'elle fût propre à servir d'habitation aux hommes. Il prétend que cette Histoire est un Journal des changemens », qui arrivérent au Chaos, & des productions de chaque jour tel qu'un' spectateur l'auroit fait, s'il eût été sur la Terre. Ce qu'il y a de plus singulier & qui paroitra peut-être plus bisarre, 9 9 52 53 WILL HIAM WHISTON new Theor, of |