Efaïe 8. du jour, dont il est question, mais à la con defcendance, que Dicu eut pour la prière d'un homme. Elles ne font peut-être pas équivalentes à celles-ci, il n'y eut jamais de jour auffi long que celui-là, mais elles peuvent être paraphrasées de cette maniére: On n'avoit jamais vû de jour, dans lequel la prière d'un homme obtint une grace semblable à celle qu'elle obtint alors. Cela semble clair dans l'Original, & dans les Verfions ordinaires: Il n'y avoit point eu de jour femblable, l'Eternel exauçant la voix d'un homme. C'est se donner des soins inutiles que de rechercher comment le jour, dont il est ici parlé, fut plus long que celui du rétablissement d'Ezéchias. Il est dit dans le second Livre des Rois, que ce Prince aiant reçû la promesse de vivre encore quinze années, elle lui fut confirmée par ce Rois figne, c'est que l'ombre du Cadran d'Achaz retroXX. IO. grada de dix degrez. 28 On a conclu par un XxxvIII. calcul, qui peut se voir dans les Auteurs citez à la marge, que le jour du rétablissement d'Ezéchias fut de trente-deux heures; & par un autre calcul, que l'on trouvera dans le même endroit, on a jugé que le jour de la défaite des Amorrhéens avoit duré quelques heures plus que l'autre: 29 Justin Martyr, dans fon Dialogue contre Tryphon, avance qu'il fut de 36. heures. Mais cette difcuffion étoit inutile. Il eft incertain fi le jour du rétablissement d'Ezéchias a été plus long que les autres. Dieu pût faire retrograder l'ombre du Çadran d'Achaz, fans changer le cours du Soleil. Il est vrai que le le Prophéte Esaie semble établir que ce fut le mouvement de cet Aftre, qui causa la retrogradation de l'ombre du Cadran: mais, outre qu'il est probable que le Prophéte a adopté le style vulgaire, on peut prendre là le Soleil pour ses rayons, comme cela se fait en plusieurs occafions, & nous ne trouvons aucun fondement à la pensée du 3o Primat d'Irlande, qui dit que le Soleil & que tous les Corps Célestes retrogradérent, & qu'il fut ajoûté autant de temps à ce jourlà, qu'il en avoit été rétranché de la nuit précedente, 3 Les Rabins ont avancé quelque chose de moins foûtenable encore: ils ont dit, que le jour de la mort d'Achaz vit l'ombre se hâter de dix heures entiéres, & qu'il fut plus court de tout ce temps-là, afin que les Juifs rétranchassent dix heures du deuil qu'ils feroient pour la mort d'un si méchant Roi, & que ces dix heures furent ajoûtées au jour du rétablissement d'Ezéchias. 3a Ils ont même avancé quelque chose de plus risible. Ils ont demandé, comment Berodach Baladan Roi de Babylone avoit pû connoitre le miracle, que Dieu avoit fait en faveur d'Ezéchias, & ils ont répondu, que le Babylonien avoit accoûtumé de faire un repas à neuf heures du matin, mais que ce jour-là il dormoit jusques à trois heures après midi : qu'il se reveilla alors, & que reconnoissant qu'il avoit été trop long-temps au lit, il s'emporta contre ses Domestiques : qu'il voulut même les tuer, parce qu'ils l'avoient laissé dormir si long-temps: que ces ferviteurs se disculpérent 28 Voi. dans MASIUS fur Jof. X. 14. pag. 1707. 29 JUST. MARTYR. Dial. cum Tryph. pag. 361. 30 USSHER. Annal. in ann. M. 3286. &c. pag. 58. en lui alléguant que le cours du Soleil avoit été changé: qu'il leur demanda qui étoit Auteur de ce miracle, & qu'ils lui répondirent que c'étoit le Dieu d'Ezechias. Cette derniére révérie n'a pas besoin de réfutation. Mais ce qui fait à notre sujet, c'est que rien ne nous nous oblige de croire, que le jour du rétablissement d'Ezéchias ait été plus long qu'un autre: & que quand il auroit été beaucoup plus long qu'on ne prétend, ce phénoméne n'auroit rien d'opposé aux paroles que nous expliquons: elles ne disent pas que le jour de la grande victoire de Josué ait été le plus long qui eût jamais éclairé les hommes, mais que c'est celui, où Dieu témoigna une condefcendance, qu'il n'avoit jamais eue pour aucun mortel. Notre troisiéme remarque confirme la précédente. Ces paroles, qui sont à la fin du ver fet treifiéme, le Soleil ne se bâta point de se coucher environ un jour entier, peuvent être entendues d'une autre maniére, sans qu'on fafle violence aux termes de l'Original. On peut traduire, le Soleil ne se hâta point de se coucher lorsque le jour fut fini. Le mot Hébreu, qui signifie quelquefois environ, signifie auffi lorsque, ou dans le temps que. C'est pour n'avoir pas fait cette ré flexion, dit le 33 favant Interpréte, à qui nous Ecclef. devons cet éclaircissement, que les Septante ont XLVI.6. traduit, le Soleil ne se bâta point de se coucher pen dant l'espace d'un jour entier : & le fils de Syrach, un seul jour fut long comme deux. Tout ce donc que l'on peut conclurre des termes Hébreux, 33 Mr. le CLERC sur Jof. X. 13. pag. 24. c'est 1 deft que le Soleil ne se coucha point à l'heure ordinaire, du moins qu'il parût ne pas se coucher. Une quatriéme remarque, c'est que ces paroles de Jofué, Soleil arrête toi à Gabaon, & celles qui suivent jusqu'à ces mots, un jour entier, paroiflent être cadencées & même rimées dans Original. Je dis qu'elles le paroissent, car il me semble qu'on ne peut pas le démontrer. 34 Mr. le Clerc, qui soupçonne qu'il y a de la rime, avoue pourtant qu'on ne fauroit la trouver sans faire quelque altération au Texte. 35 Masius, qui croit qu'elles font cadencées, ose à peine marquer quelle eft cette cadence: il tâche de scander ces vers prétendus, & il foupçonne qu'ils ont la mesure de ceux qu'on appelle Jambes, Tetrametres, Acatalectiques: mais il reconnoit en même temps que tout cela est incertain, & que l'art de icander les vers Hébreux s'est à peine conservé jusqu'à St. Jérome: or quoi que nous ne puissions pas prouver qu'il n'y a point de rime ni de cadence dans cet endroit, nous devons pourtant reconnoitre, que plusieurs pafflages de l'Ecriture seroient fufceptibles de ce tour harmonieux, fi on vouloit faire autant de violence au Texte, que l'on en fait ici. Notre cinquiéme remarque, c'est que ces paroles, Soleil arrête toi à Gabaon, & toi Lune arrête toi dans la Vallée & Ajalon, sont peut-être une citation de quelque ancien Livre. C'est ce qu'on peut inférer de ce qui est ajoûté: Ceci n'est-il point écrit au Livre de Fafchar: c'est-àdire, dire, le Livre du Juste? Il n'est pas aisé de marquer quel étoit ce Livre du Juste; beaucoup moins, dans quel temps, ni dans quelle forme il a été écrit. 35 MASIUS in Jof. X. 12. pag. 1701. 36 Quelques-uns ont crû, que c'étoit le Livre de la Génése, & qu'il est appellé le Livre du Fuste, parce qu'il contenoit la vie de trois des hommes les plus justes, qui eussent jamais été sur la terre, à savoir Abraham, Ilaac & Jacob. 37 Josephe, & 38 plusieurs Interprétes après lui, ont dit que c'étoient des Annales, dans lesquelles on conservoit l'Histoire de ce qui arrivoit de plus fingulier au peuple d'Israël, qui eft honoré du titre de Jafchar, ou de FefchuVerf. 15. run, c'est-à-dire, de Juste, dans le Chap. XXXII. du Deuteronome. D'autres pensent, que le Livre du Juste, étoit seulement un recueil de quelques vers, que l'on fefoit apprendre aux Ifraëlites, pour fixer dans leur mémoire le souvenir des miracles que Dieu avoit faits en leur faveur. Ceux qui font dans cette pensée se fondent fur ce qu'excepté le passage que nous expliquons, il n'y a qu'un seul endroit de nos Ecritures, où il est fait mention de ce Livre du Juste, & cet endroit 2 Sam. I. contient un Cantique funébre, que David avoit compofé sur la mort de Saül, & fur celle de Jonathan. 15. 'autres prétendent, que ce Livre étoit appellé le Livre du Jufte, parce qu'il contenoit les principales Loix, que Dieu avoit données à fon Peuple. C'étoit fans doute l'opinion de Jonathan, 36 J. JARCH. in Jof. X. 13. pag. 24. 37 Jos. Antiq. lib. V. cap. 17. pag. 185. |