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parc il auroit su qu'il y avoit près de là une Agathe de seize ans, qui pourroit bien inspirer à son fils ce qu'on appelle

amour.

CHAPITRE III.

MON père résolut de marier Agathe, et de l'éloigner de moi. Le lendemain, à déjeûner, il me remit plusieurs papiers qui devoient m'occuper toute la matinée; et dès qu'il m'eut établi à son secrétaire, il alla chez Louise. J'ai su depuis qu'il lui avoit proposé de donner à Agathe une ferme considérable, si elle vouloit épouser le fils d'un de ses fermiers. Louise accepta avec joie, promit la main de sa fille, et mon père revint au château.

Pendant le dîner, il me dit qu'il avoit passé la matinée à s'occuper de mes amis. Je le regardois avec inquié

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tude. —“Oui, vous aimez Louise, "c'est une brave femme; j'ai assuré son "sort, celui de sa fille, par un bon mariage; elles seront très heureuses..... "Vous devez être content..... J'ai fait 66 ce que vous auriez dû faire.—Je n'a"vois pas de dot à donner à Agathe, répondis-je

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en rougissant.

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Mon

ami, reprit mon père, j'aurai toujours soin du bonheur de ceux qui "vous seront chers; ainsi une autre fois, ne formez pas de liaisons sans m'en

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parler. Si j'avois connu votre amitié

pour Agathe, j'aurois déjà trouvé "mille manières de lui être utile."Jamais mon père ne m'avoit paru aussi bon, et cependant jamais je n'avois été

aussi malheureux..

Aussitôt après le dîner j'allai chez Louise je trouvai Agathe dans le petit jardin; elle pleuroit: je m'assis

près d'elle." Ah! si monsieur votre

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père vouloit me donner tout ce qu'il "m'a promis, sans me marier, me dit"elle, cela feroit le bien de ma mère, "et je suis si heureuse!"-Comme elle pleuroit en disant qu'elle étoit heureuse! "Et moi, Agathe, j'étois si content!" -Elle me fit promettre que je tâcherois d'obtenir que mon père renonçât à lui faire du bien; c'est ainsi qu'elle s'exprimoit: je m'y engageai, sans même penser que je donnois une parole inconsidérée, ni prévoir comment je pourrois faire changer le projet de mon père. "Vous reviendrez demain, me dit

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Agathe en me prenant la main? —

Oui, ma bonne amie, lui répondis-je "en l'embrassant.-On ne me mariera.

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pas, s'écria-t-elle !"-Je ne pus lui cacher que les volontés de mon père étoient invariables." Au moins, me

"dit-elle en soupirant, je vous verrai "demain ?-Oh! oui, oui!"-Et elle fut consolée, et elle me dit adieu sans inquiétude.

Nous nous séparâmes en espérant du bonheur pour le lendemain le lendemain; à notre

âge, c'étoit assez pour ne pas craindre l'avenir.

P

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