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meufe, la meilleure & la mieux difciplinée qu'on eût vû jusques là, & qui pouvoit le difputer aux Grecs de Marathon & de Salamine. On dit qu'il en forma le plan, ou du moins le perfectionna, fur l'idée qu'il en avoit prise dans Homére. Ce Poëte peint l'union Iliad. N. des Chefs Grecs fous l'image d'un ba- v. 130. taillon dont les foldats, par la jonc-. tion de leurs boucliers, forment un corps impénétrable aux traits de l'ennemi. Je croi plutôt que Philippe forma l'idée de la Phalange fur les leçons d'Epaminondas, & fur la Cohorte facrée des Thébains. Il traitoit avec diftinction ces fantaffins d'élite, les honoroit du nom de fes* Camarades, & par cette marque d'honneur & de con- fignifie fiance les engageoit à fupporter fans mot-àmurmure les plus rudes fatigues, & à affronter fans crainte les plus grands fantalin. dangers. Ces fortes de familiarités coutent peu au Souverain, & lui va lent beaucoup. J'inférerai à la fin de ce paragraphe une defcription plus étendue de la Phalange, & de l'ufage qu'on en faifoit dans les batailles. Je tirerai de Polybe cette defcription, dont la longueur couperoit trop ici l'histoire, mais qui, placée hors d'oeu

πεζίο ταιρος ο

mot, ca marade

Polian Aratag. Hib. 4. c.

17.

vre, pourra faire plaifir, fur tout par
les judicieuses réflexions d'un homme
auffi habile dans le métier de la
re qu'étoit cet Historien.

guer

Un des premiers foins de Philippe fut de négocier une paix captieuse avec les Athéniens, dont il redoutoit la puiffance, & qu'il ne vouloit point s'attirer fur les bras dans le commencement d'un règne encore mal affermi. Il envoie donc des Ambaffadeurs à Athénes, n'épargne ni les promeffes ni les proteftations d'amitié, & vient à bout de conclure un Traité, dont il fut faire tout l'ufage qu'il s'étoit propofé.

བ་

Auffi-tôt après, on le voit agir bien moins en Roi de vingt-quatre ans, qu'en politique confommé dans l'art de la diffimulation; & qui, fans le fecours de l'expérience, comprenoit déja que favoir perdre à propos, c'eft gaIl s'étoit emparé d'Amphipolis gner. Ville fituée fur les confins de fon Roiaume, & par conféquent fort à fa bienféance. Il ne pouvoit la garder, nonfeulement fans trop affoiblir fon armée, mais encore fans irriter les Athé niens qu'il avoit intérêt de ménager, & qui la revendiquoient comme leur colonie. D'un autre côté, il ne vouloit

pas

pas

céder à fes ennemis une clé de fes Etats. Il prend donc le parti de la déclarer libre, en lui permettant de fe gouverner en République, & de la mettre ainfi aux mains avec fes anciens maîtres. En même tems il defarme les Péoniens à force de préfens & de promeffes, fé réservant à les attaquer enfuite après qu'il auroit défuni fes ennemis, & qu'il les auroit affoi. blis par cette défunion.

Cette foupleffe, cette dextérité l'affermirent fur le trône, & bientôt il fe trouva fans concurrens. Il ferme l'entrée du Roiaume à Paufanias: puis marche contre Argée, l'atteint fur le chemin d'Ege à Méthone, le défait lui tue bien du monde, & fait beaucoup de prifonniers ; attaque les Péoniens, & les réduit fous fon obéïffance; tourne enfuite fes armes contre le Illyriens, les taille en piéces, & les oblige de lui reftituer toutes les places qu'ils occuppoient en Macédoine.

AN. M

3646.

A peu près dans ce même tems-là, les Athéniens montrérent beaucoup de Av. J..C.. générofité à l'égard des habitans de 358.. P'Eubée. Cette Ile, que l'Euripe féparoit de la Béotie, fut ainfi appellée à caufe de les grands & beaux paturages.

Elle

terc. lib.

I. cap. 4.

lib. 8. P.

613.

Demoft. Ctefiph.

pag. 489.

Efchin.

Elle fe nomme aujourd'hui Négrepont. Les Athéniens l'avoient eue fous leur Vell. Pa- domination, & ils avoient établi des colonies dans fes deux principales vilThucyd. les, Erétie & Chalcide. Thucydide dit, que dans la guerre du Péloponnéfe la revolte de l'Eubée confterna les Athéniens, parce qu'ils en retiroient plus que de l'Attique. Depuis ce temslà l'Eubée fut en proie aux factions. Dans celui dont nous parlons l'une de ces factions réclama le fecours de Thébes, & l'autre celui d'Athénes. Les Contr. Cte- Thébains d'abord ne rencontrérent point d'obftacle, & firent fans peine triompher leur faction. A l'arrivée des Athéniens tout changea de face. Quoique fort mécontens de l'Eubée qui leur avoit fait plusieurs outrages, touchés de l'extrême danger où elle fe trouvoit, & oubliant leur reffentiment particulier, ils la fecoururent fi promtement par terre & par mer, que dans l'efpace de peu de jours ils obligérent les Thébains de fe retirer. Alors, maîtres abfolus de l'Isle, ils rendirent aux habitans leurs villes & leur liberté. a perfuadés, dit Eschine en faisant ce

Sph.

b. pag.

641.

récit,

a Ουκ ἤγε μενοιδικαιον εἶναι τὴν ὀργὴν απο μνημονέυεινον, τῷ πιςευθῆναι.

récit, qu'en bonne juftice il ne faut point fe fouvenir des anciennes injures, quand l'offenfeur fe fie à l'offenfe. Les Atheniens, après avoir rétabli le calme dans l'Eubée, fe retirérent fans vouloir d'autre fruit de leurs travaux,que la gloire d'avoir réuffi à pacifier cette Ile.

3646.

Ils ne fe conduifirent pas toujours de la même forte à l'égard des autres peuples, & c'eft ce qui donna lieu à la guerre des Alliés, dont j'ai parlé ailleurs. Jufqu'ici Philippe, dans les premié. AN. M. res années de fon régne, s'étoit occupé à écarter fes concurrens pour le trône, à pacifier les divifions domestiques, à repouffer les attaques des ennemis du dehors, & à les mettre hors d'état, par fes fréquentes victoires, de le venir troubler dans la poffeffion de fon Roiaume.

Il va maintenant paroitre fous un autre caractére. Sparte & Athénes, après s'être long-tems difputé l'empire de la Grèce, s'étoient affoiblies par leurs mutuelles divifions. Cet affoibliffement avoit donné occafion à Thébes de s'élever à la premiére autorité & Thébes, s'étant affoiblie elle-même par fes guerres contre Spar

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