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prétends vous faire voir, par la manière dont | gain et de perte, quand vous n'auriez que deux

vous raisonnez tous les jours sur les choses de la moindre conséquence, de quelle sorte vous devez raisonner en celle-ci, et quel parti vous devez prendre dans la décision de cette importante question de l'existence de Dieu. Vous dites donc que nous sommes incapables de connoître s'il y a un Dieu. Cependant il est certain que Dieu est, ou qu'il n'est pas; il n'y a point de milieu. Mais de quel côté pencheronsnous? La raison, dites-vous, ne peut rien y déterminer. Il y a un chaos infini qui nous sépare. Il se joue un jeu à cette distance infinie, où il arrivera croix ou pile. Que gagnerez-vous? Par raison, vous ne pouvez assurer ni l'un ni l'autre; par raison, vous ne pouvez nier aucun des deux.

Ne blâmez donc pas de fausseté ceux qui ont fait un choix; car vous ne savez pas s'ils ont tort, et s'ils ont mal choisi.

I. Je les blâmerai d'avoir fait, non ce choix, mais un choix; et celui qui prend croix, et celui qui prend pile, ont tous deux tort: le juste est de ne point parier.

P. Oui, mais il faut parier: cela n'est pas volontaire; vous êtes embarqué, et ne point parier que Dieu est, c'est parier qu'il n'est pas. Lequel choisirez-vous done? Voyons ce qui vous intéresse le moins: vous avez deux choses à perdre, le vrai et le bien; et deux choses à engager, votre raison et votre volonté, votre connoissance et votre béatitude: et votre nature a deux choses à fuir, l'erreur et la misère, Pariez donc qu'il est, sans hésiter; votre raison n'est pas plus blessée en choisissant l'un que l'autre, puisqu'il faut nécessairement choisir. Voilà un point vidé; mais votre béatitude? Pesons le gain et la perte en prenant le parti de croire, si vous gagnez, vous gagnez tout; si vous perdez, vous ne perdez rien. Croyez donc, si vous le pouvez.

vies à gagner pour une, vous pourriez encore gager. Et s'il y en avoit dix à gagner, vous seriez imprudent de ne pas hasarder votre vie pour en gagner dix à un jeu où il y a pareil hasard de perte et de gain. Mais il y a ici une infinité de vies infiniment heureuses à gagner, avec pareil hasard de perte et de gain; et ce que vous jouez est si peu de chose et de si peu de durée, qu'il y a de la folie à le ménager en cette occasion.

Car il ne sert de rien de dire qu'il est incertain si on gagnera, et qu'il est certain qu'ou hasarde; et que l'infinie distance qui est entre la certitude de ce qu'on expose et l'incertitude de ce que l'on gagnera égale le bien fini, qu'on expose certainement, à l'infini qui est incertain. Cela n'est pas ainsi : tout joueur hasarde avec certitude pour gagner avec incertitude, et néanmoins il hasarde certainement le fini pour gagner incertainement le fini, sans pécher contre la raison. Il n'y a pas infinité de distance entre cette certitude de ce qu'on expose et l'incertitude du gain; cela est faux. Il y a à la vérité infinité entre la certitude de gagner et la certitude de perdre. Mais l'incertitude de gagner est proportionnée à la certitude de ce qu'on hasarde, selon la proportion des hasards de gain et de perte; et de là vient que, s'il y a autant de hasards d'un côté que de l'autre, la partie est à jouer égal contre égal; et alors la certitude de ce qu'on expose est égale à l'incertitude du gain, tant s'en faut qu'elle en soit infiniment distante. Et ainsi notre proposition est dans une force infinie, quand il n'y a que le fini à hasarder à un jeu où il y a pareils hasards de gain que de perte, et l'infini à gagner. Cela est démonstratif; et si les hommes sont capables de quelques vérités, ils doivent l'être de celle-là.

I. Je le confesse, je l'avoue. Mais encore n'y

I. Cela est admirable: oui, il faut croire; auroit-il point de moyen de voir le dessous du mais je hasarde peut-être trop.

P. Voyons: puisqu'il y a pareil hasard de

Cette phrase, qui est bien certainement dans le manuscrit de Pascal, manque dans quelques éditions modernes : on voit qu'elle sert à ramener l'interlocuteur au point de la question principale, et qu'il ne rappelle ici la proposition de son adversaire que pour y appliquer de suite la manière même de raisonner de l'Incrédule.

jeu?

P. Oui, par le moyen de l'Écriture, et par toutes les autres preuves de la religion qui sont infinies.

I. Ceux qui espèrent leur salut, direz-vous, sont heureux en cela; mais ils ont pour contrepoids la crainte de l'enfer.

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P. Mais qui a le plus sujet de craindre l'en- | vous auriez bientôt la foi, si vous aviez quitté fer, ou celui qui est dans l'ignorance s'il y a un ces plaisirs. Or, c'est à vous à commencer. Si enfer, et dans l'incertitude de damnation, s'il je pouvois, je vous donnerois la foi : je ne le y en a; ou celui qui est dans une persuasion puis, ni par conséquent éprouver la vérité de certaine qu'il y a un enfer, et dans l'espérance ce que vous dites; mais vous pouvez bien quitd'être sauvé, s'il est? ter ces plaisirs, et éprouver si ce que je dis est vrai.

Quiconque, n'ayant plus que huit jours à vivre, ne jugeroit pas que le parti le plus sûr est de croire que tout cela n'est pas un coup de hasard, auroit entièrement perdu l'esprit. Or, si les passions ne nous tenoient point, huit jours

et cent ans sont une même chose.

Quel mal vous arrivera-t-il en prenant ce parti? Vous serez fidèle, honnête, humble, reconnoissant, bienfaisant, sincère, véritable. A la vérité, vous ne serez point dans les plaisirs empestés, dans la gloire, dans les délices. Mais n'en aurez-vous point d'autres? Je vous dis que vous gagnerez en cette vie; et qu'à chaque pas que vous ferez dans ce chemin, vous verrez tant de certitude de gain, et tant de néant dans ce que vous hasardez, que connoîtrez à la fin que vous avez parié pour une chose certaine et infinie, et que vous n'avez rien donné pour l'obtenir.

Vous

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Il ne faut pas se méconnoître : nous sommes strument par lequel la persuasion se fait n'est corps autant qu'esprit ; et de là vient que l'inpas la seule démonstration. Combien y a-t-il peu de choses démontrées! Les preuves ne convainquent que l'esprit. La coutume fait nos preuves les plus fortes; elle incline les sens, 1. Oui, mais j'ai les mains liées et la bouche qui entraînent l'esprit sans qu'il y pense. Qui a 1. Oui, mais j'ai les mains liées et la bouche démontré qu'il sera demain jour, et que nous muette; on me force à parier, et je ne suis pas mourrons? et qu'y a-t-il de plus universelleen liberté, on ne me relâche pas ; et je suis fait ment cru? C'est donc la coutume qui nous en de telle sorte que je ne puis croire. Que voulez- persuade; c'est elle qui fait tant de turcs et de vous donc que je fasse? païens; c'est elle qui fait les métiers, les soldats, etc. Il est vrai qu'il ne faut pas commencer par elle pour trouver la vérité; mais il faut vu où est la vérité, afin de nous abreuver et de avoir recours à elle, quand une fois l'esprit a à toute heure: car d'en avoir toujours les preunous teindre de cette croyance qui nous échappe quérir une croyance plus facile, qui est celle ves présentes, c'est trop d'affaire. Il faut acde l'habitude, qui, sans violence, sans art, incline toutes nos puissances à cette croyance, sans argument, nous fait croire les choses, et Ce n'est pas assez de ne croire que par la force en sorte que notre ame y tombe naturellement. de la conviction, si les sens nous portent à croire le contraire. Il faut donc faire marcher nos deux pièces ensemble: l'esprit, par les raisons qu'il suffit d'avoir vues une fois en sa vie ;

P. Apprenez au moins votre impuissance à croire, puisque la raison vous y porte, et que néanmoins vous ne le pouvez. Travaillez donc à vous convaincre, non pas par l'augmentation des preuves de Dieu, mais par la diminution de vos passions. Vous voulez aller à la foi, et vous n'en savez pas le chemin; vous voulez vous guérir de l'infidélité, et vous en demandez les remèdes : apprenez-les de ceux qui ont été tels que vous, et qui n'ont présentement aucun doute. Ils savent ce chemin que vous voudriez suivre; et ils sont guéris d'un mal dont vous voulez guérir. Suivez la manière par où ils ont commencé ; imitez leurs actions extérieures, si vous ne pouvez encore entrer dans leurs dispositions intérieures; quittez ces vains amusements qui vous occupent tout entier.

J'aurois bientôt quitté ces plaisirs, ditesvous, si j'avois la foi. Et moi, je vous dis que

. I ci finit le dialogue..

et les sens, par la coutume, et en ne leur per- | tienne ne propose de se haïr. Nulle autre relimettant pas de s'incliner au contraire.

ARTICLE IV.

Marques de la véritable religion.
I.

La vraie religion doit avoir pour marque d'obliger à aimer Dieu. Cela est bien juste. Et cependant aucune autre que la nôtre ne l'a ordonné. Elle doit encore avoir connu la concu

piscence de l'homme, et l'impuissance où il est par lui-même d'acquérir la vertu. Elle doit y avoir apporté les remèdes, dont la prière est le principal. Notre religion a fait tout cela; et nulle autre n'a jamais demandé à Dieu de l'aimer et de le suivre.

II.

gion ne peut donc être reçue de ceux qui savent qu'ils ne sont dignes que de haine. Nulle autre religion que la chrétienne n'a connu que l'homme est la plus excellente créature, et en même temps la plus misérable. Les uns, qui ont bien connu la réalité de son excellence, ont pris pour lâcheté et pour ingratitude les sentiments bas que les hommes ont naturellement d'eux-mêmes; et les autres, qui ont bien connu combien cette bassesse est effective, ont traité d'une superbe ridicule ces sentiments de grandeur, qui sont aussi naturels à l'homme. Nulle religion que la nôtre n'a enseigné que l'homme naît en péché ; nulle secte de philosophes ne l'a

dit: nulle n'a donc dit vrai.

V.

Dieu étant caché, toute religion qui ne dit pas que Dieu est caché n'est pas véritable; et toute religion qui n'en rend pas la raison n'est pas instruisante. La nôtre fait tout cela. Cette

Il faut, pour faire qu'une religion soit vraie, qu'elle ait connu notre nature; car la vraie na-religion, qui consiste à croire que l'homme est ture de l'homme, son vrai bien, la vraie vertu tombé d'un état de gloire et de communication et la vraie religion, sont choses dont la connois- avec Dieu en un état de tristesse, de pénitence sance est inséparable. Elle doit avoir connu la et d'éloignement de Dieu, mais qu'enfin il segrandeur et la bassesse de l'homme, et la rai-roit rétabli par un Messie qui devcit venir, a

son de l'une et de l'autre. Quelle autre religion que la chrétienne a connu toutes ces choses?

III.

toujours été sur la terre. Toutes choses ont passé, et celle-là a subsisté pour laquelle sont toutes choses. Car Dieu voulant se former un peuple saint, qu'il sépareroit de toutes les auLes autres religions, comme les païennes, tres nations, qu'il délivreroit de ses ennemis, sont plus populaires, car elles consistent toutes qu'il mettroit dans un lieu de repos, a promis en extérieur : mais elles ne sont pas pour les de le faire, et de venir au monde pour cela ; et gens habiles. Une religion purement intellec-il a prédit par ses prophètes le temps et la matuelle seroit plus proportionnée aux habiles; mais elle ne serviroit pas au peuple. La seule religion chrétienne est proportionnée à tous, étant mêlée d'extérieur et d'intérieur. Elle élève le peuple à l'intérieur, et abaisse les superbes à l'extérieur, et n'est pas parfaite sans les deux: car il faut que le peuple entende l'esprit de la lettre, et que les habiles soumettent leur esprit à la lettre, en pratiquant ce qu'il y a d'exté

rieur.

IV.

Nous sommes haïssables: la raison nous en convainc. Or, nulle autre religion que la chré

nière de sa venue. Et cependant, pour affermir l'espérance de ses élus dans tous les temps, il leur en a toujours fait voir des images et des figures; et il ne les a jamais laissés sans des assurances de sa puissance et de sa volonté pour leur salut. Car, dans la création de l'homme, Adam étoit le témoin et le dépositaire de la promesse du Sauveur, qui devoit naître de la femme. Et quoique les hommes, étant encore si proches de la création, ne pussent avoir oublié leur création et leur chute, et la promesse que Dieu leur avoit faite d'un Rédempteur, néan

. Orgueil.

moins, comme dans ce premier âge du monde ils se laissèrent emporter à toutes sortes de désordres, il y avoit cependant des saints, comme Énoch, Lamech, et d'autres, qui attendoient en patience le Christ promis dès le commencement du monde. Ensuite Dieu a envoyé Noé, qui a vu la malice des hommes au plus haut degré; et il l'a sauvé en noyant toute la terre, par un miracle qui marquoit assez et le pouvoir qu'il avoit de sauver le monde, et la volonté qu'il avoit de le faire, et de faire naître de la femme celui qu'il avoit promis. Ce miracle suffisoit pour affermir l'espérance des hommes; et la mémoire en étant encore assez fraîche parmi eux, Dieu fit des promesses à Abraham, qui étoit tout environné d'idolâtres, et il lui fit connoître le mystère du Messie qu'il devoit envoyer. Au temps d'Isaac et de Jacob, l'abomination s'étoit répandue sur toute la terre: mais ces saints vivoient en la foi; et Jacob,

mourant et bénissant ses enfants, s'écrie, par un transport qui lui fait interrompre son discours : J'attends, ô mon Dieu! le Sauveur que vous avez promis: Salutare tuum expectabo, Domine. (Genes., 49, 18.)

Les Égyptiens étoient infectés, et d'idolâtrie, et de magie; le peuple de Dieu même étoit entraîné par leurs exemples. Mais cependant. Moise et d'autres voyoient celui qu'ils ne voyoient pas, et l'adoroient en regardant les biens éternels qu'il leur préparoit.

Les Grecs et les Latins ensuite ont fait régner les fausses divinités ; les poëtes ont fait diverses théologies; les philosophes se sont séparés en mille sectes différentes : et cependant il y avoit toujours au coeur de la Judée des hommes choisis qui prédisoient la venue de ce Messie, qui n'étoit connu que d'eux.

Il est venu enfin en la consommation des temps: et depuis, quoiqu'on ait vu naître tant de schismes et d'hérésies, tant renverser d'états, tant de changements en toutes choses, cette Église, qui adore celui qui a toujours été adoré, a subsisté sans interruption. Et ce qui est admirable, incomparable et tout-à-fait divin, c'est que cette religion, qui a toujours du ré, a toujours été combattue. Mille fois elle a

Peut-être devroit-on lire ici croyoient.

été à la veille d'une destruction universelle ; et toutes les fois qu'elle a été en cet état, Dieu l'a relevée par des coups extraordinaires de sa puissance. C'est ce qui est étonnant, et qu'elle s'est maintenue sans fléchir et plier sous la volonté des tyrans.

VI.

Les états périroient, si on ne faisoit plier souvent les lois à la nécessité. Mais jamais la religion n'a souffert cela, et n'en a usé. Aussi il faut ces accommodements, ou des miracles. II n'est pas étrange qu'on se conserve en pliant, et ce n'est pas proprement se maintenir; et eucore périssent-ils enfin entièrement : il n'y en a point qui ait duré quinze cents ans. Mais que cette religion se soit toujours maintenue et inflexible', cela est divin.

:

VII.

voit pas des marques visibles. C'en est une adIl y auroit trop d'obscurité, si la vérité n'amirable qu'elle se soit toujours conservée dans une Église et une assemblée visible. Il y auroit trop de clarté s'il n'y avoit qu'un sentiment est le vrai, il n'y a qu'à voir quel est celui qui dans cette Église ; mais, pour reconnoître quel y a toujours été car il est certain que le vrai y a toujours été, et qu'aucun faux n'y a touLa tradition d'Adam étoit encore nouvelle en jours été. Ainsi le Messie a toujours été cru. Noé et en Moïse. Les prophètes l'ont prédit dont les évènements, qui arrivoient de temps depuis, en prédisant toujours d'autres choses vérité de leur mission, et par conséquent celle en temps à la vue des hommes, marquoient la de leurs promesses touchant le Messie. Ils ont tous dit que la loi qu'ils avoient n'étoit qu'en attendant celle du Messie; que jusque-là elle éternellement; qu'ainsi leur loi, ou celle du seroit perpétuelle, mais que l'autre dureroit Messie, dont elle étoit la promesse, seroient toujours sur la terre. En effet, elle a toujours

duré et Jésus-Christ est venu dans toutes les

circonstances prédites. Il a fait des miracles, et les apôtres aussi, qui ont converti les païens ; Messie est prouvé pour jamais. et par-là les prophéties étant accomplies, le

C'est-à-dire, et soit toujours demeurée inflexible.

VIII.

IX.

natures, divine et humaine, a retiré les hom-
cilier à Dieu en sa personne divine.
mes de la corruption du péché pour les récon-

Je vois plusieurs religions contraires, et par conséquent toutes fausses, excepté une. Chacune veut être crue par sa propre autorité, et rités, et qu'il y a un Dieu dont ils sont capables, Elle enseigne donc aux hommes ces deux vémenace les incrédules. Je ne les crois donc pas et qu'il y a une corruption dans la nature qui là-dessus; chacun peut dire cela, chacun peut les en rend indignes. Il importe également aux se dire prophète. Mais je vois la religion chré-les en rend indignes. Il importe également aux tienne où je trouve des prophéties accomplies, hommes de connoître l'un et l'autre de ces et une infinité de miracles si bien attestés, qu'on points; et il est également dangereux à l'homme de connoître Dieu sans connoître sa misère, et ne peut raisonnablement en douter; et c'est ce de connoître sa misère sans connoître le Réque je ne trouve point dans les autres. dempteur qui peut l'en guérir. Une seule de ces connoissances fait, ou l'orgueil des philosophes qui ont connu Dieu, et non leur misère, ou le désespoir des athées, qui connoissent leur misère sans Rédempteur. Et ainsi, comme il est également de la nécessité de l'homme de connoître ces deux points, il est aussi également de la miséricorde de Dieu de nous les avoir fait connoître. La religion chrétienne le fait; c'est en cela qu'elle consiste. Qu'on examine l'ordre du monde sur cela, et qu'on voie si toutes choses ne tendent pas à l'établissement des deux chefs de cette religion.

La seule religion contraire à la nature en l'éLa seule religion contraire à la nature en l'état qu'elle est, qui combat tous nos plaisirs, et qui paroît d'abord contraire au sens commun, est la seule qui ait toujours été.

X.

Toute la conduite des choses doit avoir pour objet l'établissement et la grandeur de la religion; les hommes doivent avoir en eux-mêmes des sentiments conformes à ce qu'elle nous enseigne; et enfin elle doit être tellement l'objet et le centre où toutes choses tendent, que qui en saura les principes puisse rendre raison, et de toute la nature de l'homme en particulier, et de toute la conduite du monde en général.

Sur ce fondement, les impies prennent lieu de blasphémer la religion chrétienne, parcequ'ils la connoissent mal. Ils s'imaginent qu'elle consiste simplement en l'adoration d'un Dieu considéré comme grand, puissant et éternel: ce qui est proprement le déisme, presque aussi éloigné de la religion chrétienne que l'athéisme, qui y est tout-à-fait contraire. Et de là ils concluent que cette religion n'est pas véritable, parceque, si elle l'étoit, il faudroit que Dieu se manifestât aux hommes par des preuves si sensibles, qu'il fût impossible que personne le méconnût.

Mais qu'ils en concluent ce qu'ils voudront contre le déisme, ils n'en concluront rien contre la religion chrétienne, qui reconnoît que, depuis le péché, Dieu ne se montre point aux hommes avec toute l'évidence qu'il pourroit faire; et qui consiste proprement au mystère du Rédempteur, qui, unissant en lui les deux

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