DES EDITEURS. GETTE petite pièce fut faite pour M. Grétry, qui, avant de venir à Paris, avait paffé fix mois à Genève, d'où il se rendait fréquemment à Ferney. M. de Voltaire et madame Denis, fur quelques essais qu'il leur fit entendre, conçurent une fi grande espérance de ses talens, qu'ils le pressèrent vivement d'aller les exercer dans la capitale; et pour l'y déterminer d'autant mieux, M. de Voltaire s'offrit de travailler dans un genre nouveau, dont il n'ofait cependant espérer, disait-il, d'atteindre la fublimité. Il donna en effet le Baron d'Otrante à M. Grétry, qui vint le présenter aux comédiens italiens, comme l'ouvrage d'un jeune homme de province. Les comédiens refusèrent la pièce, en avouant cependant que l'auteur n'était pas sans talens, et qu'il promettait beaucoup. Ils engagèrent même M. Grétry à mander au jeune homme que s'il voulait se rendre à Paris, on pourrait lui indiquer des changemens nécessaires pour faire admettre et représenter sa pièce, et que moyennant un peu d'étude de leur théâtre et de la docilité, il pourrait lui être utile par ses travaux et se rendre digne d'y être attaché. Le jeune auteur reconnut fon insuffisance, et ne jugea pas à propos de se déplacer. Il aima mieux renoncer à une gloire qu'il désespérait d'obtenir. Cet événement empêcha M. Grétry de mettre la pièce en musique, et M. de Voltaire de faire d'autres opéra-comiques que le Baron d'Otrante, et les Deux Tonneaux qu'il avait commencés. Il est affez remarquable que M. de Voltaire donna le premier un opéra à M. Grétry, comme il avait donné le premier, vers 1730, une tragédie lyrique (*) à Rameau, avant que ces deux grands muficiens se fussent encore exercés dans les genres où ils ont excellé. Le (*) Samfon. |