Albe à son tour commence à craindre un sort contraire: Elle crie au second qu'il secoure son frère ; Il se hâte,et s'épuise en efforts superflus; Il trouve en les joignant que son frère n'est plus. Hélas! CAMILLE. VALÈRE. Tout hors d'haleine il prend pourtant sa place, Et redouble bientôt la victoire d'Horace : Son courage sans force est un débile appui; Voulant venger son frère, il tombe auprès de lui. L'air résonne des cris qu'au ciel chacun envoie; Albe en jette d'angoisse, et les Romains de joie. Comme notre héros se voit près d'achever, C'est peu pour lui de vaincre, il veut encor braver : « J'en viens d'immoler deux aux mânes de mes frères; Rome aura le dernier de mes trois adversaires, C'est à ses intérêts que je vais l'immoler, » Dit-il; et tout d'un temps on le voit y voler. La victoire entre eux deux n'était pas incertaine ; L'Albain, percé de coups, ne se traînait qu'à peine, Et, comme une victime aux marches de l'autel, Il semblait présenter sa gorge au coup mortel : Aussi le reçoit-il, peu s'en faut, sans défense; Et son trépas de Rome établit la puissance. LE VIEIL HORACE. O mon fils! o ma joie! ô l'honneur de mes jours! Quand pourrai-je étouffer dans tes embrassements P. CORNEILLE. (Horace. Actes III, sc. vi; IV, sc. II.) Je suis tout hors de moi; maudit soit le valet! Il sait que je l'attends... Mais enfin je le vois. Quant à présent, monsieur, je ne vous puis rien dire. LE CHEVALIER. Veux-tu donc tous les jours Me mettre au désespoir et me jouer ces tours ? Retirer ma valise, il te faut tant de temps! VALENTIN. Ah! monsieur, ces commis sont de terribles gens. Ils ne répondent point que par monosyllabes: [arabes: Oui; non; paix; quoi, monsieur?... Je n'ai pas le loisir. -Mais, monsieur... - Revenez. - Faites-moi le plaisir... Vous me rompez la tête, allez. Enfin les traîtres, Quand on a besoin d'eux sont plus fiers que leurs maîtres. LE CHEVALIER. Quoi! tu serais resté jusqu'à l'heure qu'il est Toujours à la douane! VALENTIN. Oh! non pas, s'il vous plaît. Voyant que le commis qui gardait ma valise LE CHEVALIER. Faudra-t-il que le vin te commande sans cesse? VALENTIN. Vous savez que chacun, monsieur, a sa faiblesse; LE CHEVALIER. Mais pourquoi hantes-tu mauvaise compagnie? VALENTIN. Je fais de vains efforts, monsieur, pour l'éviter; LE CHEVALIER. Que dis-tu donc, maraud? VALENTIN. Monsieur, un long usage De parler librement me donne l'avantage. En pareil cas que moi vous vous êtes trouvé; 1. C'est le latin caput : tête. Nous devons nous prêter aux faiblesses des autres, LE CHEVALIER. Je te pardonnerais d'aimer un peu le vin, Si je te connaissais à ce seul vice enclin: VALENTIN. Ah! si je joue un peu, c'est pour passer le temps. LE CHEVALIER. Oui; je vois en un mot Que tu fais le docteur, et que tu n'es qu'un sot. Pour t'empêcher de dire encor quelque sottise, Finissons, et chez moi va porter ma valise. REGNARD. (Les Ménechmes.) Un Poltron. EURYALE, prince d'Ithaque; ARBATE, gouverneur du prince; MORON, plaisant de la princesse d'Élide. I MORON, sans être vu. Au secours! sauvez-moi de la bête cruelle ! 1. Brelan. Au propre jeu qui se joue avec trois cartes; par extension, maison de jeu, tripe t. EURYALE, à Arbate. Je pense ouïr sa voix. MORON, sans être vu. A moi! de grâce, à moi! EURYALE. C'est lui-même. Où court-il avec un tel effroi? Où pourrai-je éviter ce sanglier1 redoutable? Grands dieux! préservez-moi de sa dent effroyable! Je vous promets, pourvu qu'il ne m'attrape pas, Quatre livres d'encens,et deux veaux des plus gras. (Rencontrant Euryale que, dans sa frayeur, il prend pour le sanglier qu'il évite.) Ha! je suis mort. EURYALE. Qu'as-tu? MORON. Je vous croyais la bête 2 Dont à me diffamer j'ai vu la gueule prête, Qu'est-ce ? EURYALE. MORON. Oh! que la princesse est d'une étrange humeur! Et qu'à suivre la chasse et ses extravagances 1. Prononcez sanlier; de même dans toute la scène. 2. Diffamer : défigurer, gâter. Expression vieillic. |