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d'une pauvre bête aveugle un cataplafme! parce qu'il me doit cent écus, il fe preffe de faire des Mémoires. Ah, qu'il les apporte ! & perfonne à l'anti-chambre; on arrive à cet appartement comme à la place d'armes. ROSIN E.

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Et qui peut y pénétrer que vous, Monfieur?
BARTHOLO.

J'aime mieux craindre fans fujet, que de m'exposer fans précaution; tout eft plein de gens entreprenants, d'audacieux.... N'a-t-on pas ce matin encore ramaffé leftement votre Chanfon pendant que j'allois la chercher? oh! je...

ROSIN E.

C'est bien mettre à plaifir de l'importance à tout! le vent peut avoir éloigné ce papier, le premier venu, que fais-je ?

BARTHOL O.

Le vent, le premier venu !.... Il n'y a point de vent, Madame, point de premier venu dans le monde ; & c'est toujours quelqu'un pofté là exprès, qui ramaffe les papiers qu'une femme a l'air de laiffer tomber par mégarde.

ROSIN E.

A l'air, Monfieur ?

BARTHOLO.

Oui, Madame, a l'air.

ROSIN E.

Oh! le méchant vieillard!

BARTHOLO.

Mais tout cela n'arrivera plus; car je vais faire fceller

cette grille.

ROSIN E.

Faites mieux; murez les fenêtres tout d'un coup; d'une prifon à un cachot, la différence est fi chose!

peu de

BARTHOLO.

Pour celles qui donnent fur la rue? Ce ne feroit peut-être pas fi mal..... Ce Barbier n'eft pas entré chez vous, au moins?

ROSINE.

Vous donne-t-il auffi de l'inquiétude ?

BARTHOLO.

Tout comme un autre.

ROSIN E.

Que vos repliques font honnêtes !
BARTHOL O.

Ah! fiez-vous à tout le monde, & vous aurez bientôt à la maison une bonne femme pour vous tromper, de bons amis pour vous la fouffler, & de bons valets pour les y aider.

ROSIN E.

Quoi, vous n'accordez pas même qu'on ait des principes contre la féduction de Monfieur Figaro ?

BARTHOL O.

Qui diable entend quelque chofe à la bizarrerie des femmes?

ROSINE en colere.

Mais, Monfieur, il fuffit d'être homme pour nous plaire, pourquoi donc me déplaifez-vous fi fort? BARTHOLO ftupéfait.

Pourquoi ?.... Pourquoi ?.... Vous ne répondez pas à ma queftion fur ce Barbier?

ROSIN E outrée.

Eh bien oui, cet homme eft entré chez moi; je l'ai vu, je lui ai parlé. Je ne vous cache pas même que je l'ai trouvé fort aimable: & puiffiez-vous en mourir de dépit!

(Elle fort.)

SCENE V.

BARTHOLO feul.

OH! les juifs ! les chiens de valets! La Jeuneffe? l'E

veillé l'Eveillé maudit !

SCENE V I.

BARTHOLO, L'ÉVEILLÉ. L'ÉVEILLÉ arrive en báillant, tout endormi.

AAH,

Aн, aah, ah, ah...

BARTHOLO.

Où étois-tu, pefte d'étourdi, quand ce Barbier eft entré ici ?

L'EVEILLÉ.

Monfieur j'étois.... ah, ah, ah...

BARTHOLO.

A machiner quelque efpiéglerie fans doute? Et tu ne l'as pas vu?

L'EVEILLÉ.

Sûrement que je l'ai vu: puifqu'il m'a trouvé tout malade à ce qu'il dit ; & faut bien que ça foit vrai, car j'ai commencé à me douloir dans tous les membres, rien qu'en l'en entendant parl... Ah, ah, aah..... BARTHOLO le contrefait..

Rien qu'en l'en entendant!.... Où donc eft ce vaurien de la Jeuneffe? Droguer ce petit garçon fans mon ordonnance ! Il y a quelque fripponnerie là-deffous.

SCENE VII.

LES ACTEURS PRÉCÉDENTS.) La Jeuneffe arrive en vieillard avec une canne en béquille; il éternue plufieurs fois.

L'EVEILL É toujours bâillant.

LA Jeuneffe.

BARTHOLO.

Tu éternueras dimanche.

LA JEUNESSE.

Voilà plus de cinquante.... cinquante fois.... dans un moment ( il éternue.) Je suis brifé.

BARTHOL O.

Comment! je vous demande à tous deux s'il eft entré quelqu'un chez Rofine, & vous ne me dites pas que ce Barbier...

L'EVEILLÉ continuant de bâiller.-
Eft-ce que c'eft quelqu'un donc Monfieur Figaro?
Aah, ah....

BARTHOLO.
Je parie que le rufé s'entend avec lui.
L'EVEILLÉ pleurant comme un fot.
Moi.... Je m'entends!...

LA JEUNESSE éternuant.

·

Eh mais, Monfieur, y a-t-il... y a-t-il de la justice? BARTHOL O.

De la juftice! C'eft bon entre vous autres miférables, la juftice ! Je suis votre maître moi, pour avoir toujours raifon.

LA JEUNESSE éternuant.
Mais pardi, quand une chose eft vraie......

BARTHOLO.

Quand une chofe eft vraie! fi je ne veux pas qu'elle foit vraie, je prétends bien qu'elle ne foit pas vraie. Il n'y auroit qu'à permettre à tous ces faquins-là d'avoir raison, vous verriez bientôt ce que deviendroit l'autorité.

LA JEUNESSE éternuant.

J'aime autant recevoir mon congé. Un service terrible, & toujours un train d'enfer.

L'EVEIL L É pleurant.

Un pauvre homme de bien eft traité comme un miférable.

BARTHOL O.

Sors donc, pauvre homme de bien. (Il les contrefait. Et t'chi & t'cha ; l'un m'éternue au nez, l'autre m'y bâille.

LA JEUNESSE.

Ah, Monfieur, je vous jure que fans Mademoiselle, il n'y auroit... il n'y auroit pas moyen de refter dans la maison.

(Il fort en éternuant.】

SCENE VIII.

BARTHOLO, DON BAZILE, FIGARO caché dans le cabinet paroît de temps en temps, &

les écoute.

BARTHOL O.

AH! Don Bazile, vous veniez donner à Rofine fa

leçon de musique?

BAZIL E.

C'eft ce qui presse le moins.

BARTHOLO.

J'ai paffé chez vous fans vous trouver.

BAZILE.

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