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& la fureur du Jaloux, la Pupille parvient à lui donner le change fur une lettre remise en fa présence & à lui faire demander pardon à genoux du foupçon qu'il a montré. Je le conçois encore aifément.

Qu'il n'ait pas dit un feul mot de la Scene de ftupéfaction de Bazile, au troifieme Acte, qui a paru fi neuve au Théatre, & a tant réjoui les Spectateurs, Je n'en fuis point furpris du tout.

Paffe encore qu'il n'ait pas entrevu l'embarras où l'Auteur s'eft jetté volontairement au dernier Acte, en faifant avouer par la Pupille à fon Tuteur que le Comte avoit dérobé la clef de la jaloufie; & comment l'Auteur s'en démêle en deux mots, & fort en fe jouant, de la nouvelle inquiétude qu'il a imprimée au Spectateur. C'eft peu de chofe en vérité.

Je veux bien qu'il ne lui foit pas venu à l'efprit, que la Piece, une des plus gaie qui foient au Théatre, eft écrite fans la moindre équivoque, fans une pensée, un feul mot dont la pudeur, même des petites Loges, ait à s'alarmer; ce qui pourtant eft bien quelque chofe, Monfieur, dans un fiecle où l'hypocrifie de la décence eft pouffée prefque auffi loin que le relâchement des mœurs. Très-volontiers. Tout cela fans doute pouvoit n'être pas digne de l'attention d'un Critique auffi majeur.

Mais comment n'a-t-il pas admiré ce que tous les honnêtes gens n'ont pu voir fans répandre des larmes de tendreffe & de plaifir? je veux dire, la piété filiale de ce bon Figaro, qui ne fauroit oublier fa mere !

Tu connois donc ce Tuteur? lui dit le Comte au premier Acte. Comme ma mere? répond Figaro. Un avare auroit dit: Comme mes poches. Un Petit-Maître eût répondu : Comme moi-même. Un ambitieux: Com

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me le chemin de Verfailles ; & le Journaliste de Bouillon Comme mon Libraire : les comparaifons de chacun fe tirant toujours de l'objet intéreflant. Comme ma mere, a dit le fils tendre & refpectueux!

Dans un autre endroit encore, Ah, vous êtes charmant! lui dit le Tuteur. Et ce bon, cet honnête Garçon, qui pouvoit gaiement affimiler cet éloge à tous ceux qu'il a reçus de fes Maîtreffes, en revient toujours à fa bonne mere, & répond à ce mot: Vous étes charmant ! -- Il eft vrai, Monfieur, que ma mere me l'a dit autrefois. Et le Journal de Bouillon ne releve point de pareils traits! Il faut avoir le cerveau bien defféché pour ne les voir, ou le cœur bien dur pour ne pas les fentir!

pas

Sans compter mille autres fineffes de l'Art répandues à pleines mains dans cet Ouvrage. Par exemple, on fait que les Comédiens ont multiplié chez eux les emplois à l'infini :emplois de grande, moyenne & petite Amoureufe; emplois de grands, moyens & petits Valets; emplois de Niais, d'Important, de Croquant, de Payfan, de Tabellion, de Bailli: mais on fait qu'ils n'ont pas encore appointé celui de Bâillant. Qu'a fait l'Auteur pour former un Comédien, peu exercé au talent d'ouvrir largement la bouche au Théatre? Il s'eft donné le foin de lui raffembler dans une feule phrafe, toutes les fyllabes bâillantes du français: Rien... qu'en... l'en... en... ten... dant.. parler: fyllabes en effet qui feroient bâiller un mort, & parviendroient à defferrer les dents même de l'envie!

Et cet endroit admirable où, preffé par les reproches du Tuteur qui lui crie: Que direz-vous à ce malheureux qui baille & dort tout éveille? Et l'autre qui depuis trois heures éternue à fe faire fauter le crane & jaillir la cervelle, que leur direz-vous? Le naïf Barbier répond: Eh parbleu ! je dirai à celui qui éternue, Dieu vous béniffe; & va te coucher à celui qui dort. Réponse

en effet fi jufte, fi chrétienne & fi admirable, qu'un de ces fiers Critiques qui ont leurs entrées au Paradis, n'a pu s'empêcher de s'écrier, » Diable! l'Auteur a dû refter au moins huit jours à trouver cette >> replique «<!

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Et le Journal de Bouillon, au lieu de louer ces beautés fans nombre, ufe encre & papier, Approbation & Privilege, à mettre un pareil Ouvrage au-deffous même de la critique! On me couperoit le cou, Monfieur, que je ne faurois m'en taire.

N'a-t-il pas été jufqu'à dire, le Cruel! Que pour net pas voir expirer ce Barbier fur le Théatre, il a fallu le mutiler, le changer, le refondre, l'élaguer, le réduire en quatre Ades, & le purger d'un grand nombre de pafquinades, de calembourgs, de jeux de mots, en un mot de bas comique?

A le voir ainfi frapper comme un fourd, on juge affez qu'il n'a pas entendu le premier mot de l'Ouvrage qu'il décompofe. Mais j'ai l'honneur d'aflurer ce Journaliste, ainfi que le jeune homme qui lui taille fes plumes & fes morceaux, que, loin d'avoir purgé la Piece d'aucuns des calembourgs, jeux de mots, &c. qui lui euffent nui le premier jour, l'Auteur a fait rentrer dans les Actes reftés au Théatre, tout ce qu'il en a pu reprendre à l'Acte au porte-feuille : tel un Charpentier économe cherche dans fes copeaux épars fur le chantier, tout ce qui peut fervir à cheviller & boucher les moindres trous de fon ouvrage.

Pafferons-nous fous filence le reproche aigu qu'il fait à la jeune perfonne, d'avoir tous les défauts d'une fille mal élevée ? Il eft vrai que, pour échapper aux conféquences d'une telle imputation, il tente à la rejetter fur autrui, comme s'il n'en étoit pas l'Auteur en employant cette expreffion banale: On trouve à la jeune perfonne, &c, On trouve!.... b4

me le chemin de Versailles ; & le Journaliste de Bouillon Comme mon Libraire : les comparaifons de chacun fe tirant toujours de l'objet intéreífant. Comme ma mere, a dit le fils tendre & refpectueux!

Dans un autre endroit encore, Ah, vous êtes charmant! lui dit le Tuteur. Et ce bon, cet honnête Garçon, qui pouvoit gaiement affimiler cet éloge à tous ceux qu'il a reçus de fes Maîtreffes, en revient toujours à fa bonne mere, & répond à ce mot: Vous êtes charmant !-- Il It eft vrai, Monfieur, que ma mere me l'a dit autrefois. Et Le Journal de Bouillon ne releve point de pareils traits! Il faut avoir le cerveau bien defféché pour ne les pas voir, ou le cœur bien dur pour ne pas les fentir!

Sans compter mille autres fineffes de l'Art répandues à pleines mains dans cet Ouvrage. Par exemple, on fait que les Comédiens ont multiplié chez eux les emplois à l'infini :emplois de grande, moyenne & petite Amoureufe; emplois de grands, moyens & petits Valets; emplois de Niais, d'Important, de Croquant, de Payfan, de Tabellion, de Bailli: mais on fait qu'ils n'ont pas encore appointé celui de Bâillant. Qu'a fait l'Auteur pour former un Comédien, peu exercé au talent d'ouvrir largement la bouche au Théatre? Il s'eft donné le foin de lui rafferrbler dans une feule phrafe, toutes les fyllabes bâillantes du français: Rien... qu'en... l'en... en... ten... dant.. parler: fyllabes en effet qui feroient bâiller un mort, & parviendroient à defferrer les dents même de l'envie!

Et cet endroit admirable où, preffé par les reproches du Tuteur qui lui crie: Que direz-vous à ce malheureux qui baille & dort tout éveillé? Et l'autre qui depuis trois heures éternue à fe faire fauter le crâne & jaillir la cervelle, que leur direz-vous? Le naïf Barbier ré pond: Eh parbleu ! je dirai à celui qui éternue, Dieu vous béniffe; & va te coucher à celui qui dort. Réponse

en effet fi jufte, fi chrétienne & fi admirable, qu'un de ces fiers Critiques qui ont leurs entrées au Paradis, n'a pu s'empêcher de s'écrier, » Diable! l'Auteur a dû refter au moins huit jours à trouver cette > replique «<!

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Et le Journal de Bouillon, au lieu de louer ces beautés fans nombre, ufe encre & papier, Approbation & Privilege, à mettre un pareil Ouvrage au-deffous même de la critique! On me couperoit le cou, Monfieur, que je ne faurois m'en taire.

N'a-t-il pas été jufqu'à dire, le Cruel! Que pour net pas voir expirer ce Barbier fur le Théatre, il a fallu le mutiler, le changer, le refondre, l'élaguer, le réduire en quatre Ades, & le purger d'un grand nombre de pafquinades, de calembourgs, de jeux de mots, en un mot de bas comique?

A le voir ainfi frapper comme un fourd, on juge affez qu'il n'a pas entendu le premier mot de l'Ouvrage qu'il décompofe. Mais j'ai l'honneur d'aflurer ce Journaliste, ainfi que le jeune homme qui lui taille fes plumes & fes morceaux, que, loin d'avoir purgé la Piece d'aucuns des calembourgs, jeux de mots, &c. qui lui euffent nui le premier jour, l'Auteur a fait rentrer dans les Actes reftés au Théatre, tout ce qu'il en a pu reprendre à l'Acte au porte-feuille : tel un Charpentier économe cherche dans fes copeaux épars fur le chantier, tout ce qui peut fervir à cheviller & boucher les moindres trous de fon ouvrage.

Pafferons-nous fous filence le reproche aigu qu'il fait à la jeune perfonne, d'avoir tous les défauts d'une fille mal élevée? Il eft vrai que, pour échapper aux conféquences d'une telle imputation, il tente à la re-. jetter fur autrui, comme s'il n'en étoit pas l'Auteur, en employant cette expreffion banale: On trouve à la jeune perfonne, &c, On trouve!....

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