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DA- vit régner parmi le refte des hommes RIUS. une pareille modération, & un pareil

éloignement de tout defir du bien d'autrui? L'on n'auroit pas vû les guerres fe fuccéder fans ceffe les unes aux autres, dans tous les fiécles & dans tous les pays; & le nombre de ceux qui périffent par le fer & par les armes ne feroit pas plus grand que celui des hommes qui font enlevés par la néceffité inévitable de la nature.or

Juftin termine le portrait des Soythes par une reflexion bien fenfée.a C'efteunerschofes bien furprenante, dit-il, qu'un naturel heureux, deftitué du fecours de l'éducation Wait donné aux Scythes une modération & une! fageffe, où les Grecs n'ont pu parvenir ni par les établiffement de leurs Légiflateurs, ni par les preceptes de leurs Philofophes; & que les mœurs d'une nation barbare foient préférables à celles de ces peuples cultivés & polis par les arts & par les fciences. Tant l'ignorance du vice a de plus heureux 2 pod effets

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a Prorfus ut admirabile videatur, hoc illis natură dare,quod Græci longâ fapientiú doctrinå præceptifque philofophorum confequi nequeunt,cultofque mores incultæ barbariæ collatione fuperari. Tanto plus in illis proficit vitioru ignoratio, quàm in his tognitio virtutis!

effets dans les uns, que dans les au- DAtres la connoiffance de la vertu !

Les peres croioient avec raifon laiffer à leurs enfans une précieufe fuc ceffion , en leur laiffant la paix & l'union entre eux. Un de leurs rois, il s'appelloit Scylure, fe voiant près de mourir, fit venir fes enfans, & leur préfen tant à tous fucceffivement un faisceau de dards liés fortement enfemble, les exhorta à les rompre. Quelque effort qu'ils fiffent, ils n'en purent venir à bout. Quand le faifceau fut délié, ils rompirent tous les dards fans peine. Voila, leur dit-il, l'image de ce que pourra parmi vous la concorde & Pu nion. Pour fortifier & étendre ces au vantages domestiques, ils y joignoient

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RIUS.

Plut. de gar rul. pag.

511.

;

le fecours des amis. L'amitié, chez Lucian. eux, étoit regardée comme une allian- in Tex. ce facrée & inviolable, qui approchoit pag. 51. beaucoup de celle que la nature a mi fe entre les freres, & à laquelle on ne pouvoit donner atteinte fans fe rendre coupable d'un grand crime.. some Il femble que les Auteurs anciens fe foient efforcés à l'envi de relever l'innocence des mœurs qui regnoît parmi les Scythes, par de magnifiques éloges. Je tranfcrirai ici en entier ce

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lui qu'on en lit dans Horace. Il affoRIUS. cie aux Scythes les Gétes, qui en

Horat.

lib. 3. Od. 24.

étoient fort voifins. C'eft dans la
belle Ode où ce Poete s'éleve contre
le luxe & les defordres de fon fiécle.
Après avoir dit que ni les plus ime
menfes fuper bes
richeffes ni les als
bâtimens ne peuvent procurer le res
pos & la tranquillité de Pefprit, il
ajoute:,, a Plus heureux cent fois les
Scythes, qui roulent fur des chariots
» leurs maifons errantes: plus heu
,,reux les Gétes, qui habitent des ter
res glacées par les frimats Chez
Darles

Campeftres melius Scythæ

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Quorum plauftra vagas rite trahunt domos,
Vivunt, & rigidi Geta

Immetata quibus jugera liberas

Fruges & Cererem ferunt!

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Nec cultura placet longior anmiây s
Defunctumque laboribus nol

Equali recreat forte vicarius, soos nót
Illic matre carentibus.

Privignis mulier temperat innocens :
is ne Nec dotata regit virum
Conjux, nec nitido fidit adultero.
ausna. Dos eft magna parentium

Virtus &

metuens alterius viri Certo foedere caftitas;

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Et peccare nefas, aut pretium eft mori,

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eux la terre, fans être partagée par D'Ades bornes, produit des grains & RIUS. » des des fruits qui fe recueillent en commun. Les travaux de la campagne ne durent qu'un an pour chacun d'eux; & celui qui vient d'achever fon année, ne manque point d'ètre relevé par un fucceffeur qui prend fa » place aux mêmes conditions. Là les belles-meres, loin de faire tort aux ap rans du premier lit, les ménagent avec bonté, & ne fe permettent Point d'attenter fur la vie des enfans d'un premier lit. Les femmes font en garde contre les difcours fédui» fans de ceux x qui cherchent à les corrompre, & ne tirent point de leur dot le droit de maitrifer leurs maris. La plus grande dot d'une fille, c'eft la vertu de fes pere & mere; c'eft fon inviolable attachement pour fon époux, & l'éloignement qu'elle a pour tout autre; c'eft enfin la perfuasion où elle est que l'infidélité eft un crime, & que la mort en eft le falaire. CX 93 201603 Quand on examine fans prévention le caractere & les moeurs des Seythes, eftil poffible de refuler à ces peuples fon eftime & fon admiration? Leur

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D.A- maniere de vivre, pour l'extérieur RIUS. eft-elle fort éloignée de celle des Patriarches, qui n'avoient point de demeure fixe, qui ne cultivoient point la terre, qui ne s'appliquoient qu'à la nourriture des troupeaux, & qui habitoient fous des tentes? Croit-on ce peuple fort à plaindre d'avoir ignoré, & même méprifé l'ufage de l'or & de l'argent? a Ne feroit-il pas à fouhaiter qu'ils fuffent toujours demeurés dans les entrailles de la terre, & qu'ils n'en euffent jamais été arrachés pour devenir la caufe & l'inftrument de tous les crimes? Quel ufage les Scythes en pouvoient-ils faire, eux qui n'eftimoient que ce qui fert véritablement aux befoins de l'homme, & qui mettoient à ces befoins des bornes fi étroites? Il n'eft point étonnant que vivant fans maifons, ils ne fiffent nul cas des arts fi vantés ailleurs, tels que font l'architecture, la fculpture, la peinture; non plus que de la fomp tuofité des vêtemens & des meu

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bles,

a Aurum irrepertum, & fic meliùs fitum Cùm terra celat, fpernere fortior

Quàm cogere humanos in ufus

Omne facrum rapiente dextra.

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