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dire: Entendez, ô Grands de la terre; instruisez-vous, arbitres du monde!"

Péroraison de l'Oraison funèbre du princejde Condé.

Venez, peuples, venez maintenant; mais venez plutôt, princes et seigneurs; et vous qui jugez la terre, et vous qui ́ouvrez aux hommes les portes du ciel; et vous, plus que touts les autres, princes et princesses, nobles rejetons de tant de rois, lumières de la France, mais aujourd'hui obscurcies et couvertes de votre douleur comme d'un nuage; venez voir le peu qui nous reste d'une si auguste naissance, de tant de grandeur et de tant de gloire; jetez les yeux de toutes parts: voilà ce qu'a pu faire la magnificence et la piété1 pour honorer un héros; des titres, des inscriptions, vaines marques de ce qui n'est plus; des figures qui semblent pleurer autour d'un tombeau, et de fragiles images d'une douleur que le temps emporte avec tout le reste; des colonnes qui semblent vouloir porter jusqu'au ciel le magnifique témoignage de notre néant; et rien ne manque dans touts ces honneurs que celui à qui on les rend. Pleurez donc sur ces faibles restes de la vie humaine, pleurez sur cette triste immortalité que nous donnons aux héros. Mais approchez en particulier, ô vous qui courez avec tant d'ardeur dans la carrière de la gloire, ames guerrières et intrépides; quel autre fut plus digne de vous commander? mais dans quel autre avez-vous trouvé le commandement plus honnête? Pleurez donc ce grand capitaine, et dites en gémissant: Voilà celui qui nous menait dans les hasards; sous lui se sont formés tant de renommés capitaines, que ses exemples ont élevés aux premiers honneurs de la guerre; son ombre eût pu encore gagner des batailles, et voilà que dans son silence son nom même nous anime; et ensemble il nous avertit que pour trouver à la mort quelque reste de nos travaux, et n'arriver pas sans ressource à notre éternelle demeure, avec le roi de la terre, il faut encore servir le Roi du ciel. Servez donc ce Roi immortel et si plein de miséricorde, qui vous comptera un soupir et un verre d'eau donné en son nom, plus que touts les autres ne feront jamais tout votre sang répandu; et commencez à compter le temps de vos utiles services du jour que vous vous serez donnés à un Maître si bienfesant. Et vous, ne viendrez-vous pas à ce triste monument, vous, dis-je, qu'il a bien voulu mettre au rang de ses amis? Touts ensemble, en quelque degré de sa confiance qu'il vous ait reçus, environnez ce tombeau, versez des larmes avec des prières, et, admirant dans un si grand prince une amitié si commode et un commerce si doux, conservez le souvenir d'un héros dont la bonté avait

1 Voilà ce qu'a pu faire la magnificence et la piété. Bossuet gebraucht wiederum den Singular.

égalé le courage. Ainsi puisse-t-il toujours vous être un cher entretien! ainsi puissiez-vous profiter de ses vertus; et que sa mort, que vous déplorez, vous serve à la fois de consolation et, d'exemple! Pour moi, s'il m'est permis après touts les autres de venir rendre les derniers devoirs à ce tombeau,, ô prince, le digne sujet de nos louanges et de nos regrets, vous vivrez éternellement dans ma mémoire. Votre image y sera tracée, non point avec cette audace qui promettait la victoire; non, je ne veux rien voir en vous de ce que la mort y efface: vous aurez dans cette image des traits immortels; je vous y verrai tel que vous étiez à ce dernier jour sous la main de Dieu, lorsque sa gloire sembla commencer à vous apparaître. C'est là que je vous verrai plus triomphant qu'à Fribourg et à Rocroy; et, ravi d'un si beau triomphe, je dirai, en actions de grâces, ces belles paroles du bien-aimé disciple: „La véritable victoire, celle qui met sous nos pieds le monde entier, c'est notre foi. Jouissez, prince, de cette victoire, jouissez-en éternellement par l'immortelle vertu de ce sacrifice; agréez ces derniers efforts d'une voix qui vous fut connue: vous mettrez fin à touts ces discours. Au lieu de déplorer la mort des autres, grand prince, dorénavant1 je veux apprendre de vous à rendre la mienne sainte; heureux si, averti par ces cheveux blancs du compte que je dois rendre de mon administration, je réserve au troupeau que je dois nourrir de la parole de vie, les restes d'une voix qui tombe et d'une ardeur qui s'éteint.

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La Vie humaine.

La Vie humaine est semblable à un chemin dont l'issueest un précipice affreux. On nous en avertit dès le premier pas, mais la loi est portée, il faut avancer toujours. Je voudrais retourner en arrière: Marche! Marche! Un poids invisible, une force irrésitible nous entrainent3, il faut sans cesse avancer vers le précipice. Milles traverses, milles peines nous fatiguent et nous inquiètent durant la route. 4 Encore si je pouvais éviter ce précipice affreux! Non, non, il faut marcher, il faut courir; telle est la rapidité des années. On se console, pourtant, parceque de temps eu temps on rencontre des objets, qui nous divertissent, des eaux courantes, des fleuves qui passent. On voudrait

1 Dorénavenant leitet Rahnouard von hora in antea ab; im Provenzalischen sagte man derenan. Da man im Deutschen dereinst, auch derein, hat, follte derenan nicht eher fränkischen Ursprunges sein?

2 La loi est portée, man sagt auch: la loi a frappé.

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Un poids invisible, une force irrésistible nous entraînent. Obgleich die Substantiver hier als sinnverwandt gelten können, gebraucht doch Bossuet den Plural bei der Kons gruenz des Verbs.

4 Durant la route. Der Unterschied zwischen durant und pendant ist leicht zu machen. Ist die Handlung von Dauer und findet keine Unterbrechung Statt, so muß ersteres gebraucht werden; leßteres, wenn Unterbrechung Statt findet: durant la guerre de trente ans, während des ganzen dreißigjährigen Krieges, pendant la guerre de trente ans, im dreißigjährigen Kriege.

s'arrêter; marche! marche! et cependant on voit tomber derrière soi tout ce qu'on avait passé: fracas effroyable, inévitable ruine! On se console, parce qu'on emporte quelques fleurs cueillies en passant, qu'on voit se faner entre ses mains du matin au soir, et quelques fruits qu'on perd en les goûtant: Enchantement! Illusion, toujours entraînée, tu approches du gouffre affreux; déjà tout commence à s'effacer: les-jardins moins fleuris, les fleurs moins brillantes, leurs couleurs moins vives, les prairies moins riantes, les eaux moins claires, tout se ternit, tout s'efface, L'ombre de la mort se présente, on commence à sentir l'approche du gouffre fatal. Mais il faut aller sur le bord. Encore un pas! déjà l'horreur trouble les sens; la tête tourne,1 les yeux s'égarent. Il faut marcher. On voudrait retourner en arrière; plus de moyens: 2 tout est tombé, tout est évanoui, tout est échappé.

2. BOURDALOUE (Louis).

Bourdaloue, ein Jesuit, ward zu Bourges den 20. August 1632 geboren und starb zu Paris den 13. Mai 1704, als Kanzelredner berühmt.

Wie Wachler sagt, arbeitete derselbe für den Verstand und befleißigte sich strenger Richtigkeit. Dieses Urtheil ist nicht umfassend `genug, wir wollen fein Verdienst als Redner weitläuftiger hervorheben. Bourdaloue predigte zuerst in den Provinzen, nachher beriefen ihn seine Vorgesezten nach Paris. Es war im Jahre 1669, in der glänzendsten Epoche der Regierung Ludwigs des XIV., als er dort eintraf. Corneille hatte der Bühne den Ton angegeben und dieselbe geregelt. Bourdalo ue regelte die Kanzel und war der Vorbote der Vervollkommnung, die ihr Bossuet und die übrigen Kanzelredner späterhin gaben, indem er die wahre Beredsamkeit entwickelte. Er zeichnete sich besonders durch die Kraft seiner Logik, die Anordnung des Stoffes und die Regelmäßigkeit seiner Beweise aus; aber er vernachlässigte es, die Herzen zu bewegen, er verschwendete zu sehr Zitate aus Kirchenvätern und manierirte zu sehr seine Reden durch einen zu häufigen Gebrauch von Zergliederungen und Unterabtheilungen der Hauptsäße, durch einen methodistischen Entwickelungsgang, wodurch der Geist erschlafft, der Gedanke gehemmt und getödtet wird. Ungeachtet seiner Mängel ist Bourdaloue dennoch als ein vortreffliches Muster christlicher Kanzelredner zu betrachten, Man braucht nur einen Blick auf die Reden seiner Vorgänger de Lingendes, Timoléon Cheminais, zu werfen und den schlechten Geschmack und den schwülstigen Styl derselben zu berücksichtigen, um die Dienste zu würdigen, die er der katholischen Beredsamkeit leistete. Von ihm sagte die Sévigné „Je n'ai jamais rien entendu de plus beau, de plus noble, de plus étonnant que les sermons du père Bourdaloue. In den letzten Jahren seines Lebens verließ er ganz die Kanzel und widmete feine Zeit den Armenanstalten, den Spitälern und Gefängnissen. Er starb von seinem Jahrhunderte bewundert, von seinen Ordensbrüdern bedauert und selbst von seinen Feinden geachtet. Laharpe meint, daß wenn dieser Redner in England gelebt, er als der erste aller Kanzelredner hätte glänzen können. Diese Meinung scheint uns eben nicht sehr richtig.

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Fragment d'un Sermon sur la Nativité.

J'annonce un Sauveur humble et pauvre, mais je l'annonce aux grands du monde et aux riches du monde... Que

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leur dirai-je donc, Seigneur, et de quels termes me servirai-je pour leur proposer le mystère de votre humilité et de votre pauvreté? Leur dirai-je, ne craignez point? Dans l'état où je les suppose ce serait les tromper. Leur dirai-je: craignez! Je m'éloignerais de l'esprit du mystère même que nous célébrons, et des pensées consolantes qu'il inspire et qu'il doit inspirer aux plus grands pécheurs. Leur dirai-je: affligez-vous! pendant que tout le monde chrétien est dans la joie? Leur dirai-je: consolez-vous! pendant qu'à la vue d'un Sauveur qui condamme toutes leurs maximes, ils ont tant de raisons de s'affliger? Je leur dirai, ô mon Dieu! l'un et l'autre, et par là je satisferai au devoir que vous m'imposez; je leur dirai: affligez-vous! car je vous annonce une nouvelle qui est tout à la fois pour vous un sujet de crainte et de joie.

3. FLÉCHIER (Esprit).

Flechier, Bischof zu Nimes und Mitglied der Akademie, wurde in Paris im Jahre 1632 geboren und starb 1704. Er besißt weder das Talent Bossuets, noch dessen Beredsamkeit, aber der Ausdruck seiner Oraisons funèbres ist glänzender und korrekter; es liegt in ihm eine wirksame Darstellungsgabe, die er nie mißbraucht, weßhalb er, nach Bossuet, als der größte Kanzelredner betrachtet werden kann.

Seine Werke sind noch stets zu empfehlen, obgleich seine rhetorischen Wendungen oft einförmig werden. Die Leichenpredigt Turennes und Montausiers gelten immer als zwei Meisterwerke dieses Redners.

Er war Professor der Beredsamkeit in Narbonne gewesen, ehe er

Bischof ward.

Une Armée.

Qu'est ce qu'une armée? C'est un corps animé d'une infinité de passions différentes, qu'un homme habile fait mouvoir pour la défense de la patrie: c'est une troupe d'hommes armés qui suivent aveuglément les ordres d'un chef, dont ils ne savent pas les intentions; c'est une multitude d'ames, pour la plupart viles et mercenaires, qui, sans songer à leur propre réputation, travaillent à celle des rois et des conquérants: c'est un assemblage confus de libertins, qu'il faut assujétir à l'obéissance; de lâches, qu'il faut mener au combat; de téméraires, qu'il faut rétenir; d'impatients, qu'il faut accoutumer à la confiance. Quelle prudence ne faut il pas pour conduire et réunir au seul intérêt public tant de vues et de volontés différentes? Comment se faire craindre, sans se mettre en danger d'être haï, et bien souvent abandonné? Comment se faire aimer, sans perdre un peu de l'autorité, et relâcher de la discipline nécessaire?

(Oraison Funèbre de Turenne.)

1 Proposer bedeutet hier vorlegen, auseinander seßen.

Autre Fragment de la même Oraison.

Cet homme (Machabée) qui défendait les villes de Juda, qui domptait l'orgueil des enfants d'Ammon et d'Esau, qui revenait chargé des dépouilles de Samarie, après avoir brûlé sur leurs propres autels les dieux des nations étrangères; cet homme que Dieu avait mis autour d'Israël comme un mur d'airain, où se brisèrent tant de fois toutes les forces de l'Asie, et qui après avoir défait de nombreuses armées, déconcerté les plus fiers et les plus habiles genéraux des rois de Syrie, venait touts les ans comme le moindre des Israélites réparer avec ses mains triomphantes les ruines du sanctuaire, et ne voulait d'autre récompense des services qu'il rendait à sa patrie, que l'honneur de l'avoir servie; ce vaillant homme poussant enfin avec un courage invencible les ennemis qu'il avait réduits à une fuite honteuse, reçut le coup mortel, et demeura comme enseveli dans son triomphe. Au premier bruit de ce funeste accident toutes les villes de Judée furent émues; des ruisseaux de larmes coulèrent des yeux de touts ses habitants; ils furent quelque temps saisis, muets, immobiles: un effort de douleur rompant enfin ce long et morne silence, d'une voix entrecoupée de sanglots que formaient dans leurs coeur la tristesse, la pitié, la crainte, ils s'écrièrent: Comment est mort cet homme puissant qui sauvait le peuple d'Israël? A ces cris Jérusalem redoubla ses pleurs; les voûtes du temple s'ébranlèrent; le Jourdain se troubla, et touts ses rivages retentirent du son de ces lugubres paroles: „Comment est mort cet homme puissant qui sauvait le peuple d'Israël?"

4. MASCARON (Jules).

Mascaron wurde im Jahre 1634 zu Marseille geboren und starb den 16. November 1703; wohl ist auch er ausgezeichneter Kanzelredner, doch steht er weit unter den vorhergehenden. Zur Zeit als Ludwig XIV., von seinen Leidenschaften beherrscht, das skandalöseste Beispiel gab, hatte er das Herz, in einer am ersten Sonntage der Fasten vor dem stolzen Monarchen gehaltenen Predigt, ihn an die Mission des Propheten Nathan, der dem David die Strafe feines Ehebruchs verkündete, zu erinnern, und um die Anspielung vollkommener zu machen, sezte er die Worte des heiligen Bernhards hinzu: Si le respect, que j'ai pour vous, ne me permet de dire la vérité que sous des enveloppes, il faut que vous ayez plus de pénétration que je n'ai de hardiesse, et que vous entendiez plus je ne vous dis, et qu'en ne vous parlant pas plus clairement, je ne laisse pas de vous dire ce que vous ne voudriez pasqu'on vous dit. Si, avec toutes ces précautions et touts ces ménagements, la vérité ne peut vous plaire, craignez qu'elle ne vous soit ôtée, et que Jésus Christ ne venge sa parole méprisée. Die Hofleute suchten die Absichten des Predigers bei Ludwig anzuschwärzen, der König aber gab ihnen folgende Antwort: Le prédicateur a fait son devoir, c'est à nous de faire le nôtre, und als Mascaron vor ihm erschien, empfahl er demselben, immer dieselbe Wahrheitslieke an den Tag zu legen und ihm beizustehen, damit ihm der Allmächtige den Sieg über feine Leidenschaften verschaffe.

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