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La vraie et la fausse Dévotion.
Je ne suis point, mon frère, un docteur révéré;
Et le savoir chez moi n'est pas tout retiré.
Mais, en un mot, je sais, pour toute ma science,
Du faux avec le vrai faire la différence.

Et comme je ne vois nul genre de héros
Qui soit plus à priser que les parfaits dévots,
Aucune chose au monde et plus noble et plus belle
Que la sainte ferveur d'un véritable zèle;

Aussi ne vois-je rien, qui soit plus odieux
Que le dehors plâtré d'un zèle spécieux,

Que ces francs charlatans, que ces dévots de place,
De qui la sacrilège et trompeuse grimace
Abuse impunément, et se joue, à leur grè,
De ce qu'ont les mortels de plus saint et sacré ;
Ces gents qui, par une ame à l'intérêt soumise,
Font de dévotion métier et marchandise,

Et veulent acheter crédit et dignités

A prix de faux clins d'yeux et d'élans affectés;
Ces gents, dis-je, qu'on voit d'une ardeur non commune
Par le chemin du Ciel courir à leur fortune;

Qui, brûlants et priants 2 demandent chaque jour,
Et prêchent la retraite au milieu de la cour;

- Qui, savent ajuster leur zèle avec leurs vices,
Sont prompts, vindicatifs, sans foi, pleins d'artifices,
Et pour perdre quelqu'un couvrent insolemment
De l'intérêt du Ciel leur fier ressentiment,
D'autant plus dangereux dans leur âpre colère
Qu'ils prènent contre nous des armes qu'on révère,
Et que leur passion, dont on leur sait bon gré,
Veut nous assassiner avec un fer sacré:
De ce faux caractère on en voit trop paraître.
Mais les dévots de coeur sont aisés à connaître.
Notre siècle, mon frère, en expose à nos yeux
Qui peuvent nous servir d'exemples glorieux:
Regardez Ariston, regardez Périandre,
Oronte, Alcidamas, Polydore, Clitandre;
Ce titre par aucun ne leur est débattu,
Ce ne sont point du tout fanfarons de vertu;
On ne voit point en eux ce faste insupportable,
Et leur dévotion est humaine, est traitable:
Ils ne censurent point toutes nos actions,
Ils trouvent trop d'orgueil dans ces corrections;
Et laissant la fierté des paroles aux autres,
C'est par leurs actions qu'ils reprènent les nôtres.
L'apparence du mal a chez eux peu d'appui,

1 à prix de, au prix de, ersteres bedeutet vermittelst, lehteres in Bezug auf. 2 brulants et priants, Fehler gegen die Flekzion.

Et leur ame est portée à juger bien d'autrui.
Point de cabale en eux, point d'intrigues à suivre;
On les voit, pour touts soins, se mêler, de bien vivre.
Jamais contre un pécheur ils n'ont d'acharnement,
Ils attachent leur haine au péché seulement,

Et ne veulent point prendre, avec un zèle extrême,
Les intérêts du Ciel plus qu'il ne veut lui même.
Voilà mes gents, voilà comme il en faut user,
Voilà l'exemple enfin qu'il se faut proposer1.

(MOLIÈRE, le Tartufe.)

XII. PASCAL (Blaise).

Pascal wurde den 19. Juni 1623 in Clermont-Ferrand geboren und starb, im 39sten Jahre, den 19. August 1662. Ein großer Geometer und vielleicht der eleganteste Prosaiker des großen Jahrhunderts der französischen Literatur, denn ér fann als der Schöpfer des französischen Styls betrachtet werden. Nicht nur als Schriftsteller hat er sich die Palme des Ruhms erworben, sondern er gehört. auch zu jenen Männern, über deren Besiß Künste, Wissenschaften und Literatur seit drei Jahrhunderten im Streite sind, und sich noch lange streiten werden, denn Pascal's Genie hat Alles umfaßt, und demjenigen, was es umfaßte, den ihm eigenen Stempel aufgedrückt.

Als Pascal auftrat, befand sich die französische Sprache noch in einer völligen Anarchie; die Schriftsteller, deren Freiheit in's Gränzenlose ging, befolgten keine andere Richtschnur, als die ihres Gutdünkens und ihrer Willkür. Jeder hatte seine eigenen Wendungen, Ausdrücke, kurz seine eigene Weise, schuf die Wörter, die er, um seine Gedanken auszudrücken, für nothwendig hielt, und bildete sich eine eigene Sprache. Daher diese Schwulstigkeit, schlechten Wize, lächerliche Emphase, die man in allen Werken jener Zeit, mit lateinischen und griechischen Brocken ausstaffirt, antrifft. Zu den klassischen Mustern gesellten sich noch italienische und spanische, die man allenthalben nachzuäffen suchte. Wie viel Mühe, war aber nun erforderlich, um die Sprache zu säubern! Die Akademie wurde errichtet, deren erste Sorge, wie Pelisson sagt, fut de nettoyer la langue des ordures qu'elle avait contractées, ou dans la bouche du peuple, ou dans la foule du palais et dans les impuretés de la chicane, ou par les mauvais usages des courtisans ignorants, ou par l'abus de ceux qui la corrompaient en l'écrivant, et de ceux qui disaient bien dans les chaires ce qu'il fallait dire, mais qui le disaient autrement qu'il ne le fallait." ~ Vaugelas, Patru, den selbst Boileau und Racine befragten, seßten Regeln des Styls fest, und Voiture, Balzac und Malherbe gaben denselben Anmuth und Natürlichkeit, und Pascal den lezten Schnitt.

Paseal hat mehrere Werke geschrieben, wovon die vorzüglichsten les Lettres provinciales, die von Nicole unter dem Titel Litterae de morali et politica jesuitarum disciplina in's Lateinische übertragen wurden, und seine Pensées find. Die übrigen, meist mathematischen Inhalts, gehören nicht hierher.

Jugement de Raymond sur les Lettres Provinciales. Dans ses Lettres Provinciales, Pascal adopte, comme par inspiration, le plan le plus neuf et le plus heureux: il donne à cet ouvrage une forme dramatique et pleine de vie; il met ses personnages en scène

1 Proposer bedeutet vorschlagen, se proposer sich vornehmen, hier als Muster annehmen, imiter over suivre hätten Molière's Gedanken nicht ausdrücken können, weshalb er eine Ellipse gebraucht, worunter eines der beiden Verben gedacht ist,

et s'y place avec eux; là il les immole avec un admirable talent à la gaité du public. De quelle manière plaisante il se montre lui-même allant frapper de porte en porte chez les docteurs de touts les partis, et leur proposant ses doutes et ses anxiétés! Avec quelle force comique il nous les présente courant à leurs bibliothèques, revenant chargés de livres de touts les formats, les ouvrant avec l'air du triomphe aux endroits marqués, montrant ces lignes toutes d'or, ces puissantes autorités d'écrivains inconnus et nouveaux, cités dans leur propre causé! Avec quel bonheur il oppose à l'antique et vénérable tradition de l'église, aux noms harmonieux et respectés des plus illustres docteurs une foule d'auteurs ignorés dont les noms barbares fatiguent autant l'oreille que leurs décisions renouvelées insulteraient au bon sens et outrageraient la raison! Avec quel art, avec quelles ruses savantes il poursuit ces subtiles théologiens qu'il fait parler! Avec quelle adresse il les frappe de l'arme victorieuse de Socrate! Il les agace, il presse ses questions, et, avec le ton de la plus franche bonhomie, il passe finement d'un subterfuge à l'autre, n'en laisse échapper aucun sans lui imprimer le sceau du ridicule, et finit par réduire le grave docteur au triste et humiliant aveu de quelque déplorable

absurdité.

La plaisanterie de Pascal n'est point une ironie chagrine, une raillerie colère、 marquée au coin du sarcasme et de la malignitė: c'est une agréable moquerie respirant les grâces et l'amabilite, assaisonnée de délicatesse et de charme, pleine de finesse et de douceur, qui, sous les traits de la simplicité et de l'ingénuité, frappe sans effort, avec une justesse remarquable, et ne laisse juger de sa force que par l'impression ineffaçable qui reste après elle.

(Eloge de Pascal.)

1. Jugement de Bescherelle sur les Pensées de Pascal. Les Pensées de Pascal ne sont autre chose que des fragments détachés, jetés comme au hasard sur le papier, sans liaison et sans ordre. Elles ont principalement pour objet la philosophie, la morale, les belles lettres et la religion. C'est pendant les quatre dernières années de sa vie que Pascal les écrivit, en proie à une maladie de faiblesse et de langueur qui ne lui laissait pas un seul instant de relâche. Mais ces pensées, malgré leur défaut d'unité, leur manque d'ensemble, n'en sont pas moins marquées de l'empreinte du génie. Un critique s'est même persuadé que par le moyen d'un examen approfondi, on pouvait apercevoir quelques traces de correspondance entre ces divers matériaux, quelques relations de ces fragments avec le plan auquel ils étaient, sans doute, assortis et subordonnés. Ce critique a fait plus: il a tenté lui-même cet examen, et il a cru entrevoir, au milieu de ces parties éparses et informes, un système complet de philosophie, le plus beau qui soit jamais sorti des conceptions humaines, un système qui efface toutes les méditations des philosophes anciens et modernes; système parfaitement lié dans toutes ses parties, qui embrasse l'homme tout entier, qui dévoile toute sa nature, qui en trace la peinture la plus énergique avec une vigueur de pinceau inconnue jusque-là; qui apprend à l'homme la juste mesure et les bornes de toutes ses puissances physiques et morales; qui met à nu toute sa faiblesse et sa misère, et lui découvre en même temps les restes de sa grandeur déchue, et celle à laquelle il peut s'élever encore; qui démêle et combine ces étonnantes contrariétés de son état présent, lesquelles ont fait le désespoir de touts les philosophes, dogmatiques ou sceptiques, également incapables de les comprendre, de les expliquer et de les concilier; système qui fait jaillir de ces considérations frappantes de vérité et de profondeur, toutes les lumières nécessaires pour montrer à l'homme sa véritable situation sur la terre, sa mission, sa destinée finale, et la voie qu'il doit suivre pour l'accomplir. Ici se déroule le plus magnifique tableau de la religion chrétienne, considérée dans les archives de la révé

lation, dans son histoire, dans les preuves de sa divinité, dans la haute sagesse de ses lois et de ses maximes, dans son admirable convenance à l'état et à touts les besoins de l'homme; dans sa perfection, qui complète toutes ces théories morales, qui apporte ce qui manque à toutes les doctrines imparfaites des hommes.

Extrême Grandeur et extrême Petitesse de la

Nature.

La première chose qui s'offre à l'homme quand il se regarde, c'est son corps, c'est-à-dire, une certaine portion de matière qui lui est propre. Mais pour comprendre ce qu'elle est, il faut qu'il la compare avec tout ce qui est au-dessus de lui, et tout ce qui est au-dessous, afin de reconnaître ses justes bornes.

Qu'il ne s'arrête donc pas à regarder simplement les objets qui l'environnent; qu'il contemple la nature entière dans sa haute et pleine majesté; qu'il considère cette éclatante lumière, mise comme une lampe éternelle pour éclairer l'univers; que la terre lui paraisse comme un point, au prix du vaste tour que cet astre décrit, et qu'il s'étonne de ce que ce vaste tour lui-même n'est qu'un point très-délicat, à l'égard de celui que les astres qui roulent dans le firmament embrassent. Mais si notre vue

s'arrête-là, que l'imagination passe outre; elle se lassera plutôt de concevoir, que la nature de fournir. Tout ce que nous voyons du monde, n'est qu'un trait imperceptible dans l'ample sein de la nature: nulle idée n'approche de l'étendue de ces espaces. Nous avons beau1 enfler nos conceptions, nous n'enfantons que des atomes au prix de la réalité des choses. C'est une sphère infinie, dont le centre est partout, la circonférence nulle part. Enfin, c'est un des plus grands caractères sensibles de la toute-puissance de Dieu, que notre imagination se perde dans cette pensée.

Mais pour présenter à l'homme un autre prodige aussi étonnant, qu'il recherche dans ce qu'il connaît les choses les plus délicates. Qu'un ciron, par exemple, lui offre dans la petitesse de son corps des parties incomparablement plus petites, des jambes avec des jointures, des veines, des humeurs dans ce sang, des vapeurs dans ces gouttes: que divisant encore ces dernières choses, il épuise ses forces et ses conceptions, et que le dernier objet où il peut arriver soit maintenant celui de notre discours: il pensera peut-être que c'est là l'extrême petitesse de la nature. Je veux lui peindre non seulement l'univers visible, mais encore tout ce qu'il est capable de concevoir de l'immensité de la nature dans l'enceinte de cet atome imperceptible.. Qu'il se perde dans ces merveilles aussi étonnantes par leur petitesse, que les autres par leur étendue. Car qui n'admirera

1 avoir beau ein der französischen Sprache eigener Ausdruck, der vergebens bedeutet.

que notre corps, qui tantôt n'était pas perceptible dans l'univers, imperceptible lui-même dans le sein du tout, soit maintenant un colosse, un monde, ou plutôt un tout à l'égard de la dernière petitesse où l'on ne peut arriver?

(PASCAL.)

XIV. SÉVIGNÉ (Marie, de Rabutin-Chantal, Marquise de).

Die Marquise de Sévigné ward den 5. Februar 1627 im alten Schlosse Bourbilly (Burgund) geboren und starb den 18. April 1696; besonders im Briefstyl berühmt. Jung Wittwe geworden, widmete sie ihr Leben der Erziehung ihrer Tochter, späterhin Frau von Grignan, der sie ihre Briefe_schrieb. Ihr Talent glänzt besonders in dieser Korrespondenz, obgleich ihre mütterliche Zärtlichkeit oft in Schwärmerei ausartet. Die Sprache ist rein, korrekt und wohllautend, und die Verschiedenheit und Lebendigkeit ihres Ausdrucks unerschöpflich. Kein Schriftsteller hat die zartesten Färbungen des Gedankens mit mehr Anmuth geschildert.

Die vorzüglichste Ausgabe der Lettres de Madame de Sévigné ist die von Monmerqué besorgte, weil er darin viele bis dahin unbekannte Briefe und Bruchstücke aufgenommen hat. Paris, Blaise, 1818. 2 Vol. in 8.

Madame de Sévigné à sa fille Madame de Grignan.

Voici un terrible jour, ma chère enfant; je vous avoue que je n'en puis plus. Je vous ai quittée dans un état qui augmente ma douleur. Je songe à touts les pas que vous faites, & à touts ceux que je fais; et combien il s'en faut qu'en marchant toujours de cette sorte nous puissions jamais nous rencontrer! Mon coeur est en repos quand il est auprès de vous: c'est son état naturel, et le seul qui peut lui plaire. Ce qui s'est passé ce matin me donne une douleur sensible et me fait un déchirement dont votre philosophie sait les raisons. Je les ai senties et les sentirai longtemps. J'ai le coeur et l'imagination tout remplis de vous, je n'y puis penser sans pleurer, & j'y pense toujours; de sorte que l'état où je suis n'est pas une chose soutenable; comme il est extrême, j'espère qu'il ne durera pas dans cette violence. Je vous cherche toujours et je trouve que tout me manque, parce que vous me manquez. Mes yeux qui vous ont tant rencontrée depuis quatorze mois, ne vous trouvent plus. Le temps agréable qui est passé rend celui-ci douloureux, jusqu'à ce que je sois un peu accoutumée; mais ce ne sera jamais assez pour ne pas souhaiter ardemment 'de vous revoir et de vous embrasser. Je ne dois pas espérer mieux de l'avenir que du passé; je sais ce que votre absence m'a fait souffrir; je serai encore plus à plaindre, parce que je me suis fait imprudemment une habitude nécessaire de vous voir.

Il me

semble1 que je ne vous ai pas assez embrassée en partant.

1

Il me semble hat den Indikativ und den Konjunktiv nach sich, und nicht stets den
Infinitiv. Die Frau von Sévigné macht sehr richtig diesen Unterschied: I me
semble que ce soit une crise que la nature ait souhaitée (Lettres.) In den
Fällen, wo Gewißheit vorhanden ist, gebrauche man den Indikativ, bei Zweifel und
Ungewißheit den Konjunktiv.

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