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Mais il n'est pas moins vrai que cet ordre des Cieux
Change selon les temps comme selon les lieux.
Rome a reçu des rois ses murs et sa naissance,
Elle tient des consuls sa gloire et sa puissance,
Et reçoit maintenant de vos rares bontés
Le comble,souverain de ses prospérités.
Sous vous l'Etat n'est plus en pillage aux armées,
Les portes de Janus par vos mains sont fermées:
Ce que sous ses consuls on n'a vu qu'une fois,
Et qu'a fait voir comme eux le second de ses rois.

MAXIME.

Les changements d'état que fait l'ordre celeste
Ne coûtent point de sang, n'ont rien qui soit funeste.

CINNA.

C'est un ordre des Dieux qui jamais ne se rompt,
De nous vendre bien cher les grands biens qu'ils nous font.
L'exil des Tarquins même ensanglanta nos terres;
Et nos premiers consuls nous ont coûté des guerres.

MAXIME.

Donc votre aïeul Pompée au Ciel a résisté,
Quand il a combattu pour notre liberté?

CINNA.

Si le Ciel n'eût voulu que Rome l'eût perdue,
Par les mains de Pompée il l'aurait défendue:
Il a choisi sa mort pour servir dignement
D'une marque éternelle à ce grand changement;
Et devait cette gloire aux månes d'un tel homme,
D'emporter avec eux la liberté de Rome.
Ce nom depuis longtemps ne sert qu'à l'éblouir.
Et sa propre grandeur l'empêche d'en jouir."
Depuis qu'elle se voit la maîtresse du monde,
Depuis que la richesse entre ses murs abonde,
Et que son sein fécond en glorieux exploits
Produit des citoyens plus puissants que des rois,
Les grands pour s'affermir achetant les suffrages,
Tiènent pompeusement leurs maîtres à leurs gages,
Qui par des fers dorés se laissant euchaîner,
Reçoivent d'eux les lois qu'ils pensent leur donner.
Envieux l'un de l'autre, ils mènent tout par brigues,
Que leur ambition tourne en sanglantes ligues.
Ainsi de Marius Sylla devint jaloux,

César de mon aïeul, Marc-Antoine de vous;

Ainsi la liberté ne peut plus être utile

Qu'à former les fureurs d'une guerre civile,

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Lorsque par un désordre à l'univers fatal,

L'un ne veut point de maître, et l'autre point d'égal.
Seigneur, pour sauver Rome, il faut qu'elle s'unisse
En la main d'un bon chef à qui tout obéisse.
Si vous aimez encore à la favoriser,

Otez-lui les moyens de se plus diviser1.
Sylla quittant la place enfin bien usurpée,

N'a fait qu'ouvrir le champ à César et Pompée,
Que le malheur des temps ne nous eût pas fait voir,
S'il eût dans sa famille assuré son pouvoir.
Qu'a fait du grand César le cruel parricide,
Qu'élever contre vous Antoine avec Lépide,
Qui n'eussent pas détruit Rome par les Romains,
Si César eût laissé l'empire entre vos mains?
Vous la replongerez, en quittant cet empire,
Dans les maux dont à peine encore elle soupire;
Et de ce peu, seigneur, qui lui reste de sang,
Une guerre nouvelle épuisera son flanc,
Que l'amour du pays, que la pitié vous touche;
Votre Rome à genoux vous parle par ma bouche.
Considérez le prix que vous avez coûté;

Non pas qu'elle vous croie avoir trop acheté:
Des maux qu'elle a soufferts elle est trop bien payée;
Mais une juste peur tient son âme effrayée.

Si, jaloux de son heur et las de commander,
Vous lui rendez un bien qu'elle ne peut garder,
-S'il lui faut à ce prix en acheter un autre,
Si vous ne préférez son intérêt au vôtre,
Si ce funeste don la met au désespoir,
Je n'ose dire ici ce que j'ose prévoir,

Conservez-vous, seigneur, en lui laissant un maître
Sous qui son vrai bonheur commence de renaître2;
Et, pour mieux assurer le bien commun de touts,
Donnez un successeur qui soit digne de vous.

AUGUSTE.

N'en délibérons plus, cette pitié l'emporte,

Mon repos m'est bien cher, mais Rome est la plus forte;
Et quelque grand malheur qui m'en puisse arriver,

Je consens à me perdre afin de la sauver,

(Cinna)

De sc plus diviser, Corneille hat hier ne weggelassen. Commence de renaitre. Es ist ein Unterschied zwischen commencer à und de vor handen. Hat die Sache eine Dauer, so gebraucht man ersteres, im andern Falle à (Laveaux). Das Glück, wovon hier die Rede ist kann unterbrochen werden, dess halb steht de.

V. ROTROU (Jean de).

Dieser Dichter word 1609 zu Dreux in der Normandie geboren, und starb den 27. Juni 1660. Einer der vorzüglichsten französischen dramatischen Schriftsteller, var er der Schöpfer der tragischen Kunst. Er theilte mit Mairet den Ruhm, dem åttern Corneille den Weg gebahnt zu haben, hatte aber vor Lesteren den Vortheil, daß er öffentlich dem großen Dichter die ihm gebührende Gerechtig keit wiederfahren ließ. Corneille war drei Jahre ålter als Rotrou, aber da die ersten Werke Rotrou's früher als die des Verfassers des Cid erschienen waren, so nannte derselbe den Rotrou seinen Vater. Ulle Stücke Rotrou's sind vergessen, Wenceslaus ist das einzige, das ihn überlebt hat, und doch ward dieses Meisterwerk des Verfassers erst nach dem Cid, den Horatiern, Cinna, Heraclius und Rodogune aufgeführt.

Rotrou hat die Bühne mit mehr als vierzig Stücken, sowol tragischen als komischen Inhalts bereichert. Demungeachtet wåre fein Name vergessen worden, wenn er nicht diesen Wenceslaus, ein kerniges und imposantes Trauerspiel, gedichtet hatte; die Handlung ist neu und großartig, der Styl oft hart und ergrei fend durch Ausdruck tiefen Gefühls und Leidenschaft. Wenceslaus soll eine Nachahmung des spanischen F. de Rojas sein.

Rotrou besaß einen edlen Karakter, wie man aus folgendem Zuge ersehen kann. Dreux, seine Vaterstadt, wo er Kriminalleutenant war, ward 1650 von der Pest befallen. Der Bürgermeister und vorzüglichsten Bürger fielen als Schlachtopfer dieser Krankheit. Rotrou, der sich damals in Paris aufhielt, erfährt diesen schrecklichen Zufall. Ungeachtet der Bitten seines Bruders, verläßt der Dichter Alles, Arbeiten wie Vergnügungen. Als Magistrat der Stadt ist seine Stelle ihm da angewiesen, wo die Gefahr droht. Er langt in Treur an. Welches Schauspiel!... »Le péril où je me trouve, schreibt er seinem Bruder, est imminent. Au moment où je vous écris, les cloches sonnent pour la vingt-deuxième personne aujourd'hui: ce sera pour moi, demain peut-être: mais ma conscience a marqué mon devoir. Que la volonté de Dieu s'accomplisse!..." Drei Tage nachher hatte ihn der Tod weggerafft. Millevoye hat diese Handlung Rotrou's meisterhaft geschildert. Wir geben sie hier vor dem Bruchstücke aus Wenceslaus.

Le Dévoument de Botrou.

Rotrou, cher à Thémis et cher à Melpomène,
Avait abandonné son paisible domaine;
Vers Paris un instant par la gloire entraîné,
Des palmes du théâtre il marchait couronné,
Et, du Cid méconnu défendant la merveille,
Devant Richelieu même osait louer Corneille.
Le Cirque s'est ouvert; Rotrou voit par des pleurs
Applaudir Venceslas et ses noble douleurs:
Corneille, dont l'estime et l'enflamme et l'honore,
Assiste à son triomphe et l'embellit encore,
Voilà qu'un bruit fatal, trop prompt à circuler,
Aux applaudissements est venu se mêler.
Des tragiques douleurs la vue est détournée:
De moment en moment la foule consternée
Attache sur Rotrou, son regard inquiet;

On le plaint, il s'étonne; il s'informe, on se tait.
Son trouble s'en augmente: il insiste, il arrache
Le déplorable aveu du malheur qu'on lui cache.
O revers! Dreux périt sous un mal destructeur.
Rotrou frémit. Il sait qu'un hameau protecteur

1

1

2

Retient loin des dangers les enfants qu'il adore;
Mais ses concitoyens sont sa famille encore....
Rien ne l'arrête; il part, seul, à travers la nuit,
Et cherche les périls comme un autre les fuit...
Il arrive à la mort il voit sa ville en proie.
Hélas!, ce n'étaient plus ces longs accès de joie
Qui fêtaient son retour en des temps plus heureux!
Tout demeure absorbé dans un silence affreux!....
Rotrou, dieu tutélaire, en ces lieux de tristesse,
Son zèle, infatigable au milieu des travaux,

Donne aux uns des secours, aux autres des tombeaux.
Dix fois l'astre nocturne a chassé la lumière,
Sans que le doux sommeil ait touché sa paupière,
Le poids de la fatigue en vain l'accable, en vain
La fièvre de la mort fermente dans son sein;
Il marche, et des héros enfants de sa pensée
La gloire disparaît, par la sienne effacée.
Nul danger, nul effroi ne peut le retenir:
Tant de travaux heureux qu'espérait l'avenir,
Tant d'écrits imparfaits, d'esquisses animées

Qu'en sublimes tableaux le temps eût transformées 1,
Tant de lauriers nouveaux à sa gloire promis,

Il ne regrette rien, s'il meurt pour son pays!

Millevoye, La Mort de Rotrou, poème couronné par l'Institut en 1811.

Venceslas pardonne à son fils Ladislas, et le

....

couronne.

Levez-vous! Une couronne, Prince,

Sous que j'ai quarante ans régi cette province,
Que passera sans tache en un règne futur,
Et dont touts les brillants ont un éclat si pur,
En qui la voix des grands et le commun suffrage
M'ont d'un nombre d'aïeux conservé l'héritage,
Est l'unique moyen que j'ai pu concevoir,
Pour, en votre faveur, désarmer mon pouvoir.
Je ne puis vous sauver tant qu'elle sera mienne 2 :
Il faut que votre tête ou tombe, ou la soutiène;

Il vous en faut pourvoir, s'il vous faut pardonner,

Et punir votre crime, ou bien le couronner.

Transformées, weil écrit und esquisse hier finnverwandt sind, kongruirt das Partizip mit dem legtern.

Tant quelle sera mienne. Die Grammatiker wollen, man solle die Possessivpronomen nicht ohne Artikel gebrauchen, man folle nicht sagen: voilà des livres qui ne sont pas miens. Folgende Bemerkung ist nothwendig: in der alten Sprache gebrauchte man diese Pronomen auf diese Weise N'est mie soe (Rom de Renart v 11640), n'est pas sienne. In neuen Schriftstellern, besonders in Rednern, find gleichfalls Beispiele dieser Art vorhanden. L'bomme en proposant les sentiments d'autrui les rend siens (Nicole, de la Paix V). Je ne comprends pas comment vous pourriez disposer en sa faveur de propriétés qui ne sont pas votres. (Mirabeau, 7. Août 1788.) In diesem Falle find diese Pronomen als Adjektiven gebraucht; fie stehen als Uttribut und nicht als Appofizion. Wir bemerken dabei, daß dieses nur in der höheren Stylistik stattfinden darf, Rotrous Vers ist also. nicht fehlerhaft, wie es Kritiker behaupten wollen.

L'état vous la souhaite, et le peuple m'enseigne,
Voulant que vous viviez, qu'il est las que je règne.
La justice est aux rois la reine des vertus;
Et me vouloir injuste est ne me vouloir plus.

(Lui mettant la couronne sur la tête.)

Régnez! Après l'état, j'ai droit de vous élire,
Et donner en mon fils un père à mon empire.

LADISLAS.

Que faites-vous, grand Roi?

VENCESLAS.

M'appeler de ce nom;

C'est hors de mon pouvoir mettre votre pardon:

Je ne veux plus d'un rang où je vous suis contraire.
Soyez roi, Ladislas, et moi je serai père,
Roi, je n'ai pu des lois souffrir les ennemis,
Père, je ne pourrai faire périr mon fils...
Sans peine je descends de ce degré suprème:
J'aime mieux conserver un fils qu'un diadème.

Rotrou, Wenceslas.

VI. C. MÉZERAY (François, Eudes de).

Mézerah wurde im Jahre 1610, im Dorfe Rye, bei Argentan (Orne) geboren und starb den 10. July 1683. Er war Akademiker und ist durch seine Geschichte Frankreichs so berühmt geworden.

Der Styl dieses Schriftstellers ist nicht immer korrekt, jedoch sind feine Gedanken erhaben und oft mit wigigen Einfällen vermengt. Um ihn als Geschichtschreiber zu beurtheilen, wollen wir A. Thierry reden lassen.

Jugement porté sur l'Histoire de France de Mézeray.

Quand Mézeray publia son Histoire, il y avait dans le public français peu de science, mais une certaine force morale, résultat des guerres civiles qui remplirent tout le seizième siècle et les premières années du dix-septième. Ce public élevé dans des situations graves, ne pouvait plus se contenter des romans d'amour et de féerie que le siècle précédent avait décorés du nom d'Histoire. Il lui fallait sous ce titre non plus de saints miracles ou des aventures chevaleresques, mais des évènements nationaux, et la peinture de cette antique et fatale discorde de la puissance et du bon droit. Mézeray voulut répondre à ce nouveau besoin; il fit de l'histoire une tribune pour plaider la cause du parti politique toujours le meilleur et le plus malheureux, de ce parti` qui jamais ne triomphe et qui, en dépit des plus grands efforts, retombe toujours sous la main des gents en place et des maltôliers.1 Mézeray, pour me servir de ses propres expressions, entreprit de faire souvenir aux hommes des droits anciens et naturels contre lesquels il n'y a point de prescriptions.... Il se piqua d'aimer les vérités qui déplaisent aux grands, et d'avoir la force de les dire; il ne visa point à la profondeur ni même à l'exactitude historique; son siècle n'exigeait pas de lui

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