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AVERTISSEMENT

RESQUE toujours, plus les œuvres d'un auteur classique ont été publiées, plus il est difficile d'en donner une bonne édition. A chaque réimpression le typographe a ajouté de nouvelles fautes aux fautes des impressions précédentes, et l'éditeur des bévues nouvelles aux bévues de ses devanciers. Pour peu qu'ensuite vienne un homme qui réunisse, sans grande critique, tous les travaux antérieurs, il se forme alors un assemblage inextricable d'erreurs dont la constatation est d'autant plus difficile que bon nombre ont pour elles la prescription séculaire.

Corneille avait pourtant pris des mesures qu'il devait croire suffisantes pour se mettre à l'abri contre ce danger. Non content d'avoir revu ses pièces presque à chaque réimpression successive, de leur avoir fait subir les changements qu'exigeaient et les progrès qu'il avait si puissamment concouru à faire faire à la langue, et les convenances auxquelles la scène s'était vu assujettir par lui, il avait donné avec soin, en 1660, 1663, 1664, 1668, quatre éditions de son Théâtre, complet jusqu'à chacune de ces époques, et en 1682, deux ans avant sa mort, une édition définitive de toutes ses œuvres dramatiques.

Dans ses éditions de 1663, 1664, 1668 et de 1682,

il avait exposé en partie1 et suivi un système orthographique que, depuis, l'usage a, dans plus d'un cas, sanctionné. C'est lui qui le premier proposa, entre autres modifications, d'écrire ébloüir, ébranler, il étoit, au lieu de esbloüir, esbranler, il estoit, et d'accentuer sévérité qu'on écrivait severité. L'introduction de ces réformes semblait devoir assurer quelque attention à son système entier, au moins de la part de ses éditeurs. Mais ils n'en tinrent, sans savoir pourquoi, aucun compte, et ceux qui promirent le plus d'être fidèles au texte de l'auteur ne se bornèrent pas à changer sa manière d'écrire les mots; ils lui prêtèrent leur manière de s'exprimer ".

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Voici, quant à nous, sur ce point et quelques

1. Voir ci-après, dans ce même volume, pages 2-6. 2. Ne voulant ni multiplier des citations qui deviendraient fastidieuses pour le lecteur, ni aller chercher nos exemples bien loin, nous nous bornerons à les prendre uniquement dans la préface mise par Corneille en tête des éditions de 1663, 1664, 1668 et 1682, et reproduite ci-après, pages 2 et suivantes :

CORNEILLE a imprimé :

«...Ainfi la prononciation de ces deux lettres ne peut eftre douteufe dans les impreffions où l'on garde le mefme ordre COMME EN celle-cy. >>

«...J'ay donc fait ORTHO

GRAPHER... >>>

«...Ce dernier verbe ne laisse pas d'avoir quelques temps dans fa conjugaifon où il faut luy rendre l'

M. LEFEVRE (T. XII de son édition de 1854-56) imprime :

«...Ainsi la prononciation de ces deux lettres ne peut être douteuse dans les impressions où l'on garde le même ordre QU'EN celle-ci. >>

« ...J'ai donc fait ORTHOGRAPHIER... >>>

«...Ce dernier verbe ne laisse pas d'avoir quelques temps dans sa conjugaison où il faut lui rendre l'

autres, le parti que nous avons adopté pour cette édition :

Nous nous sommes, dans les cas indiqués par Corneille, conformé à son système d'orthographe, dont l'adoption complète par l'usage eût mis souvent les étrangers à même de mieux saisir les différentes nuances de prononciation de notre langue. M. Jannet, dont tous les efforts et les sacrifices tendent à rendre cette jolie Bibliothèque digne de la faveur avec laquelle elle a été accueillie, n'a pas hésité à faire graver des lettres nécessaires pour cette reproduction fidèle, et les longs nous ont, par exemple, permis d'écrire réfister comme Corneille l'écrivait pour faire sentir la valeur distincte de chacun des deux s de ce même mot, et de différencier l'orthographe d'une syllabe commune, ayant des sons différents, comme la syllabe EST dans le vent eft à l'est.

Nous avons ensuite reproduit ses habitudes orthographiques, alors même qu'il ne les avait pas érigées en principes dans ses préfaces:

Ainsi la suppression fréquente d'une des consonnes redoublées (Corneille écrit consone), comme

parcequ'elle allonge la fyllabe; comme à l'impératif arreste qui rime bien avec teste; mais à l'infinitif et en quelques autres où elle ne fait pas cet effet... >>

«...J'ay cru à propos de NOUS fervir de différents caractères, puisque nous

en avons... >>>

«...Le mefme arrive... >>

parce qu'elle allonge la syllabe; comme à l'impératif arreste qui rime bien avec teste; mais à l'infinitif et en quelques autres TEMPS où elle ne fait pas cet effet... >>

«........J'ai cru à propos de ME servir de différents caractères, puisque nous en

avons... »

« ...Le mème CAS arrive...»

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