ment quelques strophes d'un hymne composé à cette occasion par Marie-Joseph Chénier, et mis en musique par Gossec: Ab! ce n'est point des pleurs qu'il est temps de répandre; Du plus illustre des Français. Jadis, par les tyrans cette cendre exilée, Elle vient consacrer ces lieux. Salut, mortel divin, bienfaiteur de la terre; Nos murs t'ont vu naître et mourir. Ton souffle créateur nous fit ce que nous sommes : Toi qui les as surpassés tous. Le flambeau vigilant de ta raison sublime Qu'ils creusaient au pied des autels. Sur cent tons différents ta lyre enchanteresse, ensonges brillants inventés par la Grèce La Barre, Jean Calas , venez, plaintives ombres, Joignez-vous au triomphateur. Chantez, peuples pasteurs, qui des monts helvétiques Portent sa gloire jusqu'aux cieux. Fils d'Albion, chantez; Américains, Bataves, Voltaire est le concitoyen. A la même époque, on reprit au théâtre français les Muses rivales, ou l'Apothéose de Voltaire, piéce dramatique de La Harpe, déjà jouée en 1779 par les comédiens français du palais des Tuileries. L'auteur avait ajouté à la scène huitième ces vers, qui ne se retrouvent pas dans ses OEuvres choisies, publiées par M. Petitot, non plus que le Dithyrambe aux mânes de Voltaire, couronné en 1779 par l'académie française: nous les tirons d'une édition in-18, publiée par l'auteur luimême en 1792. C'est Apollon qui parle: Pourriez-vous bien le croire? On lui défend d'y reposer. Je vous vois tous frémir de cet indigne outrage, Nous plaignons un si lâche et si triste esclavage.... Rassurez-vous, il doit finir. Le destin à mes yeux rapproche l'avenir; L'avenir m'est présent, et déjà se consomme L'ouvrage que long-temps prépara ce grand homme. Vous, enfants du génie, admirez son pouvoir. Voltaire a, le premier, affranchi la pensée ; Il instruisit la France, à le lire empressée. La France aux nations a montré leur devoir. Tous les droits sont remis dans un juste équilibre : Le peuple est éclairé, l'homme pense, il est libre. Il rejette ses fers dès qu'il connaît ses droits ; Il n'a plus de tyrans dès qu'il connaît des lois. La France est délivrée; elle peut étre juste. Aux talents bienfaiteurs elle ouvre un temple auguste Où ces amis du ciel et de l'humanité Reposent dans la gloire et l'immortalité. Quel contraste ce jour à nos regards expose ! L'outrage fut honteux : que le retour est beau ! Celui qu'on privait d'un tombeau, Voltaire obtient l'apothéose : La valeur, la beauté, les arts, Jouissez encore un moment. Il voulut le briser : agitez sur sa tête Le bonnet de la liberté! Que le Despotisme pâlisse! Les restes de Voltaire ne sont plus dans la place honorable que l'admiration et la reconnaissance publique lui avaient consacrée. DU JOURNAL DU COMMERCE, DU 15 FÉVRIER 1819. La loge d'adoption attachée à celle des Amis des Arts et des Lettres a été installée le mardi 9 février 1819, dans une fête qui a eu lieu le soir à l'hôtel de Villette. Cette loge a pris le nom de Belle et Bonne, que Voltaire avait, comme on le sait, donné à sa nièce adoptive, madame de Villette. La même couronne que reçut ce grand poéte à la comédie française, des mains de Belle et Bonne, était exposée aux yeux des amis de la liberté, de la tolérance, et de la philosophie; et chacun se disait, Une feuille de cette couronne suffirait à ma gloire. La rivale de Clairon, mademoiselle Duchesnois, a récité devant le buste du défenseur des Calas l'ode de Marmontel, à laquelle l'auteur de la tragédie de Bélisaire avait ajouté les deux strophes suivantes, dont l'heureux à-propos a été vivement senti par toute l'assemblée : |