CHOIX DE PIECES JUSTIFICATIVES. VERS DE S. A. S. LE PRINCE DE CONTI, A M. DE VOLTAIRE. 1718. Pluton, ayant fait choix d'une jeune pucelle, Une marque de son amour, Commanda qu'une fête et superbe et galante Il fait assembler à sa cour Tous ceux dont le bon goût et la délicatesse Parmi tous ces hommes fameux, Chacun à réussir travailla de son mieux. Pour remporter le prix, et Corneille et Racine Uning leur veine divine: Chaque auteur en vain disputa, Et voulut gagner le suffrage Du dieu qui demandait l'ouvrage ; Bien que des deux esprits la pièce l'emportât, De tant d'auteurs la cohorte nombreuse De remporter l'honneur de l'applaudissement. Sans se donner du mouvement Rappelaient l'histoire passée Du temps où de la France ils étaient l'ornement. Ne pouvait rien trouver de bon. Ce malheur leur causait une tristesse extrême. Ils connaissaient que dans Paris l'on aime D'un spectacle nouveau les doux amusements; Qu'abandonnés par Melpomene, Les auteurs n'avaient plus ces nobles sentiments Depuis leur séjour en ces lieux, Par ses talents et sa science. Pour réparer les maux du théâtre obscurci, Ce démon fut par eux choisi. Ils lui font prendre forme humaine; Sous le nom d'Arouet cet esprit fut conduit. LETTRE DE L'ABBÉ DESFONTAINES A M. DE VOLTAIRE. Ce 31 mai 1724. Je n'oublierai jamais, monsieur, les obligations infinies que je vous ai. Votre bon cœur est encore bien au-dessus de votre esprit, et vous êtes l'ami le plus essentiel qui ait jamais été. Le zèle avec lequel vous m'avez servi me fait en quelque sorte plus d'honneur que la malice et la noirceur de mes ennemis ne m'a causé d'affront par l'indigne traitement qu'ils m'ont Ces vers font autant d'honneur au prince de Conti qu'en a fait à Lamotte son approbation d'OEdipe. Ils annoncèrent tous deux à la France un digue successeur de Corneille et de Racine, et jamais prophétie ne fut mieux accomplie. fait souffrir. Il faut se retirer pendant quelque temps. Fallax infamia terret. J'ai une lettre de cachet qui m'exile à trente lieues de Paris. C'est avec plaisir que je vais chercher la solitude; mais je suis bien fâché que cette retraite me soit ordonnée. C'est un reste de triomphe pour les malheureux auteurs de ma disgrace. Je consens d'aller en province, et j'y vais très volontiers. Mais tâchez, monsieur, de faire en sorte que l'ordre du roi soit levé par une autre lettre de cachet en cette forme: « Le roi, informé de la fausseté de Faccusation in« tentée contre le sieur abbé Desfontaines, consent qu'il demeure à Paris. » c Si vous obtenez cet ordre de M. de Maurepas, c'est un coup essentiel. Au surplus, je promets, parole d'honneur, à M. de Maurepas de m'en aller incessamment, et de ne point revenir à Paris qu'après lui en avoir demandé la permission secrètement. Voilà, mon cher ami, ce que je vous prie à présent d'obtenir pour moi. Je vous aurai encore une obligation infinie de ce nouveau service. C'est, à mon gré, ce qu'on peut faire de plus simple pour réparer le scandale et l'injustice, en attendant que je puisse faire mieux, et que j'aie les lumières nécessaires pour découvrir les ressorts cachés de l'horrible intrigue de mes ennemis. Malgré la noirceur de l'accusation et le penchant du public à croire tous les accusés coupables, j'ai la satisfaction de voir les personnes même indifférentes prendre mon parti. Les Nadal, les Danchet, les Depons, les Fréret, sont les seuls, dit-on, qui traitent ma personne comme toute ma vie je trai terai leurs infames ouvrages et leur indigne caractère. Genus irritabile vatum. J'ai un plan d'apologie qui sera beau et curieux, et que je travaillerai à la campagne. Je suis trop connu dans le monde pour qu'il convienne à un homme comme moi de me taire après un si exécrable affront; et je le ferai de façon que j'aurai l'honneur de le présenter à M. de Maurepas pour le prier de me permettre de le faire paraître. On y verra tout ce qui m'est arrivé de malheureux, et mes malheurs toujours causés par des gens de lettres, surtout l'histoire de ma sortie des jésuites. Adieu, mon cher ami; je me reco1nmande à vous. LETTRE DU SIEUR DEMOULIN A M. DE VOLTAIRE. A Paris, le 12 d'auguste 1738. Nous en conserve Monsieur, nous vous remercions très humblement de toutes vos bontés, et des facilités que vous voulez bien nous accorder pour vous payer. rons un précieux souvenir, et nous vous en marquerons notre vive reconnaissance dans toutes les occasions. Votre créance est bien assurée; et nous vous prions d'être persuadé que nous l'acquitterons le plus tôt qu'il nous sera possible. Je suis en avance dans plusieurs |