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CLITANDRE.

Quoi! vous vous opposez à ma félicité!
Et, lorsqu'à mon amour je vois chacun se rendre...

HENRIETTE.

Je sais le peu de bien que vous avez, Clitandre;
Et je vous ai toujours souhaité pour époux,
Lorsqu'en satisfaisant à mes vœux les plus doux
J'ai vu que mon hymen ajustait vos affaires.
Mais lorsque nous avons les destins si contraires,
Je vous chéris assez, dans cette extrémité,
Pour ne vous charger point de notre adversité.

CLITANDRE.

Tout destin avec vous me peut être agréable; Tout destin me serait sans vous insupportable.

HENRIETTE.

L'amour, dans son transport, parle toujours ainsi.
Des retours importuns évitons le souci.
Rien n'use tant l'ardeur de ce nœud qui nous lie,
Que les fâcheux besoins des choses de la vie;
Et l'on en vient souvent à s'accuser tous deux
De tous les noirs chagrins qui suivent de tels feux.
ARISTE, à Henriette.

N'est-ce que le motif que nous venons d'entendre
Qui vous fait résister à l'hymen de Clitandre?

HENRIETTE.

Sans cela, vous verriez tout mon cœur y courir; Et je ne fuis sa main que pour le trop chérir.

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J'en ai la joie au cœur,
Par le chagrin qu'aura ce lâche déserteur.
Voilà le châtiment de sa basse avarice,
De voir qu'avec éclât cet hymen s'accomplisse.
CHRYSALE, à Clitandre.
Je le savais bien, moi, que vous l'épouseriez.
ARMANDE, à Philaminte.
Ainsi donc à leurs vœux vous me sacrifiez?
PHILAMINTE.

Ce ne sera point vous que je leur sacrifie;
Et vous avez l'appui de la philosophie,
Pour voir d'un œil content couronner leur ardeur.
BÉLISE.

Qu'il prenne garde au moins que je suis dans son cœur:
Par un prompt désespoir souvent on se marie,
Qu'on s'en repent après tout le temps de la vie.
CHRYSALE, au notaire.
Allons, monsieur, suivez l'ordre que j'ai prescrit,
Et faites le contrat ainsi que je l'ai dit.

FIN DES FEMMES SAVANTES.

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TROISIÈME ENTRÉE DE BALLET.

Les bergers et bergères du côté de Tircis dansent autour de lui, sur une ritournelle, pour exprimer leurs applaudissements.

DORILAS.

Le fondre menaçant qui perce avec fureur
L'affreuse obscurité de la nue enflammée

Fait, d'épouvante et d'horreur,
Trembler le plus ferme cœur;
Mais, à la tête d'une armée,

LOUIS jette plus de terreur.

QUATRIÈME ENTRÉE DE BALLET.

Les bergers et bergères du côté de Dorilas font de même que

les autres.

TIRCIS.

Des fabuleux exploits que la Grèce a chantés,
Par un brillant amas de belles vérités,

Nous voyons la gloire effacée;
Et tous ces fameux demi-dieux

Que vante l'histoire passée

Ne sont point à notre pensée

Ce que LOUIS est à nos yeux.

CINQUIÈME ENTRÉE DE BALLET.

Les bergers et bergères du côté de Tircis font encore la même

chose.

DORILAS.

LOUIS fait à nos temps, par ses faits inouïs,

Croire tous les beaux faits que nous chante l'histoire Des siècles évanouis;

Mais nos neveux, dans leur gloire,

N'auront rien qui fasse croire

Tous les beaux faits de LOUIS.

SIXIÈME ENTRÉE DE BALLET.

Les bergers et bergères du côté de Dorilas font encore de

même.

SEPTIÈME ENTRÉE DE BALLET.

Les bergers et bergères du côté de Tircis et de celui de Dorilas se mêlent et dansent ensemble.

SCÈNE IV.

FLORE, PAN; DEUX ZÉPHYRS dansants; CLIMÈNE, DAPHNÉ, TIRCIS, DORILAS; FAUNES dansants; BERGERS ET BERGÈRES chantants et dansants.

Avec ses chants les plus beaux,
N'entreprendrait pas de dire?

C'est donner trop d'essor au feu qui nous inspire,
C'est monter vers les cieux sur des ailes de cire,
Pour tomber dans le fond des eaux.

Pour chanter de LOUIS l'intrépide courage,

Il n'est point d'assez docte voix,

Point de mots assez grands pour en tracer l'image : Le silence est le langage

Qui doit louer ses exploits.

Consacrez d'autres soins à sa pleine victoire;
Vos louanges n'ont rien qui flatte ses désirs :
Laissez, laissez là sa gloire;

Ne songez qu'à ses plaisirs.

CHOEUR.

Laissons, laissons là sa gloire;
Ne songeons qu'à ses plaisirs.

FLORE, à Tircis et à Dorilas. Bien que pour étaler ses vertus immortelles La force manque à vos esprits,

Ne laissez pas tous deux de recevoir le prix. Dans les choses grandes et belles,

Il suffit d'avoir entrepris.

HUITIÈME ENTRÉE DE BALLET.

Les deux zéphyrs dansent avec deux couronnes de fleurs à la main, qu'ils viennent donner ensuite aux deux bergers.

CLIMÈNE ET DAPHNÉ, donnant la main à leurs amants. Dans les choses grandes et belles,

Il suffit d'avoir entrepris.

TIRCIS ET DORILAS.

Ah! que d'un doux succès notre audace est suivie!

FLORE ET PAN.

Ce qu'on fait pour LOUIS, on ne le perd jamais.
CLIMÈNE, DAPHNÉ, TIRCIS, DORILAS.
Au soin de ses plaisirs donnons-nous désormais.
FLORE ET PAN.

Heureux, heureux qui peut lui consacrer sa vie!

CHOEUR.

Joignons tous dans ces bois

Nos flûtes et nos voix :

Ce jour nous y convie,

Et faisons aux échos redire mille fois :

LOUIS est le plus grand des rois;

Heureux, heureux qui peut lui consacrer sa vie !

NEUVIÈME ENTRÉE DE BALLET.

Faunes, bergers et bergères, tous se mêlent, et il se fait entre eux des jeux de danse, après quoi ils se vont préparer pour la comédie.

PAN.

Laissez, laissez, bergers, ce dessein téméraire;
Hé! que voulez-vous faire?

Chanter sui vos chalumeaux
Ce qu'Apollon sur sa lyre,

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AUTRE PROLOGUE.

UNE BERGÈRE chantante.

Votre plus haut savoir n'est que pure chimère,

Vains et peu sages médecins;

Vous ne pouvez guérir, par vos grands mots latins, La douleur qui me désespère.

Votre plus haut savoir n'est que pure chimère.

Hélas! hélas ! je n'ose découvrir

Mon amoureux martyre
Au berger pour qui je soupire,
Et qui seul peut me secourir.
Ne prétendez pas le finir,

Ignorants médecins, vous ne sauriez le faire :
Votre plus haut savoir n'est que pure chimère.
Ces remèdes peu sûrs, dont le simple vulgaire
Croit que vous connaissez l'admirable vertu,
Pour les maux que je sens n'ont rien de salutaire;
Et tout votre caquet ne peut être reçu

Que d'un MALADE IMAGINAIRE.

Votre plus haut savoir n'est que pure chimère,
Vains et peu sages médecins, etc.

Le théâtre change, et représente une chambre.

ACTE PREMIER.

SCÈNE PREMIÈRE.

ARGAN, assis, une table devant lui, comptant avec des jetons les parties de son apothicaire. Trois et deux font cinq, et cinq font dix, et dix font vingt; trois et deux font cinq. « Plus, du vingtquatrième, un petit clystère insinuatif, préparatif « et rémollient, pour amollir, humecter et rafraîchir « les entrailles de monsieur. » Ce qui me plaît de monsieur Fleurant, mon apothicaire, c'est que ses parties sont toujours fort civiles. « Les entrailles de monsieur, trente sous. » Oui; mais, monsieur Fleurant, ce n'est pas tout que d'être civil; il faut être aussi raisonnable, et ne pas écorcher les malades. Trente sous un lavement! Je suis votre serviteur, je vous l'ai déjà dit; vous ne me les avez mis dans les autres parties qu'à vingt sous; et vingt sous en langage d'apothicaire, c'est-à-dire dix sous; les voilà, dix sous. « Plus, « dudit jour, un bon clystère détersif, composé avec

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Le premier prologue ne pouvait servir longtemps, puisque, comme on le sait, la fameuse conquête qu'il célèbre fut reprise au bout de l'année. C'est peut-être à cause de cela que Molière a composé cet autre prologue. Il a, sur le premier, l'avantage d'être infiniment plus court, et d'annoncer le sujet de la comédie. (A.)

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<< catholicon double, rhubarbe, miel rosat, et autres, << suivant l'ordonnance, pour balayer, laver et nettoyer le bas-ventrede monsieur, trente sous. » Avec votre permission, dix sous. « Plus, dudit jour, le soir, « un julep hépatique, soporatif et somnifère, composé « pour faire dormir monsieur, trente-cinq sous. » Je ne me plains pas de celui-là, car il me fit bien dormir. Dix, quinze, seize et dix-sept sous six deniers. « Plus « du vingt-cinquième, une bonne médecine purga« tive et corroborative, composée de casse récente << avec séné levantin, et autres, suivant l'ordonnance << de monsieur Purgon, pour expulser et évacuer la << bile de monsieur, quatre livres. » Ah! monsieur Fleurant, c'est se moquer : il faut vivre avec les malades. Monsieur Purgon ne vous a pas ordonné de mettre quatre francs. Mettez, mettez trois livres, s'il vous plaît. Vingt et trente sous. « Plus, dudit jour, << une potion anodine et astringente, pour faire re« poser monsieur, trente sous. » Bon, dix et quinze sous. « Plus, du vingt-sixième, un clystère carminatif, pour chasser les vents de monsieur, trente « sous. » Dix sous, monsieur Fleurant. « Plus, le clys«tère de monsieur, réitéré le soir, comme dessus, << trente sous. >> Monsieur Fleurant, dix sous. « Plus, «< du vingt-septième, une bonne médecine, composée << pour hâter d'aller, et chasser dehors les mauvaises << humeurs de monsieur, trois livres. » Bon, vingt et trente sous; je suis bien aise que vous soyez raisonnable. « Plus, du vingt-huitième, une prise de petit<< lait clarifié et dulcoré, pour adoucir, lénifier, tempérer et rafraîchir le sang de monsieur, vingt sous.. Bon, dix sous. << Plus, une potion cordiale et préservative, composée avec douze grains de bézoard, sirop de limon et grenades, et autres, suivant l'or« donnance, cinq livres. » Ah! monsieur Fleurant, tout doux, s'il vous plaît; si vous en usez comme cela, on ne voudra plus être malade : contentez-vous de quatre francs; vingt et quarante sous. Trois et deux font cinq, et cinq font dix, et dix font vingt. Soixante et trois livres quatre sous six deniers. Si bien donc que, de ce mois, j'ai pris une, deux, trois, quatre, cinq, six, sept et huit médecines; et un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, dix, onze et douze lavements; et l'autre mois, il y avait douze médecines et vingt lavements. Je ne m'étonne pas si je ne me porte pas si bien ce mois-ci que l'autre. Je le dirai à monsieur Purgon, afin qu'il mette ordre à cela. Allons, qu'on m'ôte tout ceci. ( Voyant que personne ne vient, et qu'il n'y a aucun de ses gens dans sa chambre.) Il n'y a personne. J'ai beau dire: on me laisse toujours seul; il n'y a pas moyen de les arrêter ici. (Après avoir sonné une sonnette qui est sur la table.) Ils n'entendent point, et ma sonnette ne fait pas assez de bruit. Drelin drelin, drelin. Point

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