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pace dans lequel les astronomes conçoivent qu'une planète accomplit son cours. De là la différence au figuré.

Le cercle est petit, la sphère grande. « L'histoire de Louis XIV me paraît un cercle trop étroit; je trouve que Frédéric élargit la sphère de mes idées. » VOLT. « Nous voilà réduits à un bien petit cercle relativement à l'existence des choses; mais que ce cercle forme encore une sphère immense pour la mesure de l'esprit d'un enfant! J. J.

D

α

« Ce n'est point en resserrant la sphère de la nature et en la renfermant dans un cercle étroit qu'on pourra la connaître.» BUFF. « Dans le cercle étroit que l'âme parcourt, son activité lui semble vaine; un désir invincible la presse de s'élancer vers des régions élevées, vers des sphères plus libres. » STAËL. « L'art d'écrire en prose embrasse toute la sphère philosophique des idées ; et, quand on condamne des hommes de lettres à tourner dans le cercle des madrigaux et des idylles, on leur donne aisément le vertige de la flatterie. » ID. Sans l'histoire, resserrés dans le cercle étroit de nos connaissances particulières, nous demeurons toujours dans une espèce d'enfance (R LL.); Voltaire cultivait les lettres et les sciences auprès de Mme du Châtelet, capable de les rassembler dans la sphère de ses travaux et de ses méditations (LAH.).

En parlant d'un homme, on ne dit pas, son cercle, mais le cercle de ses idées, le cercle dans lequel il est retenu, renfermé, resserré. « La plupart des hommes vieillissent dans un petit cercle d'idées qu'ils n'ont pas tirées de leur fonds. » VAUV. «Maintenez toujours vos enfants dans le cercle étroit des dogmes qui tiennent à la morale.»> J. J. « Après avoir parcouru le cercle étroit de leur vain savoir.» ID. « Pourquoi nous resserrer dans le cercle étroit d'une petite société isolée ? » VOLT. Mais on dit bien la sphère d'un homme ou d'une classe d'hommes, parce qu'on les considère comme des astres qui se meuvent dans des orbites plus ou moins grandes. « Tant que les hommes naîtront avec peu d'esprit et beaucoup d'envie d'en avoir, ils ne pourront jamais s'arrêter dans leur sphère.» VAUV. « M. le président de Lamoignon était d'un mérite supérieur, à le prendre même dans la sphère d'un homme de lettres. » D'OL. « Cicéron assure que la sphère de l'orateur est aussi étendue que celle du poëte. >> MARM.

CERCUEIL, BIÈRE. Espèce de caisse dans laquelle on met un corps mort.

Cercueil, anciennement sarcueil, est dérivé par les uns du latin arca, dont le sens est le même, et par les autres du grec σάρξ, σαρκός, chair, d'ou se serait formé dans le latin du moyen âge sarcus, sarcueil, cercueil, c'est-à-dire proprement caisse à chair. Bière, au contraire, ne tire pas son origine d'une langue savante il paraît venir de l'allemand bahre, civière, brancard, bière, en latin feretrum.

De là résulte entre les deux termes une grande et incontestable différence.

Cercueil est plus noble que bière : il signifie quelque chose de plus distingué, quelque chose d'orné ou de précieux quant à la matière; c'est d'ailleurs le seul mot qui convienne au discours

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soutenu et qui se prenne au figuré. « On voyait le
corps du jeune Hippias étendu, qu'on portait dans
un cercueil orné de pourpre, d'or et d'argent.
FEN. « C'est en vain que l'on enrichit de marbre
et de bronze les cercueils des grands de la terre. »
Boss. « Alexandre fit embaumer le corps de Da-
rius et orner son cercueil avec une magnificence
royale. » ROLL. « Phraate fit chercher parmi les
morts le corps d'Antiochus, et le fit mettre dans
un cercueil d'argent. » ID. « On prétend que la
tête de don Carlos n'est séparée du corps, dans les
tombes de l'Escurial, que parce que la caisse de
plomb qui renferme le corps est trop petite.... Il
était aisé de faire un cercueil plus long. » VOLT.
Penses-tu que plus vieille en la maison céleste
Elle eût eu plus d'accueil,

Ou qu'elle eût moins senti la poussière funeste
Et les vers du cercueil?

(Consolation à M. du Perrier). MAɩH.

« Sa fille passa du berceau au cercueil. » VOLT.
Rhodes, des Ottomans ce redoutable écueil,
De tous ses défenseurs devenu le cercueil. RAC.
Des antiques héros la gloire est au cercueil. CHÉN.
Molière admis à peine aux honneurs du cercueil. ID.
As-tu bien pu penser, quand tu cesses de vivre,
Qu'au cercueil Roméo put tarder à te suivre? Duc.
Bière est le mot commun: il exprime quelque
chose de simple, de modeste, de vil même, et on
s'en sert de préférence dans le langage ordinaire,
en conversation, dans les fables, dans la comédie
et dans le style badin.

Au pied de cet autel de structure grossière,
Git sans pompe, enfermé dans une vile bière,
Le plus savant mortel qui jamais ait écrit.

(Epitaphe de M. Arnauld). BOIL.

« L'homme civil naît, vit et meurt dans l'esclavage à sa naissance on le coud dans un maillot; à sa mort on le cloue dans une bière. » J. J. « Elle a fini par une économie, ou plutôt par une avarice qui lui fit marchander sa bière, la veille de sa mort. » HEN. « Cette digne religieuse sentit de loin son heure approcher; elle se condamna au silence; elle fit porter sa bière dans sa chambre. DID.

Son fils, qui jette tout, à qui, dans sa misère, Manquera mème un drap pour entrer dans sa bière.

Un mort s'en allait tristement S'emparer de son dernier gite.... Notre défunt était en carrosse porté,

Bien et dûment empaqueté,

DUC.

Et vêtu d'une robe, hélas ! qu'on nomme bière. LAF.
La bière est un séjour par trop mélancolique. MOL.
Le procès est gagné, la tante est dans la bière;
Orphise ma maitresse est sa seule héritière. DEST.
Mais si quelque jour, moi, chetif,
J'allais passer le noir esquif,

Je n'aurais qu'une vile bière. VOLT.

« Considérez toutes ces ombres, dit le boiteux à l'écolier; celles qui ont des mausolées sont confondues avec celles qui n'ont qu'une misérable bière pour tout monument.... Savez-vous bien quelle est cette ombre-là? C'est celle d'un vieux notaire, lequel a eu la vanité de se faire enterrer dans un cercueil de plomb; ce qui a choqué tous les autres mânes de bourgeois dont les cadavres

ont été mis en terre ici plus modestement. » | par conséquent entre agreste et champêtre une

LES.

CHAMPÊTRE, RUSTIQUE, AGRESTE. Qui est des champs, qui appartient ou se rapporte aux champs; les champs sont appelés en latin campi, rura et agri.

Champêtre et rustique d'abord se ressemblent beaucoup, mais sans cependant équivaloir l'un à l'autre autre chose est, par exemple, la vie champêtre, et autre chose la vie rustique.

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très-grande distance. « Agreste n'est pas synonyme de champêtre. Agreste emporte avec lui l'idée de sauvage; champêtre, l'idée de la culture et des agréments qui l'accompagnent. » Littré. « Voyez ces plages désertes, ces tristes contrées où l'homme n'a jamais résidé... ; ce sont des végétaux agrestes, des herbes dures, épineuses....>> BUFF. Il ne vous en a coûté que de la négligence. Ce lieu est charmant, il est vrai, mais Champêtre, latin campestris, vient de campus, agreste et abandonné; je n'y vois point de trala plaine, la partie des terres qui est cultivée et vail humain. » J. J. « Les Russes mangent sans fertile par opposition aux montagnes et aux ro- distinction et sans apprêt les productions les plus chers qui ne le sont pas. Rustique, rusticus, a été agrestes de la campagne. » BERN. Des poires formé de rus, qui signifie la campagne ou plutôt rêches et des fruits agrestes, tels que la nature le village et les villageois par opposition à la les produit dans les montagnes pour l'apre paville. On dit proprement un lieu champêtre (MON-lais des sangliers. » ID. Le second lieu agreste TESQ., MOL.), et une maison rustique (VOLT., J. J., que j'ai vu était dans la Finlande russe : nous BUFF.). Champêtre est plus relatif à la campagne voyagions entre la Suède et la Russie, dans des même et fait concevoir quelque chose de riant et pays si peu fréquentés, que les sapins avaient d'agréable; rustique regarde plutôt les gens de la poussé dans le grand chemin. » ID. « Toute la campagne (rustici), les paysans, ce qu'ils sont et campagne qui environne la petite ville d'Evandre ce qu'ils font. Vous direz mieux un domaine est encore inculte et sauvage; des troupeaux bêchampêtre, et une cabane ou un toit rustique; lent ou mugissent encore dans ces lieux agrestes.» des fleurs ou des oiseaux champêtres, et des meu- DEL. Relativement à rustique, et en parlant des bles ou des outils rustiques; des plaisirs champê- personnes, agreste garde son caractère distinctif. tres (LAF.), et des travaux rustiques (Boss., Le rustique manque de politesse, c'est un paysan, VOLT.); les amusements (D'AG.), les agréments un lourdaud; l'agreste manque de civilisation ou (LES.) de la vie champêtre, et les occupations de culture, c'est un homme des champs, il est (Boss., D'AG.) ou les exercices (MARM.) de la vie brut et presque féroce. « On remarque toujours en rustique. Une promenade faite dans les champs est Marius quelque chose d'agreste et de féroce. » une promenade champêtre (J. J.); l'éducation ROLL. « Un pasteur brusque et grossier établi sur qu'on reçoit au village est une éducation rustique un peuple encore plus agreste et plus féroce que (ROLL.) promenade rustique et éducation cham-lui-même. » MASS. Rustique se dit plutôt des parpêtre seraient des façons de parler vicieuses. Un ticuliers et a plus de rapport aux manières; asile champêtre (J. J.) se trouve au milieu des ar- agreste convient surtout à l'égard des peuples ou bres et de la verdure; il y avait à Rome des tri-quand il est question des meurs, de la manière bus rustiques et des tribus urbaines (J. J.). Dans l'antiquité, les divinités champêtres présidaient aux biens de la terre, et les divinités rustiques Un peuple regardé alors comme barbare, et qui, protégeaient les laboureurs et les bergers moins malheureux que les Français, était cepen<< Quand la Renommée eut annoncé aux divinités dant beaucoup plus agreste. » ID. «< Avec des rustiques et aux bergers de Cynthe le départ de mœurs plus agrestes (que celles des Spartiates), Lycon, tous ces bois retentirent de plaintes amè-les habitants des villes de la Laconie ont une vares...; les divinités mêmes les plus champêtres ne furent pas insensibles à cette perte; les dryades sortaient des troncs creux des vieux chênes pour regretter Lycon. » FÉN. A la rigueur, champêtre peut servir à qualifier une musique et une flûte, quand elles se font entendre dans les champs; mais est-il question du chant ou de la voix des habitants de la campagne, rustique est la seule épithète qui convienne : « Le roi veut voir vos bergers danser au son d'une flûte champêtre, y mêler leurs voix rustiques et chanter les louanges de celui qui leur aura rendu la joie et la sérénité. » LABR.

A peine est-il besoin d'ajouter que rustique, à la différence de champêtre, est applicable aux personnes, propre à en faire connaître l'air, les manières, l'humeur, le langage. « L'on voit des gens rustiques.... » LABR.

Agreste, latin agrestis, a pour racine ager, qui désigne la campagne par opposition aux maisons, aux lieux habités. De là vient qu'agreste emporte l'idée de quelque chose de sauvage, et qu'il y a

d'agir. Dans les Lois de Minos, Teucer parle de son projet « de civiliser l'agreste Cydonie. » VOLT.

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leur moins brillante, » BARTH.

CHANSONS, SORNETTES, BALIVERNES, BILLEVESÉES, FARIBOLES. Mots dont on se sert familièrement, le plus souvent au pluriel, pour signifier des propos oiseux ou frivoles.

Les chansons n'ont rien de sérieux; ce sont, en fait de discours, des bagatelles, quelque chose qui ne mérite pas plus attention que si on chantait. «En voilà trop sur des chansons, revenons à de choses plus sérieuses. » J. J.

Ce que je vous dis là ne sont pas des chansons, Et vous devez du cœur dévorer ces leçons. MOL. Dans le Tartufe, Dorine, ayant entendu parler du mariage de Tartufe avec Mariane, traite cela de pure bagatelle, de plaisante histoire, de chansons; mais le père de Mariane, Orgon, soutient qu'il ne raille pas, que ce n'est point un jeu.

Les sornettes, du vieux français sorne, le commencement de la nuit, latin serum, ressemblent aux contes qu'on fait pendant les veillées : elles n'ont rien de sensé; ce n'est pas seulement, comme les chansons, quelque chose de peu digne

d'attention, c'est quelque chose d'extravagant. | Sosie, de la quitter sans lui dire un seul mot de « Je vous envoie une fête (le Temple de la gloire, douceur. Mercure lui répond :

opéra), que j'ai voulu rendre raisonnable, décente, et à qui j'ai retranché exprès les fadeurs et les sornettes de l'opéra. » VOLT.

Cherchez ailleurs vos dettes;

Et je n'ai pas le temps d'entendre vos sornettes:
Vous êtes un vieux fou. REGN.

Boileau n'estime sur le théâtre que les auteurs qui plaisent par la raison seule; mais quant aux faux plaisants à équivoques grossières, il les envoie Amuser le Pont Neuf de leurs sornettes fades.

Les balivernes, quelle que soit l'étymologie du mot, n'ont rien d'amusant; elles sont particulièrement ennuyeuses. Ce sont, dit Condillac, les propos d'un homme qui parle pour parler; elles sont l'effet du désœuvrement, et ne peuvent intéresser personne. « Je serais ici il y a une heure, s'il n'y avait pas de fàcheux au monde.... C'est là le fléau des petites villes que ces grands nouvellistes qui cherchent partout où répandre les contes qu'ils ramassent. Celui-ci m'a montré d'abord deux feuilles de papier pleines d'un grand fatras de balirernes. » MOL. « Pendant qu'on est à la comédie italienne, moi qui n'aime point du tout ces pantalons étrangers, je me renferme dans ma chambre pour vous mander les balivernes de ce pays-ci. VOLT. « Pardonnez-moi. Comment peut-on écrire quatre pages sur ces baliternes ? Cela est honteux. » ID.

Les billeresées, c'est-à-dire, suivant les étymologistes, les balles soufflées, n'ont rien de solide, sont creuses. Ce mot se dit spécialement là où on prétend être profond, en matière de doctrines, de métaphysique ou de théologie. Dans le Festin de Pierre, Sganarelle dit de son maître, don Juan: « C'est un chien, un démon, un Turc, un hérétique qui ne croit ni ciel, ni enfer, ni diable..., qui traite de billevesées tout ce que nous croyons. » MOL. « Il ne s'est point engagé dans les belles disputes scholastiques, que notre ami appelle de vénérables billevesées. » VOLT. « O Platon et Descartes, Bayle a exercé toute la sagacité de sa dialectique sur vos antiques billevesées. » ID. « Il s'élève des guerres intestines pour des billevesées incompréhensibles de pure métaphysique.» ID. « Toutes les billevesées de la métaphysique ne valent pas un argument ad hominem. » DID. Des billeresées théologiques, sorboniques (D'AL.).

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Diantre où veux-tu que mon esprit
T'aille chercher des fariboles? MOL.
Ce sont là des billets qu'il faut négocier,
Et non pas vos poulets, vos chiffons de papier,
Où l'amour se distille en de fades paroles,

Et qui ne sont partout pleins que de fariboles. REGN.

CHANTEUSE, CANTATRICE. Femme qui chante, selon les règles de la musique. qui forme avec la voix une suite de sons variés

Chanteuse, du verbe français chanter, ou qui tout au moins le rappelle, est un mot commun et qui n'exprime rien que d'ordinaire. Mais cantatrice, du verbe latin cantare, et copié exactement du substantif latin cantatrix, de même signification, est un terme relevé et qui suppose quelque chose de distingué ou d'éminent dans la personne à laquelle on l'applique.

On dit une chanteuse des rues, d'atelier, de salon; une chanteuse des choeurs; une chanteuse de peu de mérite. << M. Poinsinet reparaît sur la scène à l'occasion de l'escroquerie dont l'accuse Mlle Duprat, chanteuse des chœurs de l'Opéra. » BACH. << Mlle Carton, chanteuse des choeurs et d'un talent fort médiocre. » ID. Mais on n'appelle cantatrice qu'une femme qui chante sur le théâtre et qui s'y montre habile dans son art. «< Mme Favart a été longtemps l'héroïne des Italiens.... On a beaucoup applaudi au début de Mlle Piccinelli. C'est une cantatrice du premier ordre. » BACH.

Chanteuse sert aussi à marquer l'emploi indépendamment de la manière dont on le remplit, et cantatrice le talent indépendamment de l'emploi dans lequel on le développe. Telle femme à tel théâtre est première ou deuxième chanteuse, forte chanteuse ou chanteuse légère; telle femme excelle comme cantatrice à tel theatre. « La comédie italienne vient de perdre Mlle Véronèse. C'était une très-grande actrice. On n'y voit plus en femme que des cantatrices, et l'on sera obligé de renoncer absolument aux pièces italiennes qu'elle soutenait par son jeu. » BACH.

Il est à remarquer, d'ailleurs, que cantatrice nous étant venu du latin par l'italien s'est dit d'abord uniquement et doit peut-être encore se dire spécialement d'une chanteuse italienne. «Ah! ah! cette cantatrice italienne? eh bien! qu'en dites-vous? Ah! monsieur, quelle voix! Nos chanteuses de France paraissent ensuite bien misérables. >> FLOR.

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CHAPELAIN, AUMÔNIER. Ecclésiastique attaché à un grand à qui il dit la messe.

Les fariboles, de même origine peut-être que fable, c'est-à-dire de fari, parler, n'ont rien de vrai ; c'est quelque chose de fabuleux, ce sont des menteries, et assez souvent des menteries amou- Le chapelain, voué au service de la chapelle, reuses, des fleurettes. « Il s'est fait depuis peu une est moindre que l'aumônier, chargé de la districertaine mascarade que je prétends faire entrer bution des aumônes : ou le grand, auprès duquel dans une bourde que je veux faire à notre ridi- réside le chapelain, n'est pas de ceux qui ont des cule (M. Jourdain).... Il est homme à y jouer son aumônes à distribuer, n'est pas très-considérable, rôle à merveille et à donner aisément dans toutes ou le chapelain ne remplit pas auprès de lui de les fariboles qu'on s'avisera de lui dire. MOL. fonctions importantes. Chapelain paraît même « Je ne puis souffrir toutes ces fariboles; ceux qui quelquefois signifier un ecclésiastique subalterne vous les ont contées sont des menteurs. » LES. qui s'occupe des soins d'une chapelle les plus vulL'hôte, qui avait écouté tout ce discours comme gaires. « Quand je suis à l'office de notre chœur, un discours fait à plaisir, dit au chevalier : Lais-je vois la main d'un de nos chapelains qui prosons à part ces fariboles. » ID. Dans Amphitryon, mène un grand éteignoir qui éteint tous les cierCléanthis reproche à Mercure, qu'elle prend pour ges par derrière l'un après l'autre. » FÉN.

CHARITABLE, MISÉRICORDIEUX. Quoique Girard ait indiqué ces deux mots comme étant synonymes, ils le sont, à vrai dire, extrêmement peu. Tout ce qu'ils ont de commun se réduit à exprimer l'idée très-étendue d'une sensibilité active et gratuitement bienfaisante.

Charitable veut dire bon, humain on est cha

Un personnage d'un rang élevé, mais non pas charge grossière; ou bien c'est une charge viodu plus haut rang, peut avoir un chapelain. lente, maligne à outrance et sans ménagement, « Lorsque le maréchal de Tallard, ambassadeur satirique et agressive, redoutable auxiliaire des auprès du roi Guillaume, revint en France, il avait partis politiques. laissé à Londres un chapelain nommé Gaultier. >> COND. « Le général Widers, entendant un jour son chapelain lire cet endroit de la Bible, lui arracha le livre et lui dit.... » VOLT. « Tous les gens de lettres connaissent la charmante description de l'île de Tinian, faite par le chapelain de l'amiral Anson.» BERN. Mais il n'y a que les souverains qui aient des aumôniers. « Saint Louis ne com-ritable pour tout le monde, et la charité consiste muniait que cinq fois l'année. On demanda à La surtout à donner; une charité est une aumône. Chaise où il avait pris cela il fit voir un manu- <<< Il faut être charitable envers tout le monde. » scrit d'un des aumôniers de ce roi. » SEV. « Le roi ACAD. « Les hérétiques ont été charitables envers (François Ier) envoya secrètement un des aumô-les pauvres. » BOURD. « Il n'y a d'homme chaniers de sa mère pour négocier avec le duc de ritable que celui qui sait donner. » MONTESQ. Bourbon.» Boss. - L'abbé Girard était chapelain | Miséricordieux ressemble fort à compatissant : de la duchesse de Berry; un autre académicien, on n'est miséricordieux qu'à l'égard des hommes Jean de Montigny, évêque de Léon, fut plusieurs qui sont dans la misère, dignes de pitié, et parannées aumônier de la reine Marie-Thérèse. ticulièrement à l'égard de ceux qui, étant couEn appelant aumôniers les ecclésiastiques atta-pables, nous touchent et nous disposent à la cléchés à certains corps et à certains établissements mence; en sorte que la miséricorde consiste surpour y remplir des fonctions analogues à celles tout à pardonner. « Le messie doit être un homme des curés, on leur donne le titre le plus honorable infiniment miséricordieux, dont le cœur s'attenet aussi le plus juste; car ils sont plus particuliè- drira à l'aspect des misères de notre nature. » rement que les curés, leurs confrères, au service Boss. « Dieu est miséricordieux envers les pédu souverain ou de l'État. cheurs. » ACAD. A l'égard d'une infortunée au

CHARGE, CARICATURE. Représentation gro- désespoir, à qui le remords seul arrachait l'aveu tesque et bouffonne.

Charge rappelle le verbe charger et exprime proprement un fait, l'action de représenter en chargeant, en amplifiant, en grossissant; mais caricature, sans verbe correspondant dans notre langue, marque par sa terminaison un résultat, comme écriture, gravure, ciselure, peinture, chaussure, armure, garniture, etc. Tel peintre excelle dans la charge; tel portrait est une caricature. Quelle charge! c'est-à-dire comme cette personne exagère en parlant, en peignant ou en jouant sur la scène! Quelle caricature! c'est-à-dire quelle tournure! comme cela est plaisamment fait! Dans une pièce de théâtre on trouve du comique de charge (LAH.), des rôles de charge (ID.); mais on juge que la pièce elle-même, prise comme objet d'art, est une caricature. « Fabre d'Églantine n'a fait de son Intrigue épistolaire qu'une très-lourde caricature de tout ce que l'on connaissait.... Il n'a obtenu le rire que par des rôles de charge et des succès de tréteaux. » LAH.

En général, charge convient mieux en parlant de représentations théâtrales, parce que les représentations de cette sorte consistent tout en actions, et caricature est plutôt un terme de peinture et de sculpture, parce que ce qu'on considère surtout de ces deux arts, c'est ce qui en résulte, les œuvres qu'ils produisent.

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de sa faute, était-ce un crime d'être miséricordieux? » J. J.

CHAUD, BRÙLANT, ARDENT, BOUILLANT, FERVENT. En quoi il y a du feu ou une sorte de feu; qui éprouve ou produit les effets du feu ou des effets semblables.

Chaud, du latin calidus ou caldus, exprime à un degré, sinon toujours bas, au moins peu élevé, la qualité dont il est question. Il en est de même du mot chaleur: il désigne, comme on sait, un état ou une action qui en soi n'a rien que de modéré. « Dans les latitudes chaudes et tempérées. » Bern.

Brûlant, qui brûle, paraît avoir été formé du latin perustus, brûlé, consumé, dévoré. Il enchérit évidemment sur chaud : l'objet brûlant est très-chaud, en proie au feu, si chaud qu'il est en état de brûler, de consumer ou d'endommager ce qui en approcherait, ou de causer une trèsvive douleur, quelquefois la mort à ceux qui s'y exposeraient.

Prête-moi (ô soleil !) de tes feux l'éclat étincelant,
Que j'embrase leur Grèce avec ton char brûlant.

CORN.

Quand le soleil brûlant dévorait les campagnes. Duc. a Que de fruits de la miséricorde le vent brûlant de l'orgueil flétrit tous les jours! » MASS. « Le comte d'Ennery ne put résister aux funestes influences de ce climat brulant. Sa perte fut une calamité publique.» VOLT. « J'attribue à ces promenades brûlantes une maladie qu'éprouva Rousseau.» BERN.

Quant au degré, la charge reste évidemment audessous de la caricature; car la première ne fait qu'ajouter à l'original, au lieu que la seconde le contourne, le fait grimacer, le défigure. « C'est la caricature du style héroïque; mais c'était déjà Ardent, latin ardens, du verbe ardere, être tout quelque chose, après les mystères, que de ressem- en feu, signifie aussi très-chaud, excessivement bler à l'héroïque, même avec cette charge gros-chaud. « Dès que cette ardeur (de la terre incansière; et c'est à peu près tout ce que firent Jodelle descente) se fut attiédie, une chaleur bénigne et et Garnier. » LAH. Ainsi la caricature est une féconde succéda par degrés au feu dévorant qui

C.

s'opposait à toute production.» BUFF. Au
figuré, chaud et chaleur se prennent volontiers
en bonne part et n'annoncent rien que de doux
et de bienfaisant un ami (J. J.. CORN., MOL.),
un protecteur (MOL.) chaud; la chaleur du senti-
ment (ACAD.), la chaleur de l'enthousiasme (COND.).
Mais ardent et ardeur sont plus propres à mar-
quer un excès et à qualifier quelque chose de
nuisible: un ennemi (J. J.), un persécuteur (ID.),
un satellite (ID.) ardent; l'ardeur des passions
(ACAD.); rien de plus funeste pour le salut que
l'ardeur de vouloir être plus qu'on n'est (BOURD.). |
Brùlant et ardent, les deux superlatifs de
chaud, diffèrent aussi l'un de l'autre. Brûlant sup-
pose quelque chose de passif ou a plus de rapport à
l'état; ardent suppose quelque chose d'actif ou a
plus de rapport à l'action. La chose brûlante
brûle dans le sens neutre du verbe brûler, pos-
sède la chaleur à un degré remarquable plat
brûlant, avoir les mains brûlantes. La chose ar-
dente est en action ou en mouvement, jette des
rayons lampe ardente, fournaise ardente, mi-
roir ardent.

Le souffle impétueux

Fouette d'un sable ardent leur brulante paupière.

DEL.

Ferrent, latin fervens, de fervere, être chaud, ardent, brûlant, bouillir, fermenter, a pris dans notre langue une spécialité d'acception qui dispense d'en traiter longuement. Il n'est usité qu'au figuré, et encore en termes de dévotion seulement; en sorte qu'on peut appliquer à fervent ce que Voltaire a dit de ferveur, sur ce premier vers du Cid:

Entre tous ces amants dont la jeune ferveur.... L'Académie réprouve le mot de ferveur qui n'est admis que dans le langage de la dévotion. Prière, dévotion fervente (ACAD.); fervent dans la piété (ACAD.); fervent à la prière (Boss.); une fervente carmélite (MAINT.).

Vert-Vert n'est plus cet oiseau révérend,
Ce cœur si pur, cet esprit si fervent. GRESS.
Redouble (o mon Dieu!) tes faveurs divines,
Visite mon cœur plus souvent,
Et pour le rendre plus fervent
Instruis-le dans tes disciplines. CORN.
CHEF, PRINCE, CORYPHÉE. Celui qui est à
la tête ou au premier rang dans son genre.

Chef, formé du latin caput, tête, est le mot commun. Prince et coryphée sont des termes de choix auxquels on a très-rarement occasion de recourir.

Prince, du latin princeps, le premier, chef d'Etat, se dit toujours en bonne part et dans le grand pour désigner un homme qui prime ou excelle par son mérite dans un genre relevé, en doctrine, en éloquence, en philosophie ou en poésie. Saint Pierre, le prince des apôtres (BOURD.); saint Augustin ou saint Thomas, le prince des théologiens (PASc., Boss.); Cicéron, le

Le soleil est brûlant, c'est une substance ignée; dans la canicule le soleil est ardent, il darde ses rayons avec force. De même au figuré. Dans une fièvre brûlante on éprouve une extrême chaleur, on en est consumé ou miné; dans une fièvre ardente on s'agite et on délire. Brûlant de combattre fait connaître la passion dont on est possédé; ardent au combat montre à l'œuvre et fait voir la manière dont on agit. En disant un style brû-prince de l'éloquence (J. J.) ou des orateurs lant et des pages brûlantes, vous qualifiez des choses dont vous indiquez, non pas l'action, car elles ne sont pas de nature à agir, mais la qualité ou l'état; c'est tout le contraire quand vous dites un désir ardent, une poursuite ardente.

Bouillant a plus d'analogie avec ardent qu'avec aucun autre des mots qui précèdent : il implique comme lui l'idée d'activité. Mais d'abord, au propre, il ne se dit que des liquides, au lieu qu'ardent ne se dit que des solides. « Outre ces épreuves à l'eau froide et à l'eau bouillante, il y en avait encore d'autres : c'était de porter à la main l'espace de neuf pas et sans se brûler une barre de fer ardent, de marcher sur des charbons allumés, etc. » COND. Au figuré, la différence est aussi simple que certaine ardent suppose une activité intérieure, et bouillant une activité extérieure, visible, comme est celle d'un liquide qui bout sur le feu. Un homme ardent est vif, animé, passionné, véhément; un homme bouillant est violent et emporté. Ardente affection (Boss.), courage bouillant (ACAD.). Il y a d'ailleurs ceci de particulier à remarquer qu'avec le mot sang l'épithète de bouillant est la seule qui convienne. a Ah! si M. le chevalier avait une telle cause en main, avec ce beau sang bouillant qui fait la goutte et les héros, il la saurait bien soutenir. » SEV. Cette force, cette vigueur, ce sang chaud et bouillant, semblable à un vin fumeux, ne permet rien aux jeunes gens de rassis ni de modéré. » Boss.

SUPPL. SYNON. FRANÇ.

(BERN.); Socrate, Platon, Aristote ou Descartes, le prince des philosophes (PASC., FEN., P. R., COND., ROLL.); Virgile, le prince des poëtes latins (LES., BERN., DEL.). « Lessing a eu le courage de critiquer un grand écrivain français, et de plaisanter avec esprit le prince des moqueurs, Voltaire lui-même. » STAËL.

Coryphée, grec xopupzioç, de xopugh, tête, sommet, a signifié spécialement chez les Grecs le chef du choeur dans les tragédies. De nos jours, on nomme encore de ce nom celui ou celle qui est à la tête d'un choeur ou d'une sorte de chœur. « Mlle Lemière et Larrivée, ces deux coryphées de la scène lyrique, sont enfin unis par des liens indissolubles. Ce grand événement a fait une sensation générale parmi les amateurs de l'opéra. » BACH. « Bonaparte se faisait dire sa volonté sur divers tons, tantôt par la voix sage du sénat, tantôt par les cris commandés des tribuns, tantôt par le scrutin silencieux du corps législatif; et ce chœur à trois parties était censé l'organe de la nation, quoiqu'un même maître en fût le coryphée. » STAEL. Au figuré, coryphée s'applique d'abord à ceux qui se distinguent en musique. « Le rossignol, ce coryphée du printemps.... » BUFF. « Grétry était fait pour opérer une révolution dans la musique du théâtre italien, dont les coryphées ne paraissent que des gens médiocres auprès de cet auteur. » BACH. Mais ensuite n'ayant plus égard à la signification primitive de coryphée ni à la noblesse de son

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