Page images
PDF
EPUB

les fréquentes visites qu'il y fera pour se faire rendre compte du progrès des études. » ROLL. « Ce serait un ouvrage très-utile que celui où l'on exposerait en détail le progrès de l'astronomie dans l'ordre que ce progrès a dû suivre.... Il est impossible qu'un pareil travail ne contribue très-efficacement à l'avancement rapide de l'astronomie. » D'AL. « Dans le plan que Bacon trace des sciences il montre les progrès qu'elles ont faits, et il enseigne les moyens de contribuer à leur avancement. » COND.

Une seconde différence est propre à séparer avancement non-seulement de progrès, mais encore de progression, avec lequel on serait peutêtre tenté de le confondre en conséquence de la distinction précédente. Avancement a été formé d'un verbe tout français, avancer ou s'avancer, au lieu que progrès et progression reproduisent exactement les mots latins progressus et progressio. Il s'ensuit qu'avancement est plus commun et moins scientifique : l'avancement de vos affaires (BORD.); ne jamais rien faire que pour l'avancement de ses vues et de sa fortune. (S. S.). Il se dit particulièrement bien d'une augmentation dans les emplois, d'une élévation en grade, d'une promotion: procurer de l'avancement à un commis, à un officier. « Ce n'était ni par le travail ni par l'étude qu'on parvenait au pouvoir en France: un bon mot, une certaine grâce, étaient souvent la cause de l'avancement le plus rapide. » STAEL. Mais progrès et progression s'emploient mieux en parlant, par exemple, de choses qui ont une marche régulière, un développem nt soumis à des lois que les savants étudient: le progrès d'une maladie, le progrès de la civilisation, les progrès de l'esprit humain; le progrès ou la progression du mouvement de déclinaison de l'aimant. Avancement le c'de encore à progrès en ce qu'il dit moins ou quelque chose de moindre. Aussi progrès se met-il bien après pour renchérir. «L hypocrisie ne trouve rien qui ne soit permis dès qu'il sert à son avancement et à son progrès. BOURD. « Cette marche que Jésus-Christ nous ordonne n'est rien autre chose que l'avancement et le progrès dans le chemin du salut. » ID. Une infériorité de signification aussi grande pour le moins a été attribuée à avancement par M. Dupanloup dans le passage suivant : « Substituer à la haute éducation intellectuelle l'enseignement tout professionnel, c'est condamner la société à ne plus marcher que dans les voies étroites d'un avancement sans progrès véritables. »

[ocr errors]

AVENIR, POSTÉRITÉ, DESCENDANTS, NEVEUX. Les hommes qui viendront après ceux d'à présent ou qui sont venus après ceux d'une certaine époque.

Avenir, pris ici figurément, est un terme tout abstrait, d'une très-grande généralité, et le plus souvent poétique il représente, non pas une collection de personnes réelles, mais un être de raison, auquel on reconnait pour tout attribut l'intelligence. L'avenir est l'esprit ou l'opinion des races futures, ou ce sont les races futures en tant qu'elles conçoivent, qu'elles apprennent, qu'elles pensent, qu'elles croient, qu'elles jugent, qu'elles estiment.

α

J'ai vu trop de merveilles : L'avenir aura peine à les bien concevoir. MOL. Le croirai-je? grands dieux! et le voudra-t-on croire Alors que l'avenir en apprendra l'histoire? CORN. L'univers me contemple, et les races futures Contre mes ennemis déposeront pour moi.

L'univers, mon ami, ne pense point à toi, L'avenir encor moins. VOLTt.

L'avenir ne voudra jamais croire que.... » J. J. « Regardez comme très-possible que votre patrie et votre siècle vous jugent aussi mal, et que l'avenir ne soit pas plus juste. » MARM. Hippolyte dit à Thésée dans Phèdre :

Souffrez que mon courage ose enfin s'occuper....
Ou que d'un beau trepas la mémoire durable
Prouve à tout l'avenir que j'étais votre fils. RAC.
Le Parnasse français, ennobli par ta veine,
Contre tous ces complots saura te maintenir
Et soulever pour toi l'équitable avenir.

(Ép. à Racine). BOIL.

Postérité, très-général comme avenir, ne s'emploie également qu'au singulier. Néanmoins il détermine davantage l'idée commune, et ce qui le prouve, c'est qu'il se prend quelquefois dans le sens relatif de descendants et de neveux pour signifier une suite d'hommes issus d'un même père, parents de celui ou de ceux dont ils sont les successeurs.

Jamais postérité de vous ne sortira. REGN. La postérité d'Abraham (ACAD.). Dans son acception la plus générale, outre qu'il n'est pas poėtique comme avenir, il est moins abstrait, moins exclusivement intellectuel, il représente les hommes à venir comme des personnes, auxquelles on dit très-bien, par exemple, qu'on lègue quelque chose (J. J., CHÉN.). « Actions qui seront écrites en caractères ineffaçables dans le livre de la postérité. » MASS. Un passage des Rêveries de J. J. Rousseau met cette différence dans tout son jour: Je comptais encore sur l'avenir, et j'espérais qu'une génération meilleure, examinant mieux...., démêlerait aisément l'artifice et me verrait enfin tel que je suis. C'est cet espoir qui m'a fait écrire mes dialogues et qui m'a suggéré mille folles tentatives pour les faire passer à la postérité. »

Mais si postérité est plus déterminé, plus précis qu'avenir, il l'est moins que descendants et que neveux, et c'est proprement en cela qu'il diffère de ceux-ci. Il désigne les successeurs les plus lointains, ceux qui sont venus ou qui viendront bien longtemps après; en sorte que la postérité dans l'avenir correspond aux ancêtres dans le passé : « La gloire des ancêtres est une lumière pour leur postérité. » ROLL. D'ailleurs, postérité, purement collectif, fait considérer seulement l'ensemble, et non pas dans l'ensemble les individus comme descendants et neveux, qui ne se disent qu'au pluriel: Dieu promit la terre de Chanaan à la postérité d'Abraham, et l'obligea à le servir et à se circoncire, lui et ses descendants (Boss., BOURD.).

Les descendants, à leur tour, sont plus éloignés que les neveux; car les descendants d'un homme peuvent appartenir à une génération postérieure quelconque, au lieu que ses neveux,

comme ses fils, sont de la génération qui le suit | veux dorénavant nourrir mes pigeons que de immédiatement. Les descendants d'un prince, miel ou de froment pur. » LAF. « Moyennant les d'une famille ou d'une nation vivront dans les siècles à venir: « Quelle leçon domestique, dans les siècles à venir, pour les descendants de cette auguste maison! » MASS. Les Grecs modernes sont les descendants d'Homère, de Socrate, de Thémistocle, etc. (VOLT.). Mais nos neveux sont presque nos fils, ce sont nos petits-fils, nos héritiers tout au moins. « Les neveux portent sur leur front l'iniquité de leurs pères. » MASS.

Mes neveux souperont sans rancune et gaiment
Avec les héritiers des frères Pompignan. VOLT.

cinq cents francs qu'il touchera par mois dorénavant, il pourra se donner la considération qu'il doit avoir. » VOLT. « L'histoire de l'empire grec, c'est ainsi que nous nommerons dorénavant l'empire romain, n'est plus qu'un tissu de révoltes. » MONTESQ. « Cette vérité expressément reconnue par tant de théologiens doit passer dorénavant pour très-constante. » Boss. François Ier écrivit de sa main au roi d'Angleterre, l'assurant que dorénavant il ne ferait rien que par ses conseils. » ID. On fait ou on fera Du reste, il en est de neveux par rapport à désormais le contraire de ce qu'on faisait jusdescendants comme d'avenir relativement à pos-que-là, ou ce qu'on faisait jusque-là, désormais térité. Étant pris ici dans une acception qui n'est on le cessera, on y renoncera, on se l'interdira. pas son acception propre, il convient plus parti- De ses jeunes erreurs désormais revenu. RAC. culièrement en poésie. Mais faites-moi l'honneur de cesser désormais Un amour qu'un mari peut trouver fort mauvais. MOL. «Peste soit de la sincérité! Désormais j'y renonce. » ID. « Tous nos maux vont finir désormais. » REGN. «<< Ali-Camourgi disait qu'il ne fallait plus souffrir désormais aucun ministre chrétien à Constantinople. » VOLT. « Désormais les deux princes vivraient en bonne intelligence, sans se souvenir des inimitiés passées. » Boss. « Désormais ne péchez plus. » ID.

Je veux que votre livre aille, au gré de vos vœux,
Faire siffler Cotin chez nos derniers neveux:
Que vous sert-il qu'un jour l'avenir vous estime
Si vos vers aujourd'hui vous tiennent lieu de crime?
BOIL.

AVERTISSEMENT, REMONTRANCE. Discours

pour fin notre correction.

AVENIR (À L'), DANS LA SUITE; DORENAVANT, DÉSORMAIS. Dans le temps futur. A l'avenir et dans la suite different en ce que à l'avenir n'exprime pas, comme dans la suite, une suite, ne suppose pas une liaison entre ce qui sera et ce qui est ou a été. Quelqu'un pro-inspirés par l'intérêt qu'on nous porte et qui ont met d'être sage à l'avenir; un écrivain, dans une partie de son livre qui n'est pas la dernière, promet d'exposer telle chose dans la suite. On profite à l'avenir d'un avertissement; au milieu d'une entreprise, des agents demandent ce qu'ils auront à faire dans la suite. Le châtiment des coupables épouvante ceux qui à l'avenir voudraient les imiter; vos débuts ayant été bons, tâchez dans la suite de faire encore mieux. Telle paix est le modèle de toutes les paix qui se feront à l'avenir; de bonne heure l'enfant fait pressentir ce qu'il sera dans la suite.

Dorénavant et désormais ont cela de propre par rapport aux deux premiers mots, qu'ils annoncent un futur immédiat, et non pas un futur plus ou moins éloigné. Ils signifient l'un et l'autre dès ce moment-ci, à partir de cette heure. Faites telle chose à l'avenir ou dans la suite, n'est pas aussi pressant que, faites telle chose dorénavant ou désormais.

Entre eux dorénavant et désormais se distinguent de la manière suivante. Dorénavant, d'oresen-avant (MONTAIG., MOL), de cette heure en avant, est positif ou affirmatif: Dorénavant vous serez heureux. Désormais, dès-or-mais, dès cette heure plus, est négatif, indicatif de la cessation d'un état Désormais vous ne souffrirez plus. Vous êtes dorénavant aimé d'une personne qui vous prend en affection; vous n'êtes plus désormais persécuté par l'ennemi avec lequel vous vous réconciliez. Dans Horace, Horace dit à Camille avec une parfaite précision :

[merged small][ocr errors]

L'avertissement tend à nous corriger de nos défauts, de nos torts, de nos mauvaises habitudes, en nous les montrant, en nous les faisant connaître; et la remontrance en nous les remontrant, en nous les remettant sous les yeux, afin que nous en apercevions toute la laideur, afin que nous en rougissions et que nous nous en repentions. On donne des avertissements, c'està-dire des instructions qui éclairent; on fait des remontrances, c'est-à-dire des semonces, et des réprimandes qui touchent. Il ne faut être ni sourd aux avertissements, ni insensible aux remontrances (MASS.).

AVEUGLEMENT, CÉCITÉ. État d'un homme qui est privé de la faculté de voir.

C'est ce que le latin exprimait au propre et au figuré par un seul terme, cæcitas. Le français n'a eu de même pendant longtemps pour les deux acceptions qu'un seul mot, aveuglement, du latin barbare aboculus, sine oculis, sans yeux, comme amens, sine mente, sans raison. Mais au dix-huitième siècle, les médecins empruntèrent du latin le terme cécité, qui naturellement désigna l'infirmité physique de ceux qui n'ont pas l'usage de la vue, et aveuglement se réduisit peu à peu à la signification figurée, suivant laquelle il représente un état intellectuel ou moral. Avant 1760, cécité n'avait pas place dans le Dictionnaire de l'Académie; mais on l'y trouve à partir de cette époque, avec la remarque expresse que cécité se dit au propre et aveuglement au figuré. Vers le même temps, d'Alembert écrivait dans ses Éléments de philosophie: « Il y a dans la langue française un grand nombre d'expressions qui n'ont d'usage qu'au sens figuré, comme aveuglement; on parlerait assez mal en disant de

quelqu'un qui a perdu la vue, qu'il est à plain- [extraordinaire «< qu'un aveuglement causé par unc dre par son aveuglement; mais on dit très-bien chiasse d'hirondelle. >> Pareillement, Laharpe, l'aveuglement de l'esprit et du cœur. » dans son Cours de littérature, cite une ode de la Motte, « qui roule sur la cécité dont il fut affligé dès trente ans ; » et, d'autre part, Mme Dudeffand, devenue aveugle, se plaint plusieurs fois, dans ses lettres, de son aveuglement et des autres infirmités de son âge.

Que cécité ne se prenne jamais et ne doive jamais se prendre au figuré, c'est une chose certaine. Mais aveuglement, au propre, au lieu de cécité, a continué à se dire et se dit bien encore dans le langage commun. C'est que cécité, auquel ne correspond pas en français, Du reste, aveuglement qui, au figuré, exprime comme à aveuglement, un adjectif, un verbe et un simple trouble, convient assez au propre et un adverbe de sa famille, conserve toujours peut-être est nécessaire pour signifier une privaquelque chose de savant et d'etranger qui fait tion passagère ou incomplète de la vue. Il semble qu'il ne se popularise pas aisément. Dans l'His- donc qu'on dirait bien que saint Paul, sur le toire naturelle de l'homme, Buffon parle de la chemin de Damas, fut frappé d'aveuglement, cécité et de ses causes; mais Voltaire, commen- et non pas de cécité comme Polyphème à qui tant quelque part l'histoire de Tobie en termes Ulysse fit perdre la vue absolument et pour touvulgaires tout au moins, dit que c'est chose jours.

B

[ocr errors]

BAGAGE, ÉQUIPAGE. Ce qu'on a d'effets avec | ture ou de chariot; aussi des étymologistes ontsoi hors de chez soi, en voyage ou en campagne. ils pensé que le mot équipage avait bien pu être Bagage signifie un assemblage de bagues, c'est formé du latin equum parare, préparer ou charger à-dire de hardes, suivant l'acception primitive un cheval. Ajoutons (à ces ouvrages de Salomon) du mot, un paquet d'effets, en latin sarcina. les lieux destinés aux équipages, où les chevaux, Équipage a voulu dire d'abord la même chose les chariots, les atteliges étaient innombrables.» qu'équipement, la réunion des objets dont on Boss. O quelle merveille, s'écrie Sénèque, de pourvoit un vaisseau pour la manoeuvre, la sub- voir Caton n'avoir pour tout équipage qu'un seul sistance, la défense et l'attaque, etc. : equipage, cheval, qui portait avec son maître tout son petit esquipage, paraît venir comme esquif du germa- bagage!» ROLL. nique skif, schiff, skip, navire.

Il est à remarquer encore que bagage est absolu

gages simplement, et un équipage de chasse, de
guerre, de siége, etc. D'autre part, le bagage se
considère plutôt en sci, on y a ou on y met telle
ou telle chose, au lieu que l'équipage se conçoit
comme un convoi, comme quelque chose qui est
en mouvement ou en train d'aller. « Tarquin vient
à bout de corrompre les domestiques de Turnus
(député latin) qui conduisait son équipage; il les
engagea à souffrir qu'on por ât pendant la nuit des
armes dans la maison où logeait leur maître, et à
les glisser adroitement parmi son bagage. » ROLL.

a

Le bayage peut être peu considérable, se ré-et équipage relatif. On a du bagage ou des baduire à un simple paquet: on dit plier bagage comme plier son paquet, pour s'en aller furtive ment ou mourir. Les moindres gens ont du bagage ou des bagages. « Ignice va étudier à Paris il fait le voyage à pied, précédé d'un âne qui portait son bagage, ses livres et ses écrits. » VOLT. « Oldar mit dans ses poches tout l'or et les choses précieuses, et fit de tout le reste de son bagage un petit paquet qu'il assujétit sur ses épaules. HAM. L'équipage, au contraire, est tout un attirail, et on n'attribue d'équ pages qu'aux princes et aux grands. La ville de Malines ayant été prise en 1746, «< on renvoya au prince Charles les domestiques et les équipages qu'il avait dins la ville. ▾ VOLT. On voyait des richesses immenses (le trésor de Darius) éparses çà et là par la campagne, les superbes equipages de tant de grands seigneurs et de grandes dames, les vases d'or, les tentes magnifiques.... » VAUG.

En termes de guerre bagage a une signification bien moins étendue qu'équipage. Les bagages sont les choses qui appartiennent aux troupes et qui sont à leur usage. Mais les équipages comprennent en outre toutes les choses nécessaires pour les opérations, c'est-à-dire les munitions de toutes

sortes.

Étant petit, et pouvant, à la rigueur, être porté par une personne ou par la personne à laquelle il appartient, le bagage ne suppose nécessairement ni cheval ni voiture. Mais par la raison contraire, équipage implique presque toujours l'idée de mon

BARBOUILLAGE, GRIFFONNAGE. Mauvaise écriture, et, par extension, écrit de peu de valeur.

Barbouillage désigne primitivement une mauvaise peinture. « J'ai laissé Beaulieu avec le copiste de M. de la Garde; il ne quitte point mon original (le portrait de Mme de Grignan).... Vous verrez ce que c'est que ce barbouillage. Je souhaite que les derniers traits soient plus heureux; mais hier c'était quelque chose d'horrible. » SEV. Quand ce mot se prend pour signifier une mauvaise écriture, il parait dire moins que griffonnage qui est dans ce sens le mot propre. Le barbouillage est quelque chose de peu net et de peu distinct; et le griffonnage semble écrit par la griffe d'un chat, les lettres n'y sont pas formées, on n'y distinque rien.

Dans leur acception étendue, quand ils se disent d'écrits dont on fait peu de cas, les deux mots diffèrent de la manière suivante. Le barbouillage

[ocr errors]

1

[ocr errors]

Votre éventail me plait d'être ainsi bigarré. CORN. La législation était tellement bigarrée, que nonseulement des lois particulières régissaient les divers ordres de l'Etat, mais que chaque province STAEL. Mais la avait ses priviléges distincts. cham rrure, résultat de l'action d'orner un habit de passements, de galons, de fourrures, d'en faire une simarre, plaît ou déplait par l'éclat, par la richesse. Un habit chamarré d'argent (LES.), de diamants (LAF.). Des baladins chamarrés (J. J.) sont couverts d'oripeaux. « Le reste du plumage (de ce canard) est richement chamarré d'ondes et de festons de noirâtre, de roussâtre et de roux. ». BUFF. « Les généraux français portaient sans rougir des habits usés par la guerre, et plus honorables cent fois que les broderies et les décorations dont, plus tard, on les a vus chamarrés. » STAEL.

est plutôt un écrit imprimé, et il est défectueux, plaise davantage aux Indiens que leurs oiseaux il péche sous quelque rapport que ce soit. Vous bigarrés de diverses couleurs. » VAUG. « Le plutrouverez, à votre retour, un barbouillage nou- mage du petit-duc est plus élégamment bigarré vellement imprimé où je me suis mêlé de bavar- et plus distinctement tacheté que celui des autres.» BUFF. der sur la musique.... Aimant la musique, vous ne dédaignerez peut-être pas de parcourir une espèce de livre qui en traite tant bien que mal. » J. J. Mais le griffonnage est plus généralement manuscrit, et il a le défaut particulier d'être informe ou inachevé, de n'être qu'une ébauche. « Corbinelli montre tout ce qu'il fait (tout ce qu'il écrit) à Mme de Coulanges plusieurs cartésiens le prient de continuer; il ne veut pas; il brûle tout ce qu'il a griffonné. » SEV. Voltaire avait confié à M. le comte d'Argental le manuscrit d'une tragédie à laquelle il n'avait pas encore mis la dernière main, le priant de faire des observations. Il lui écrit à ce sujet : Renvoyezmoi donc mon griffonnage apostillé, et puis j'aurai l'honneur de vous le renvoyer au net. » Le griffonnage n'est donc pas comme le barbouillage une œuvre imprimée et sous sa forme définitive; c'est quelque chose de manuscrit qui doit ou pourrait être retouché. Aussi griffonnage est-il le mot qui convient le mieux en parlant d'une lettre. « Je finis à la hâte ce griffonnage, que je n'ai pas même le temps de relire, tant je suis pressé de le faire partir. » J. J. Au moment que je griffonne (que je vous écris cette lettre), la nouvelle vient de Francfort que.... » VOLT. BARIOLÉ, BIGARRÉ, CHAMARRÉ. Marqué ponds bien tard à votre aimable lettre chamarrée de différentes couleurs.

α

: G

Bariolé, écrit barriolé par deux r dans la première édition du dictionnaire de l'Académie, peut bien avoir été fait de barre, ainsi que l'Académie l'indique en effet, et il a une terminaison diminutive comme affriolé, bestiole, gloriole, etc. En sorte que les couleurs de la chose bariolée forment de petites barres ou de petites bandes, au lieu de taches arrondies et plus ou moins larges. « Les géographes nous présentent la terre bariolée de lignes de toutes couleurs qui la divisent et la subdivisent en empires, en diocèses, en sénéchaussées, en élections, en bailliages, en greniers à sel.» BERN. « Le requin est devancé par plusieurs petits poissons bariolés de noir et de jaune.» ID. Arlequin est appelé un grand drôle bariole (MARIV.) à cause du vêtement rayé qu'il porte.

Bigarré et chamarré, outre qu'ils supposent des couleurs qui ne forment pas de petites raies ou de petites lignes, mais des taches rondes et plus ou moins grandes, se distinguent de bariolé en ce qu'ils sont d'une application plus fréquente et plus variée. Dans sa Satire de l'homme, Boileau dit de l'àne:

Et que peut-il penser lorsque dans une rue Au milieu de Paris il promene sa vue; Qu'il voit de toutes parts les hommes bigarrés, Les uns gris, les uns noirs, les autres chamarrés? La bigarrure et la chamarrure diffèrent ensuite l'une de l'autre d'une manière encore assez sensible. La bigarrure, de bis varius, deux fois ou plusieurs fois varié, très-varié, plaît ou déplait par l'opposition des couleurs, par leur arrangement ou piquant ou bizarre. «Il n'y a rien qui

De son orgueil ses habits se sentaient;
Force brillants sur sa robe éclataient,
La chamarrure avec la broderie. LAF.

- Un écrit bigarré de certaines choses en est diversifié : « Toutes mes pièces ont été bigarrées de variantes. » VOLT. Mais un écrit chamarré de certaines choses en est paré ou embelli : « Je ré

de jolis vers. VOLT.

BAS, IGNOBLE. L'air, le langage, etc., quand ils annoncent peu de grandeur, sont qualifiés de bas ou d'ignobles.

Mais c'est proprement un défaut d'élévation que marque ce qui est bas, et un défaut de noblesse qu'indique ce qui est ignoble. Le bas se remarque partout; l'ignoble, dans ce qui est d'un ordre ou d'un rang distingué. Philaminte des Femmes savantes reprend dans le langage de la servante Martine des mots sauvages et bas; Voltaire relève dans les tragédies de Corneille des expressions ignobles. Toute personne peut être dite avoir une physionomie ou une mine basse ; on n'attribue de physionomie ou de mine ignoble qu'aux princes et aux grands personnages.

Ensuite, bas suppose un défaut plus essentiel, un fond de lâcheté ou de quel que autre qualité mauvaise; ignoble est plutôt esthétique seulement, tout relatif à la forme, et n'emporte d'autre idée que celle de grossièreté. Buffon reconnaît une physionomie basse et cruelle à toute la race sanguinaire des goëlands, et à l'engoulevent un air de famille lourd et ignoble. On ne dit pas une laideur basse, mais bien une laideur ignoble (S. S.), parce que la laideur est toute superficielle, sans rapport au caractère, aux sentiments, aux dispositions de l'âme.

1 BATEAU, BATELET, BARQUE, NACELLE, 2° VAISSEAU, NAVIRE, ESQUIF, CANOT; BÂTIMENT, GALÈRE, CHALOUPE. Ce sont les noms les plus communs donn ́s en France à ces machines en bois dont on se sert pour aller sur l'eau ou pour transporter par eau des choses ou des personnes.

sens. FÉN.

La frêle nacelle gémit,

Quand Enéas les pieds y mit,

Les six premiers désignent évidemment quel- | flots qui la poussent et la ballotent dans tous les que chose de moins grand que les cinq autres. Les pêcheurs ont des bateaux, des barques ou des nacelles; une flotte se compose de vaisseaux, de batiments ou de chaloupes. Ce avec quoi et dans quoi Caron faisait passer au delà du Styx les ames des défunts est également nommé dans l'Enéide travestie un bateau, une barque, une nacelle et un esquif; lorsque Annibal, parvenu sur les bords du Rhône, voulut le traverser avec ses troupes, il mit en réquisition tout ce que les habitants possédaient de bateaux, de barques, de nacelles et de canots (ROLL.). Mais en racontant une bataille navale on rapportera quel fut le sort des vaisseaux, des navires, des galères, etc., combien il y en eut qui sautèrent, combien qui furent coulés à fond, ou pris, ou mis en fuite (VOLT., THOM.).

Et reçut l'eau par plusieurs fentes. SCARR. Esquif, italien schifo, de l'allemand schiff, vaisseau, a servi à former esquiver. C'est le nom d'une petite barque légère à l'aide de laquelle on manœuvre ou on se sauve adroitement et promptement. «< Comme le roi Edouard II voulut se sauver dans un esquif avec son favori Spencer, ils furent pris tous deux. » Boss. Les Tyriens assiégés venaient avec des esquifs reconnaître la digue élevée par Alexandre.... Il était facile d'avancer et de retirer ces esquifs comme on voulait. » ROLL. « Entre les lignes Scipion laissa des intervalles par où les esquifs devaient passer entre les barques pour aller reconnaître les en

1o Bateau, batelet, barque, nacelle, esquif, nemis et se retirer en sûreté. » ID.

canot.

Pour moi, sur cette mer qu'ici-bas nous courons,
Je songe à me pourvoir d'esquif et d'avirons,
A régler mes désirs, à prévenir l'orage,

Et sauver, s'il se peut, ma raison du naufrage. BOIL. Il fut un temps où les vaisseaux avaient à leur service un esquif ou des esquifs pour aller du bord à terre ou pour se sauver en cas de nau

Bateau diffère de batelet en ce que celui-ci est le diminutif de celui-là: le batelet est un petit bateau, et on s'en sert principalement pour aller d'un bord à l'autre d'une rivière. « Je voudrais, comme font les Anglais chez eux, établir nos matelots invalides aux bacs des rivières, sur tous ces petits batelets qui traversent Paris, et les ré-frage. C'est ce qu'on voit dans les Fourberies de pandre le long de la Seine comme des tritons dans nos campagnes.» BERN.

[ocr errors][merged small]

Scapin: il feint que son maître est retenu sur la galère turque, tandis que lui, Scapin, a été renvoyé seul à terre dans un esquif pour traiter de la rançon du prisonnier. Et dans Rabelais : « Si toust que les ancres feurent iectees, et le vaisseau asseuré, lon descendit lesquif.... Le bon Pantagruel entra et toute sa compaignie dedans lesquif, pour prendre terre. »

Canot est aujourd'hui le terme dont on se sert pour rendre cette dernière idée, celle d'une petite embarcation au moyen de laquelle les vaisseaux communiquent avec le rivage ou entre eux. «< Ces Patagons avaient aidé les matelots à échouer le canot du navire. » BUFF. Mais si canot a remplacé esquif dans cette acception, il ne signifie pas par lui-même comme esquif quelque chose d'agile; il désigne dans le principe et à présent encore quelque chose de creux, de semblable à un roseau, canna (d'où canal), un simple tronc d'arbre creusé, une pirogue, ou un petit bateau fait d'écorce, ou enfin quelque chose de très-primitif en fait de voiture par eau. « Au moyen du feu l'homme excave et façonne les troncs les plus durs; il en fait des vases, des tonneaux, des ca

Bateau et barque ne sont guère plus difficiles à distinguer. D'abord on emploie plutôt les bateaur, comme les batelets, sur les rivières, et les barques sur la mer on dit qu'une rivière porte bateau dès sa source, et c'est surtout au petit cabotage que les barques sont affectées. Descartes et César faillirent périr, l'un dans un bateau sur l'Elbe, l'autre dans une barque sur laquelle il passait d'Épire en Italie (THOM.).. Ensuite, ce qu'on considère particulièrement dans le bateau, c'est sa forme un lit en bateau (ACAD.); la moule est taillée en bateau (BERN.); sous le brou de la noix est une coque ligneuse de la forme d'un bateau, ayant une proue poin-nots.» BERN. « Il ne faut que l'écorce d'un de tue, une poupe aplatie.... (ID.). Mais c'est spécialement à la conduite, à la manière dont on dirige le gouvernail que barque fait penser : conduire la barque, au propre et au figuré (ACAD.); bien conduire sa barque, être adroit dans le maniement de ses affaires.

Nacelle, en latin et du latin navicella (formé de navis, navire), est un diminutif comme batelet. Mais il a de plus pour caractère propre d'emporter l'idée particulière de faiblesse et de fragilité une faible nacelle (BERN.), une frèle nacelle (LAH., ROLL.). Lorsque Neptune, dans l'Odyssée, lance contre le vaisseau d'Ulysse une vague épouvantable, « la nacelle est le jouet des

ces vastes bouleaux pour faire un grand canot. »>
ID. Tant que les hommes se bornèrent à tailler
avec des pierres tranchantes quelques canots de
pêcheurs. » J. J. Les sauvages ont des canots:
« Les sauvages arrêtent leurs canots des heures
entières pour considérer les cabrioles des sapa-
jous.
» BUFF.

2o Vaisseau, navire, bâtiment, galère, chaloupe. Vaisseau, grand, énorme vase, espèce de maison flottante, est dans la langue commune le terme général dont on se sert pour représenter tout ouvrage de grande dimension fait par les hommes pour voguer sur la mer. Il est admis en poésie, et il se prend bien au figuré.

« PreviousContinue »