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quillité, police, discipline, subordination. Se- | discipline supposent, la première des magistrats rait-ce que tous ces termes ont la même valeur, et qu'on peut indifféremment dans tous les cas employer l'un ou l'autre pour exprimer la bonne situation où se trouve un Etat, une province, une ville, une armée?

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et la seconde des chefs ou des maîtres. Mais ce sont proprement des supérieurs que suppose la subordination, elle n'est relative qu'au rang et n'emporte pas toujours et nécessairement l'idée de commandement et d'ob'issance telle est la A parler rigoureusement, d'abord, l'ordre et la subordination qui existe entre les pauvres et les tranquillité sont des effets qui résultent de la po- riches. Il fallait qu'il y eût une diversité de lice, de la discipline et de la subordination. C'est conditions, et surtout il fallait qu'il y eût des afin de garantir l'ordre et la tranquillité que la pauvres, afin qu'il y eût dans la société humaine police, la discipline et la subordination sont éta- de la subordination et de l'ordre. » BOURD. « Pour blies parmi les hommes. L'ordre et la tranquillité apprendre à ces boyards une subordination qu'ils sont en soi un bien dont on jouit, qu'on recher- ne connaissaient pas, le czar Pierre les fit passer che, pour lequel on préfère, par exemple, tel pays par tous les grades. » VOLT. « Sous le gouverneà tel autre; la police, la discipline et la subordi- ment de Cyrus, chacun avait son district et son nation sont des institutions sociales gênantes et objet particulier, dont il rendait compte à celui pénibles en elles-mêmes auxquelles on ne se sou- qui était au-dessus de lui, et celui-là à un troimet que parce qu'elles sont la condition d'un sième, et ainsi des autres, jusqu'à ce que par ces bien, l'ordre et la tranquillité. « Une discipline, différents degrés et par cette subordination rédevenue encore plus exacte, avait mis dans l'ar-glée, la connaissance des affaires parvînt jusqu'au mée un nouvel ordre. » VOLT. «Sans cette maxime on ne peut conserver l'ordre dans l'Église de Dieu, puisqu'il n'y aurait plus dans le monde chrétien ni subordination ni dépendance. BOURD.

Ordre, tranquillité.

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L'ordre consiste dans une sage disposition des choses, il a la confusion pour contraire; la tranquillité est un état de paix ou de repos, elle est opposée à l'agitation. Là où règne l'ordre, chaque homme a l'emploi qui lui convient, chaque chose sa destination, sa place ou son rang; là où règne la tranquillité on mène une vie calme, sans secousse, sans mouvement violent, à l'abri des orages. Dans les États, rien de plus nuisible à l'ordre que le gaspillage et l'anarchie, et, sous le point de vue de la tranquillité, rien de plus funeste que les révoltes et la guerre.

Police, discipline, subordination.

roi. » ROLL.

OUTRE, INDÉPENDAMMENT, PAR-DESSUS. Prépositions qui servent à marquer addition et qui signifient sans compter telle chose, sans compter ce qui vient d'être dit.

Outre, oultre, du latin ultra, au delà, plus loin, en avant, de plus, annonce une addition de choses quelconques, et, par exemple, de choses de même nature. « Outre la beauté singulière, le visage du duc de Rohan avait toutes les grâces possibles. »S. S. « Le czar promit encore des troupes au roi de Pologne, outre les douze mille hommes qu'il avait déjà envoyés. » VOLT. « Outre le millet, les jaunes d'œufs...., les jeunes poulets aiment aussi la navette, le chènevis et autres menus grains de ce genre. » BUFF. « Il nous faudrait, outre les mots simples et nouveaux, des composés et des phrases où.... » FEN. «Chaque grand homme, outre sa capacité générale, a encore un Police, grec noditeíz, administration d'une talent particulier dans lequel il excelle et qui fait ville (ó), désigne quelque chose de plus géné- sa vertu distinctive. » MONTESQ. « La police n'a ral que discipline, latin disciplina, administra-pas été si bien exécutée pour la distribution des tion de disciples ou d'une école, de discere, ap- billets (pour une représentation à l'Opéra): outre prendre. Les lois de la police s'appliquent à une le tumulte effroyable que l'avidité des curieux ocsociété plus étendue, et elles sont moins particu-casionnait, il a redoublé par la quantité qu'on a lières que les règles de la discipline: elles ne con- distribuée soit de parterres soit d'amphithéâtres.>> cernent que l'homme civil ou les rapports les BACH. moins étroits. Massillon appelle expressément la police une discipline extérieure. La discipline ne se borne pas à empêcher, elle apprend à faire ce qu'on doit et la manière de le faire; elle laisse moins de liberté ; elle s'occupe de tous les détails de la conduite; elle ne vous permet pas même de faire le bien, que vous n'en ayez reçu l'ordre. On dit la police d'une ville, et la discipline d'une armée. Que si on dit bien aussi la police d'une armée, d'un camp, cela se rapporte, dans une armée ou dans un camp, aux mesures les plus gé-dire qu'au défaut de la foi il n'a plus d'autre règle nérales qui peuvent assurer l'entretien du corps dont il est question.

Quant à la subordination, du latin sub, sous, et ordinatio, disposition, arrangement, elle a cela de distinctif, qu'elle est hiérarchique, qu'elle représente un classement d'hommes dans lequel les uns sont placés au dessous des autres, en dépendent, leur sont soumis. Sans doute la police et la

Mais indépendamment, sans dépendance ou sans rapport avec, s'emploie pour exprimer une addition de choses différentes de celles dont il a été question, qui n'en sont pas la suite, qui sont à part. Outre telle chose, il a obtenu telle autre, c'est-à-dire qu'il a obtenu encore ou de plus telle autre chose; indépendamment de telle chose, il a obtenu telle autre, c'est-à-dire qu'il a obtenu d'ailleurs telle autre chose distincte, d'une nature particulière. « C'est rendre l'homme libertin de

de sa conduite que la pission et l'erreur indépendamment de la foi, nous avons une raison qui nous gouverne. » BOURD. « Les huguenots avaient une espèce de petit parlement à Castres, indépendamment de celui de Toulouse. » VOLT. « Tout aspirant marié selon la loi,qui aura quelque fonds en propre, indépendamment de ceux de sa femme, sera inscrit dans la classe des patriotes. » J. J.

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Indépendamment de ses piquants, l'urson a, comme le castor, une double fourrure. » BUFF. Le public même prendra part à nos exercices (de l'Académie); la cour et la ville nous fourniront des questions, indépendamment de celles qui se trouvent dans les livres. » FEN. « Je te ferai voir qu'indépendament des causes physiques (de la diminution des peuples) il y en a de morales qui ont produit cet effet. » MONTESQ. « Indépendamment du beau coup d'œil que présente la salle d'Opéra de Versailles, de sa coupe avantageuse et de la magnificence de son ensemble, le mécanisme de son intérieur offre des détails immenses et admirables à ceux qui s'y connaissent. » BACH.

Par-dessus indique quelque chose de surérogatoire, d'ajouté à la mesure convenue, ordinaire ou suffisante. Par-dessus le marché. « Que gagne Épictète de prévoir que son maître va lui casser la jambe? Il a par-dessus son mal le mal de la prévoyance. » J. J. « Le commandement est de soi plus que suffisant pour nous déterminer à une pratique; de sorte qu'exiger par-dessus cela une inspiration extraordinaire, c'est nier qu'il y ait un commandement. » Boss. « M. le tabellion, écrivez que par-dessus la dot qui revient à ma fille, je lui donne dès aujourd'hui tout ce que je possède et tout ce que je pourrai jamais posséder. » FLOR.

PAÎTRE, BROUTER. C'est ce que font certains animaux en mangeant sur place et ordinairement sur racine des plantes dont ils se nourrissent. Paitre, du latin pascere, signifie manger de l'herbe dans les prairies (pascua) en se baissant pour la prendre, et, par extension, manger de ce qui est à terre sans tenir au sol, des fruits tombés ou des feuilles détachées des arbres. « Ces rennes paissaient comme des vaches. » BUFF. « Ce sont des chiens qui hurlent contre un beau cheval qui pait dans une verte prairie. » VOLT. « Un jeune berger jouait de la flûte auprès de ses moutons paissants. » FÉN. « On peut croire qu'il y a des animaux qui paissent sur les feuilles des plantes, comme les bestiaux dans nos prairies. » BERN. << La tortue pait au fond de la mer des herbes vertes.» ID. « Cette grosse macreuse s'abat sur les prairies dont elle paît l'herbe. >> BUFF.

L'âne se mit à paître :

Il était alors dans un pré

Dont l'herbe était fort à son gré. LAF.

P

des bézoards de petits cailloux, des noyaux de prunes, de tamarin, des graines de cassie, et surtout des brins de paille et des boutons d'arbres: ainsi l'on ne peut guère attribuer cette production qu'aux animaux qui broutent les herbes et les feuilles. » ID.

La vache pesante paît au fond des vallées; la brebis légère sur les flancs des collines; la chèvre grimpante broute les arbrisseaux des rochers.» BERN.

A la vérité, brouter l'herbe se dit aussi; mais c'est moins proprement, ou cela signifie paître la sommité de l'herbe : « Nous ne broutons, dit l'abeille, que des fleurs odoriférantes.» FEN. Ou bien l'herbe broutée est très-courte, consistant toute en pointes à peine saisissables, et c'est pourquoi on dit figurément et familièrement d'un homme industrieux : l'herbe sera bien courte, s'il ne trouve de quoi brouter. Quand l'herbe est grande dans les prairies, les bestiaux y paissent; ils y trouvent à peine de quoi brouter à l'époque où l'herbe commence à sortir de la terre ou après

• Les cochons paissent le gland, la fatne dans les que les prairies ont été rasées par les faucheurs : forêts. ACAD.

« Vous voyez un nombreux troupeau qui, répandu sur une colline, pait tranquillement le thym ou le serpolet, ou qui broute dans une prairie une herbe menue et tendre qui a échappé à la faulr des moissonneurs. » LABR.

Brouter, autrefois brouster, veut dire manger du broust, et le broust était la pâture que trouvaient les bêtes fauves dans les jeunes taillis, savoir les bourgeons et les extrémités des pousses nouvelles. Ce n'est donc pas proprement de l'herbe, ni A l'égard de l'homme, quoiqu'on dise figurédes choses tombées à terre, que broutent les ani- ment et populairement envoyer paître quelqu'un, maux, mais bien des broutilles, des bouts de pour, le renvoyer avec mépris, le seul terme probranches d'arbres, des feuilles tendres encore at- pre est brouter; car le moyen pour nous de partachées aux broussailles, aux arbustes, aux haies, tre, à moins de nous mettre à plat ventre? « La aux buissons vers lesquels il faut que l'animal famine fut si grande, que les pauvres étaient réélève ou tende la gueule pour saisir sa nourri-duits à brouter l'herbe. » ACAD. Des hommes ture. La girafe, qui, à cause de l'excessive hauteur de ses jambes, ne peut paître l'herbe qu'avec peine (BUFF., se nourrit en broutant les feuilles des arbres (BERN.). Le cerf, caché dans la vigne qui l'a mis à couvert des chasseurs, broute sa bienfaitrice (LAF.). « L'âne et la chèvre trouvent partout à vivre, et broutent également les plantes de toute espèce, les herbes grossières, les arbrisseaux chargés d'épines. » BUFF. « Au printemps les chevreuils vont dans les taillis plus clairs, et broutent les boutons et les feuilles naissantes de presque tous les arbres. ID. «< On trouve au centre

créés à l'image de Dieu broutent l'herbe comme des animaux, et dans leur nécessité extrême.... MASS. « Qui croirait que les Grecs descendissent de sauvages qui ignoraient l'agriculture, et brou taient à la manière des bêtes? » ROLL. « J'aimerais mieux aller brouter l'herbe et ronger des racines que d'accepter de lui un morceau de pain. J. J.

PAIX, SILENCE, CHUT. Sortes d'interjections par lesquelles on invite à se taire.

Paix invite à se taire, c'est-à-dire à ne pas faire de bruit, à rester paisible ou tranquille.

« A peine furent-ils entrés dans la maison, qu'ils rencontrèrent la dame Chimène, qui leur fit signe de ne point faire de bruit. Paix! pair! leur ditelle d'une voix basse, vous reveilleriez ma nièce.» LES. «Ne faites donc pas tant de bruit; paix, encore une fois! » VOLT. « Ainsi plaisantait l'exécuteur de l'infortuné don Carlos. Comme le prince criait et voulait se débattre : Pair, monseigneur, lui disait-il en l'étranglant, tout ce qu'on en fait n'est que pour votre bien. » J. J.

Silence invite à se taire, c'est-à-dire à ne pas parler, à rester muet, afin qu'on puisse entendre autre chose ou une autre personne. «< Belle leçon! s'écria la comtesse.... Fi donc! Madame, dit le chevalier.... Mme la comtesse a toujours raison de blâmer, dit le baron.... Silence! Messieurs, silence! interrompit le curé; voici la lettre d'un académicien écoutez-la de toutes vos oreilles. » LES. Dans la Princesse d'Élide, Philis dit à Moron qui veut par ses propos l'empêcher de prêter l'oreille aux chants de Tircis : «< Tais-toi, je veux l'entendre.... Silence, dis-je, ou je me mettrai en colère. » MOL.

Chut invite à se taire, c'est-à-dire à ne pas parler hors de propos, à être discret. Si, au moment où vous parlez mal d'une personne ou révélez un secret qu'elle ne doit pas savoir, je la vois qui approche, je vous dirai chut! la voici (MOL., DEST.). « Chut! n'offensez pas ces messieurs-là.» MOL.

A tout autre qu'à lui ne dites rien surtout:
On vient.... Chut.

GRESS.

« Une femme âgée de 90 ans disait à M. de Fontenelle âgé de 95: La mort nous a oubliés. Chut! lui répondit M. de Fontenelle, en mettant le doigt sur la bouche. » CHAMF.

PANSE, BEDAINE. Mots dont on se sert familièrement en parlant du ventre d'un homme.

Panse, du latin pantex, pantices, les intestins, a rapport à l'intérieur, à la capacité. La panse est essentiellement grande, elle contient beaucoup. Avoir plus grands yeux que grand'panse (ACAD.); une large panse (Duc.); avoir la panse pleine (LAF.); ne songer qu'à remplir sa panse (LES.).

:

Les matelots luttaient contre le sort, Voulant empêcher la baleine

De les nicher dans sa bedaine. SCARR. PARADOXE, PARADOXAL. Contraire au sentiment commun: opinion paradoxe ou paradoxale.

On a dit d'abord paradoxe seulement, puis concurremment paradoxe et paradoxal, et enfin le crédit de paradoxal, le nouveau venu, est aujourd'hui si grand, qu'on a presque totalement oublié l'adjectif paradoxe, tant nous sommes amoureux des nouveautés. Cependant paradoxe mérite d'être conservé avec paradoxal; car il ne signifie pas exactement la même chose.

Ce qui est paradoxe l'est absolument, c'est-àdire tout à fait et essentiellement : une pensée (D'AL.), une maxime (J. J.) très-paradoxe : ce qui est paradoxal ne l'est que relativement, c'està-dire en partie ou sous un certain point de vue : proposition qui semble avoir quelque chose d'un peu paradoxal.

Ensuite paradoxe sert à qualifier les choses en elles-mêmes, quant à leur fond ou à leur nature; au lieu que paradoxal a rapport à l'expression, à la forme des choses. On dira donc proprement une idée paradoxe, et une doctrine paradoxale; donner au sentiment le moins paradoxe quelque chose de paradoxal par la manière de le présenter; tel philosophe a eu un système paradoxe (P. A.), et tel orateur ou tel écrivain a cherché à réussir par un certain ton paradoxal ou en hasardant des propositions paradoxales. - « La loi chrétienne commande deux choses paradoxes, l'une de hair ses proches, l'autre d'aimer ses ennemis. » BOURD. « Eblouir un moment la multitude par des pensées hardies, qui ne paraissent nouvelles que parce qu'elles sont hasardées et paradoxales, c'est ce qui est donné à beaucoup d'hommes. » LAH.

PARALYTIQUE, PERCLUS. Atteint d'une maladie ou d'une infirmité qui consiste dans la privation du sentiment et du mouvement volontaire.

Paralytique, qui a une paralysie, du grec яарaλúεv, relâcher, dissoudre, est absolu. Perclus, du latin perclusus, fermé, obstrué, empê

Bedaine, quelle qu'en soit l'étymologie, et elle est certainement vulgaire, est relatif à l'exté-ché, est relatif. rieur, à la forme la bedaine est quelque chose de proéminent; elle est essentiellement grosse, semblable à un bedon, espèce de tambour gros et court.

Expresses défenses à tous

De plus porter chausses suissesses.
Grosses bedaines, grosses fesses,
Où diable vous mettrez-vous?
CHAP. et BACH.

Du reste, bedaine, étant seul de basse extraction et relatif à la forme, indique plus nécessairement quelque chose de grotesque et de risible, et appartient plus exclusivement au langage de la plaisanterie.

Quand j'aurai fait le brave, et qu'un fer, pour ma peine,

Maura d'un vilain coup transpercé la bedaine....
(Sganarelle). MOL.
L'ami Bonneau court à pied dans la plaine,
En maudissant sa pesante bedaine. VOLT.

Paralytique représente en soi, comme étant, indépendamment de quoi que ce soit, l'état qu'il signifie; perclus, au contraire, fait concevoir ce même état comme un effet. On dit paralytique, simplement; mais on dit perclus de goutte (S. S.) ou de rhumatismes (J. J.). Il se peut qu'on soit paralytique de naissance : Thibaud le Jeune, fils de Théodebert, était né paralytique (VERT.), et Bernardin de Saint-Pierre parle d'un homme qui avait un fils de dix-huit ans, né paralyt que et imbécile. Mais on n'est jamais perclus que par accident, que parce qu'on l'est devenu; en sorte que perclus, dérivé d'un participe et qui a encore la forme d'un participe, ressemble plus à paralysé qu'à paralytique.

Mais il reste toujours entre paralysé ou para lytique, d'une part, et perclus, de l'autre, une sensible différence Paralytique et paralysé marquent un état plus grave, une affection arrivée

au point qu'elle mérite d'être appelée de son nom scientifique et rigoureux, une paralysie. « J'ai chez moi un pirent de vingt-trois ans il tombe un jour de cheval à la chasse, et le voilà paralytique pour le reste de ses jours. » VOLT. « Le bon homme Gil Perez est devenu paralytique de la moitié du corps, et n'ira pas loin. » LES. Il n'en est pas ainsi de perclus : c'est un mot vague qui exprime une sorte de paralysie, une quasi-paralysie. Voltaire, dans sa vieillesse, avait la manie d'exagérer ses maux. Il a écrit quelque part, n'osant employer le mot paralytique, qui eût été trop fort: « Me voilà à l'âge de quatre-vingts ans, un peu perclus, un peu sourd, un peu aveugle; et ailleurs: «<l ne reste à moi, pauvre perclus, que la liberté de la main droite pour remercier Votre Altesse.» De même Lafontaine applique l'épithète de perclus à un serpent qui n'était qu'engourdi par le froid. On trouve beaucoup de gens paralytiques dans les hospices et beau coup de gens perclus dans les établissements d'eaux thermales. Ce sont des paralytiques que guérit Jésus-Christ et non pas seulement des gens perclus.

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1° PARCE QUE, A CAUSE QUE; - 2o CAR, EN EFFET, PUISQUE; —3o VU QUE, ATTENDU QUE. Conjonctions et locutions conjunctives également employées dans le discours pour rendre raison de quelque chose.

Parce que et à cause que ont rapport aux idées, et leur objet est de faire concevoir, de répondre à un pourquoi. Un corps tombe, quand il n'est pas soutenu, parce qu'il est pesant, ou à cause qu'il est pesant; une personne est fière parce qu'elle est riche ou à cause qu'elle est riche; nous haïssons quelqu'un parce qu'il ou à cause qu'il nous a fait du mal. Partout où il s'agit de faits à expliquer, en histoire, dans les sciences naturelles, à l'égard de tout ce qui arrive, parce que et à cause que sont de rigueur, leurs synonymes seraient impropres.

Car, en effet et puisque ont rapport aux juge ments, aux propositions, et servent, non pas à faire concevoir, mais à faire croire ou admettre, à convaincre ils annoncent la raison, non pas d'un fait, mais d'une assertion, non pas une explication, mais une preuve. Toutes les fois qu'on raisonne, à proprement parler, on doit préférer car, en effet, puisque aux deux premières conjonctions: Dieu est bon, car, en esset, puisque.... Que si pou tant parce que et à cause que se prennent quelquefois par extension pour signifier la confirmation de ce qui a été avancé, une cause logique, ils la supposent faible ou apparente, ils indiquent souvent un simple pretexte. «Est-ce donc bien raisonner de dire que vous avez droi de retenir votre superflu, parce que les temps sont mauvais, puisque c'est justement pour cela même que vous ne le pouvez retenir sans crime?» BOURD.

Vu que et attendu que, ayant ou étant considéré que, désignent une cause intellectuelle, c'est-à-dire un motif quelque chose qui a agi ou est propre à agir sur un être capable de voir, de faire attention: J'ai pris telle resolution, j'ai decidé telle chose vu que ou attendu que.... Ce sont

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d'ailleurs deux locutions communes, du langage de la procédure ou d'un langage approchant, dont on fait surtout usage quand on expose des considérants, quand on rend compte d'une délibération.

1° Parce que, à cause que. Conjonctions causatives explicatives.

Parce que, par cela que, est beaucoup plus usité que son synonyme à cause que, qui a tout à fait le même sens, mais qui est moins scientifique ou plus simple, qui ne convient guère que dans le langage familier. Pascal dit, d'une part: « Nous sommes redevables aux anciens de l'ascendant que nous avons sur eux, parce que s'étant élevés jusqu'à un certain degré où ils nous ont portés, le moindre effort nous a fait monter plus haut. » Et d'un autre côté : « D'où vient qu'un boiteux ne nous irrite pas et qu'un esprit boiteux nous irrite? c'est à cause qu'un boiteux dit que nous allons droit et qu'un esprit boiteux dit que nous boitons. » De même Fénelon, dans l'Abrégé de la vie des anciens philosophes Héraclite tenait que la raison des différentes phases de la lune était parce que sa barque ne se tournait que peu à peu. » Et dans un autre endroit du même livre : « Aristippe vit une fois un jeune homme qui était fort glorieux à cause qu'il savait bien nager. )- Pareillement, Malebranche a écrit quelque part : « Je sais que je suis, que je pense, que je veux, parce que je me sens. » Et ailleurs : « Les termes les plus communs sont les plus confus, quoiqu'on s'imagine les bien entendre, à cause qu'ils sont familiers.

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2o Car, en effet, puisque. Conjonctions causatives démonstratives.

Car est bref, décisif, se met devant une preuve courte, sententieuse, contenue en une seule phrase, et dont la vérité s'aperçoit d'abord. II s'emploie volontiers dans la conversation où l'on a très-rarement besoin de tirer des conclusions en forme et où l'on ne raisonne guère que par enthymemes. « Vous ne le trouverez pas chez lui, car je viens de le voir dans la rue. » ACAD. « Vous le prendrez pour un stupide, car il n'écoute point, et il parle enco e moins. » LABR. « Je n'en suis pas bien assuré (que Socrate soit homme); j'en doute quelquefois, car il ne ressemble guère aux autres. » FEN.

En effet, au contraire, commence une preuve développée, qui consiste à reprendre l'assertion pour faire voir par la deduction qu'elle dérive de principes certains. Ainsi, en géométrie, après avoir énoncé la proposition à démontrer, on continue en disant, en effet, et on la démontre. Naturellement cette locution sent l'école; dans une simple conversation elle a un air de prétention et d'étalage, quelque chose de pédantesque. « Les victoires de Marius ne sont pas une suffisante compensation pour les horreurs dont il s'est rendu coupable.... En effet, il eut tous les vices des grands scélérats: il fut sans foi, sans honneur, etc.... » ROLL.

Puisque a cela de tout à fait propre, qu'il rappelle pour confirmer une assertion quelque chose d'admis ou de convenu, quelque chose au moins qu'on suppose ne pouvoir pas être désavoué ou

contesté. Il n'est pas brusque et tranchant comme | mot d'égal : des lignes égales; deux quantités car, ni étendu et spécialement scientifique comme égales à une troisième sont égales entre elles. Nos en effet. Il dispose comme par degrés et sans ap- pareils sont des hommes qui sont à notre niveau parat à la persuasion, à recevoir une proposition pour la fortune, la condition, le talent; nos égaux impliquée dans la vérité admise. « Me voilà résolu sont des hommes qui ont les mêmes droits, chose à croire que je pense puisque je doute, et que je qui se mesure légalement, avec une parfaite exacsuis puisque je pense. » FEN. «< Adam ne connais- titude. Vous direz des doctrines pareilles (Pasc.), sait pas toutes les propriétés des corps, puisqu'il de pareilles horreurs (VOLT.), et des parts ou des est constant que ces propriétés sont infinies. >> sommes égales; il n'est rien de pareil au génie MAL. «< Comment donc, dira-t-on, et par quelle d'Homère, et il n'est rien d'égal à la force de la idée connaissons-nous qu'une chose existe actuel- vapeur, à la vitesse de la lumière. lement? Car, puisque nous la connaissons, il faut bien qu'il y en ait quelque idée. » Boss.

3o Vu que, attendu que. Conjonctions causatives destinées à exprimer, dans le style du palais ou dans un style analogue à celui-là, les considérations qui ont déterminé un être intelligent.

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Ainsi quand le soleil fait naître un parélie,
La splendeur qu'il lui prête à la sienne s'allie;
Leur hauteur est égale, et leur éclat pareil. CORN.
SE PARER, FAIRE PARADE. Montrer avec
ostentation.

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Se parer, parer soi, mettre sur soi une parure, un ornement, annonce quelque chose d'étranger, d'emprunté, dont on se revêt; ce mot emporte les idées d'usurpation et de déguisement. Se parer des plumes du paon, des plumes d'autrui (ACAD.). « La naissance n'est rien, c'est le mérite de nos ancêtres; c'est se parer du bien d'autrui. » Boss. Il y a de la fausseté dans le cœur, quand on s'est accoutumé à flatter et à se parer des sentiments qu'on n'a pas. » VOLT. « J'ai le cœur trop bon pour me parer de quelque chose qui ne soit point à moi, et tout Naples peut rendre témoignage de ma naissance. » MOL. On fait plutôt parade, c'est-à-dire montre, de ce qui est à soi, et la seule idée accessoire distinctive de cette expression est celle de vanité. «Tirer parade et vanité du mépris qu'on a pour le monde. » Boss. « Faire parade de ses bonnes œuvres. » BOURD. « Un religieux qui fait parade de sa vertu met du faste jusque dans l'humilité même. » VOLT.

Vu que, ayant ou ayant été vu que, emporte l'idée d'une considération moins sérieuse, moins approfondie qu'attendu que, du verbe latin attendere, faire attention; aussi est-il plus usité dans la langue ordinaire, hors du barreau. « Je m'étonne qu'il ait entrepris cela, vu qu'il n'est pas très-hardi. » ACAD. «Ils auraient de la peine à concevoir qu'un espace ait une infinité de divisibles, vu qu'on les parcourt en si peu de temps. » PASC. « La difficulté fut de trouver un libraire qui voulût se charger de mon manuscrit, vu qu'il y avait quelque dépense à faire pour les nouveaux caractères. » J. J. Attendu que suppose un plus grand examen, et c'est surtout un terme de contrats, d'affaires, de plaidoiries, d'administration. << Crokius Dubius, après un long examen, crut que cette invitation (de la Bible) s'adressait aussi aux Juifs (et non pas seulement aux oiseaux), attendu qu'il y est parlé de tab'e. » VOLT. « L'auteur prouve que la procédure faite contre Jean Morelli n'était point un exemple à suivre à mon égard; attendu, premièrement, que... ; que d'ailleurs mon crime devait être traité plus sévèrement. » J. J. « Il conviendra que ledit premier emprun-Au contraire, faire parade, selon le sens de la teur paie cet intérêt sans préjudice du reste, attendu que ce n'est que pour l'obliger que ledit prêteur s'engage à cet emprunt. » MOL.

Vaugelas s'est trompé quand il a dit qu'attendu que, autrefois relégué dans le pays d'icelui et d'à icelle fin, commençait à se rendre fort commun dans le beau style : le beau style l'a repoussé encore plus que son synonyme.

PAREIL, ÉGAL. Termes d'estimation comparative, servant à marquer que des choses ont même grandeur ou sont au même degré, qu'elles se valent, qu'elles ne l'emportent pas l'une sur l'autre, qu'elles ne le cèdent pas l'une à l'au

tre.

Pareil est un mot commun, qui exprime moins de rigueur. Égal est, au contraire, un terme spécial, plus particulièrement relatif à ce qui peut être précisément et mathématiquement déterminė. " On combattit de part et d'autre à forces égales, et avec un courage et un succès pareils. » ROLL. On dit dans le langage ordinaire, une étoffe pareille à une autre;

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Ensuite, se parer est abstrait on se pare de sentiments (VOLT.), de fermeté (ID.), de douceur (Boss.), de modestie (D'AL.), de zèle (ROLL.), de dévoeument (HEN.), de vertus, de titres (ACAD.), etc.

terminaison ade, est concret, et se dit en parlant de choses extérieures. « Que peut dire une dame chrétienne qui fait parade de ce que la nature et la religion l'obligent de cacher? » BOURD. « On fait parade du luxe jusque dans l'Église. » Boss. Ils font parade de leur bonne chère, ils se vantent de leurs bons morceaux, ils font retentir tout le voisinage et de leurs cris confus et de leur joie dissolue. » ID. « Fier de sa noblesse, jaloux de sa beauté, le cygne semble faire parade de tous ses avantages.» BUFf. « Les petits esprits, dont tout le mérite consiste dans leurs richesses, font consister leur gloire à en faire parade et à les donner en spectacle au peuple. » ROLL.

PARTAGE LOT. Ce que quelqu'un obtient ou a obtenu dans la distribution d'un tout qui a été divisé.

Partage, de partem agere, faire part, et par extension part faite, est un mot tout verbal, relatif au fait de la division ou à celui de la distribution; au lieu que lot, anciennement los, de l'allemand loos, tudesque hloz, hluz, sort, portion échue par le sort, est tout objectif, signifie l'objet mème qui échoit. Vous avez telle chose en Mais en géométrie on emploie exclusivement le partage, et cette chose est votre lot.

Nous ne concevions point de mal pareil au nôtre.

SUPPL. SYN. FRANÇ.

CORN.

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