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prendre la signification figurée et même ne prend | souffrance restait au fond de mon âme; sa cruelle guère que celle-là, et c'est surtout en le mettant serre ne lâchait pas prise.» STAËL. au participe qu'on s'en sert.

«L'art de greffer procure à la plupart de nos fruits les qualités que la nature leur avait refusées. » BARTH. « Scipion l'Africain bêchait luimême la terre, plantait et greffait ses arbres. » ROLL. « Il fait ses délices des jardins : personne mieux que lui ne greffe et ne taille les arbres. » MARM. « C'est un arbre qui n'a porté jusqu'ici que des fruits de mort; cependant nous ne voulons pas qu'on le coupe, mais qu'on le greffe.» VOLT. -(( C'est une famille entée sur telle autre... ; un financier enté sur un praticien...; il a beaucoup de vices entés sur de onnes qualités. » ACAD. « Nous pouvons bien imaginer distinctement une tête de lion entée sur le corps d'une c èvre. » DESC. « L'anhinga nous offre l'image d'un reptile enté sur le corps d'un oiseau. » BUFF. « Un visage d'Ethiopienne enté sur un corps de Grecque.» LAF. « Des romans entés sur l'histoire. » STAËL. << Le gouvernement de Bonaparte était une tyrannie entée sur une révolution. » STAEL. Se faire des plans de religion, imaginer une morale de bon goût qui réconcilie Jésus-Christ avec Bélial, qni ente sur un fonds chrétien les plus pures maximes du paganisme. » MASS.

Vous faites le plongeon,

Petit noble à nasarde, enté sur sauvageon. REGN. Enter de nouveaux mois sur de vieilles idées. CHEN. GRIFFE, SERRE. Pied des oiseaux de proie. Griffe est plus général. Il ne se dit pas seulement par rapport aux oiseaux de proie, mais encore en parlant d'autres animaux, même de l'homme et de certaines plantes. « Les bêtes farouches ne sont redoutables pour l'homme que par leurs dents et par leurs griffes. » FEN. « Le terrible créancier! Un château sous la griffe d'un semblable procureur est comme une colombe dans les serres d'un milan. » LES. « La nature donne des vrilles à la vigne pour s'attacher à l'orme, et des griffes au lierre pour saisir le tronc des chênes.» BERN.

Quand griffe s'entend spécialement des oiseaux de proie, il diffère encore de serre d'une manière assez remarquable.

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La griffe, de l'allemand greifen, saisir, gripper, sert à saisir, à prendre, à attaquer, à s'accrocher: donner un coup de griffe. « Si la nature avait fait l'homme méchant, elle lui aurait donné des griffes, une gueule, du venin, quelque arme offensive. BERN. Dans l'OEdipe de Corneille, Iphicrate dit à Edipe qui lui demande qui il est

Vous êtes

Un enfant exposé....,

Et de qui par pitié j'ai dérobé les jours

Aux ongles des lions, aux griffes des vautours. Mais la serre est proprement employée à serrer, à tenir, à avoir ou à emporter en soi. « On vit volern vautour; il tenait dans ses serres une colombe. »FEN. «Sur l'étendard d'Othon il y avait un aigle qui tenait un dragon avec ses serres. » Boss. « S'il y avait des races de nains, les oiseaux de proie les enlèveraient dans leurs serres.» BERN. «La serre du malheur me tient. » STAËL. « La

Les martinets voltigent autour d'un trou, et étendent leurs griffes comme pour s'accrocher à la muraille; on en a vu fort souvent sortir des ni s d'hirondelles et de moineaux emportant des matériaux dans leurs petites serres (BUFF.).-Dans Lafontaine un milan pris par un chasseur et donné à un roi va tout droit poser sa griffe sur le nez de sa majesté. On s'efforce en vain de lui faire q itt r prise de sa serre insolente il tient bon, et il semble vouloir nicher là malgré tout. GRIMPER, GRAVIR. Monter à quelque endroit en s'aidant des pieds et des mains.

L'étymologie de l'un et de l'autre n'étant pas certaine, on ne saurait prudemment y recourir. Mais il n'en est pas besoin pour arriver à découvrir en quoi ils diffèrent.

Grimper exprime une action ordinaire et par conséquent facile de certains animaux appelés grimpants, tels que chats, singes, écureuils, escargots; de certains oiseaux, des grimpereaux, des pics, des mésanges; et même de certaines plantes, de la vigne et du lierre, par exemple. Mais gravir ne désigne pour aucun animal ni pour aucune plante en particulier une manière d'avancer ou de s'étendre naturelle.

On grimpe donc sans peine, comme un chat; au lieu qu'on gravit par une façon d'aller extraordinaire, avec effort et difficilement. Les couvreurs grimpent sur les toits de nos maisons (SÉv.); les soldats sont souvent obligés de gravir sur des rochers (VOLT.) ou contre des montagnes (ROLL.). J. J. Rousseau peint l'homme sauvage grimpant légèrement sur les arbres ou grimpant aux arbres même comme un singe; mais Voltaire se représente lui

Gravissant avec peine à cette double cime
Où la mesure antique a fait place à la rime....
Et Corneille dit en parlant de l'ambitieux :
Pour un malheureux titre on s'épuise d'haleine,
On gravit sur les monts.

« L'âne lourd et constant se plaît à gravir les roBERN. Bossuet avait dit dans l'oraison funèbre chers où grimpe la chèvre légère et capricieuse. » d'Henriette d'Angleterre : « Le juste ne peut pas même obtenir que le monde le laisse en repos dans ce sentier solitaire et rude où il grimpe plutôt qu'il ne marche. » Laharpe le reprend avec raison en remarquant que « le mot propre était gravit,

qui est moins familier, et même plus expressif,

puisque gravir c'est grimper avec effort. »

différence qui tient aussi à ce que gravir ne se dit Gravir est moins familier que grimper, seconde pas proprement, comme grimper, de certains animaux. On ne dira donc pas gravir, mais grimper un escalier (DID.), sur une chaise (SEV.), à un cinquième étage (MONTESQ.), et dans la phrase suivante du Dissipateur de Destouches grimper sera également le seul mot qui convienne : Quand on a de bon vin, On boit à ses amours: cela grimpe à la tête, Et le cœur s'attendrit.

GROSSE, ENCEINTE, en parlant d'une femme, signifient en état de gestation, en état d'accoucher dans peu.

cet esprit qu'elle est pleine mystérieuse femme de l'Apocalypse, c'est de cet enfant qu'elle est enceinte. » ID.

D'ailleurs grosse est un mot vulgaire, d'où a été formé un verbe plus vulgaire encore pour dire rendre une femme grosse; au lieu qu'enceinte est un terme relevé ou tout au moins plus distingué, précisément parce qu'étant abstrait il désigne sans le représenter l'état quelque peu immodeste dont il s'agit. On soupçonna la reine d'Angleterre, mère d'Édouard III, d'être grosse de son favori (Boss.); la vierge Marie chanta un cantique d'allégresse lorsqu'elle se sentit enceinte du Saint-Esprit (ID.). Au moyen âge, une fille deve

Mais grosse exprime un état apparent. Dans les Lettres persanes une actrice de l'Opéra, qui a été séduite, se plaint « d'être si grosse qu'elle n'ose plus se présenter sur le théâtre. » MONTESQ. « Les parents et les voisins de la femme de Virginius l'avaient vue grosse de la fille dont elle avait accouché. » VERT. « La coupable Marguerite devient grosse, sa honte est publique, tout le quartier qu'elle habite la montre au doigt. » STAËL. Enceinte, au contraire, marque un état qui n'est pas extérieur ou visible. «Mahomet III commença son règne par faire noyer douze femmes de son père, qu'on croyait enceintes. » VOLT. « La graine de fougere est contraire aux femmes enceinctes. » RAB. Aussi le mot enceinte s'emploie-nait-elle grosse sans que l'on connût son amant, t-il bien et seul dans une acception abstraite ou c'était, disait-on, le diable qui lui avait fait un figurée. « La venue de Jésus-Christ étant préparée enfant (VOLT.); la reine Marie Stuart était endès l'origine du monde, toute la loi, pour ainsi ceinte de cinq mois lorsqu'on tua sous ses yeux dire, en étant enceinte et toute prête à l'enfan-le musicien italien Rizzio (Id.), et Marie était ter, Dieu.... » Boss. « Une nouvelle prophétesse enceinte de Jésus lorsqu'Auguste ordonna un (Mme Guyon) a entrepris de ressusciter la Guide dénombrement des peuples de toute la terre de Molinos, et l'oraison qu'il y enseigne : c'est de (ID.).

HABITUDE, ROUTINE. Pratique familière à quelqu'un et qu'il a contractée par des actes réitérés. « Le paysan faisant toujours ce qu'on lui commande, ou ce qu'il a vu faire à son père, ou ce qu'il a fait lui-même dès sa jeunesse, ne va jamais que par routine; et, dans sa vie presque automate, l'habitude et l'obéissance lui tiennent lieu de raison. » J. J.

Mais habitude, du latin habitudo, manière d'être, est plus général, et se dit particulièrement bien en termes de morale et en fait de conduite.« Habitude au bien ou au mal. » ACAD. « L'habitude du crime.» ACAD. « L'habitude dans la piété. » PASC. « Des vertus d'habitude. » FÉN. Il est charitable c'est une compassion toute humaine qui le touche, ou l'habitude qui le conduit. » BOURD. « Celui qui commence à bien vivre, on dit qu'il a de bonnes dispositions pour la vertu; et celui qui vit tout à fait bien, on dit qu'il en a l'habitude même. » Boss.

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Routine, du français route, correspond au mot méthode, tiré du grec, et qui, ainsi que routine, signifie procédé, chemin tracé pour arriver à découvrir ou à opérer quelque chose. Aussi s'emploie-t-il proprement quand il est question de sciences ou d'arts. « Il ne sait point de musique, mais il chante par routine. » ACAD. « Il n'a jamais étudié cet art à fond, mais il y a acquis une sorte de routine. » ACAD. « Les procédés (pour obtenir les métaux), ainsi que les résultats des routines ou méthodes ordinaires, sont trèsdifférents les uns des autres. >> BUFF. «< Les arts libéraux et mécaniques sont distingués, en ce que les premiers travaillent de l'esprit plutôt que de la main; et les autres, dont le succès dépend de la routine et de l'usage plutôt que de la science, travaillent plus de la main que de l'esprit. » Boss. Il est à remarquer, d'ailleurs, que l'habitude

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en elle-même peut être bonne ou mauvaise, au
lieu que le mot routine se prend de préférence
en mauvaise part. Dire d'une personne qu'elle
parle correctement par habitude, c'est lui attri-
buer une qualité; mais si on veut établir la né-
cessité des règles de la grammaire, on dira qu'il
ne suffit pas de savoir parler correctement par
routine. Prendre une habitude est l'expression or-
dinaire; mais on y substitue quelquefois prendre
une routine dans le langage familier et quand il
s'agit d'une habitude qu'on désapprouve : « C'est
une routine qu'ils ont tous prise de dire que je
suis belle; ils m'en importunent. » SEV. Parmi
les habitudes on distingue une habitude routi-
nière, c'est-à-dire aveugle et toute machinale.

J'ai rassemblé mes amis les plus chers,...
Que chaque soir, dans mon humble réduit,
Auprès de moi l'habitude conduit;

Non l'habitude routinière

Qui, se traînant dans son ornière,
Dans la même assemblée et dans les mêmes lieux
S'en va porter sa face contumière

Et ses propos fastidieux;

Mais l'habitude libre et fière
Qui, chez ses bons amis, les mêmes qu'autrefois,
S'achemine par goût et s'arrête par choix. DEL.

HABITUER, ACCOUTUMER. C'est, par la répétition des mêmes actes ou des mêmes impressions, disposer un homme de manière à lui rendre familière une certaine chose.

Voici la distinction de Condillac. « Nous habituons les autres à vivre comme nous, nous les accoutumons à notre manière de vivre. Nous nous habituons à faire une chose, nous nous accoutumons à la voir faire. Ainsi s'habituer est relatif à nos actions, et marque que nous les faisons facilement, qu'elles ne nous coûtent plus; s'accoutumer est relatif aux actions des autres,

et marque qu'elles ne nous choquent plus, son origine. C'est dans le style soutenu qu'il est à qu'elles ne nous surprennent plus. » sa place « Un grand chêne du mont Ida, que la Habituer regarde les habitudes actives: qui est hache a coupé par mille coups dont toute la forêt habitué n'a plus de peine à faire certaines choses. a retenti, ne fait pas un plus horrible bruit en « On est habitué à juger des autres par soi-tombant. FEN. Mais cognée est vulgaire : même.» Boss. « Le prince qui s'habitue à bien connaître les hommes, paraît en tout inspiré d'en haut. » ID. « En étudiant, les enfants s'habituent à barbouiller, à prononcer négligemment. » J. J. « J'habituerais mes élèves, plusieurs fois la semaine, à parler d'abondance sur un sujet donné. » LAH.

Lorsqu'à la bien chercher (la rime) d'abord on s'évertue,

L'esprit à la trouver aisément s'habitue. BOIL. Accoutumer produit une habitude passive: qui est accoutumé n'a plus de peine à sentir, à souffrir, à supporter telle ou telle chose. « L'estomac s'accoutume à la fin aux viandes qui auparavant lui répugnaient. » Boss. «Notre premier aliment | est le lait; nous ne nous accoutumons que par degrés aux saveurs fortes. » J. J. « J'admire comme on s'accoutume aux maux et aux incommodités. » SEV.

J'accoutume mon âme à souffrir ce qu'ils font (les hommes).

MOL.

« Si vos opinions paraissaient tout à coup dans leur dernier excès, elles causeraient de l'horreur; mais ce progrès lent et insensible y accoutume doucement les hommes. » PASC. «Mentor dit à Idoménée Mon dessein a été de vous accoutumer à entendre nommer les choses par leur nom. » FÉN.

Un bûcheron perdit son gagne-pain,
C'est sa cognee....

Il n'avait pas des outils à revendre. LAF. D'ailleurs, par rapport au bois, la hache est d'un usage plus relevé; au lieu que la cognée est un simple outil pour abattre les arbres et les dépecer, la hache est un instrument pour travailler le bois de construction: un bûcheron a une cognée, un charpentier une hache.

Au figuré, si ce n'est qu'il s'agisse de proverbes, tels que jeter le manche après la cognée, et aller au bois sans cognée, hache est le seul mot qui convienne. La perte des sciences a été la première plaie faite à l'humanité par la hache de la barbarie. » BUFF.

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HAILLON, GUENILLE. Étoffe de très-petite ou de nulle valeur.

Les haillons sont toujours des vêtements, et des vêtements en bon état, quoique pauvres et peutêtre usés. « Faites voir à un paysan de riches palais, une cour superbe, il conçoit toute la pauvreté de son village, et ne peut souffrir ses haillons à la vue de tant de magnificence. » FÉN. « Les haillons de la vieille tombaient tous d'eux-mêmes pour faire place à des vêtements magnifi ues. » HAM. «Que dites-vous du Taureau blanc ? En vérité, Voltaire se moque de nous : il nous débite le fond de sa boutique, il n'y a plus que des hailons. » DUDEFF. Mais les guenilles sont les haillons d'un homme déguenillé, qui est en guenilles, en

HACHE, COGNÉE. Noms donnés à un fer tranchant d'une certaine largeur dont on se sert, au moyen d'un manche de bois, pour couper en frap-loques, ou bien ce sont ces loques mêmes, des pant.

lambeaux. On dit bien des lambeaux de haillons (VOLT.); on ne saurait dire des lambeaux de guenilles. « Le ciel (à l'Opéra) est représenté par cer

Hache paraît avoir été formé du latin ascia, doloire, hache d'armes au moyen âge. Cognée, autrefois coignée et coingnie, vient incontestable-taines guenilles bleuâtres, suspendues à des bâment de coin, et signifie un coin emmanché.

Hache est plus général. La hache a des usages que n'a pas la cognée; et, par exemple, elle est seule une arme, et elle a été seule un instrument d'immolation et de supplice. Lorsque la ville de Paris était assiégée par les Normands (885), a chaque jour l'évêque Goslin se mettait sur la brèche, le casque en tête et une hache à sa ceinture.» VOLT. Jean sans Peur fut assassiné sur le pont de Mortereau; « Tanneguy du Châtel donna le signal, et lui abattit le menton d'un coup de hache. Boss. Le roi de Navarre attaque une place importante.... La hache enfonce les portes. THOM. Thrasymède se tint près de la victime, la hache à la main, tout prêt à la frapper. » ROLL.

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Sylla marche en public sans faisceaux et sans haches,
Prêt à rendre raison de tout ce qu'il a fait. CORN.
Et Sirven, au supplice écha pé dans tes bras,
Vit par un juste arrêt la hache menaçante
S'é arter à ta voix de sa tête innocente. CHÉN.

Mais la hache sert aussi à couper du bois, et c'est alors que le mot de hache semble différer très-peu de celui de cognée, car la cognée n'est employée qu'à couper du bois.

tons ou à des cordes, comme l'éten lage d'une blanchisseuse.» J. J. « Comment rassembler tous leurs libelles? Qui peut aller trier to s ces lambeaux, toutes ces guenilles chez les fripiers de Genève ? » ID. « Ce sont des guenilles qu'on a cousues à une bonne étoffe. » VOLT.

Par conséquent guenille renchérit sur haillon; il signifie quelque chose de plus misérable. «< Tous ces grands trésors que ces messieurs (de l'Académie) disent qu'on leur a volés ne sont que des haillons et des guenilles dont la misère ne tentera jamais des voleurs et des plagiaires. » FURETIÈRE. On attribuera plutôt des haillons à des gens qui inspirent de l'intérêt et des guenilles à ceux pour lesquels on n'éprouve que du mépris. Dans la Nouvelle-Héloïse, J. J. Rousseau s'apitoie sur « de malheureux paysans exténués de jeûnes, excérlés de fatigue, et couverts e haillons. » Mais à la fin d'une de ses lettres, représentant «< toute la canaille de Paris» qui dansa et se divertit un jour de fête dans les superbes salles de Versailles, il ajoute : «< Ils ont tant secoué leurs quenil.es, ils ont tellement bu, et se sont si pleinement piffrés que la plupart ont été malades. » Les pauvres ont pour vêtements des haillons, et les gueux des gue

Hache se distingue pourtant encore de son synonyme par le caractère de noblesse qu'il tient denilles.

Outre qu'il est plus général et susceptible de se prendre en plus mauvaise part, guenille est aussi plus propre à recevoir l'acception figurée, et il s'emploie de preference dans le langage familier. HALEINE, RESPIRATION. "Fonction animale qui consiste à attirer l'air dans sa poitrine et à le repousser dehors alternativement.

Mais, à parler proprement, l'haleine est la matière de cette fonction, le souffle, l'air qui sort des poumons; la respiration est cette fonction même, ou c'en est l'exercice, le jeu des poumons néces- | saire pour que l'air entre et sorte. Avoir l'haleine douce ou puante (ACAD.); avoir la respiration libre (ACAD.) ou précipitée (ROLL.). Des périodes de peu de longueur suffisent pour épuiser l'haleine d'un orateur qui a la respiration courte ou difficile (ROLL.).

a

prenant seraient des téméraires; avec un degré de plus, l'homme osé serait un effronté ou un impudent. « Il n'y a point de maladie si osée que de se jouer à la personne d'un médecin. » MOL. « On statua la peine des galères contre quiconque serait assez osé pour être d'un autre avis que le Stagyrite.» VOLT. « Clitus continuant avec plus d'insolence irritait toujours davantage Alexandre, même il fut si osé que de défendre Parménion. >> VAUG. HAUTEUR, COLLINE, ÉMINENCE. Élévation de terre peu considérable.

La hauteur se considère par rapport à sa hauteur, à la distance qu'il y a de sa base à son sommet. Elle oblige à monter ou à descendre plus ou moins, et, quand on est dessus, on se trouve plus ou moins élevé relativement à ce qu'on a devant soi, on le voit, on en est vu plus aisément, ou bien on est au-dessus de ses atteintes comme il arrive dans une inondation, par exemple.

Nous perdons l'haleine, parce que l'haleine nous manque, parce que nous ne trouvons plus de quoi respirer. « Nous volâmes si rapidement, que je La colline se considère par rapport à son incliperdais presque 1haleine en fendant le vague de naison: elle s'étend en pente douce. Ensuite et l'air.» FEN. Perdre la respiration, c'est, par op- en conséquence elle est ordinairement cultivée et pression ou autrement, perdre l'usage de la fonc-offre à l'œil des sites agréables, de belles perspection de la vie la plus visiblement essentielle. Télémaque dit en parlant de sa lutte avec un Rhodien: « Nous nous serràmes à perdre la respiration. » FEN.

HARDI, ENTREPRENANT, OSÉ. Qui se comporte résolûment, sans hésitation, sans se laisser intimider ou détourner par rien.

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tives; si bien que le mot de colline est, non pas comme celui de hauteur, un terme abstrait et géométrique, mais un mot pittoresque.

L'éminence a cela de tout à fait particulier, qu'elle est isolée, qu'elle ne se développe pas en longueur; c'est moins une petite montagne qu'un petit mont; c'est une hauteur en forme de butte, Hardi et entreprenant diffèrent d'abord en ce quelque chose de semblable sur la surface de la terre qu'ils se rapportent, l'un à une action particulière, à ce qu'est une tumeur sur le corps d'un homme. et l'autre à une entreprise, c'est-à-dire à toute une Quand on descend ou qu'on remonte un fleuve, le suite d'actions ayant pour objet de s'emparer de Rhône, par exemple, on aperçoit à droite et à quelque chose. Pour un coup de main il faut un gauche des suites de petites montagnes, c'est-àhomme hardi qui sache affronter le péril; mais dire des hauteurs et des collines, mais non pas pour former des projets ou des plans et tenter for- des éminences; ce sont des éminences, au contune en consequence, il faut un homme entrepre- traire, que les monticules qui se trouvent sur un nant qui ne soit pas aisément rebuté par les diffi- vaste espace de terre, comme de grandes taupicultés. On est hardi et déterminé, entreprenant et nières, de distance en distance : « Des éminences ambitieux. Un soldat est hardi dans le combat, distribuées dans le milieu des terres arrêtent les aussi Voltaire dit-il de Henri IV « qu'il s'exposait vapeurs de l'air, rendent les sources intarissables comme le plus hardi soldat; » mais un conquérant et toujours nouvelles, » BEFF. De dessus une hauest entreprenant, ainsi Démosthènes, suivant Rol-teur ou une colline on voit loin en avant; de deslin, représentait Philippe & comme un prince inquiet, entreprenant, ambitieux, dont le plan était d'envahir toute la Grèce.» « Romulus n'eut pour sujets qu'un assemblage de gens hardis, détermi-mène mes yeux de tous côtés, et j'aperçois de loin nés, féroces, qui n'espéraient de sûreté pour leur la fumée qui sortait du palais de Circé. » FÉN. personne que par la force.... Un des caractères HIATUS, BÂILLEMENT. Termes de grammaire dominants du peuple romain a été d'être belli- relatifs à l'espèce de cacophonie qui résulte de la queux, entreprenant, conquérant........ » ROLL. Ti- rencontre, de la succession immédiate de deux bérius Gracchus était poussé (à publier la loi voyelles, particulièrement quand elle a lieu sans agraire) par quelques amis hardis, et d'un naturel élision entre un mot qui finit et un mot qui entreprenant. » S. R. Jac ¡ues d'Artevelle était commence il fut invité alors, invité ensuite à un brasseur de bière, fictieux et entreprenant, qui faire telle chose. « Les Italiens ont été obligés de ne trouvait rien difficile; il était fin et de bon con- se permettre cet achoppement de sons qui détruiseil, aussi hardi dans l'exécution qu'habile à ha-sent l'harmonie naturelle, ces hiatus, ces bailleranguer le peuple. » Boss. Sans de hardis naviga-ments que les Latins étaient soigneux d'éviter. »> teurs, un ministre ou un négociant d'un génie VOLT. vaste et entreprenant pour le commerce maritime ne saurait réussir dans ses desseins.

sus une éminence on voit loin de tous côtés : « Je m'avance dans la campagne pour aller à la découverte du pays. Je monte sur une éminence, je pro

Voltaire, dans cet exemple, et Dumarsais, dans l'Encyclopédie, article Bdillement, semblent reOsé se distingue nettement de ses deux syno-garder ces deux mots comme tout à fait synonymes par son caractère social. Ce que l'homme nymes. Il y a cependant une différence à mettre osé brave, ce ne sont pas les dangers, c'est l'auto- entre l'un et l'autre. rité. Avec un degré de plus, le hardi et l'entre

Hiatus est un mot emprunté du latin tel quel,

sans aucune modification de forme, et baillement | meurtriers la communion jusqu'à la mort. » PASC. tire certainement son origine d'une langue vul- Par conséquent meurtrier enchérit sur homicide. gaire. C'est pourquoi hiatus, tout littéraire, est « Je ne puis ne point haïr les Athéniens, auteurs le mot propre dans cette acception, la seule qu'il de cette malheureuse guerre, comme les homiaft; au lieu que baillement signifie presque tou-cides et les meurtriers de mes enfants. » ROLL. jours, au physique, une ouverture involontaire -Quand les deux mots se prennent adjectivement, de la bouche avec grand écartement des mâchoi- homicide marque avec l'action de tuer un rapport res, et se prend rarement, et seulement par ex-moins prochain on dit un dessein homicide tension, dans le sens dont il s'agit ici. L'hiatus est un fait dont il est naturellement question dans une théorie sur l'harmonie des mots et du langage; le baillement est un phénomène dont l'étude appartient à l'anatomie et à la physiologie. Ce qu'on considère dans l'hiatus c'est le son, et dans le baillement, c'est l'organe, la bouche. « Il y avait peut-être chez les anciens une espèce de baillement dans l'hiatus; mais s'il y en a chez nous, il est insensible. » MARM.

Outre cela, baillement, en conséquence de son origine, est moins noble que son synonyme. Si de bons écrivains s'en servent quelquefois dans la signification étroite d'hiatus, ce ne peut être que dans le discours commun, sinon familier. Ainsi appeler le défaut grammatical en question baillement, comme l'a fait Dumarsais dans l'article de l'Encyclopédie où il en traite, c'est employer l'expression non-seulement la moins propre, mais

encore la moins relevée.

HOMICIDE, MEURTRIER, ASSASSIN. Noms donnés à un homme coupable d'en avoir tué un autre.

Homicide a la signification la plus générale. Pour être appelé de ce nom il suffit d'avoir tué un homme même sans le vouloir, par accident, par imprudence ou inattention, en le frappant, par exemple, dans un accès de colère sans avoir l'intention que mort s'ensuivît. Il y a des homicides involontaires, et naturellement ils sont punis d'une manière moins rigoureuse que les meurtriers et les assassins. « L'asile ne regarda d'abord que les homicides involontaires; mais, lorsqu'on y comprit les grands criminels, on tomba dans une contradiction grossière. » MONTESQ. « Les lois de Moïse furent très-sages. Les homicides involontaires étaient innocents, mais ils devaient être ôtés de devant les yeux des parents du mort: il établit donc un asile pour eux. » ID. « En médecine une bévue, une impéritie, n'exposent pas à moins qu'à commettre un homicide. » PIR. D'ailleurs, on dit bien être homicide de soi-même (ACAD., BOURD.), et il se peut que l'action de l'homicide dirigée contre autrui ne présente aucun caractère criminel ou qu'elle soit tout au moins excusable.

Ne descendez-vous pas de ces fameux lévites
Qui...,

De leurs plus chers parents saintement homicides,
Consacrèrent leurs mains dans le sang des pertides?
RAC.

(ACAD), des cris homicides (LAH.), et une arme meurtrière (ACAD., MASS.), un combat meurtrier (ACAD.). Ce qui est homicide tend à donner la mort; ce qui est meurtrier la donne.

Assassin renchérit sur meurtrier même. « On vengera ses querelles particulières par les meurtres et les assassinats. » BOURD. L'assassin commet un meurtre avec préméditation ou de guet-apens. C'est un méchant qui a longuement ruminé son crime, ou un lâche, un traître qui machine dans l'ombre et use de moyens secrets, afin de ne pas manquer sa victime et de conserver sur elle un avantage tel qu'elle ne puisse ni s'enfuir ni se défendre. « Si ces personnes étaient en danger d'être assassinées, s'offenseraient-elles de ce qu'on les avertirait de l'embûche qu'on leur dresse, et s'amuseraient-elles à se plaindre du peu de charité qu'on aurait de découvrir le dessein criminel de ces assassins?» PASC. « Cet assassinat de la part d'un lâche qui veut faire périr l'objet de sa haine, et qui n'ose le faire ouvertement, était bien digne de la cour de Byzance. » THOM.

Comme à mon ennemi je t'ai donné la vie,
El, malgré la fureur de ton lâche dessein,
Je te la donne encor comme à mon assassin.
(Auguste à Cinna). CORN.
Exécrable assassin d'un héros que j'adore!
Va, tu l'as pris en traître.

(Chimène à don Sanche, dans le Cid). ID. L'autre a fui làchement, tel qu'un vil assassin. VOLT. D'indignes assassins

Des piéges de la mort ont semé les chemins. ID. On dit figurément et familièrement des yeux assassins en parlant d'yeux qui tendent des embûches, qui attendent les gens au passage pour les blesser tout à coup, à l'improviste. De même on appelle assassinats des outrages ou des discours d'une méchanceté noire contre lesquels il n'y a point de défense. « Ils l'ont attendu au coin d'une rue, et l'ont chargé de coups: c'est un assassinat. » ACAD. « Cette calomnie est un véritable assassinat. » ACAD.

Ces distinctions ont été consacrées par la loi pénale française, qui gradue les peines, applicables à un attentat contre la vie d'une personne, suivant que cet attentat peut être qualifié d'homicide, de meurtre ou d'assassinat. L'homicide est excusé, et puni seulement d'un emprisonnement avec dommages-intérêts des parties lésées; mais le meurtrier est condamné aux travaux forcés à perpétuité, et pour l'assassin la punition est la

mort.

Qui m'osera punir d'un si juste homicide? VOLT. Le meurtrier est celui qui a commis un meurtre, Les nuances d'idées attachées à ces trois termes c'est-à-dire un homicide volontaire, c'est celui qui sont trop importantes au point de vue du droit a tué un homme à dessein, de propos délibéré. pour n'avoir pas d'expressions correspondantes L'Église abborre tellement la calomnie, qu'elle dans toutes les langues. En allemand elles sont désil'a punie de même qu'un homicide volontaire. Cargnées avec non moins de précision qu'en français elle a différé aux calomniateurs aussi bien qu'aux par les mots Todtschlag, Mord et Meuchelmord.

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