Page images
PDF
EPUB
[ocr errors]

La nécessité enfin est une contrainte secrète. « On a imaginé de distinguer entre nécessité et contrainte; mais au fond la contrainte est-elle autre chose qu'une nécessité dont on s'aperçoit? Et la nécessité n'est-elle pas une contrainte dont on ne s'aperçoit point?» VOLT.

destement aux premiers journaux des savants, | qu'à la violence pour sauver Iphigénie malgré parce qu'elle est de lui. » ID. Laharpe rabaisse elle. » LAH. singulièrement le poëme de Silius Italicus en disant: «Comme tout cela ne produit que quelques discours inutiles, la présence de Junon n'empêche pas que l'ouvrage ne soit une gazette en vers; la diction passe pour être assez pure, mais elle est faible et habituelle nent médiocre. »> Que si un ouvrage est traité de journal, c'est une qualification moins dédaigneuse : « Un excellent historien est peut-ête encore plus rare qu'un grand poëte....: Xénophon n'a fait qu'un journal dans sa Retraite des dix mille; tout y est précis et exact, mais uniforme. » FÉN.

GENEROSITÉ, LIBÉRALITÉ. Penchant ou disposition à bien faire, à traiter les autres favorablement, à user de nos avantages à leur profit.

Cela étant et personne ne se souciant de donner et de laisser donner à son œuvre un nom peu avantageux, gazet e a partout cédé la place à jour-point avare. nal, et journaliste a été créé pour être substitué à gazetier, désormais terme d'injure. Gazette ne s'emploie plus en bonne part que comme nom propre servant de titre à certains journaux plus ou moins anciens Gazette de France, Gazette des tribunaur, Gazette médicale. De son côté, journal, pour devenir le terme unique et particulièrement le remplaçant de gazette, a dû perdre et a effectivement perdu sa signification primitive. Le journal, tel que nous l'entendons aujourd'hui, ne s'occupe plus de sciences et de littérature, objet spécial des Revues, ou s'il en traite encore, ce n'est que par accident et dans un endroit séparé, à la fin de la feuille, sous le titre de Variétés, ou au bas, dans ce qu'on appelle le feuilleton.

GÊNE, CONTRAINTE, VIOLENCE, NÉCESSITÉ. Ce que tous ces mots ont de commun, c'est qu'ils expriment une atteinte à la liberté.

Mais d'abord, pour ce qui concerne la gêne et la contrainte, elles n'attaquent pas la liberté de la même manière. La gêne agit d'une manière négative, en empêchant, c'est une entrave; la contrainte influe d'une manière positive, en forçant d'aller ou de faire, en donnant l'impulsion, c'est un ordre ou quelque chose à quoi il faut obéir. Gêné, on n'agit pas librement, c'est-à-dire à l'aise, sans obstacle, sans rien qui arrête; contraint, on n'ag t pas librement, c'est-à-dire volontairement, de son plein gré, on ne se détermine pas de soi-même, on n'a pas l'initiative de son action. La gêne vous met dans la position d'un homme qui est en prison, dans les fers ou tout au moins embarrassé; la contrainte vous oblige à suivre les volontés d'un maître comme fait le cheval à l'egard du cavalier qui le mène. On fait quelque chose malgré la gêne, et par contrainte. La gêne est prohibitive et incommode, témoin celle de la rime et celle des bienséances; la contrainte est impérative et pressante, comme est celle d parents qui forcent leurs enfants à prendre un engagement ou un parti.

La violence, de son côté, consiste en une contrainte violente, qui emploie la force, la force ouverte, les armes. « Un prince, qui est toujours dans cet état dans lequel il force ou il est forcé, ne peut pas se plaindre d'un traité qu'on lui a fait faire par 1 iolence. » MONTESQ. « J'aime à voir dans Racine le bouillant Achille aller presque jusSUPPL. SYN. FRANC.

C'est ce que générosité exprime de la manière la plus générale. Mais la libéralité, comme le remarque judicieusement Vauvenargues, est une branche de la générosité, savoir l'espèce de générosité qui consiste à donner avec plaisir, à n'être Êtes-vous libéral? Je ne suis point avare. CORN. Après la défaite de Maxence, Constantin se montra libéral, mais non pas généreur i fit une loi qui ordonnait de prendre sur le trésor public ou sur son domaine de quoi nourrir les enfants lorsque les pères seraient trop pauvres pour les entretenir; mais il fit livrer aux bêtes un grand nombre de prisonniers qu'il avait faits sur les Francs (Cont.). « Auguste était tout treur, et sa générosité n'a jamais paru avec tant d'éclat que dans les effets de sa clémence et de sa libéralité. » CORN. On le voit par les deux derniers exemples, la générosité ne se borne pas comme la libéralité à faire des dons ou des largesses; elle a quelquefois pour effet de nous porter à la clémence, au pardon des injures, au sacrifice de nos affections les plus fortes et de nos intérêts les plus chers, quels qu'ils soient, même au sacrifice de notre vie. « Il n'était parlé que de Postumius (qui avait opiné qu'on devait le livrer aux Samnites et rompre le traité qu'il avait conclu avec eux) : tout le monde le comblait de louanges, et l'on comparait sa générosité à celle de Décius qui s'était dévoué pour la pa'rie. » ROLL.

Mais comment diffère la générosité de la libéralité, quand le premier de ces mots se prend dans le sens particulier au second, quand ils désignent l'un et l'autre une inclination bienfaisante? Là est la vraie difficulté.

La générosité est plus méritoire : elle suppose de la grandeur d'âme, de l'empire sur nous-mêmes, une vic oire remportée sur nos instincts de personnalité; elle implique l'idée de sacrifice et nous détermine à donner, quoi qu'il nous en coûte soit à raison de la modicité de nos moyens soit à cause de nos sentiments pour la personne à qui nous donnons. « On dit que Molière donna cent louis à Racine pour l'encourager à entreprendre une tragédie. Cette générosité de la part d'un comédien qui n'était pas riche me touche. » VAUV. a Cette générosité passa de la ville dans le camp. Aucun cavalier, aucun centurion ne voulut reccvoir de paye. ROLL. « Qui pourra se sauver? Ce fidèle généreux qui comble de bienfaits l'ennemi qui a voulu le perdre. » MASS. « Vous êtes bien généreuse de recevoir si bien un ambassadeur qui va vous faire tant de mal. » SÉv.

La générosité est une vertu, puisqu'elle ne s'exerce pas sans efforts sur nous-mêmes; le latin

11

a

Mais le germe se considère comme étant dans la personne ou dans la chose et la semence comme y ayant été jetée ou apportée. On aperçoit dans un enfant des germes de vertus (COND.); le but de l'éducation est de jeter des semences de vertus dans les cours de la jeunesse (J. J.). Des doutes que vous concevez sur un sujet deviennent pour vous le germe de certaines réflexions (VOLT.); le socianisme est une doctrine dont Fauste Socin surtout répandit les semences en Europe (ID.), Le czar Pierre avait en lui les germes du génie et de la grandeur (THOM.); c'est le mème prince qui a porté en Russie les semences de tous les arts (ID.).

generosus (de genus, race) s'est dit primitivement mots signifient tous deux un principe d'où naît des animaux de bonne race, chevaux, chiens, quelque chose. lions, etc., qui ont la force de surmonter l'instinct de conservation en s'exposant au péril. Il n'en est pas de même de la libéralité : le libéral donne abondamment et sans y être obligé (libere); mais il n'a pas à lutter contre lui-même et à se vaincre; c'est un bienfaiteur opulent et bienveillant, dont les ressources sont très-grandes et qui en dispose en faveur de personnes à l'egard desquelles il n'est retenu par aucun motif de haine, qui sont à plaindre peut-être, mais dont il n'a pas à se plaindre. «Un homme livré à l'ambition se refond, se métamorphose, il force son naturel.... D'une humeur serrée et épargnante, il devient libéral, prodigue même, tout est inondé de ses dons. » MASS. « Jésus-Christ sera un roi libéral qui comblera notre âme de faveurs. » ID. « Dans l'inégalité de ce qu'on donne par une pure libéralité il n'y a point d'injustice. » Boss. Clitandre fait de la dépense, parce qu'il est amoureux; l'amour rend libéral. REGN. «< La libéralité paraissait à Cyrus une vertu véritablement royale; mais il faisait encore plus de cas de la bonté.... D'aimer plus que les autres à donner, quand on est infiniment plus riche qu'eux, est une chose moins surprenante que de descendre du trône pour s'égaler à ses sujets. » ROLL. La bonne Péquigny est la seule personne que j'aie vue qui exerce sans contrainte la vertu de libéralité elle donne, elle jette, elle habille, elle nourrit les pauvres.... Il est vrai qu'elle a vingt-cinq mille écus de rente, et qu'à Paris elle n'en dépense pas dix mille. » SEV. Bien loin de demander qu'on se prive ou qu'on se contraigne, condition essentielle de la vertu proprement dite, il se peut que la libéralité soit un defaut, celui d'un homme prodigue, d'un homme qui s'abandonne à son goût pour les profusions. « La libéralité de Charles XII, dégénérant en profusion, a ruiné la Suède. » VOLT. « Antoine aimait à donner; la libéralité était même un vice en lui, parce qu'il la portait jusqu'à la prodigalité. » COND. « La libéralité de l'indigent est nommée prodigalité. » VAUV.

[ocr errors]

:

<«< Imitons la reconnaissance et la générosité des enfants du siècle. Quand le prince les a honorés de ses bienfaits et élevés à des postes brillants, ils sacrifient leur vie pour lui en marquer leur reconnaissance : ils ne comptent pour rien les fatigues et les périls: ils em loient généreusement pour la gloire du prince les biens qu'ils tiennent de sa libéralité. » MASS. « Avez-vous (pour Dieu) cet amour généreux à qui rien ne coûte, dès qu'il y va de sa gloire; cet amour libéral qui ne ménage rien, dès qu'il est question de ses intérêts? » BOURD.

La générosité a quelque chose de plus que la libéralité, et est bien au-dessus; on aime naturellement à donner, mais il ne se trouve guère de personnes vraiment généreuses; celles qui le sont ont l'âme grande; c'est une des plus belles qualités qu'on puisse avoir; elle rend incapable d'intérêt et fait réussir en ce qu'on entreprend, parce qu'elle donne le courage de surmonter les obstacles. » MAINT.

Germe annonce un principe plus éloigné, et semence un principe plus prochain. En effet la semence est un germe non pas seulement fécondé, mais encore semé, c'est-à-dire déposé dans un terrain propre pour le développer et le faire pousser. « La paix d'Aix-la-Chapelle semblait avoir pacifié l'Europe; mais le germe de toutes les guerres, l'ambition et l'intérêt, subsistait encore.... L'Angleterre cherchait, dans l'exécution même du traité de paix, de nouvelles semences de guerre. » THOм. « Ce n'était pas assez pour Henri IV d'avoir arraché toute semence de guerre civile; il avait encore besoin de n'être pas troublé par des dissensions domestiques. Car les petites tracasseries, d'abord concentrées dans le palais, sont le germe des factions qui tôt ou tard déchirent un royaume. » COND. - Si on veut exprimer une origine d'une manière de plus en plus vague et indéterminée, on se servira de germe après avoir employé semence sur lequel il enchérira: « Voilà le culte que je cherche il n'était chez les Juifs qu'en figure, on n'y en trouvait que la semence, qu'un germe, qu'une ombre. » FÉN. Ce sera, au contraire, semence qu'on mettra après germe quand il s'agira de représenter une cause qui approche de plus en plus de son effet : « César regardait alors tout trouble et toute faction dans l'État comme un germe et une semence de ce qu'il prétendait faire lui-même. » ROLL.

Outre cela, comme, au propre, germe se dit particulièrement des animaux, et semence des plantes, et que les plantes sont placées au-dessous des animaux dans l'échelle des êtres, germe se prend plus volontiers en bonne et semence en mauvaise part. « On se demande comment un Dieu, qui est la bonté même, a laissé dans le cœur de l'homme tant de semences de malice; et comment il a permis que le principe, que le germe de la bonté y fut si corruptible?» MARM. <<< Semer, voir éclore, cultiver soi-même dans l'esprit et dans l'âme de ses enfants les premiers germes des vertus, et en extirper les semences du vice. » ID.

GLACÉ, GLACIAL. Très-froid, au figuré.

Glacé dit plus que glacial; car il signifie gelé ou réduit en glace, au lieu que glacial marque seulement un rapport de ressemblance ou de cou venance à la glace.

Ensuite glacé sert à qualifier quelque chose GERME, SEMENCE. Au figuré et au moral ces d'accidentel ou qui arrive dans un certain cas, et

glacial est pour l'habituel, pour ce qui arrive toujours un homme a l'abord glacial, et dans l'occasion il fait ou on fait à quelqu'un un accueil glacé (LES.); un acteur a constamment le jeu glacial, et dans une circonstance particulière on lui trouve le jeu glacé.

En outre, glacé regarde plutôt le fond des choses, et glacial la forme réponse glacée (ACAD.), silence glacé (LES.), trouver à quelqu'un quelque chose de froid et de glacé (DELAF); air ou style glacial (ACAD.), une pièce de théâtre glaciale (LAH.).

GLANER, GRAPILLER. Pris au figuré, ces deux mots veulent dire l'un et l'autre recueillir encore ou trouver encore à recueillir quelque chose de bon.

-

Mais glaner n'exprime rien que de louable. « Le vieux Caderousse s'était ruiné à ne rien faire, son fils et sa fille avaient achevé à jouer. Il y avait encore à glaner en mettant quelque ordre à leurs biens. S. S. - De plus, la principale application de ce mot est toute littéraire : glaner, c'est pour l'ordinaire savoir tirer encore quelque chose d'une matière qui semblait épuisée. « Il n'y a pas de quoi glaner après ma fille; elle a en vérité tout dit, et mieux que je n'eusse pu faire. » SEV. • Après les quatre pièces (lyriques) qui viennent de nous occuper, on n'en trouve plus dans les écrivains morts une seule qui mérite une place; et l'on ne peut plus, en parcourant les recueils, glaner que quelques strophes éparses. » LAH. « Depuis le temps qu'on écrit, presque toutes les idées premières ont été saisies; or, que la moisson ait été faite par des hommes de génie et de goût, l'on s'en console en glanant après eux et en jouissant de leurs richesses. » MARM. « On ne pouvait plus (au temps de Virgile) que glaner dans la Grèce; il y avait à moissonner en Italie. » DEL.

Les temps sont durs, même pour un génie....
On peut encor glaner dans la satire;

Mais pour la scène il n'est plus temps d'écrire.
On a tout dit....

CHÉN.

Grapiller est d'une tout autre sorte. Il n'a rien de littéraire, et il se prend en mauvaise part pour signifier, faire de petits profits illicites ou blamables. « C'est ce qui prit fin par la parade que Voysin fit au feu roi de retrancher ce qu'il traita d'abus au profit de ses finances. C'etait à cette sage et savante pratique de Louvois qu'il fallait revenir, au lieu de tirer et de grapiller incessamment sur les troupes dans le faux objet de soulager les finances à leurs dépens. » S. S. « Avec cela (ses gages et une gratification) et ce que je pouvais avoir grapillé dans les petites commissions dont on avait chargé mon intégrité, je fus en état de me mettre proprement. » LES. « Notre politique ne songe qu'à escamoter et grapiller ce qu'elle trouve sous sa main. Plus ces expressions sont basses, plus elles sont propres à rendre ma pensée et le sentiment dont je suis affecté. » COND.

PASQUIN.

Ne devrait-elle pas empêcher que Cléon
N'achève de ses biens la dissipation?

Mais bien loin de sauver son amant du pillage,
C'est elle qui s'y porte avec plus de courage....
Hé! tu suis son allure avec assez d'adresse....
De même que Julie, ardente à nous piller....

FINETTE.

Oh! pour moi, je n'ai fait encor que grapiller. DEST. GOUVERNAIL, TIMON. Pièce de bois attachée à l'arrière d'un navire et qui sert à le diriger;' au figuré, ces deux mots s'emploient en parlant de la conduite de certaines choses, de la conduite d'un Etat, par exemple.

Au propre, point de difficulté: timon est trèsrare dans cette acception, outre qu'il signifie d'ordinaire une partie seulement du gouvernail, celle que les marins appellent la barre.

Mais, au figuré, c'est gouvernail qui, à son tour, paraît le moins usité. On ne l'y emploie guère d'une manière absolue et sans rappeler l'acception propre du mot. « Si on prefère le doux loisir de la ville aux dangers et aux fatigues du camp, qu'on ne s'avise pas de vouloir tenir le gouvernail en demeurant tranquille dans le port. ROLL. « Lors qu'avec un peu de courage on travaille à détruire ces répugnances, qu'on rame contre le fil de l'eau, on trouve la chose aisée, parce que Jésus nous aide dans notre travail jusqu'à ce qu'il prenne lui-même le gouvernail. FEN.

[ocr errors]
[ocr errors]

Timon, tout métaphorique, et plus indépendant du sens propre, convient particulièrement dans l'acception figurée. Aussi est-il généralement préferé en poésie. Quelquefois l'imagination enlève le timon au jugement; alors l'homme devient fou. BERN. Dans sa vie épitre, Boileau parle

De es rois nés valets de leurs propres ministres
Et qui jamais en main ne prenant le timon,
Aux exploits de leur temps ne prêtaient que leur nom
Agrippine dit de Néron dans Britannicus:
Ai-je mis dans sa main le timon de l'État
Pour le conduire au gré du peuple ou du sénat? RAC.
Est-il doux de régner?

Est-il doux de tenir le timon d'un empire
Pour en voir les soutiens toujours se contredire?

CORN

GRAIN, BRIN. Figurément ces mots signifient, tous deux un peu, une petite quantité: Un grain un brin d'amour ou de raison."

[ocr errors]

Mais un grain se considère par rapport à autre chose avec quoi il forme un tas ou un mélange, et c'est pour cela qu'on dit bien augmenter ou diminuer d'un grain. Je ne ferais pas un stade pour aller la voir si son amitié est diminuée d'un grain.. VOLT. « Jamais une oraison funèbre n'a ajouté un grain à la réputation de personne. » THOM. C'est une chose admirable que tous les grands hommes ont toujours du caprice, quelque petit grain de folie milé à leur science. MOL.

Mme de Montulé avait dans l'esprit et dans le caractère ce grain d'honnête coquetterie qui, mêlé avec la décence, donne aux agréments d'une femme plus de vivacité. » MARM. - Au contraire, un brin de quelque chose se considère, non pas collectivement, mais absolument, en soi. « Ац fond du cœur, j'ai un petit brin d'espérance. » SEV. S'il vous reste un brin d'amitié pour moi. » MARM. Aucun Capouan n'avait porté le moindre brin d'amitié et d'affection à la république romaine » BRANT. Ils ont la prétention de l'esprit sans en avoir un brin. » DUDEFF.-Telle femme est heureusement douée; avec un grain d'imagination

[ocr errors]

VOLT. « Il est dit dans l'Erode: Prenez d'excellente myrrhe, du cinnamum, de l'huile d'olive pour oindre le tabernacle; et on fera mourir quiconque s'oindra d'une pareille composition ou en oindra un étranger. » ID. « Les anciens se fai

ou de caprice ce serait une personne accomplie : |oignaient leurs cheveux avec du beurre fort. » Dans le Mariage de Figaro, le comte dit à la comtesse qu'il prend pour Suzanne: « Toi que l'amour a faite et si vive et si jolie, avec un grain de caprice, tu seras la plus agaçante maitresse.» Telle femme est extrêmement bornée; elle n'a pas un brin d'imag nation : « Esprit bouché! est-il possi-saient oindre au sortir du bain. » ACAD. ble que depuis le temps que nous sommes ensemble il ne te soit pas venu le moindre brin d'imagination? HAM.

D'ailleurs, un grain, au propre, étant quelque chose de précieux, au lieu qu'un brin est quelque chose de chétif ou de vil, un fétu, il s'ensuit que grain est moins essentiellement familier que son synonyme. Un grain d'amour appartient au style commun et se trouve dans une satire de Voltaire; un brin d'amour ou de flamme, ne convient guère qu'en badinant comme dans cette chanson de la Pastorale comique de Molière,

Iris charme mon âme;
Et qui pour elle aura

Le moindre brin de flamme,
Il s'en repentira.

GRAISSER, OINDRE. Frotter d'huile, de pommade ou de quelque autre matière semblable.

Graisser est un mot tout français, formé de celui de graisse. Oindre est pris directement du verbe latin ungere, comme joindre de jungere.

De là dans l'application une différence considérable.

Si toutefois oindre s'emploie aussi par exception pour exprimer quelque pratique moderne. c'est quand il est question de choses relevées et d'ordinaire en termes de médecine ou de liturgie.

Oindre une tumeur avec de l'onguent pour l'amollir. » ACAD « On oint les évêques à leur sacre. ID. «<< Oindre un malade avec les sa n'es huiles. » ID. « Voici le temps de la lutte (de la mort): Eglise sainte, oignez vos athlètes, afin que le démon soit vaincu. » Boss. GRAS; PLEIN,

REPLET:

POTELÉ, REBONDI ; - DODU. Qui a de l'embonpoint. Gras est le terme général; il ne spécifie rien et se trouve parfois suivi de quelqu'un de ses synonymes qui sert alors à le déterminer gras et replet (Bo-s., BUFF., DID.); gras et potelé (SÉv., BUFF.); gras et rebondi (LAF.); gras et dodu (VOLT). Il se rapporte à tout le corps de l'animal et se prend en bonne plutôt qu'en mauvaise part, étant opposé à maigre qui signifie un défaut. «Je suis ravie que vous vous portiez bien, et que vous soyez grasse, c'est-à-dire belle. » SEV.

Ce loup rencontre un dogue aussi puissant que beau,
Gras, poli....

LAF.

Plein et replet représentent l'embonpoint sous le rapport de la quan.ité: ils se disent d'un homme qui est gros, bien fourni de graisse et de chair. Quant à la différence de l'un à l'autre, elle est aussi simple qu'incontestable. Plein, qui est rempli, et non pas vide, et non pas décharné ou sec, n'annonce rien que de modéré. M. le duc d'Orléans était d'une taille médiocre au plus, fort plein, sans être gros. S. S. «Daguesseau, de taille médiocre, fut gros, avec un visage fort plein et agréable.» ID. Mais replet, du latin repletus, rempli et rempli encore, rassasié, gorgé, las, est tout au moins très-propre à marquer un excès.

[ocr errors]

Graisser est l'expression vulgaire, et ne se dit qu'en parlant de ce qui se fait de nos jours. Dans les Précieuses ridicules, Gorgibus dit de ses filles : « Ces pendardes-là, avec leur pommade, ont, je pense, envie de me ruiner. » Puis, s'adressant à elles-mêmes. Il est bien nécessaire, vraiment, de faire tant de dépense pour vous graisser le museau!» MOL. « Le vicaire du Temple étant venu administrer l'extrême-onction à ce vaurien ah! monsieur l'abbé, lui dit-il, vous venez me graisser les bottes.» MARM. « On fait graisser l'essieu de son carrosse en voyage. » VOLT. On ne peut guère se dispenser d'étriller les boeufs tous les jours, de les laver, de leur graisser la corne des pieds, etc. » Guillaume duc de Normandie) était gros et BUFF. Un jardinier prend une vieille corde; il reple; Philippe (Ir) demandait un jour, en se la graisse avec une figue et l'enterre dans un moquant, quand il accoucheraít. » Buss. « Ptosillon; et je vois quelque temps après que tous lémée Évergète II eut dans la suite le sobriquet ces petits grains ont percé la terre. MAL. « Side Physcon, qui veut dire gros ventre, parce que Andrée n'entre dans mes vues avec piété, il est impossible qu'elle y fasse bien, car il n'est pas délicieux de passer sa vie à tuer des poux, à graisser de la gale, à faire laver des pieds.... » MAINT.

[ocr errors]
[ocr errors]

Mais oindre est exclusivement réservé pour rappeler des usages anciens. « Anciennement on avait coutume d'oindre les corps de ceux qui devaient combattre dans les spectacles publics. FEN.« Marie se mit aux pieds de Jésus, qu'elle oignit d'un parfum exquis. Il est arrivé trois fois au Sauveur d'être oint par de pieuses femmes. » Boss. Quand on embaumait un corps chez les Egyptiens, on l'oignait pendant plus de trente jours avec de la gomme de cèdre, de la myrrhe, du cinnamome et d'autres parfums.» BUFF. « Dans le cinquième siècle de notre ère, les Bourguignons

[ocr errors]

ses excès de table l'avaient rendu extrêmement gros et replet. » ROLL. « Peut être la constitution làche, molle et replète étant bien d'un Silène, d'une bacchante et d'autres êtres crapuleux, conviendrait-elle tout-à-fait dans une bacchanale. »> DID.

Potelé et rebondi représentent l'embonpoint sous le rapport de la forme ils se disent d'un corps ou d'une partie d'un corps qui est remarquable, non plus par l'abondance de la matière, mais par sa rondeur. Et ce qui les distingue l'un de l'autre, c'est que potelé donne l'idée d'une rondeur complète, et rebondi celle d'une rondeur partielle, d'une demi-rondeur. e qu'on qualifie de potelé est comme un cylindre ou un rouleau, comme ce qui est fait au tour ou ce qui sort des mains du potier. « Ce taureau était blanc, fait au tour, potelé. » VOLT. « Chère petite main

[ocr errors]

rondelette et potelée. » MARIV. Aussi ce mot s'em- de quelqu'un qui agit, et pour indiquer la maploie-t-il de préiérence en parlant des parties du nière dont il agit. «Ne chercher son salut que corps qui ont une circonférence et qu'on considère par conformité au bon plaisir divin qui nous le sous ce point de vue : « Un bras rond et po- promet gratuitement. » FEN. « Comme Polygnote telé, des bras potelės. » ACAD. Mais rebondi se piquait d'honneur et était plus sensible à la s'applique ou est relatif aux parties du corps qui gloire qu'à l'intérêt, il avait fait ce tableau grasont susceptibles de saillir, de former une émi- tuitement et sans vouloir en tirer aucune récomnence seulement, quand elles sont soulevées par pense. » ROLL. « Je n'ai jamais pensé à vous offrir la graisse des joues rebondies (ACAD., VOLT.); gratuitement l'emploi de mon temps. J. J. « Il une croupe rebondie (ACAD.); une face (VOLT.), n'y a que l'Europe seule où l'on vende l'hospitaune mine (CHEN.) rebondie. « Il y a bien des vi-lité. Dans toute l'Asie on vous loge gratuitement. » sages allongés. Que le vôtre devienne plus re- ID. « Elle mettrait dans le plus grand danger cebondi! Nul bonheur n'est pareil au vôtre. » ¦ lui qui lui rendrait gratuitement service. » VOLT. DUDEFF.

Dodu, queile qu'en soit l'étymologie, se distingue par un accessoire bien caractéristique. Il a rapport à l'usage qui peut être fait de la personne ou de la chose; il la fait concevoir comme fraîche et appétissante. << Passe encore que les pères mangent les enfants qui sont dodus et tendres. » VOLT.

Ces pigeons sont dodus, mangez, sur ma parole. BOIL.
Cette anguille est dodue, et vaut bien un poulet;

Au lieu d'en faire un bracelet,

Va m'en faire une matelote. REGN.

Un lion fit le goutteux

Et publia qu'il était permis

A biches fraiches et dodues

«Profitant de l'amitié qu'un vieux parent avait pour moi, j'acceptai un logement qu'il m'offrit gratuitement avec sa table. » LES. «< Une de ces deux personnes est attaquée d'une épilepsie accidentelle, et M. Malouet, médecin charitable, a entrepris la cure gratuitement. » BACH << Nous devons sortir de cette vie comme d'un banquet, en remerciant et bénissant la divinité qui nous y invite gratuitement. » BERN.

Lors même qu'on se sert de gratis avec donner ou tout autre verbe équivalent, on ne doit pas le considérer comme ayant le même sens que son synonyme, c'est-à-dire comme se rapportant au sujet, comme le qualifiant, comme en faisant connaître les sentiments ou les dispositions. Qui donne gratis ne fait rien payer; qui donne graFigurez-vous la plus jolie petite mignonne, tuitement se montre désintéressé et généreux douce, tendre, accorte et fraîche, agaçant l'ap-(gratuitus). Des juges rendent la justice gratis, pétit, pied furtif, taille adroite, élancée, bras des comédiens jouent gratis certains jours de fete, dodus....» BEAUM.

[ocr errors]

De se ren ire à sa cour. HAM.

Sculpte vous quelque beauté nue

De qui la chair blanche et dodue

Séduise l'œil du spectateur,

Et qui dans son âme insinue
Ces doux desirs et cette ardeur

Dont Pygmalion le sculpteur

Brûla, si la fable en st crue? VOLT.

GRATIS, GRATUITEMENT. De pure grâce, sans payement de retour.

C'est ce que gratis signifie en soi, absolument, et ce que gratuitement exprime en rapport avec un sujet d'action.

[ocr errors]

D'ou il suit que gratis convient mieux pour le passif, en parlant d'une chose reçue. «Il reçut tous ses diplômes de grand d'Espagne gratis. » S. S. « Il y a des gens de lettres qui ne sont pas assez riches pour acheter cet ouvrage, et qui le recevront de vous bien volontiers, gratis. » VOLT. "Les choses ne sont ni meilleures ni pires, soit qu'on les paye, soit qu'on les ait gratis. » ID. Il venait chez moi des gens pour m'exciter par des supplications à leur faire obtenir gratis ce qu'ils souhaitaient. » LES. « Laissons ces seigneurs savourer des plaisirs qu'ils achètent si cher, pendant que leurs valets se consolent dans la douce espérance de les avoir gratis. » In. « Le passage et la nourriture me furent accordés gratis. » PREV. « Vous a-t-on donné ordre d'être servi gratis?» MARIV. « Quoique sa place doive être gratis par le droit du roi, je compte de donner mille livres pour elle le lendemain de sa profession.» MINT. Gratuitement, au contraire, s'emploie plutôt pour l'actif, quand il est question

a

il n'y a à cela de leur part aucun mérite, ils y sont obligés; mais c'est gratuitement qu'un avocat, non nommé d'office, en use envers ses clients dont il n'exige pour ses services aucun honoraire. Un médecin traite les pauvres gratis quand il leur donne ses soins sans qu'il leur en coûte rien, parce qu'il en a été chargé moyennant rétribution par l'autorité ou par un bureau de bienfaisance. Mais il les traite gratuitement quand il travaille à leur guérison de son propre mouvement, par un pur sentiment d'humanité, et sans indemnité d'au

cune sorte.

GREFFER, ENTER. C'est couper une petite branche ou lever un œil à la branche d'un arbre en séve, et l'insérer dans une fente d'un autre arbre, afin que la branche ou l'œil reprenne et que l'arbre sur lequel se fait l'insertion porte le fruit de l'arbre d'où on a tiré la branche ou l'œil à insérer.

Greffer rappelle greffe qui signifie une opération: l'opération de la greffe (ACAD.), multiplier par la greffe les arbres les plus précieux (BUFF.). Mais enter, c'est faire des entes, c'est-à-dire des arbres qui ont subi l'opération de la greffe : il y a beaucoup de jeunes entes dans ce jardin (ACAD). On emploie la greffe pour avoir des entes. D'où il suit que greffer a plus de rapport à l'action, et qu'enter en a davantage au résultat. Qui gresse bien est bon gresseur, habile artiste dans le genre dont il s'agit; qui ente bien se distingue par les produits, par les entes qu'il obtient.

D'ailleurs, greffer désignant spécialement l'action ne se dit guère qu'au propre. Enter, au contraire, out relatif au résultat, n'éprouve aucune peine à

« PreviousContinue »