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puissant, incapable de faire; l'infirmité rend chancelant, incapable de se tenir debout ou de résister. On ne peut rien attendre des efforts d'un homme faible; un homme infirme a beaucoup de peine à se tenir ou à se soutenir. Les animaux faibles sont ceux qui ne peuvent vaincre les autres; les animaux infirmes (Boss.) sont ceux qui n'ont pas de défenses ou d'autres armes, comme des cornes, à opposer aux attaques de l'ennemi. Le lion n'est pas un faible ennemi, il s'en faut; cependant il devient infirme quand la vieillesse et les maladies le mettent hors d'état de repousser les atteintes de l'âne même.

De leur audace en vain les vrais chrétiens gémissent; Prêts à la repousser les plus hardis mollissent. BOIL. FAIT (EN) DE, EN MATIÈRE DE. Quand il s'agit de.

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En fait de se dit en parlant de choses de fait, effectives ou réelles, qui arrivent ou qui sont. En fait de guerre (VOLT., ROLL.), de nouvelles (VOLT., MONTESQ.), de pénitence (BOURD.). « En fait de réputation comme en fait de maladies, c'est toujours l'impatience qui nous perd. » D'AL. « Les Allemands voudraient que tout leur fût tracé d'avance en fait de conduite. » STAËL. « Un homme qui n'aurait vu, en fait de chiens, que des barC'est la même différence qu'entre faible et fra- bets ou des épagneuls. » VOLT. Mais en magile. Seulement fragile se dit proprement destière de convient spécialement à l'égard des choses objets, et infirme des êtres vivants. C'est pour- de spéculation, des choses qui sont des matières quoi, au lieu que ce qui est fragile est menacé ou des sujets dont on traite. En matière de phyde rupture, ce qui est infirme est d'ordinaire sique (VOLT.), de littérature (ROLL.), de style menacé de mort. L'infirme est généralement un | (J. J.), de goût (CHÉN.), de raisonnement (S. S.), malade qu'on considère par rapport à la force qui lui reste, et de là vient qu'on appelle_infirmerie | un lieu destiné à recevoir les malades. JésusChrist allait de ville en ville rendant la santé aux infirmes (PASC.). « Pour guérir cette volonté infirme. » ID. « Dire merveilles de sa santé devant des infirmes. >> LABR. « Je naquis infirme et malade, J. J. Catherine donna à Pierre le Grand un fils, dont l'enfance infirme était menacée d'une mort prochaine, et qui mourut en effet bientôt après. » VOLT. Quant au duc d'Orléans, qui voyait le roi (Charles VIII) devenir infirme par ses excès, il reculait autant qu'il pouvait sa sortie du royaume, dont la succession le regardait. » Boss.

Je dis qu'il était vieux pour son peu de santé : Il se plaignait toujours de quelque infirmité. REGN. FAIBLIR, MOLLIR. Perdre de sa force. Faiblir est d'abord plus général que mollir. Il se dit bien, par exemple, en parlant du vin (ACAD.), du talent d'un auteur (STAËL), d'une partie d'un poëme ou d'un écrit quelconque comparée aux autres (LAH.).

Quand faiblir se rapporte particulièrement comme mollir à la force de l'âme, et qu'il exprime un défaut de résolution ou de courage, il en diffère d'une manière qui a été parfaitement saisie et nettement indiquée par Condillac : « On faiblit, dit-il, parce qu'on ne sait pas insister; on mollit, parce qu'on ne sait pas résister. »

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de calcul (STAEL). « En matière de sciences exactes, quelques ouvrages lus et médités profondément suffisent; en matière d'érudition, la lecture des originaux anciens dispense de celle de tous les modernes. » D'AL.

«Par la nature de l'entendement humain nous aimons, en fait de religion, tout ce qui suppose un effort (le célibat, par exemple), comme, en matière de morale, nous aimons spéculativement tout ce qui porte le caractère de la sévérité. » MONTESQ.

En fait de religion est dans cet exemple l'expression propre, parce qu'il y est question de ce qui se fait en religion, de ce qui s'y pratique. Mais on doit préférer en matière de religion quand on considère la religion dogmatiquement, sous le point de vue théorique. Ignorant en matière de religion (BOURD.). « Il ne s'est jamais informé d'aucun homme comment il pensait en matière de religion. » J. J. Pareillement, en fait de politique et en matière de politique s'emploient pour exprimer, le premier une manière de se conduire et le second une manière de penser en politique. «Donn r la plus légère atteinte à l'affection des peuples, c'est, en fait de politique, la faute la plus capitale.... Cicéron regarde comme une vérité incontestable, et comme la base de toutes les règles qu'on peut donner en matière de politique, qu'on ne peut bien gouverner un Etat sans garder en tout une exacte justice. » ROLL.

« L'esprit d'examen en matière de religion conduit nécessairement au gouvernement représentatif en fait d'institutions politiques. » STAËL.

FAMILIARITÉ, PRIVAUTÉ. Manière de parler ou d'en user avec les gens qui exclut toute gêne et toute façon.

Ainsi, faiblir signifie qu'on se relâche, qu'on se dément, qu'on ne se soutient pas, qu'on manque de persévérance. « Aucun de ces ducs ne se démentit, aucun ne faiblit, tous agirent et firent merveilles. » S. S. On aurait peine à rendre le courage avec lequel cet amour si durable de la femme de Cavoye pour son mari la soutint pour l'assister..., et la sépulture à laquelle elle se condamna à sa mort, et qu'elle garda fidèlement jusqu'à la sienne.... Elle se consuma ainsi en peu d'années, sans avoir jamais faibli, ni reculé d'une ligne. » ID. Mais mollir, c'est proprement fléchir, céder, ne pas tenir bon, manquer de fermeté ou de constance. Ce verbe emporte l'idée d'une lutte. Aussi dit-on bien mollir contre (ACAD.). « On se Familiarité appartient à tous les styles, même flattait que le cardinal Albéroni deviendrait plus au plus noble, et il ne marque rien que de perdocile; on disait qu'il commençaità mollir. » S. S. | mis. « Nos premiers pères se présentaient au com

Familiarité, familiaritas, est, à la terminaison près, le mot même qui servait à exprimer cette idée en latin. C'est bien aussi d'un mot latin, priratus, qu'a été formé privauté, ainsi que privé signifiant apprivoisé, non sauvage; mais en bonne latinité privatus ne veut pas dire familier, il n'a pris cette acception qu'au moyen âge. De là toute la différence.

mencement devant Dieu avec une sainte familia- | « Les actes de vertu où je ne vois ni forfanterie rité. » Boss. « Sésostris savait bien choisir les plus honnêtes gens pour les admettre dans sa familiarité. » FÉN. « Vous ouvrirez simplement à Dieu votre cœur avec une entière familiarité. » ID. « Les vrais épanchements du cœur veulent non-seulement l'amitié, mais la familiarité. » J. J. On lit dans l'Encyclopédie : « La familiarité est le charme le plus séduisant et le lien le plus doux de l'amitié. »

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« Il voulut passer par degrés aux privautés les plus choquantes. » J. J. « Tous ces chefs d'accusation ne roulaient que sur quelques tendres privautés, ou tout au plus sur ce qu'on appelle les menus plaisirs d'un commerce. » HAM. « Agrippine vit avec plaisir son fils Néron tomber tout à coup de cette fierté impérieuse à une douceur excessive, et que, passant de la colère à l'enjouement et de l'enjouement à un entretien plus libre, il se laissait insensiblement conduire aux privautés les plus tendres; elle s'imagina qu'elle pourrait enfin pousser ce cœur déréglé aux derniers excès de l'aveuglement. » S. REAL. « Entretenir avec de mortelles créatures des liaisons dont la privauté pervertirait un ange, s'il avait des sens.» BOURD. « Ce goût du cœur, joint à la diversité des sexes, à la familiarité des entretiens, à leur durée et à leur privauté, mène in

sensiblement au vice. » ID.

FANFARONNADE, RODOMONTADE, FANTERIE. Affectation de valeur.

FOR

ni ostentation me font toujours tressaillir de joie.» J. J. « Ce ton ampoulé ressemblait au sublime comme la forfanterie révolutionnaire ressemble à la grandeur romaine. » LAH. On impute, non pas de la fanfaronnerie ou des fanfaronnades, mais de la forfanterie aux médecins (MOL., SÉv.) et aux avocats (RAC.); et c'est ce qu'on appelle de la charlatanerie, quand on considère que c'est un moyen d'attirer des dupes pour les exploiter, pour leur débiter sa marchandise.

FASCINER, ÉBLOUIR. Altérer la vue, causer des illusions, surprendre l'esprit.

Ce qui fascine est mystérieux, magique, un charme, ou bien c'est quelque chose d'artificieux. «Ils sont fascinés par le charme de son hypocrisie. » BOURD. «Que n'ai-je pu apercevoir plus tôt ce bien à travers les charmes trompeurs et les frivoles enchantements qui me fascinaient les yeux!» ID. « Cette fascination (du régent par rapport au cardinal Dubois) ne peut paraître qu'un prodige du premier degré. » S. S. « On voit combien le charme du merveilleux peut fasciner les esprits. » BUFF. « Étrange illusion dont l'ennemi au genre humain nous fascine! » Boss. «< Je ne laisserai aucun lieu aux équivoques dont les hérétiques fascinent le monde. » ID. « Le premier qui osa faire parler Dieu était un composé de fanatisme et de fourberie. La fraude seule ne suffirait pas, elle fascine, et le fanatisme subjugue. » VOLT.

α

Mais ce qui éblouit est éclatant, spécieux, propre à imposer. Eblouir les yeux par sa richesse (Boss.), le vulgaire par un superbe appareil (ID.). « Le nom spécieux de Réforme éblouit les peuples. >> ID. « C'est vouloir éblouir le lecteur par des paroles trompeuses et vides de sens, que de parler ainsi. » FÉN.

Dieu des Juifs, tu l'emportes!
C'est toi qui, me flattant d'une vengeance aisée,
M'as vingt fois en un jour à moi-même opposée;
Tantôt pour un enfant excitant mes remords,
Tantôt m'éblouissant de tes riches trésors....
(Athalie) RAC.

« La multitude se laisse éblouir par un faux
éclat. J. J.

trompe.

La fanfaronnade est d'un fanfaron ou sonneur de fanfares, d'un homme qui est toujours à célébrer ses prouesses. « M. de Vendôme avec ses fanfaronnades repaissait le roi. » S. S. « On accuse le duc d'Enghien de fanfaronnade pour avoir ouvert la tranchée (au siége de Lerida) avec des violons. » VOLT. La rodomontade est une FAUSSETÉ, DUPLICITÉ, PATELINAGE. Cafanfaronnade extravagante, celle d'un ronge-ractère d'un homme qui n'est pas vrai, qui montagne (rodere montes), d'un avaleur de charrettes ferrées, d'un pourfendeur de géants; c'est, dit Condillac, la fanfaronnade qui se vante des plus grands exploits et qui veut paraître braver les plus grands dangers. Villars paya d'effronterie et ne parlait que de manger l'armée ennemie avec ses rodomontades usées. » S. S. « Les poëtes français empruntaient des poëtes espagnols leurs rodomontades et leurs extravagances. »

MARM.

La forfanterie est d'un forfant, d'un homme qui forfait, qui fait mal, qui trompe, qui fourbe. Ce mot, à la différence des deux premiers, n'a certainement aucun rapport à la bravoure: il exprime une affectation de valeur morale, de vertu, ou bien d'un talent étranger à la guerre. Dans le Tartufe, Dorine dit du héros de la pièce : Que d'affectation et de forfanterie! MOL.

Pour ce qui concerne d'abord fausseté et duplicité, la duplicité est une espèce de fausseté qui consiste à jouer deux rôles, à parler d'une manière et à agir d'une autre (COND.), à louer quelqu'un en face et à le déchirer en secret (Mass.). Qu'une femme simule de l'amour, n'en ayant pas, ou qu'elle cache l'amour qu'elle a, elle n'est que fausse. Mais une femme est double, si elle fait accroire qu'elle aime un homme tandis qu'elle en aime un autre. Ainsi, dans les Ménechmes de Regnard, Araminte accuse le chevalier de duplicité, parce qu'elle croit qu'il est infidèle, qu'il joue un double jeu, qu'il en conte à deux. Pareillement, l'hypocrite n'est pas proprement faux, mais double; les sentiments qu'il affecte sont en contradiction avec ceux qu'il a : « Ce n'est pas l'hypocrisie et la duplicité qui fait la grande plaie de

la religion. » MASS. Nous apprenons aux enfants, | être exempts de fausseté; les discours, les aveux, suivant J. J. Rousseau, à devenir faux, c'est-à-de mensonge; l'air, d'imposture; les pratiques, de dire, comme il l'explique fort bien, menteurs ou tromperie. dissimulés, pour extorquer des récompenses ou se dérober aux châtiments. Mais il dit ailleurs que l'éducation du monde n'est propre qu'à faire des hommes doubles, qui paraissent toujours rapporter tout aux autres, mais qui en réalité ne rapportent jamais rien qu'à eux seuls. - Il suit de là que duplicité renchérit sur fausseté : la duplicité est une fausseté odieuse, par laquelle un homme se met sciemment en opposition avec lui-même, avec ce qu'il a dit ou fait, avec ce qu'il fait ou éprouve. « Ce prince se trouvait dès lors en état | de confondre le faux et le double, et de porter une lumière aussi pénétrante qu'inconnue dans l'épaisseur de ces ténèbres. » S. S. « Ils le connaissaient ouvert et franc, détestant le mystère et la fausseté; ils l'ont entouré de trahisons, de mensonges, de ténèbres, de duplicité. » J. J. |

Quant à la gravité, la fausseté en a plus que le mensonge, car c'est dans les personnes une qualité permanente, et elle consiste à donner aux choses une valeur, une existence, objective; au lieu que le mensonge est passager, et se réduit quelquefois à un mot qui échappe dans une situation critique, ou bien à un conte fait pour amuser, à une fiction, à une fable, telles que les poêtes en imaginent. « Jamais la fausseté ne dicta mes mensonges; ils sont tous venus de faiblesse.»> J. J. « La fausseté d'un acte est un crime plus grand que le simple mensonge : elle désigne une imposture juridique, un larcin fait avec la plume.>> VOLT. L'imposture, à son tour, est encore plus sérieuse et plus criminelle que la fausseté, parce qu'elle est plus audacieuse, plus effrontée, plus noire, plus incapable de rougir et de lâcher prise. Patelinage annonce par sa terminaison un dé- « En voilà assez pour des faussetés si vaines. Ce faut plus relatif encore à la conduite qu'au carac- ne sont là que des coups d'essai de vos novices.... tère. C'est la fausseté d'un homme qui par des ma- Je viens à cette calomnie, l'une des plus noires nières doucereuses et câlines cherche à s'insinuer qui soient sorties de votre esprit. Je parle de cette auprès des gens, ou à les faire venir à ses fins. audace insupportable avec laquelle vous avez osé « Ces moyens (d'accès) sont de s'insinuer à force imputer à de saintes religieuses de ne pas croire d'adresse, de patelinage, d'opiniâtre importunité, la présence réelle. Voilà une imposture digne de de le cajoler sans cesse, de lui parler avec trans-vous, voilà un crime que Dieu seul est capable port de ses talents.... » J. J. « La façon dont se de punir. » PASC. · La tromperie a seu un caprésentent ceux qui cherchent à s'insinuer dans sa ractère pratique : elle ne consiste pas à dire, mais confiance, les fades louanges qu'ils lui donnent, à faire. Un ennemi, pour vous décrier, emploie le patelinage qu'ils y joignent.... » ID. la fausseté, le mensonge et l'imposture; votre domestique, pour vous dérober, ou un concurrent, pour nuire au succès de vos affaires, use de tromperies, c'est-à-dire de manoeuvres.

FAUSSETÉ, MENSONGE, IMPOSTURE, TROMPERIE. Ces mots expriment quelque chose de contraire à la bonne foi, quelque chose par quoi on fait accroire ce qui n'est pas, ou on représente ce qui est autrement qu'il n'est.

La fausseté est proprement contraire à la vérité ou à la réalité; le mensonge, à la véracité; l'imposture, à la sincérité; la tromperie, à la probité. Ce qui est faux n'est pas vrai ou réel; ce qui est menteur ou mensonger n'est pas véritable; ce qui est imposteur ment par les apparences, au public ou en public; ce qui est trompeur met dedans, fait tomber dans le piége.

La fausseté est objective, elle controuve; le mensonge est subjectif, il parle contre sa pensée; l'imposture est spécieuse, elle éblouit ou jette de la poudre aux yeux; la tromperie est frauduleuse, elle attrape, abuse, joue des tours.

C'est une fausseté, a rapport à la chose dite ou inventée. C'est un mensonge, regarde la personne qui a parlé ou dit la chose. C'est une imposture, est relatif aux apparences ou au masque dont on se sert pour en faire accroire, ou bien à l'éclat, à la publicité de ce qui est dit ou fait pour égarer l'opinion. C'est une tromperie, indique une manière d'agir destinée ou propre à faire une dupe.

On dit, les faussetés d'un témoin ou d'un historien ignorant ou corrompu, d'un fabricateur d'actes, de faits ou de nouvelles; les mensonges d'un hâbleur ou d'un enfant pris en faute; les impostures d'un charlatan, d'un hypocrite, d'un calomniateur; les tromperies d'un fripon.

Les rapports, les allégations, les faits, doivent

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FAUX, POSTICHE. On qualifie de faux ou de postiches certains objets qui ne sont point naturels ou véritables cheveux faux ou postiches, barbe fausse ou postiche, dents fausses ou postiches.

Ce qui est faux trompe l'œil; ce qui est postiche est ajouté. Postiche vient de postes, ornement d'architecture de peu de relief, qu'on place ordinairement sur les plinthes. On s'aperçoit ou on ne s'aperçoit point que la barbe d'un homme déguisé est fausse; dans une querelle il perd ou on lui arrache sa barbe postiche. Une personne âgée et édentée, qui veut se faire passer pour jeune, porte de fausses dents; elle ôte ses dents postiches en se couchant ou pour manger.

Ce qui est faux choque la vérité; ce qui est postiche offense presque toujours le goût. C'est, d'une part, une falsification, une dissimulation, un déguisement; et, de l'autre, une beauté d'emprunt et déplacée. Or faux (ACAD.), ornement postiche (MARM.), agréments postiches (J. J.). Avec de fausses dents on ment, on en impose; dents postiches signifie d'ordinaire des dents artificielles mal posées, mal assorties, ou qui donnent un drôle d'air.

FEINT, SIMULÉ, CONTREFAIT. Ces épithètes servent à qualifier une chose affectée, une chose à laquelle on donne l'air d'être ce qu'elle n'est pas, ou quoiqu'elle ne soit pas.

Feint s'emploie bien en parlant de choses abstraites, comme les qualités, et ne suppose que

de l'invention; mal feint, feinte probité, feinte modération. Simulé, au contraire, s'applique aux choses concrètes, aux actions, et marque le semblant, une démonstration extérieure: attaque simulée, querelle simulée, les tournois étaient des combats simulés (COND.). On dira donc, une raison feinte, et une démarche simulée; une joie feinte, et un enjouement simulé; un zèle feint, et un empressement simulé; une amitié feinte, et une réconciliation simulée. Une personne qui s'est fait ou à qui on a fait, n'importe comment, une réputation de piété, peut n'avoir qu'une piété feinte; une personne de beaucoup de dévotion peut n'avoir qu'une piété simulée.

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La fermeté et la résolution se rapportent à une action qui doit se faire; le courage et l'énergie, à une action qui se fait; aussi ne dit-on point une action ferme ou une action résolue, mais bien une action courageuse ou énergique. L'homme ferme ou résolu est considéré en tant qu'il entreprend, il veut bien ce qu'il veut; l'homme courageux ou énergique est considéré en tant qu'il exécute, il brave les périls et la mort en homme de cœur, il se comporte vaillamment, d'une manière vigoureuse, héroïque. Sans fermeté et sans résolution on hésite, on ne s'arrête à aucun parti, on flotte; sans courage et sans énergie on est lâche et mou, on plie, on cède, on se laisse vaincre. Fermeté, résolution.

La fermeté est invariable; la résolution, hardie. L'une implique plutôt l'idée de défensive, l'autre celle d'offensive. Avec de la fermeté on reste le

Ce qui est contrefait est une mauvaise imitation. Les hérétiques ont une piété contrefaite (Boss.), c'est-à-dire réelle, mais défectueuse ou de mauvais aloi. Une douceur feinte est d'un homme qui n'est point doux; une douceur con-même, on résiste aux causes de changement, on trefaite (J. J.) est une douceur bâtarde, forcée, qui n'est point naturelle. Ce qui est feint ou simulé vous fait croire ce qui n'est point, vous trompe sur l'existence; ce qui est contrefait vous trompe sur la qualité. C'est, d'une part, une ombre, une apparence vaine, et, de l'autre, une contrefaçon et comme du chrysocale.

FERMER, BOUCHER. Mettre sur ou dans une ouverture un objet qui empêche que quelqu'un ou quelque chose n'y passe.

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est très-difficile à ébranler; avec de la résolution on ose, on se décide avec assurance. Régulus est un modèle de fermeté, quand il continue à vouloir retourner à Carthage, malgré les prières et les pleurs de sa famille; on sait avec quelle résolution César se décida à passer le Rubicon, prêt à marcher contre Rome et à attaquer Pompée. Portées à l'excès, la fermeté dégénère en opiniâtreté, et la résolution en témérité. D'ailleurs, la fermeté est une qualité, quelque chose de permaCe avec quoi on ferme fait partie de la chose nent, d'inhérent au caractère. On cite parmi les ou y est adapté; c'est, au contraire, avec un corps qualités de Fabius Maximus une grande fermeté à étranger qu'on bouche. On ferme une malle au se tenir au parti qu'il avait pris sur de bonnes moyen d'un couvercle; on bouche un trou comme raisons, à persister toujours dans ses premiers on bouche une bouteille, en y apportant et en y desseins, sans que rien fût capable de l'ébranler introduisant quelque matière qui forme bouchon | (ROLL.). « Cette roideur de caractère, cette mutiou tampon, du mortier, du plâtre, des pierres, de nerie ou cette fermeté n'est pas si rare parmi les la paille, etc. On ferme les yeux en fermant ou enfants élevés ainsi. » J. J. La fermeté qui fait en baissant les paupières, qui sont pour eux votre caractère. » BOURD. Fermeté de caractère comme des portes; Ulysse, dans la crainte des (ACAD.). La résolution, au contraire, est plutôt un syrènes, boucha avec de la cire les oreilles de fait, quelque chose d'accidentel, de passager ou ses compagnons, et pour éviter de sentir de mau- d'extérieur. « Cependant onze jours après, ô résovaises odeurs on se bouche le nez avec son mou-lution étonnante! la reine à peine sortie d'une choir. « Dès les premiers accords de ce prélude, mon chameau se mit à deux genoux, tremblant comme la feuille, et ferma les yeux, ne pouvant se boucher les oreilles. » HAM. Nous fermons nos maisons à l'aide de choses qui y tiennent et sont destinées à cela, portes, fenêtres, verrous, etc.; mais Polyphème bouchait sa caverne avec un énorme rocher qu'il roulait à l'entrée. Des écluses ferment le passage à l'eau d'un canal, et des matières ou des immondices qui s'y sont amassées lui bouchent le passage.

D'ailleurs, fermer est plus propre pour marquer la suspension et boucher pour exprimer la snppression de l'entrée ou de l'usage de la chose. On ferme une porte ou une fenêtre, pour l'ouvrir ensuite, un peu plus tôt, un peu plus tard; mais on la bouche quand on la condamne, quand on la ferme de telle sorte qu'elle ne puisse plus s'ouvrir. Il en est de même de fermer une fontaine par rapport à boucher une source. Au figuré, qui a les yeux fermés n'y voit pas, et qui a les yeux bouchés est aveugle pour jamais.

FERMETE, RÉSOLUTION;-COURAGE, ÉNERGIE. Force de volonté.

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tourmente si épouvantable ose encore se commettre à la furie de l'océan. » Boss. « Turenne court à la défense d'un pont, et tient ferme contre une armée; et soit la hardiesse de l'entreprise, soit..., il étonna par sa résolution ceux qu'il ne pouvait arrêter par la force, et releva par cette prudente et heureuse témérité l'Etat penchant vers sa ruine. » FLÉCH. Avoir un air de résolution (ACAD.).

Courage, énergie.

Le courage est une force morale, l'énergie une grande force. Le courage ne peut être attribué qu'aux agents intelligents et libres dont il fait des héros; l'énergie est une vertu singulière qui rend capable de grands efforts et de grands effets un agent quelconque: l'énergie d'un remède, d'un acide, l'énergie des passions. Ce qui frappe le plus dans le courage, c'est le mérite de celui qui le développe, car le courage est une des quatre vertus cardinales; ce qu'il y a de plus remarquable dans l'énergie, c'est son intensité, son haut degré de puissance. Se conduire avec courage est une partie de la sagesse; se conduire avec énergie c'est montrer beaucoup de vigueur. Dans tous les

temps on admirera le courage de Socrate devant ses juges, et l'énergie que déploya Cicéron contre Catilina et ses complices.

FERTILE, ABONDANT. Chacun de ces mots sert à qualifier une chose en tant qu'elle en produit d'autres en grande quantité des terres fertiles ou abondantes, fertiles ou abondantes en telles ou telles denrées. La Bruyère dit des commentateurs qu'ils sont fertiles et abondants dans les endroits clairs.

Fertile est plus relatif à la chose produisante, et abondant aux choses produites. C'est pourquoi, bien qu'abondant s'applique aussi aux terres, par exemple, il s'applique mieux encore à ce qui en nalt, aux récoltes. La Pologne est la partie de l'Europe la plus fertile; elle produit d'abondantes moissons.» BERN. « Obtenir un temps favorable pour rendre nos campagnes fertiles et nos moissons abondantes. » BOURD. Que si quelquefois on appelle aussi fertiles les moissons elles-mêmes, c'est par métonymie, en appliquant à l'effet ce qui convient à la cause, et sans aucun égard à l'usage ou à l'utilité de l'objet, en le considérant comme une production plutôt que comme un produit: «Dieu n'avait promis à ces anciens Juifs que la fertilité de leurs moissons, que l'abondance du blé et du vin. » BOURD.

l'honneur de Dieu ou d'un saint, ou en mémoire d'un événement.

Fêter et chômer d'abord ont cela de commun entre eux et de distinctif par rapport aux autres qu'ils se disent spécialement d'un saint. Chacun d'eux a en outre une nuance tout à fait propre et caractéristique.

Fêter, faire fête, donner une fête, vient du latin festus, joyeux, gai, divertissant; en sorte qu'on fête par des réjouissances, des jeux, des danses et des festins, comme il arrive dans les fêtes de village, par exemple, ou quand on fête quelqu'un. Il n'est pas rare de voir le saint jour du dimanche fêté par des divertissements emportés, pleins de licence et d'excès.

Chomer veut dire primitivement et absolument ne pas travailler. D'où il suit qu'on chôme en cessant de travailler ou en se reposant. On peut fêter un jour sans le chômer, et la preuve, c'est qu'il y a des fêtes chômées et d'autres qui ne le sont pas. Les jours chômés ou les fêtes chômées diminuent les gains de l'ouvrier en l'obligeant à rester oisif. C'est ce dont se plaint le savetier au financier dans une fable de Lafontaine : Le mal est que dans l'an s'entremêlent des jours

Qu'il faut chomer; on nous ruine en fêtes. - Il semble aussi que chômer, dont l'origine est probablement vulgaire, est plus familier que fêter, qui tire manifestement la sienne du latin. On dira donc pour l'ordinaire en parlant d'un homme décrédité : c'est un saint qu'on ne fête plus. Mais en conversation et dans la comédie on préfèrera chômer:

L'honneur est un vieux saint que l'on ne chome plus.

DEST.

La fertilité, de ferre, porter, fait qu'une chose porte, rapporte, produit; l'abondance en vient, c'est une copieuse provision, une richesse. « A Sybaris on abuse de la fertilité du terroir, qui y produit une abondance éternelle.» MONTESQ. « Les fleuves arrosent la terre et répandent dans les diverses contrées la fertilité et l'abondance.» LABR. « La province de Satrapène est un pays fertile et abondant en toutes sortes de biens. » VAUG. Si un esprit est fertile, ses pensées sont abondantes. Fertiles, les commentateurs sont babillards; quand on les qualifie d'abondants, on fait penser à la vaine érudition dont sont chargés leurs écrits. Les pays fertiles se montrent couverts de moissons sur pied et d'arbres portant des fruits; les pays abondants ont de grandes ressources, beaucoup de moyens de bonheur et de succès, qui proviennent le plus souvent, mais non pas toujours, de la fertilité des terres : «Pourquoi les Chinois n'auraientils pas découvert, avant les Européens, une infi-à-dire avec des cérémonies extraordinaires. « Les nité d'îles abondantes et de terres fertiles dont ils

sont voisins? » BUFF.

Célébrer emporte l'idée de cérémonies; aussi dit-on célébrer des funérailles, les mystères, l'office divin, la messe, toutes expressions qui supposent quelque chose de religieux. C'est généralement dans les temples ou les églises que se fait l'action de célébrer.

Oui, je viens dans son temple adorer l'Éternel;
Je viens, selon l'usage antique et solennel,
Célébrer avec vous la fameuse journée

Où sur le mont Sina la loi nous fut donnée. RAC.
Solenniser, c'est célébrer avec solennité, c'est-

saints rois Ezéchias et Josias sont célèbres pour avoir fait solenniser la Pâque avec religion et Fertile se dit uniquement de la terre, et, sur la une magnificence extraordinaire.... Les fêtes des terre, de ce qui porte ou donne des fruits; mais chrétiens sont beaucoup plus simples, et en même abondant, dérivé du latin unda, eau, est aussi temps beaucoup plus saintes; et cependant on employé en parlant d'autres choses, particulière- est bien plus lâche à les célébrer. » Boss. « Lorsment de la mer et des rivières : un pays est fer- que l'Eglise fut protégée par les empereurs, les tile en blé et en vin; il est abondant en gibier cérémonies se firent avec pompe. On solennisa et en poisson. « Les Lapons prennent des brochets les dimanches, les fêtes de Noël, de Pâques et en quantité; et la nature, comme une bonne de Pentecôte; et on célébra encore les fêtes des mère, leur refusant la fertilité de la terre, leur martyrs dans les lieux où étaient leurs tomaccorde l'abondance des eaux. » REGN. « Ces pê-beaux. COND. - D'ailleurs les cérémonies dont ches abondantes (dans les rivières et les lacs du solenniser implique l'idée sont moins essentielleNord) n'approchent pas encore de celles de ces ment religieuses que celles d'une célébration. mers.» BERN. Tout mariage se célèbre devant l'autel; mais Mazarin, pour solenniser celui de Louis XIV, fit représenter au Louvre un opéra italien (VOLT.), et Sidoine Apollinaire rapporte que les soldats de Clodion solennisèrent le mariage du fils de l'un

FÊTER, CHÔMER, CÉLÉBRER, SOLENNISER. On dit également fêter, chômer, célébrer, solenniser un jour, ce qui signifie le signaler de différentes manières ou par différentes pratiques en

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