Page images
PDF
EPUB

ce sont plutôt les hommes ou les convenances qui interdisent. « Le saint vieillard Éléazar ne voulut pas souiller son âme par l'usage des viandes profanes et défendues par la loi la mère et les sept enfants dans les Machabées ne voulurent pas se permettre des mets que Moïse avait interdits au peuple de Dieu. » MASS. « Une fois rentré dans le monde, je fais mille démarches que mes promesses à Dieu devaient m'interdire, quand tout ce que je dois à mon état ne me les défendrait pas. >> ID. « L'usure est une chose mauvaise de soi et défendue par la loi de Dieu.... Grotius a tort de prétendre que ce n'est qu'aux clercs qu'elle est interdite par les lois de l'Eglise. Boss. « La puissance souveraine doit se régler sur les volontés des lois, et se croire interdit tout ce qu'elles défendent. » ROLL.

DÉFUNT, FEU. Décédé depuis peu de temps. Le roi défunt, le feu roi; mon défunt mari, feu mon mari.

Ils m'ont, jusqu'à présent, chicané mon douaire !
REGN.

« La résolution d'aller toucher deux mille écus que feue ma tante me légua par son testament. >> DEST. « Ma fortune n'a jamais été dans un si bon état, grâce à feu mon oncle qui m'a laissé par un bon testament de quoi pouvoir me passer de maître le reste de mes jours. » LES. « Le feu roi avait fait un testament qui bornait l'autorité du régent. » MONTESQ. Ensuite, et plus généralement, feu s'applique à des personnes distinguées ou dont on veut honorer la mémoire. «Feu M. le cardinal de Richelieu. » CORN. « Feu M. l'archevêque, d'heureuse mémoire. Boss. « Feu Son Excellence. » MONTESQ. « Feu Madame la Dauphine. » S. S. « La feue duchesse d'Orléans.» ID. « Celui de tous les Anglais qui a porté plus loin la gloire du théâtre comique est feu M. Congrève. » VOLT. « Je tiens ce trait de feu M. le comte de Cromstorm. » LES. Il est à remarquer qu'on dit sans façon, défunt un tel, ou le défunt sieur un tel, au lieu qu'avec feu on met d'ordinaire Monsieur.

J'étais intime ami de défunt votre père. DEST. « J'étais bien serviteur de feu M. votre père. » LES. Pour désigner le même prélat Bossuet et Fénelon disent, le premier: « le défunt évêque de Genève; » et le second : a feu M. de Ge

Défunt, anciennement défunct, du latin defunctus, mort, est. du style commun et se dit en parlant de toutes sortes de gens, même des gens qui ont vécu dans une condition médiocre ou pour lesquels on n'a pas ou on ne tient pas à témoigner de la considération dans le moment. << Le maréchal de Florenges avait épousé la fille aînée de la fameuse Diane de Poitiers et de son défunt mari, Louis de Brézé. » S. S. « La prin-nève.» « Feu M. Tristan a renouvelé Marianne cesse des Ursins avait fait venir d'Italie à Madrid le fils de sa défunte sœur de Lanti. » In. « Mon défunt ami Gauffecourt. » J. J. « Si tu ne me caresses pas, mon défunt mari m'y a tout accoutumée. » LAF. « Cette Monime, qui n'est pas la Monime de Racine, a été confiée à Acasto par le défunt père de la demoiselle. » VOLT. « Défunt Legrand, comédien ordinaire, se promenait avec un de ses amis. » LES. « Le capitaine pria les comédiens de boire à la mémoire de défunt Charles Dodo, oncle de la dame accouchée. »> SCARR. Bien plus, il arrive quelquefois qu'en plaisantant on emploie défunt l'égard des choses ou à l'égard de personnes qui ont vécu bien avant nous. « Notre défunte compagnie des Indes. » VOLT. « La défunte Année littéraire. » LAH. Remuer les cendres de notre défunte union. » DUDEFF. « Défunt Jean de Nivelle. » SCARR. « Je ne crois pas que défunt Phaéton, de malheureuse mémoire, ait été plus empêché. ID.

et Panthée sur les pas du défunt sieur Hardy. » CORN. Louis XVI étant monté sur le trône, Mme du Deffand, à cette occasion, écrit à un de ses amis : « Après avoir pleuré le défunt roi, je ressens tant soit peu de joie de l'espérance de revoir incessamment les exilés. » Et quatre jours plus tard elle écrit au même que la princesse de Conti étant allée demander au roi le retour de son fils, « la réponse du roi fut que, par respect pour la mémoire du feu roi, il ne devait changer précipitamment ce qu'il avait décidé. » Marivaux dit quelque part : « Vous ressemblez comme deux gouttes d'eau à défunt Baptiste, que j'ai pensé épouser. » Et ailleurs «Sa belle-mère la croyait fort au-dessous de l'honneur que feu le marquis lui avait fait de l'épouser. »

DÉGÂT, RAVAGE, DÉVASTATION. Dommage causé par une armée, ou tel que celui qui est causé par une armée.

Dégât est pour ainsi dire le diminutif des deux autres mots: il ne marque ni autant de violence Et quand un gentilhomme, en commençant à vivre, que ravage, ni une si grande étendue d'action Sait tirer en volant, boire et signer so "om, que dévastation. A la différence du ravage, le déIl est aussi savant que défunt Cicéron. KLGN. gat peut se faire doucement et avec lenteur, et, Feu, italien fu, dérive comme celui-ci du latin quand il est question de troupes, il se fait quelfuit, italien fu, il fut, autrefois il feut, il a été. quefois sans l'emploi des armes, par la maraude, Etymologie étrange et pourtant démontrée par par des larcins particuliers. « Pendant les voyages ce seul fait, qu'en parlant de plusieurs on disait de la cour, Louis IX envoyait toujours un prélat d'abord furent, feurent furent vos parents, pour et un seigneur pour informer des dégâts et les feu vos parents, c'est-à-dire qui fuerunt (ceux réparer. » Boss. « En Saxe, des inspecteurs alqui ont été), vos parents, ou vos parents qui laient tous les quinze jours de maison en maison fuerunt (qui ont été, qui ont vécu). Le feu roi, s'informer si les Suédois n'avaient point commis est pour, le roi qui fuit, qui fut ou a été. Or, ce de dégât. Ils avaient soin de dédommager les mot formé d'une manière extraordinaire et re-hôtes. » VOLT. Le dégât est donc un petit ravage, cherchée convient d'abord particulièrement en style de notaire.

Croiriez-vous que, depuis la mort de feu leur père,

et le ravage un dégât terrible, qui, au lieu de gåter et de détériorer simplement, renverse, détruit, perd.

Plus leur cours (de ces torrents) est borné, plus ils font de ravage,

Et d'horribles dégâts signalent leur passage. RAC. « Annibal ne manqua pas de piquer et d'irriter la témérité de Flaminius par les dégâts et les ravages qu'il fit faire à sa vue dans toutes les campagnes.» ROLL. La nielle dans les blés et certains insectes dans les vignes ne laissent pas de faire des dégâts dont on s'aperçoit à la longue; la grêle, les orages et les inondations y font des ravages qui les abîment tout d'un coup. Et, à la différence de la dévastation, le dégât peut ne pas s'étendre loin, peut porter sur un objet unique et restreint. J. J. Rousseau parle du dégât fait au sein d'une femme par son enfant qu'elle allaite, et du dégât que commit un jeune homme en déchirant et en jetant au feu ses manchettes.

Au travers d'un mien pré certain anon passa, S'y vautra, non sans faire un notable dommage. .... Un expert est nommé;

A deux bottes de foin le dégât estimé. RAC.

D'ailleurs, on le voit par ce dernier exemple, dégât est un terme abstrait, au lieu que les deux autres mots font image et frappent l'esprit chacun à sa manière.

essen tielle de la tiédeur, c'est le mépris des petites choses; voilà par où l'on commence à dégénérer. BOURD. L'action marquée par s'abátardir est absolue: s'abatardir, c'est dégénérer tout à fait ou honteusement. «Jamais on n'a vu votre empire si lâche, si efféminé, si abâtardi, si indigne des anciens Romains, qui ressemblaient aux Spartiates. » Solon à Justinien. FÉN. « Cette nation (l'espagnole) n'est pas moins jalouse et ombrageuse qu'imbécile et abâtardie. » ID. « Les Gortues s'étaient abátardis et ne tenaient plus rien de la vertu de leurs ancêtres. » VAUG. « Tel homme que l'impulsion d'un beau génie eût porté à renouveler les chefs-d'œuvre, se fait journaliste, libelliste, ou s'abatardit dans quelqu'autre métier aussi lucratif que dégradant. BEAUM.

Les animaux dégénèrent dans l'état de domesticité qui affaiblit en eux quelque qualité de leur espèce ou de leur genre. Ils s'abátardissent quand ils dégénèrent au point qu'ils sont méconnaissables, qu'on ne peut plus légitimement les rapporter à la famille à laquelle ils appartiennent par leur origine. Les Romains de l'empire avaient dégénénéré de ceux de la république; c'était un peuple abdtardi lorsque les barbares fondirent sur l'Occident. La jeunesse dégénère dans l'oisiveté, et s'abátardit dans la débauche. - Par quoy, la meilleure partie de moy qui est lame, seroyt degenerante et abastardye. » RAB. - « Sans cela les grains, les fleurs, les animaux dégénèrent, ou plutôt prennent une si forte teinture du climat, que la matière domine sur la forme et semble labátardir. » BUFF.

DÉGOUTTER, DISTILLER. Tomber doucement, en parlant d'un liquide, la pluie, la sueur, les larmes, le sang, ou autres choses semblables.

Ravage a pour idées accessoires celles de fureur et de destruction par le fer, par le feu ou par tout autre moyen expéditif. « Charles le Chauve abandonnait ses peuples à la fureur et au ravage des Normands. » Boss. « L'électeur justetement outré des ravages et des incendies que Turenne commettait dans son pays lui proposa un duel par un trompette. » VOLT. Mais la dévastation, suivant l'excellente définition de Condillac, est le ravage que fait une armée qui rend pour ainsi dire désert un royaume, un empire, une grande étendue de pays. » La dévastation suppose un vaste théâtre. « L'on voit dans les pays méridionaux sortir tout à coup du désert des myriades de fourmis, lesquelles s'emparent de tous les lieux habités, en chassent les animaux et les hommes, et ne se retirent qu'après une dévastation générale. >> BUFF. << Dans ce recensement de tant d'horreurs mettons surtout les douze millions d'hommes détruits dans le vaste continent du nouveau monde.... Jamais ce malheureux globe n'éprouva une dévastation plus horrible et plus générale. » VOLT. <<< Qu'on se figure la longue dévastation de la Russie entière par les Tartares.» ID. Dans ses conquêtes Gengis ne fit que détruire son empire, de la frontière de la Russie jusqu'à celle de la Chine, fut une dévastation. » ID. | L'invasion des barbares en Occident fut l'époque Dégoutter exclut positivement l'abondance, et d'une destruction presque générale.... Sur une partie de la terre régnaient la dévastation, le silence, et cet étonnement stupide qui suit les grands malheurs. » THOM.

:

[blocks in formation]

Naturellement ces deux verbes diffèrent comme en latin gutta et stilla, d'où ils tirent leur origine. Or gulta signifie la plus petite portion d'un liquide, arrondie; et stilla, une petite portion de liquide allongée, formant une traînée, coulant. Par conséquent, ce qui dégoutte tombe goutte à goutte, une goutte après l'autre, guttatim; et ce qui distille s'épand ou découle lentement, mais d'une manière continue. La rosée dégoutte sur la terre (Boss.); Chardin dit qu'il y a en Perse un bitume précieux qui distille des rochers (BUFF.). Quand il a plu, l'eau dégoutte des feuilles des arbres; l'encre distille d'une plume qui écrit. Le sang dégoutte du nez qui saigne;i stille d'une blessure d'où il ruisselle.

se dit bien quand il s'agit de quelques gouttes qui tombent à des intervalles plus ou moins éloignés. « Le jus et les sauces lui dégouttent du menton et de la barbe. » LABR. Corneille dit de l'ombre de Laïus apparaissant à Jocaste :

Tout menaçait en elle; et des restes de sang Par un prodige affreux lui dégoutlaient du flanc. Pour que l'eau dégoutte d'une voûte, il suffit qu'il en tombe en très-petite quantité et de temps en temps.

D'une sueur de sang les marbres dégouttèrent. Duc. Distiller, au contraire. n'implique point du tout l'idée de la rareté du liquide; il en suppose

quelquefois et sans difficulté l'abondance. « Ma--| lieutenant général des armées. » VOLT. « Prié rie Madeleine, assise aux pieds de Jésus, boit passa au service de l'empereur. Il y parvint aux à longs traits le fleuve de vie qui distille si abon-premiers grades..... Il obtint de la cour de damment de sa bouche. » Boss.

Nourrissez-moi de pleurs, Seigneur....

Détrempez-en mon pain, mêlez-en mon breuvage,

Et de tout mon visage

Jour et nuit à grands flots faites-les distiller. CORN. Dieu dit à son peuple: Je ferai dégoutter ma fureur sur la terre. Que sera-ce quand il la fera distiller ou tomber comme un torrent sur les réprouvés (BOURD.)?

DEGRÉ, GRADE. Chacun des échelons par lesquels on s'élève dans une hiérarchie.

Quoique les deux mots aient été tirés l'un et l'autre du latin gradus, qui a le même sens, la ressemblance avec le primitif est moins évidente pour degré que pour grade. Degré a d'abord été seul employé, et grade, qui ne se trouve point dans Nicot, a été ultérieurement emprunté du latin sans changement de forme bien sensible. De là vient que degré est moins noble que grade.

Vienne cet emploi de plénipotentiaire. » S. S.

DÉLAYER, FONDRE, LIQUÉFIER, DISSOUDRE. C'est produire dans les corps solides un effet contraire à celui de l'attraction, c'est en séparer les parties.

Le délayement se fait toujours par l'intermède de l'eau ou d'un autre liquide: délayer de la farine, des jaunes d'œufs; délayer une couleur dans de l'eau. Mais c'est toujours par le moyen du feu ou de la chaleur que la fusion et la liquefaction se produisent. L'état primitif de fluidité du globe terrestre n'ayant pu s'opérer par le délayement dans l'eau, il est nécessaire que cette fluidité ait été une liquéfaction causée par le feu (BUFF.). Des matières minérales proviennent de la décomposition des matières primitives que l'eau aura délayées, d'autres ont été fondues par le feu des volcans (ID.).

Entre fondre et liquéfier la différence, quoique peu considérable, est néanmoins certaine et digne d'attention. Fondre, du latin fundere, est le mot le plus généralement employé; liquéfier, du latin liquefacere, est comme putréfier par rapport à pourrir, il rappelle davantage son origine savante, et convient surtout dans le didactique ou pour exprimer quelque chose d'extraordinaire. « L'élément du feu agit toujours en sens contraire de la puissance attractive, et seul peut séparer ce qu'elle a réuni, résoudre ce qu'elle a combiné, liquéfier ce qu'elle a rendu solide.» BUFF. « Mon Espagnol, saisi d'un enthousiasme poétique de son pays, s'écria que Mme la Dauphine était un soleil dont la présence avait liquéfié tout l'or du royaume, dont s'était fait un fleuve immense au milieu duquel nageait toute la cour. » J. J. « A Naples, le sang de saint Janvier, de saint Jean

Étant moins noble que grade, degré signifie un moindre poste. Des derniers degrés on s'élève aux premiers grades. Voltaire a dit du duc de Vendôme qu'il parvint enfin au généralat, après avoir passé par tous les degrés depuis celui de garde du roi, comme un soldat de fortune. » Et dans Zadig on lit : «< Zadig envoya chercher le brigand Arbogad, auquel il donna un grade honorable dans son armée. » « De l'état de page, un jeune homme passait à quatorze ans à celui d'écuyer. En remplissant bien les devoirs de son état, il s'élevait ensuite par degrés jusqu'au grade de gendarme, pour être admis quelques années après dans l'ordre des chevaliers. COND. Par la même raison on se servira plutôt de degré en parlant d'une hiérarchie peu considérée, quand il est question, par exemple, des grades qu'on prend ou qu'on reçoit dans les uni-Baptiste et de saint Étienne, conservé dans des versités et dans les ordres religieux.

Mais quoi! j'entends déjà plus d'un fier scholastique Qui, me voyant ici sur un ton dogmatique En vers audacieux traiter ces points sacrés, Curieux, me demande où j'ai pris mes degrés. BOIL. • Le Tasse étudia le droit à Padoue. Il y réussit il reçut même ses degrés en philosophie et en théologie. » VOLT. « Les évêques, pour ordonner patriarche Photius, le firent passer en six jours par tous les degrés. Le premier jour on le fit moine.....: le second jour il fut lecteur, le troisième sous-diacre, puis diacre, prêtre, et enfin patriarche, le jour de Noël, en 858. » ID. « Le P. Tellier avait passé par tous les degrés de la compagnie (des jésuites), professeur, théologien, recteur, provincial, écrivain. » S. S. Que s'il s'agit d'une profession plus haut placée dans l'estime du monde, et, par exemple, de la carrière des armes ou de celle de la diplomatie, c'est en général le mot grade qui méritera la préférence. « Marius passa par tous les degrés de la milice; et ces différents grades furent toujours la récompense d'autant d'actions où il s'était signalé. » VERT. « J'exigerais que le ministre de la guerre eût été lui-même officier, qu'il eût passé par tous les grades, qu'il fût au moins

bouteilles, se liquéfie étant approché de leurs têtes.» VOLT. Dans les arts, où on parle la langue commune, on dit fondre; mais en termes de science, et, par exemple, dans une théorie sur les opérations de la nature, l'usage veut qu'on préfère liquéfier. « Les rayons du soleil animent toute la nature; ils dilatent les airs, liquéfient les eaux.... Archimède les rassemble avec un miroir ardent, et en tire un feu capable de fondre les plus durs métaux.» BERN.

Dissoudre ressemble beaucoup à délayer; car pour l'ordinaire il signifie aussi séparer les parties d'un corps au moyen d'un liquide. Mais il dit plus. Ce qui est délayé est seulement rendu moins consistant, et ce qui est dissous perd toute consistance de la chaux se délaye dans de l'eau; du sucre s'y dissout. « La terre est une matière que l'eau pénètre, étend et rend ductile, qui s'y délaye et ne se dissout pas comme le sel. » BUFF. « L'eau a saisi toutes les matières qu'elle pouvait délayer et dissoudre. » ID. Relativement à fondre et à liquéfier dissoudre a cela de propre, quand il suppose comme eux l'emploi du feu comme moyen de décomposition, qu'il sert à exprimer que le corps est réduit, non pas en quelque chose de liquide ou de fluide, mais en quel

que chose de solide, en cendre. « Supposé que l'altération que cause le feu dans ma main soit une grande agitation de toutes les parties, qui irait enfin à les dissoudre et à les réduire en cendres.... Boss. Un chêne se dissout et tombe en un tas de cendre après que le feu l'a consumé.»

J. J.

DÉLICAT, DÉLICIEUX. Adjectifs propres à qualifier ce qu'il y a de meilleur à manger et à boire.

possédé, et vous êtes tranquille comme un élu. » VOLT. « A le voir s'agiter et se démener comme il fait en se promenant, je juge qu'il compose quelque ouvrage d'importance. » LES. « Le furibond chevalier ne revenait point de sa frénésie : il se démenait dans la chambre comme un possédé, faisant le moulinet de son épée autour de sa tête. » ID. Tu sais que, quand tu bois,

Toute la nuit tu cours, tu te démènes. LAF. Mais se débattre, s'agiter en se battant, ou se battre en se remuant beaucoup, est relatif : il suppose que le sujet est aux prises avec quelqu'un ou avec quelque chose. Aussi, au lieu qu'on dit, se démener, simplement, on dit se débattre avec, contre, sous, entre les bras de quelqu'un. « On aime à voir (dans la tragédie) comment la créature semblable à nous se débat avec la souffrance, y succombe, en triomphe, s'abat et se relève sous

Mais délicat désigne une qualité factice, qui a été mise dans la chose, et délicieux une qualité, peut-être naturelle, portée au plus haut degré. On ne dirait pas, un fruit délicat, comme on dit, un fruit délicieux, parce que l'excellence d'un fruit dépend de la nature seule; mais on dit proprement une chère ou une table delicate. Un mets est délicat ou délicatement préparé; quand on a bien soif, on trouve l'eau délicieuse, on en boit déli-la puissance du sort. » STAËL. « Il se débattait avec cieusement.

un homme dont l'aspect était effrayant. >> FLOR.
« Je souffre, je me débats contre mon existence
que je maudis et que j'aime. » VOLT. « La super-
stition ne se débattrait pas encore comme elle fait
sous la vérité qui l'écrase. » ID.

Je le vois, l'œil farouche et les cheveux épars,
Se débattre longtemps sous le dieu qui l'accable.
CRÉB.

Ou bien la délicatesse est une qualité relative à nos idées, à notre manière toute de convention d'estimer les choses; au lieu que délicieur marque une qualité dont l'appréciation appartient au goût tel qu'il est naturellement dans tous les hommes. En sorte que les aliments délicats supposent doublement de l'art ils sont non-seulement bien apprêtés, mais encore très-prisés, recherchés et « La déesse se débat, et veut échapper des bras réputés fins. Delicat fait l'éloge de la personne qui la tiennent. » MONTESQ. « Ce cavalier emporqui a accommodé la chose ou de celle qui l'a tait avec violence une femme qui se débattait choisie et qui sait la goûter; délicieux fait l'éloge entre ses bras, et criait en implorant du secours. » de la chose même. « Tout ce que le goût peut in- LES.« Des archers avaient mis la main sur un venter de délicat et d'exquis pour flatter tous les homme arrêté pour dettes, et qui se débattait en sens à la fois, semblait concourir, dans ce souper criant au secours. » DUCL. « Il se débat violemdélicieux, à l'enchantement d'Alcibiade. » MARM. ment dans son agonie. » SEV. Dans une des fables Il faut un gourmet pour reconnaître et apprécier de Lafontaine, une grenouille ayant attaché un un vin délicat; le gourmand savoure un vin dé-rat à son pied s'efforce de le tirer au fond de licieux. Les mets délicats sont des mets de choix, l'eau pour en faire sa proie. rares, tendres, légers; les mets délicieux peuvent être très-ordinaires et même grossiers, mais ils sont savoureux et succulents. Les personnes d'une santé faible sont obligées de se réduire aux viandes délicates, quoique peut-être un peu fades, et de s'interdire les viandes délicieuses, qui leur seraient plus agréables. Il faut un manger délicat au voluptueux, à l'homme qui mange avec esprit et discernement; il faut un manger délicieux à l'homme sensuel, à l'épicurien ordinaire qui ne regarde qu'à la somme du plaisir.

Il résiste; elle tire. En ce combat nouveau, Un milan, qui dans l'air planait, faisait la ronde, Voit d'en haut le pauvret se débattant sur l'onde. Ensuite, outre que se démener n'est guère que du style familier, il prend seul l'acception figurée : il signifie quelquefois se remuer beaucoup pour faire ou pour empêcher quelque chose. « Il y eut un jésuite à Bordeaux, qui se démena fort pour empêcher l'université de cette ville de recevoir les six articles. » RAC. « Les jeunes gens sont actifs, ils se démènent pour rendre service. » VOLT. « Vous pouvez assurer mon neveu de ma malédiction, s'il ne se démène pas dans cette affaire. » ID.

DÉMENER (SE), SE DÉBATTRE. S'agiter beaucoup, faire ou se donner beaucoup de mouvement. Se démener, se mener ou se porter de côté et d'autre, est absolu il représente le sujet solitai- DÉMENTIR (SE), SE CONTREDIRE. N'être pas rement, sans rapport avec qui que ce soit, ges-d'accord avec soi-même ou l'un avec l'autre. ticulant, se trémoussant, se tournant à droite et Un témoin se dément; un savant ou un docteur à gauche avec vivacité. «Quand un acteur s'agite, se contredit. on dit qu'il se démène comme un prédicateur; car, en effet, il y a beaucoup plus de mouvement dans la chaire que sur le théâtre. » STAËL. « Pour faire passer ce discours, joignez-y quelques petites gesticulations démenez-vous un peu. » DEST. « Il n'y a que les Européens qui gesticulent en parlant.... Quand un Franc s'est bien démené, bien tourmenté le corps à dire beaucoup de paroles, un Turc dit deux mots à demi-voix et l'écrase d'une sentence. » J. J. « Je me démène comme un

Se démentir se dit proprement quand il est question de faits rapportés. « Les apôtres ont soutenu ces miracles sans se démentir jamais. » BOURD. «Si ce que disait l'aveugle guéri par Jésus-Christ eût été une imposture, il se serait coupé dans ses réponses. Mais parce qu'il confesse la vérité et que la vérité est toujours la même, il ne se dément point, et n'a qu'un témoignage toujours uniforme. » ID. Se contredire convient mieux en matière d'opinion. « Les pyrrhoniens se con

tredisent souvent en parlant de leur opinion. » P. R. « J'ai prêché cette morale comme les autres, et je suis bien éloigné de la contredire, puisque ce serait me contredire moi-même. »> BOURD.

nistre Jurieu ne craignit point de dire qu'il ne se souvenait pas d'avoir jamais rien lu de si scandaleux. » VOLT. «< Voltaire fait dans ce livre une énumération très-édifiante de ses bonnes-œuvres. » GRIMM. Linnée, simple classificateur ou noToutes les fois qu'on raconte quelque chose menclateur, donne un dénombrement des oiseaux d'incroyable ou de controuvé, on est exposé à se de la Suède (BUFF.); Buffon, peintre de la nadémentir. Il est rare que celui qui a avancé quel-ture, fait l'énumération des différentes races que chose de paradoxal ou d'erroné ne se contredise pas ensuite.

Même distinction quand les actions de se démentir et de se contredire sont attribuées à des choses. Des bruits se démentent (ACAD.), et des propositions se contredisent (ACAD.).

DÉNOMBREMENT, ÉNUMÉRATION, CENS, RECENSEMENT. Action ou résultat de l'action de faire le compte ou le détail des individus d'une classe ou des parties d'un tout.

:

d'hommes et d'animaux (ID.).

Cens, latin census, est exclusivement un terme d'histoire ancienne. Le cens, de censere, compter, estimer, était chez les Romains le dénombrement des citoyens, la déclaration authentique qu'ils faisaient tous les cinq ans aux censeurs, de leurs noms, âge, biens, profession, résidence, etc. Le mot français recensement en vient, et se dit bien d'abord des choses qui s'estiment ou s'évaluent, des fortunes, par exemple: « Après la ruine du système de Law on fit un recensement de toutes les fortunes des citoyens ce fut l'opération de finances et de justice la plus grande et la plus difficile qu'on ait jamais faite. » VOLT. D'autre part, recensement, en vertu de sa préfixe, indique parfois ou un nouveau dénombrement ou un dénombrement fait avec attention, insistance, avec le soin de passer les choses en revue (recensere), de n'en point omettre. « Je n'étendrai pas davantage ce recensement des royaumes du Nord au seizième siècle. » VOLT. « Le premier dénombrement circonstancié est celui qu'on voit dans les Nombres. Par le recensement que Moïse et Aaron firent du peuple dans le désert, on trouva 603 550 hommes en état de porter les armes. » ID. « Jamais il n'y eut sous le règne d'Auguste un recensement entier des citoyens romains. » ID. Dans un article où il expose tout au long les conspirations contre les peuples, Voltaire dit : « Dans ce recensement de tant d'horreurs mettons surtout les douze millions d'hommes détruits dans le vaste continent du nouveau monde. »

Dénombrement et énumération ont même radical, d'une part le français nombre, de l'autre le latin numerus d'où vient nombre. Toute la différence tient aux terminaisons des deux mots. Dénombrement est objectif, relatif aux choses, significatif du résultat; énumération est subjectif, se rapporte à la forme, à l'action, à la manière. Telle chose est ou n'est pas comprise dans un dénombrement : « Il manque au dénombrement de ses qualités celle de mauvais prédicateur.» LABR. On fait une énumération emphatique ou terrible « Il a fallu nommer mon maître; et je l'ai fait avec une énumération pompeuse de toutes les sciences qu'il voulait bien m'enseigner. » J. J. Dénombrement est un terme tout logique, qui n'a de rapport qu'à la réalité et à la quantité; aussi y a-t-il en logique un sophisme qu'on appelle dénombrement imparfait. Énumération est un mot littéraire, oratoire et qu'on emploie dans les descriptions où on veut rendre les choses plus sensibles, plus frappantes; aussi y a-t-il en rhétorique un lieu commun nommé énumération des parties. « Laissons à la rhétorique cette longue et scrupuleuse énumération (des prodiges de l'industrie). » Boss. « La tristesse évangélique est suppléée (dans le discours chrétien) par le choix des mots, et par de longues énumérations. » LABR. « Cette unique figure qu'on appelle description ou énumération, employée avec tant de succès dans les vingt-huit chapitres des Caractères de Théophraste. » ID. — Un dénombrement, par exemple, celui d'un peuple (Boss., FEN.), celui des fêtes de l'année (Boss.), celui des erreurs d'un auteur (ID.), celui des vertus Le dénoûment est un éclaircissement, une ex(VOLT.), est exact ou instructif. « On voit Jésus- plication; la solution est un dénoúment trouvé Christ aller à Capharnaum, lui, sa mère, ses frères et donné par quelqu'un. Le dénoûment n'est consiet ses disciples; Joseph ne paraît pas dans un dé-déré que par rapport à l'effet qu'il produit, qui nombrement si exact. » Boss. Une énumération, est de rendre intelligible, de dissiper l'obscurité par exemple celle de certains plaisirs (LAF.), de ou la confusion; c'est une clef, comme on dit certains crimes (J. J.), de certains dangers (ID.), métaphoriquement: « J'appelle la clef et le dédes peines des scélérats (VOLT.), est touchante ou noûment de la prophétie les versets qui.... » pathétique, produit un grand effet. « Les députés, Boss. La solution indique un travail aussi bien se voyant écoutés, échauffaient les esprits par que le dénoûment qui en résulte. C'est pourquoi l'énumération des mécontentements donnés à l'ar- Bossuet dit, en parlant de certaines explications mée. » J. J. «< On frémit en lisant l'énumération qu'il vient de donner : « Ces solutions générales de ces dangers. » ID. « Le cardinal Duperron fai- servent de dénoúment à tous les passages de sait une longue énumération des absurdités de saint Clément d'Alexandrie. » l'Écriture, en termes si peu ménagés, que le mi

DÉNOÛMENT, SOLUTION, RÉSOLUTION. Ce qui sert à faire comprendre quelque chose de difficile, d'obscur, de douteux, d'énigmatique. On dit également le dénoúment, la solution et la résolution d'une difficulté, d'une question et d'un doute.

Solution rappelle l'action du verbe latin solvere, résoudre, qui s'emploie dans la même acception; dénoúment ne rappelle l'action d'aucun verbe, car dénouer ne se prend pas dans ce sens.

Le dénoûment explique telle chose : le dénoù

« PreviousContinue »