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Euh! euh! les journaux et l'autorité nous en feront raison. Siècle barbare!...

ROSINE.

Vous injuriez toujours notre pauvre siècle.

BARTHOLO.

Pardon de la liberté; qu'a-t-il produit pour qu'on le loue? Sottises de toute espèce : la liberté de penser, l'attraction, l'électricité, le tolérantisme, l'inoculation, le quinquina, l'encyclopédie et les drames....

ROSINE, le papier lui échappe et tombe dans la rue.

Ah! ma chanson! ma chanson est tombée en vous écoutant; courez, courez donc, Monsieur, ma chanson; elle sera perdue.

BARTHOLO.

Que diable aussi, l'on tient ce qu'on tient. (Il quitte le balcon.)

ROSINE regarde en dedans et fait signe dans la rue.

S't, S't; (Le comte paroît. ) ramassez vîte et sauvez-vous. ( Le comte ne fait qu'un saut, ramasse le papier et rentre.)

*. Bartholo n'aimoit pas les drames. Peut-être avoit-il fait quelque tragédie dans sa jeunesse.

BARTHOLO Sort de la maison, et cherche, Où donc est-il? Je ne vois rien.

ROSINE.

Sous le balcon, au pied du mur.

BARTHOLO.

Vous me donnez là une jolie commission! Il est donc passé quelqu'un?

ROSINE.

Je n'ai vu personne.

BARTHOLO, à lui-même.

Et moi qui ai la bonté de chercher... Bartholo, vous n'êtes qu'un sot, mon ami; ceci doit vous apprendre à ne jamais ouvrir de jalousies sur la rue. ( Il rentre.)

ROSINE, toujours au balcon.

Mon excuse est dans mon malheur : seule, enfermée, en Butte Persécution d'un homme odieux, est-ce un crime de tenter à sortir d'esclavage?

BARTHOLO, paroissant au balcon.

Rentrez, Signora ; c'est ma faute si vous avez perdu votre chanson; mais ce malheur ne vous arrivera plus, je vous jure. ( Il ferme la jalousie à la clef.)

SCÈNE IV.

LE COMTE, FIGARO.

(Ils entrent avec précaution.)

LE COMTE.

A présent qu'ils sont retirés, examinons cette

chanson, dans laquelle un mystère est sûrement renfermé. C'est un billet!

FIGARO.

Il demandoit ce que c'est que la précaution inutile!

LE COMTE, lit vivement.

« Votre empressement excite ma curiosité; sitôt » que mon tuteur sera sorti, chantez indifférem>> ment sur l'air connu de ces couplets, quelque >> chose qui m'apprenne enfin le nom, l'état et les >> intentions de celui qui paroît s'attacher si obsti» nément à l'infortunée Rosine. »

FIGARO, contrefaisant la voix de Rosine. Ma chanson, ma chanson est tombée, courez, courez donc. (Il rit. ) Ah! ah! ah! ah! Oh! ces femmes! voulez-vous donner de l'adresse à la plus ingénue? enfermez-la.

LE COMTE.

Ma chère Rosine!

FIGARO.

Monseigneur, je ne suis plus en peine des motifs de votre mascarade; vous faites ici l'amour en perspective.

LE COMTE.

Te voilà instruit, mais si tu jases....

FIGARO.

Moi, jaser! je n'emploierai point pour vous 1 rassurer les grandes phrases d'honneur et de dévouement dont on abuse à la journée; je n'ai qu'un mot: mon intérêt répond de moi; pesez tout à cette balance, et...

LE COMTE.

Fort bien. Apprends donc que le hasard m'a fait rencontrer au Prado, il y a six mois, une jeune personne d'une beauté!.... Tu viens de la voir. Je l'ai fait chercher en vain par tout Madrid. Ce n'est que depuis peu de jours que j'ai découvert qu'elle s'appelle Rosine, est d'un sang noble, orpheline et mariée à un vieux médecin de cette ville, nommé Bartholo.

FIGARO.

Joli oiseau, ma foi! difficile à dénicher! Mais qui vous a dit qu'elle étoit femme du docteur ?

Tout le monde.

LE COMTE.

FIGARO.

C'est une histoire qu'il a forgée en arrivant de Madrid, pour donner le change aux galans et les écarter elle n'est encore que sa pupile; mais bientôt...

LE COMTE, vivement.

Jamais. Ah! quelle nouvelle-! J'étois résolu de tout oser pour lui présenter mes regrets; et je la trouve libre! Il n'y a pas un moment à perdre, il faut m'en faire aimer et l'arracher à l'indigne engagement qu'on lui destine. Tu connois donc ce tuteur?

Comme ma mère.

FIGARO.

LE COMTE.

Quel homme est-ce ?

FIGARO,

vivement.

watches

C'est un beau gros, court, jeune vieillard, gris pommelé, ruse, fase, blasé, qui guette et furète, et gronde, et geïnt tout à la fois.

LE COMTE, impatienté.

Eh! je l'ai vu. Son caractère?

FIGARO.

Brutal, avare, amoureux et jaloux à l'excès de sa pupile, qui le hait à la mort.

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Tant mieux. Punir un fripon en se rendant heureux...

FIGARO.

C'est faire à la fois le bien public et particulier chef-d'œuvre de morale, en vérité, Monseigneur!

LE COMTE.

Tu dis que la crainte des galans lui fait fermer sa porte?

FIGARO.

A tout le monde : s'il pouvoit la calfeutrer...

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