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quatre enfants. Un de ces enfants mourut. Mademoiselle Détrimont l'ensevelit elle-même, et porta son corps dans la cour de la maison, seul endroit d'où l'on osât approcher. Enfin, ses soins actifs et constants secondant l'effet des médicaments qui lui furent envoyés, elle eut le bonheur d'arracher à une mort qui paraissait certaine, Vasselin et les trois enfants qui lui restaient. Cette belle action n'est pas un fait unique dans la vie de mademoiselle Détrimont. Nombre d'actions semblables, qui n'étaient connues que du ciel et des infortunés qu'elle secourait, viennent d'être tirées de l'obscurité où elle aimait à les ensevelir. Il y a vingt-sept ans qu'elle se consacre au soulagement des malheureux.

LE SOLDAT EN GARNISON.

EXTRAIT DES ARCHIVES DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR.

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N 1832, dans un incendie qui éclata dans la ville de Maubeuge, un nommé Buisson, soldat du 9e régiment en garnison dans cette ville, fit preuve d'un courage et d'un dévouement bien remarquables. On était dans une vive inquiétude sur le sort de trois enfants couchés dans les appartements supérieurs d'une maison que dévorait l'incendie. L'emplacement du cabinet où se trouvaient les deux aînés, et où le feu avait fait des progrès effrayants, ne laissait que trop pressentir leur affreuse destinée; mais le troisième, couché dans une chambre contigue, pouvait être encore sauvé. Plusieurs tentatives furent faites pour y parvenir; mais la fumée était si épaisse et la chaleur si suffocante, qu'on essaya inutilement d'y pénétrer. C'est alors que Buisson, n'écoutant que son courage, se précipita dans la chambre et la parcourut en tous sens, jusqu'au moment où il sentit rouler sous lui le malheureux enfant qu'il cherchait. L'enfant était asphyxié et sa chevelure brûlée. Buisson le saisit et

l'emporte. Les plus grands soins lui furent prodigués par les of ciers de santé de l'armée, et il fut rappelé à la vie.

Quant à Buisson, il eut les mains et les vêtements brûlés. Sa conduite pleine de courage lui valut les éloges de toutes les personnes qui en furent témoins; elle fut citée dans un ordre du jour, et le gouvernement lui accorda une médaille d'honneur pour perpétuer le souvenir de sa belle action.

LES INSULAIRES BIENFAISANTS,

OU LES HABITANTS DE L'ILE DE SEN.

KXTRAIT DU BULLETIN DE LA SOCIETE CENTRALE ET LOCALE DES NAUFRAGES.

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ILE de Sen ou des Vieillards, plateau isolé et stérile, consacré jadis aux pontifes du culte druidique, est en même temps aussi une terre protectrice; elle Sest habitée par une population si active et si généreuse, qu'elle semble avoir dévoué toute son existence à l'humanité. Là, une soixantaine de misérables cabanes renferment les plus grandes vertus hospitalières. Ces insulaires ont, de 1617 à 1763, sauvé d'une perte certaine un vaisseau de ligne, une frégate, deux corvettes, un lougre, trois embarcations de commerce, dans lesquelles se trouvait un transport ramenant cinq cents hommes de troupes françaises des colonies; cinq équipages entiers de bâtiments de guerre et de négoce, et de plus, huit cent dixneuf hommes dont huit cents faisaient partie de ceux qui montaient le Séduisant, brisé sur le Tévenec, le plus dangereux des écueils de cette terrible chaussée de Sen, si féconde en désastres nocturnes, en trépas ignorés. Ils auraient sauvé jusqu'au dernier individu du Séduisant, si la tempête, devenue encore plus horrible, n'avait pas rendu la mer absolument impraticable. Pendant onze jours qu'elle interdit toute communication avec la terre, ils partagèrent fraternellement avec

ces nombreux hôtes leurs habitations et leurs vivres, en sorte que si elle se fût prolongée davantage, réfugiés et habitants y

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seraient également morts de faim. C'est aussi de cette enceinte de rochers que le brick anglais la Bellessima vit accourir ses intrépides libérateurs, pour lesquels M. l'amiral Codrington avait fait parvenir une gratification qui leur a été remise par l'intermédiaire de M. le commissaire de marine d'Audierne, membre honoraire de la Société. En exécution des intentions de l'illustre donateur, il l'avait partagée entre MM. Jacques et Noël Milliner, Michel Guilcher et Charlès; mais ce dernier n'ayant jamais démenti le désintéressement évangélique, les vertus chrétiennes qui ont animé toutes ses actions, la part du vénérable pasteur a été, de concert avec lui, distribuée à ceux des indigents de l'île qui avaient fait preuve de zèle pour l'équipage naufragé.

SAINT VINCENT DE PAUL

FONDANT L'INSTITUTION DES SOEURS DE LA CHARITE

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AINT VINCENT DE PAUL était curé à Châtillon en 1617. Un jour de fête, comme il était prêt à monter en chaire, une dame l'arrêta un moment et le pria de recommander aux charités de ses paroissiens une famille extrêmement pauvre, dont la plupart des enfants et des domestiques étaient tombés malades dans une ferme éloignée d'une demi-lieue de Châtillon. Il

le fit avec cette onction qui lui était natu

relle, et qui semblait redoubler toutes les fois qu'il s'agissait de l'intérêt de ceux qui étaient dans la misère. Il établit avec beaucoup de force la nécessité de secourir les pauvres, surtout quand la maladie se trouve jointe à l'indigence, et qu'ils sont hors d'état de se soulager eux-mêmes, comme l'étaient ceux qu'il leur recommandait.

Après la prédication, un grand nombre de ceux qui l'avaient entendue sortirent pour aller visiter ces pauvres gens; personne n'y alla les mains vides; les uns leur portèrent du pain, les autres du vin, de la viande et autres choses semblables. Saint Vincent y alla lui-même après les offices, avec quelquesuns des habitants de Châtillon. Comme il ne savait pas que tant d'autres y fussent déjà allés avant lui, il fut fort surpris de rencontrer dans le chemin une multitude de personnes qui revenaient par troupes, et dont quelques-unes se reposaient sous. des arbres, parce que la chaleur était excessive. Il loua leur zèle, mais il ne le trouva pas assez sage: Voilà, dit-il, une grande charite; mais elle n'est pas réglée. Ces malades auront trop

de provisions à la fois; cette abondance même en rendra une partie inutile. Celles qui ne seront pas consommées sur-le-champ, se gâteront et seront perdues, et ces pauvres malheureux retomberont bientôt dans leur première nécessité.

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Cette première réflexion porta saint Vincent, qui avait un esprit d'arrangement et de système, à examiner par quel moyen on pourrait secourir avec ordre non-seulement cette famille affligée, qui était alors l'objet de son zèle, mais tous ceux qui dans la suite se trouveraient dans une nécessité semblable. Il en conféra avec quelques femmes de sa paroisse, qui avaient du bien et de la piété. Chacun voulut avoir part à une si bonne œuvre, et le saint, pour profiter de ces heureuses dispositions, dressa un projet de règlement dont il voulut qu'on fit l'essai pendant quelque temps, avant que d'y faire mettre le sceau de l'approbation des supérieurs ecclésiastiques. Saint Vincent avait une maxime qu'il suivait toujours il était persuadé qu'un homme sage doit ajuster ses idées à l'expérience, et qu'il y a mille choses qui, quoique fort belles dans la spéculation, ne sont ni possibles, ni avantageuses dans la pratique. Ce ne fut que lorsqu'une expérience de trois mois lui eut fait connaître qu'il n'y avait rien à risquer, que saint Vincent demanda et

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