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poser, ainsi qu'il le désire; mais eux-mêmes ils bravent les hasards, et toute une famille est sauvée.

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Le second, M. Léger, dessert une paroisse isolée dans une île du Rhône c'est celle qui a le plus souffert. L'église, le presbytère, le cimetière et la maison commune sont les seuls lieux qui n'aient point été submergés. Aussi la population tout entière a-t-elle été en proie aux plus vives alarmes, aux plus cruelles tortures; et des efforts inouïs ont pu seuls préserver la commune de Vallabrègues d'une ruine totale. A la tête des hommes généreux qui se sont dévoués dans cette circonstance, on trouve toujours M. Léger. Tant qu'a duré cette crise terrible, il n'a pas un instant faibli, se tenant ainsi constamment à toute la hauteur de son saint ministère, donnant à tous l'exemple du devoir, et visitant en bateau chaque habitation compromise, afin de procurer des aliments aux familles cernées par les eaux, et que la faim eût infailliblement fait périr.

A Montfaucon, M. Blanc a montré tout ce que peut inspirer de noble et de généreux l'esprit du christianisme. Il apprit à

Alais, où il prodiguait ses soins à son vieux père malade, la catastrophe qui réduisait ses paroissiens au désespoir. Aussitôt il abandonna, non sans efforts, le lit de douleur près duquel il veillait sur une vie qui lui était bien chère, et courut partager les dangers de ceux dont il était, lui, le père spirituel. Ne pouvant se procurer une barque qui le portât chez eux, il se jeta dans le courant, et fit, dans l'eau jusqu'à mi-corps, un trajet de trois kilomètres. Il atteignit enfin une grange encore préservée, où il put changer de vêtements, et rejoignit aussitôt la population alarmée, négligeant de prendre le moindre repos, quoiqu'il en eût un si pressant besoin. Il redoubla d'efforts pour se livrer à tous les soins qu'exigeait l'affreuse situation de son troupeau; il vint en aide à tous, et ne mit un terme à ses fatigues et à ses veilles que lorsque tout péril eut cessé; dévouement d'autant plus digne d'éloges, que M. Blanc était atteint d'une maladie grave.

LE MODELE DES BONS SERVITEURS. JEAN GUÉNISSET.

PRIX MONTYON. 1820

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ONSIEUR JEAN GUENISSET est un serviteur sensible, qui a concentré dans la personne de son maître toutes ses affections, et qui, pour l'objet de sa vénération et de son culte, porte le dévouement jusqu'à l'hé

roïsme.

Voici un extrait des divers rapports qui ont été adressés à l'Académie-Française:

M. Antoine Magi, négociant à Marseille, et dont les ancêtres ont fait, de tout temps, le commerce avec honneur et distinction, éprouva des pertes à l'époque de nos premiers troubles révolutionnaires. Plein de confiance dans les opérations du gouvernement, il risqua, après le traité de paix d'Amiens, ce qui lui restait encore de sa fortune (environ 130,000

francs en marchandises) sur divers bâtiments. Tout fut pris par les croisières anglaises. Ruiné par ce nouveau désastre, il vint à Paris avec ses deux anciens domestiques (Guénisset et sa femme), pour solliciter auprès du gouvernement des indemnités. Ses sollicitations furent sans effet.....

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Depuis cette époque, il n'a existé que par les sacrifices de ses fidèles serviteurs. Émus par infortunes, ils se sont attachés plus que jamais à son sort, dans l'espoir, sinon de le changer, du moins d'en adoucir l'amertume. Le mari se plaça sacristain chez les dames carmélites, rue d'Enfer, où, chaque mois, il touchait quinze francs, qu'il mettait dans la maison. L'épouse se procura des ouvrages de couture; et, d'accord l'un et l'autre, ils consacraient les fruits de leurs travaux à soutenir les jours languissants de leur bon maître. L'épouse étant morte, il y a deux ans, l'honnête Guénisset a gardé pour lui seul la charge touchante qu'il partageait auparavant; et, dans les moments libres que lui laissaient les soins de la sacristie, il faisait des commissions. Une maladie grave que cet estimable. indigent vient d'essuyer, lui a fait perdre sa place; il n'a plus, pour son maître et lui, d'autres ressources que ses commissions. Le maire du 12o arrondissement a voulu le placer dans un hospice, en lui promettant de suppléer aux soins qu'il rendait à M. Magi; ce modèle des bons serviteurs a mieux aimé partager la misère de son maître, et a sacrifié les avantages de cette offre. Dans son langage naïf et ingénu, il a dit: Ce n'est pas à quatre-vingt-dix ans, qu'a atteints mon bon maître, qu'on se fait à de nouveaux visages, à de nouvelles manières; il est fait aux miennes... Il ne peut vivre heureux qu'auprès de moi, je ne puis l'étre qu'auprès de lui. »

Prévoyant, en 1817, que son âgé avancé ferait baisser, chaque jour, les produits déjà si faibles de son état de commissionnaire, il se fit inscrire au bureau de charité; et, par un sentiment de respect et de pudeur que vous apprécierez, il refusa de faire porter, sur ce même rôle d'indigence, le nom respecté de son maître; mais c'est à ce maître toujours qu'il a consacré les trois francs qu'il reçoit par mois comme secours, ainsi que tout ce qu'il peut recevoir encore au même titre.

LA BONNE FILEUSE, FRANÇOISE OLIVIER.

PRIX MONTYON, 1839

Dourgne, département du Tarn, habite Françoise Olivier, dite Bourdiole. Sa vie n'est qu'une longue suite de dévouements etd'abnégations. Pauvre et obscure fileuse de laine, après avoir soutenu des produits de son travail une mère infirme qui s'éteint dans ses bras, son ardente charité s'élance au-devant de tous les malheureux; il semble qu'ils lui soient adressés par le ciel. Ce sont quatre, six, sept vieillards, qu'elle a tous accueillis et soignés; elle ne les abandonne qu'après leur guérison ou à leur mort; un vieil aveugle reste trois ans à sa charge; elle le guide, le console, le nourrit, et reçoit son dernier soupir. Un autre vieillard indigent, qui porte, qui usurpe peut-être le nom de François Olivier, se présente à elle, se dit son parent, veut le

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ver; elle lui en épargne la peine « Vous êtes malheureux,

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vous êtes de ma famille,» répond cette fille angélique. Il reçoit des vêtements propres, une nourriture saine, et, jusqu'au jour où il expire, la pauvre fileuse vit de privations pour le soutenir, et parvient à trouver du superflu dans de faibles ressources qui ne lui assurent pas même le nécessaire.

Un ouvrier, père de trois enfants, est atteint d'une infirmité qui le met hors d'état de les soutenir; la mère, faible et souffrante, ne peut travailler pour eux Françoise Olivier adopte le père, la mère et les trois enfants; elle répare les haillons qui les couvrent, leur procure du linge et des vêtements. C'est peu des secours qu'elle prodigue aux indigents, elle inspire aux plus jeunes l'amour du travail et de la vertu. Ses faibles moyens pécuniaires ne suffisent point à tant de sacrifices, mais elle jouit d'une telle renommée, que les personnes. bienfaisantes l'aident dans toutes ses bonnes œuvres. Enfin, pour peindre en un mot cette modeste fille, qui a non-seulement l'amour, mais l'intelligence du bien, sous l'humble toit qui la couvre, elle a fondé pour les indigents un Hôtel-Dieu, un cours de religion, une caisse d'épargne et un tribunal sans appel.

DEVOUEMENT FRATERNEL. AUBRY, L'INVALIDE.

EXTRAIT DES FASTES DE LA NATION FRANÇAISE.

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ON l'an 1800, le 31 octobre, on ordonna l'ouverture du pertuis de Vermanton, département de l'Yonne, où passent les trains de bois flotté; on venait de le refaire à neuf.

Etienne Aubry, de la commune d'Accolay, apprend que le train dont son fils, âgé de 12 à 13 ans, conduit le bout de derrière, doit passer le premier. Alarmé du danger qu'il court dans un pertuis neuf, il se rend sur le lieu, et monte sur le train avec lui pour le surveiller. En effet, à peine le train est-il écoulé à moitié, que l'autre moitié est submergée de près de deux mètres de profondeur.

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