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sais où je vais..... Ils vont mourir.» Mon ami, lui dit l'autre, pénétré de sa situation, voilà deux sous, c'est tout ce que je possède; si tu voulais gagner quelque argent, je t'enseignerais bien un moyen.-Je ferai tout, répond Jacques avec vivacité, hors ce qui est contraire à l'honneur et à la religion. Eh bien, poursuivit son camarade, va à tel endroit, chez telle personne, elle apprend à saigner; et si tu peux te résoudre à te faire saigner, elle te donnera quelque

argent.

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Jacques vole chez la personne indiquée; on le saigne d'un bras; il est payé. Il apprend la même chose dans un autre endroit, il y court, et se fait encore saigner l'autre bras. Cet homme si respectable et si à plaindre, transporté de joie, achète du pain, et retourne précipitamment chez lui le partager entre sa femme et ses enfants. Ils le voient changer de cou

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leur. Il s'assied, le sang coule de ses bras. « Mon mari! mon père qu'avez-vous? vous vous êtes fait saigner! - Ma chère femme, mes chers enfants, leur dit-il avec un profond soupir

et en les tenant étroitement embrassés, c'était..... c'était pour vous donner du pain. » Alors ces infortunés l'inondent de larmes, ils le pressent réciproquement contre leur cœur. O hommes, quel spectacle!

AMYOT. SECOURS ET GRATITUDE.

ACQUES AMYOT, fils d'un cordonnier de Melun, s'étant échappé fort jeune de la maison de son père, s'égara et tomba malade en chemin. Un gentilhomme, qui le vit étendu dans le champ, en eut pitié et le mit en croupe derrière lui; il l'emmena à Orléans, où il le mit à l'hôpital. Comme sa maladie ne venait que de lassitude, il fut bientôt guéri: on le

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congédia et on lui donna douze sous. Ce fut en reconnaissance de cette charité, qu'étant devenu grand-aumônier de France et évêque d'Auxerre, il légua douze cents écus à cet hôpital d'Orléans.

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LE PILOTE DELPIERRE.

PRIX MONTYON ET DISCOURS PRONONCE SUR SA TOMBE 1834

ELPIERRE JACQUES, marin du port de Boulogne, fit souvent, dans sa jeunesse, la course avec succès, et quand nos côtes étaient bloquées il enlevait des bricks aux Anglais. En 1811, entre autres, il avait pris à l'abordage un brick de quatorze canons vivement défendu. La capture était belle et méritait encouragement. On lui offrit le choix entre la croix d'honneur et le retour immédiat de son père, prisonnier chez les Anglais. C'était mal connaître le cœur du brave corsaire. Jacques Delpierre opta pour son père, et le ministre oublia de lui donner aussi la croix d'honneur. Le roi des Français répara cet oubli; en 1832, Delpierre fut décoré de l'étoile des braves.

Ce père, qu'il entourait des soins les plus tendres, il le quittait toujours pour courir aux naufragés. Les registres de la marine attestent ses nombreux actes de dévouement. Tantôt il contribue à sauver l'équipage d'un vaisseau brisé, tantôt il ramène seul deux pêcheurs qui, submergés, allaient périr. Un jour, son canot ayant chaviré loin du port, la vague engloutit trois des hommes qui l'accompagnaient; un seul avait surnagé. Delpierre s'était saisi d'un aviron qui l'aidait à se soutenir sur l'eau; c'était son seul moyen de salut il donne l'aviron à l'homme, et n'est sauvé lui-même que par miracle. Il est cité pour s'être vingt fois jeté à la mer au premier cri de secours, et en avoir retiré un soldat, des passagers, plusieurs enfants. Un soir, par un violent orage, le cri Sauve! sauve! le fait

s'élancer tout habillé de la jetée de l'Est. Cette fois, son zèle fut bien récompensé l'enfant qu'il sauva était son fils.

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Jusqu'à son dernier jour, Delpierre fut toujours prêt à sc dévouer pour le salut de ses semblables, et sa fin fut digne de sa belle vie. En 1840, il périt victime de son dévouement en voulant sauver un bâtiment naufragé.

Ce brave marin ne brillait pas seulement par son courage et son héroïsme il possédait aussi toutes les qualités qui rendent l'homme estimable; il aimait le travail, était d'une probité sévère, d'une conduite irréprochable, et savait se faire aimer de tous ceux qui le connaissaient.

Delpierre avait deux fils. L'un périt avec lui; l'autre, celuilà même qui lui doit deux fois l'existence, a recueilli un héritage qui vaut mieux que l'or celui d'un nom vénéré par toutes les àmes généreuses.

SAINT VINCENT DE PAUL AU MILIEU DES GALÉRIENS.

EXTRAIT DE LA VIE DU SAINT PUBLIEE EN 1748.

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AINT VINCENT DE PAUL, dans son inépuisable charité, allait au-devant de toutes les misères. Son inclination particulière le portait toujours là où il y avait le plus de plaies à guérir. Il voulait savoir comment étaient traités les criminels, qui, condamnés aux galères, restent quelque temps à Paris avant que d'être conduits à Marseille. On le fit entrer dans les cachots de la Conciergerie et des autres prisons. Le spectacle qui s'offrit alors à ses yeux toucha vivement sa grande âme il vit des malheureux renfermés dans d'obscures et profondes cavernes, mangès de vermine, attenues de langueur et de pauvreté, et entièrement négligés pour le corps et pour l'âme.

Il s'agissait, d'un côté, de soulager un grand nombre de misérables; de l'autre, il fallait adoucir leur état sans les soustraire à la justice; inspirer une crainte salutaire des jugements de Dieu à des hommes qui ne s'en étaient jamais occupés, et apprendre à des cœurs endurcis à sanctifier par l'amour et la patience ces mêmes souffrances qui les aigrissaient, et qui étaient pour eux une occasion de blasphème, de fureur et de désespoir.

Encore tout ému des tristes objets qui l'avaient frappé, il en donna avis au général des galères. Il lui représenta que ces pauvres gens lui appartenaient, et qu'en attendant qu'on les conduisit au lieu de leur destination, il était de sa charité de ne pas souffrir qu'ils demeurassent sans secours et sans conso

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