Page images
PDF
EPUB

congrégations religieuses, et même pendant les violents orages qui ont exposé ses membres à des persécutions. Rétablie avec une existence légale par le gouvernement impérial, par le décret du 8 février 1809, elle possède aujourd'hui plus de trois cents établissements en France. Elle s'est étendue dans tous les pays voisins, et a envoyé des colonies au delà des mers. Que de milliers de pauvres, de malades, de veuves et d'orphelins doivent aujourd'hui à la charité et à la sagesse de saint Vincent de Paul les secours temporels et spirituels qu'ils reçoivent de ces pieuses filles qui continuent si dignement l'œuvre de leur saint fondateur !

LA FAMILLE GROSSO.

PRIX MONTYON. 1838

[graphic]

:

NE pauvre et honnête famille, depuis longues années, soutient de ses deniers et entoure de soins la vieillesse invalide et souffrante d'un colonel espagnol que diverses vicissitudes ont laissé sans fortune et sans asile. Cet officier avait eu à son service, vingt-cinq ans, le nommé Grosso, qui avait fait la guerre sous ses ordres. Dans la vieillesse et l'adversité, son serviteur fidèle ne l'abandonna point. Mais Grosso mourut. Sa femme, son fils, crurent au devoir de continuer sa tâche ils s'y dévouèrent avec courage. Le fils, chaque mois, apportait tout son gain à sa mère pour faire vivre l'ancien maître de son père. Cependant, voilà que lui aussi, à trente-trois ans, la mort est venue le frapper; et la mère, accablée de tant de coups, est désormais incapable de travail. Deux filles restaient pour porter tout cet héritage de dévouement, et soutenir à la fois le vieillard et sa bienfaitrice. Elles sont brodeuses de leur état; elles travaillèrent la nuit et le jour, elles travaillèrent si bien, que l'aînée, atteinte d'une maladie sans remède, cessa de pouvoir payer son tribut. Elle tombait ainsi, avec son

hôte et sa mère, à la charge de sa plus jeune sœur. Pétronille Grosso accepte tous les fardeaux que lui envoie la Providence. A force de travail, de privations et de courage, elle suffit à tout. Son courage ne fléchira point. Mais déjà sa santé s'épuise, et quand les voisins, effrayés pour elle, lui offrent les moyens d'acheter des aliments plus solides, elle achète au vieillard quelque surprise qui lui rappelle sa fortune et sa patrie. Quand on lui apporte, dans les rigueurs de l'hiver, des vêtements plus chauds, elle les donne à sa sœur. Sa constance parmi tant d'infortunes semblerait surhumaine, si elle ne trouvait dans la religion le seul soutien qui puisse toujours égaler nos forces à nos devoirs et à nos misères. Mais n'admire-t-on pas cette famille que la mort frappe à coups redoublés, sans y tarir la source des sentiments généreux! La vertu s'y transmet, comme une succession, au plus proche héritier. Rien n'atteste mieux l'heureuse puissance de l'éducation, et ne fait plus vivement sentir ce que peuvent les pères pour assurer à leurs enfants le trésor des bons sentiments avec celui des bons exemples.

PHILIPPE BARRE.

PRIX MONTYON. 1830

[graphic]

HILIPPE BARRÉ n'a pas seulement ce courage, cette force d'âme qui élève au-dessus de la crainte, et porte à braver le danger; chez lui, c'est encore une disposition habituelle à s'exposer luimême au péril, afin d'en préserver ou d'en tirer ses semblables: il est courageux par humanité.

Philippe Barré est chargé de cinq enfants et de sa belle-mère, qu'il fait vivre par son travail journalier. En 1817, à l'aspect d'une voiture dans laquelle étaient deux

estropiés près d'être engloutis par les eaux, Barré se jette dans la rivière; et, après de grands efforts et un travail opiniâtre, il les ramène à bord sains et saufs avec le cheval attelé à la voiture.

En 1818, Jean-Baptiste Dumilly, aussi charretier de bateaux à Rolleboise, tombe dans l'eau de dessus la berge (au Roulle, département de l'Eure); deux chevaux, sur l'un desquels il était monté, y tombent avec lui. Aux cris que Dumilly pousse pendant sa chute, Barré, qui le suivait par derrière, chargé de la conduite d'un autre bateau, se plonge tout habillé, sauve d'abord l'homme que le courant entraînait, et ramène ensuite les chevaux.

En 1821, au mois de décembre, un incendie éclate dans les écuries de M. Harang, aubergiste, dans l'une desquelles étaient sept chevaux et un de ses charretiers.

Philippe Barré n'hésite pas à s'élancer au travers du feu, saisit d'abord et sauve le charretier près de périr; revient aux chevaux, coupe promptement les longes de chacun, et les fait

[graphic]

sortir du gouffre qui allait les engloutir; puis, en fermant hermétiquement l'écurie, étouffe le feu, dont il se rend maître.

En 1822, au mois de janvier, un militaire vétéran, âgé

[merged small][merged small][ocr errors][merged small]

de 63 ans, tombe dans l'eau à Rolleboise, au moment où il montait dans la galiote; Barré le voit tomber, se lance dans l'eau et le sauve.

En 1825, le 3 février, Barré entend des cris sortant du bateau de M. Bayard, marchand à Paris, resté arrêté à cause des glaces, à Rolleboise, de l'autre côté de la Seine, et à bord duquel était M. Lacombe, commis marchand de vins.

Malgré la rigueur de la saison, Barré se jette dans la rivière, qu'il traverse à la nage, arrive au bateau, ranime le courage abattu des mariniers, examine le dessous de ce bateau, et voit que l'eau s'y introduit par une ouverture faite par des morceaux de glace. Il se sert de matelas qu'il trouve sous sa main pour empêcher l'eau de pénétrer davantage; et, après deux heures d'un travail aussi courageux que pénible, les hommes et l'équipage sont sauvés; mais il fallut jeter les tonneaux de vin dont le bateau était chargé.

En 1827, au mois de juillet, entre Rolleboise et Méricourt, Barré, averti par une clameur publique, plonge dans la rivière de Seine, à l'endroit où s'enfonçait la voiture de M. Alexandre Routier, marchand à Méricourt, et la ramène à bord avec les marchandises qu'elle contenait et le cheval qui y était attelé.

En 1829, au mois d'octobre, le feu se manifeste dans les écuries de M. Viollet, aubergiste; aux cris de: Au feu! Barré accourt, et parvient à arrêter l'incendie, non sans courir luimême de grands dangers.

Peu de temps après, étant couché dans son lit, Barré entend crier: Au malheur! Sans se donner le temps de prendre ses vêtements, Barré va droit aux cris, aperçoit dans la Seine, au bas de Rolleboise, une voiture qui se perdait; trois hommes étaient dedans, et elle était attelée d'un cheval. Barré se jette à l'eau suivant sa coutume, sauve les hommes, le cheval et la voiture.

On assure que sa vie entière est semée de traits pareils : on a recueilli et cité ceux qui sont le plus connus dans le pays. Ce sont les attestations de MM. les maires et adjoints, du curé et des notables habitants des communes de Rolleboise et de Bonnières, et de M. le sous préfet de Mantes

« PreviousContinue »