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– Bref de sa Sainteté Grégoire XVI, à M. Artaud de Montor.

<< Cher fils, salut et bénédiction apostolique,

>> Nous accordons toujours volontiers, à titre de récompense, les plus grandes marques d'honneur et d'éclatans témoignages de notre bienveillance à des hommes d'élite qui se placent au premier rang par leur talent, leur vertu et leur religion, lorsque surtout ils joignent à ces qualités un attachement inébranlable au siége de saint Pierre, et s'efforcent dans leurs ouvrages de mériter l'approbation du gouvernement de la république chrétienne et celle des autres états.

>> Certes, votre mérite personnel ne pouvait nous être inconnu ; distingué comme vous l'êtes par cette suréminence de talent, par les belles qualités de votre esprit, votre constante application aux meilleures choses, vos rares connaissances en littérature et en morale, enfin par la louange universelle qui proclame votre loyauté intègre, votre piété, votre foi, et ce dévouement sincère et ferme qui vous tient uni de cœur à la chaire de saint Pierre et à notre personne. Ce sont là autant de titres qui ont rendu votre nom illustre, soit dans votre ouvrage de la Vie de l'ie VII, notre prédécesseur de vénérable mémoire, soit dans l'Histoire de Dante Alighieri, où vous faites preuve d'une érudition si étendue et si forte, soit enfin dans quelques autres productions littéraires où brille toujours la manifestation de votre respectueuse déférence pour le siége apostolique. C'est pourquoi, dans le vif sentiment de satisfaction qui nous anime, nous avons cherché à vous donner quelque témoignage des dispositions spécialement bienveillantes que nous avons pour vous.

» Ainsi, pour honorer votre personne d'une manière spéciale, nous vous nommons, par les présentes lettres, et en vertu de notre autorité apostolique, nous vous proclamons chevalier Commandeur de SaintGrégoire-le-Grand de l'ordre civil, et nous vous donnons droit d'être compté parmi les autres chevaliers de cette illustre compagnie ; vous déclarant auparavant et pour cette circonstance seulement, absous et relevé de toute sentence ecclésiastique, d'interdit, d'excommunication, de censures et autres peines, de quelque manière et pour quelque cause que vous les ayez peut-être encourues.

» En conséquence, nous vous permettons et vous accordons le droit de porter librement et licitement les insignes de cet ordre, lesquels con

sistent en une grande croix d'or octogone, ayant au milieu l'image de saint Grégoire en rouge émaillé, que l'on peut porter au cou, avec un ruban de soie rouge, bordé des deux côtés par un liseré jaune.

» Et afin que vous puissiez apprécier de plus en plus notre bienveillance pour vous, nous envoyors nous-même le commandement, qu'on vous remette de notre part cette décoration telle que nous venons de la désigner.

» Donné à Saint-Pierre de Rome, sous l'anneau du Pêcheur, le 29 avril 1842, l'an douzième de notre pontificat.

L. cardinal LAMBRUSCHINI. »

Au dos est écrit: «A notre cher fils le chevalier Artaud de Montor. »

En marge, à gauche du texte, se trouve le sceau de l'anneau du Pêcheur. P.

Nous pouvons ajouter que jamais récompense ne fut mieux placée. M. Artaud de Montor est un écrivain qui a consacré sa plume à la défense de l'Église et du saint-siége ; il compose en ce moment une Vie de Léon XII, dont il a bien voulu nous lire quelques fragmens, et qui sera un vrai monument élevé à la gloire de ce grand pontife, et fera un digne pendant à la belle Vie de Pie VII. L'ouvrage paraîtra avant la fin de l'année.

PRUSSE. BERLIN.. Collection d'ouvrages sanscrits. Berlin va s'enrichir d'une collection de 845 manuscrits indiens, presque tous en langue sanscrite, contenant les Védas en entier. C'est M. Bunsen, conseiller intime de légation, qui, par ordre de Sa Majesté, a acheté cette collection à Londres, des héritiers de feu sir Robert Chambers. Les Védas ne se trouveut dans aucune bibliothèque, ni à Paris, ni à Londres. La Bodleiene, à Oxford, n'a acquis cet ouvrage que depuis peu de semaines, par la cession que M. le professeur Wilson lui a faite de sa précieuse collection. Feu M. Rosen préférait les Védas de Chambers à tous ceux qu'il connaissait. Les numéros contenant le Rig-Véda sont d'une beauté tout à fait particulière et conservés sous verre dans des montres précieuses; la copie seule de cet ouvrage a coûté 1,000 liv. st. dans les Indes. Les Védas ont 120 numéros, les Upanischads 26. La collection entière a été achetée pour 1,250 liv. sterl. M. le professeur Hoefer s'occupe en ce moment de faire un catalogue critique de ces rares ouvrages;

peut-être devrons-nous à ce savant distingué une anthologie indienne, en texte primitif, comme il a déjà publié une traduction de poésies sanscrites en vers allemands.

(Gazette du Hanovre.)

AMÉRIQUE.

MEXIQUE. - Découverte d'une ville antiqué, encore toute peuplée d'Indiens n'ayant eu aucune communication avec les Espagnols. Nous ne croyons que faiblement au récit suivant. Nous le donnons cependant tel qu'il est rapporté dans l'ouvrage récent de M. Stephens, intitulé: Visite aux villes ruinées de l'Amérique centrale:

<< Entre un grand nombre de portraits esquissés de main de maître, l'ouvrage de M. Stephens ne nous en présente pas un qui surpasse celui du curé de Quiché.-Son habit séculier, son humeur joviale, sa persévérance dans les études historiques et les transitions soudaines de la bouffonneric la plus enfantine aux pensées les plus graves, toutes ces particularités d'une nature moitié rustique et moitié civilisée, sont rendues avec le plus grand bonheur. Le bon père parla aux voyageurs d'une caverne adjacente à un village voisin, dans laquelle on trouvait des crânes humains, d'une dimension extraordinaire, qui inspiraient aux Indiens un respect superstitieux. Il les avait examinés lui-même et il pouvait garantir leurs vastes proportions. Un jour il avait placé une pièce de monnaie à l'entrée du souterrain, et il l'y avait retrouvée l'année suivante, tant les habitans du pays vénéraient ce lieu mystérieux. Il dit à M. Stephens que les Indiens étaient encore, à peu de chose près, tels que les avait trouvés la conquête espagnole; qu'ils chérissaient encore les usages et les coutumes de leurs pères; que, malgré la fascination qu'exerçait sur leurs imaginations la pompe des cérémonies romaines, ils n'en restaient pas moins idolâtres au fond du cœur; qu'ils avaient leurs idoles cachées dans les montagnes et les ravins, qu'ils pratiquaient encore en secret les rites que leur avait légués leurs pères, et que lui-même, bien qu'à regret, il se voyait obligé de fermer les yeux sur tout cela.

>> Son amour pour les antiquités égalait celui de nos voyageurs. Il leur cita plusieurs autres cités en ruinc, et une en particulier, située dans la province de Véro-Paz, aussi vaste que Santa-Cruz del Quiché, déserte

et désoléc, mais dans un état de conservation presque aussi parfaite qu'à l'époque où ses habitans l'avaient abandonnée. La première cure qu'il avait occupée était dans le voisinage, et il avait eu pendant longtems l'habitude de parcourir tous les jours les rues silencieuses de la cité

ruinée.

>> Mais le padre nous apprit quelque chose de bien plus extraordinaire encore que tout cela, ajoute M. Stephens, il nous dit qu'à quatre jours de marche sur le chemin de Mexico, de l'autre côté de la grande Sierra, était encore à cette heure une cité vivante, grande et populeuse, habitée par des Indiens qui étaient dans le même état précisément qu'avant la découverte de l'Amérique. Il en avait entendu parler bien des années auparavant dans le village de Chajul dont les habitans lui avaient maintes fois affirmé qu'on pouvait apercevoir très-distinctement cette ville du haut de l'arête supérieure de la Sierra. Il était jeune alors, et il gravit à grand'peine la montagne. Arrivé au sommet, c'est-à-dire à une hauteur de dix à douze mille pieds, il aperçut à ses pieds une plaine immense s'étendant jusqu'à Yucatan et au golfe du Mexique, et bien loin, presqu'à la limite de l'horizon, il vit une vaste cité qui couvrait une grande étendue de terrain et dont les tours blanches brillaient au soleil. A en croire les Indiens de Chajul, aucun blanc n'a jamais pénétré dans cette ville, dont les habitans parlent encore la langue Maya, n'ignorent pas qu'une race d'étrangers à conquis tous les pays circonvoisins, et massacrent sans pitié tous les Européens qui tentent de franchir les limites de leur territoire. Ils n'ont aucune monnaie ni aucune valeur en circulation; ils n'entretiennent ni chevaux, ni bestiaux, ni mulets ni autres animaux domestiques, si l'on en excepte la volaille, et encore ont-ils soin d'enfermer les coqs sous terre pour que leur chant ne puisse pas être entendu.

» Le vieux curé, avec son long habit noir, presque aussi flottant qu'une soutane, avec ses discours pleins d'enthousiasme et son œil ardent, nous rappelait, au milieu du silence profond de son cloître, à peine éclairé par une pâle lumière, ces prêtres qui accompagnaient les armées espagnoles, et jamais je n'avais ressenti une émotion égale à celle que j'éprouvai en le voyant dessiner un plan sur la table, et nous désigner du doigt la Sierra, du haut de laquelle il avait contemplé ce merveilleux spectacle. Un coup d'œil jeté sur cette cité valait des années d'une vie

ordinaire. S'il a dit vrai, il est un lieu où l'on peut encore retrouver les mœurs et le peuple que Cortez et Alvaro découvrirent en mettant le pied sur le continent américain, un lieu où s'élève encore une ville dont les habitans sont à même de déchirer le voile mystérieux qui couvre les cités en ruine..., qui sait même, de déchiffrer les inscriptions qui couvrent les monumens de Copan.

» Quant à moi, je crois à l'authenticité des récits du padre; je suis convaincu la contrée désignée par lui ne reconnaît que pas le gouvernement du Guatimala, qu'elle n'a jamais été explorée, et qu'aucun blanc ne tenta jamais d'en franchir les limites.

>> D'autres auteurs nous confirmèrent dans cette conviction, et tout le village de Chajul s'accorda à nous affirmer que l'on voyait en effet une ville indienne du haut de la Sierra....; mais aucun homme, quelque disposé qu'il fût à risquer sa vie, ne pourrait tenter d'y pénétrer avec la moindre chance de succès, sans consacrer préalablement deux ans au moins à errer aux alentours du pays, à étudier la langue et le caractère des Indiens du voisinage, et à lier connaissance avec quelques-uns des naturels... Cinq cents hommes suffiraient évidemment pour conquérir ce territoire, et cette invasion serait certes mieux motivée que toutes celles des Espagnols, mais le gouvernement est trop occupé de ses dissensions intestines, et d'ailleurs ce ne serait qu'au prix du sang que la science historique ferait un progrès. Quant aux dangers, on les a probablement grandement exagérés. Quoi qu'il en soit, si l'on fait jamais là aucune découverte, c'est aux prêtres qu'on la devra. »

(Traduit de l'anglais.)

Bibliographie.

COMMENTAIRE GÉOGRAPHIQUE sur l'Exode et les Nombres, par Léon de Laborde, auteur des Voyages de l'Arabie Pétrée, de la Syrie et de l'Asie Mineure; 1 vol., in-fol. avec 13 cartes. Prix 20 fr. Paris et Leipzig, Jules Renouard et comp., 1841.

Nous ne ferons qu'annoncer cet ouvrage, sur lequel il y aura dans le prochain cahier, un article de M. Quatremère. Mais, pour en faire sentir toute l'importance, nous allons donner: 1o la liste des cartes qui y sont insérées; 2° l'approbation dont l'a revêtu Mgr l'archevêque de Paris.

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