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» par une tradition fidèle. Ce document mosaïque, que l'on peut, » en outre, par de bonnes raisons, déclarer le plus ancien qui >> existe sur la race humaine, doit donc trouver toujours appro >bation et estime devant le tribunal d'une critique purement historique, qui détourne ses yeux de tout point de vue religieux.-Le même jugement s'applique à l'histoire de l'homme. » Là aussi les récits mosaïques sont si évidemment préférables à » tous ceux des écrivains profanes que l'on ne peut leur refuser » un haut degré de crédulité, au moins comparativement. Dans l'aperçu sur les sources de l'histoire des Hébreux, il dit : << Nous ne possédons sur l'histoire d'aucun peuple de ces tems-lå » des relations aussi anciennes, aussi circonstanciées et aussi sû» res. Les écrivains bibliques, dont nous avons fait mention plus haut, étaient pour la plupart, abstraction faite de l'inspiration, témoins oculaires des événemens qu'ils racontent; ils y avaient pris part, ou au moins ils étaient, par leurs relations, à portée » de rassembler et de comparer les traditions et les monumens » relatifs aux faits nationaux antérieurs à leur époque. Ces livres >> remontent au berceau, à la première origine du peuple hébreu, » et l'on ne peut méconnaître qu'ils sont dignes de foi, quant à » ce qui regarde l'enchaînement essentiel des faits; car il en est >> autrement des circonstances accessoires, et de ce qui n'est qu'une » exposition métaphorique.

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Les adversaires du Pentateuque n'ont pas conservé un seul partisan parmi tous les historiens modernes qui possèdent quelque mérite, ou qui passent pour en avoir. Ils sont réduits à se contenter de gens tels que Mannert, qui parle entièrement comme eux dans son Manuel de l'histoire ancienne1, ouvrage déjà frappé de mort, ou plutôt mort-né. Un seul trait suffira pour caracté riser cet écrivain: La supériorité de l'homme sur les animaux ne consiste, suivant lui, que dans les doigts, l'habitude de marcher debout, et la parole. Il observe encore que d'autres animaux possèdent la base de la raison, et il croit porter un coup terrible

' Berlin, 1818.

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à l'histoire du déluge par l'objection suivante : « La pensée se » révolte à l'idée que la justice de Dieu ait pu anéantir des ani>> maux innocens, parce que des hommes coupables auraient transgressé ses commandemens 1! » — -La voix de la conscience historique ne peut se faire entendre dans le domaine de l'écriture sainte, quand toute intelligence des choses élevées fait ainsi défaut, quand une haine profonde contre tout ce qui est divin a fait irruption daus l'âme ; car, alors, l'historien se transforme involontairement en mauvais théologien, surtout s'il a été dès le berceau pénétré de la plus détestable théologie : nous ne reconnaîtrions pas même la compétence d'un historien qui ferait profession de philosophie. Si l'on réussit à mettre l'histoire au service d'un système comme celui de Hegel, les historiens et les pseudo-théologiens pourront en venir à une alliance; l'historien-philosophe, en effet, comme le pseudo-théologien, se garde très fort d'étudier les faits qu'il a devant les yeux avec une attention scrupuleuse, et sans se préoccuper des résultats qui en découleront; son unique pensée est de faire accorder les faits avec ses présuppositions intérieures; or, les hypothèses à priori, auxquelles la philosophie la plus récente a voué son amour, sont incompatibles avec la composition mosaïque du Pentateuque. Mais nous pouvons nous rassurer à cet égard : des ouvrages comme l'Histoire des papes de Ranke, nous donnent l'heureuse garantie que l'histoire a devant elle un meilleur avenir.

Remarquons encore que le chronologiste le plus distingué de notre époque partage l'opinion de nos grands historiens sur la question qui nous occupe. Ideler, dans son Manuel de chronologie, ne se borne pas à supposer constamment l'origine mosaïque de la loi, il la soutient d'une manière expresse. Dans un endroit, par exemple', il s'exprime ainsi : « Pendant les longues années

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Pages 6 et 12.

Mannert s'abstenait sans doute soigneusement de manger aucune espèce d'animaux; car c'eût été une sorte de fratricide,

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› de leur marche à travers l'Arabie Pétrée et Déserte, leur guide » leur donna une constitution qui ne devait être mise en pra» tique qu'à leur entrée dans la terre promise de Chanaan, » demeure originaire de leurs nomades ancêtres. Cette consti» tution avait pour but d'en faire un peuple agriculteur : ce but » est assez clairement exprimé par la mesure du tems qui règle >> les jours de fête et les jours de repos, etc. » Le chronologiste, comme de raison, commence par faire passer l'authenticité au creuset de sa science; et comme, en se plaçant dans l'hypothèse de l'authenticité, il trouve chaque chose où elle doit être, il ne fait aucune attention aux cris des pseudo-théologiens.

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Après avoir montré que le penchant général du siècle au septicisme ne suffit pas pour expliquer la négation de l'authenticité du Pentateuque, nous allons essayer d'indiquer la cause essentielle de ce fait.

Elle est dans la propension de notre époque au Naturalisme, propension qui prend elle-même sa source dans l'isolement où l'on se tient aujourd'hui de Dieu. Quand un homme n'a rien éprouvé intérieurement qui lui ait fait sentir la présence d'un Dieu vivant, il cherche à effacer aussi ses traces de l'histoire. Tout ce qui se passe en lui-même étant purement naturel, il lui semble qu'à l'extérieur tout doit s'être passé d'une manière également naturelle.

Pour étayer cette opinion, on s'est appuyé sur les mots pompeux de développement progressif, de perfectionnement humanitaire, etc.; mais, assurément, c'est bien à tort. Le Naturalisme ne pourrait être considéré comme un progrès qu'autant que l'on serait parvenu, dans les tems modernes, à expliquer par les lois de la nature ce que, faute de les connaître, les âges passés avaient cru surnaturel; mais une plus grande connaissance de la nature n'a rien produit de semblable: ce qui passait jadis pour surnaturel passe encore pour tel aujourd'hui. Il y a donc insigne impudence de la part du Naturalisme à se targuer ainsi de progrès, tandis qu'il s'enfonce dans un abîme d'absurdités. Ses partisans doivent soutenir, d'abord, que les défenseurs récens du système mythique sont plus instruits, plus avancés que les champions de la vérité

biblique; mais c'est de quoi, assurément, il n'y a nulle apparence, L'histoire des attaques dirigées contre le Pentateuque, et contre les livres saints en général, a så partie honteuse, que l'on cherche soigneusement à dissimuler. Si le nom d'homme instruit doit être l'apanage de ceux qui nient l'authenticité du Pentateuque, il faudra décerner ce titre à des hommes qui semblaient ne pouvoir guère y prétendre depuis les libertins du 16e siècle, qui tournaient le Pentateuque en dérision, jusqu'à l'auteur du Catéchisme de l'honnéte homme', jusqu'au populaire Edelinann, pour lequel le Pentateuque n'est autre chose « qu'un amas de fragmens entas>> sés on ne sait trop par qui, probablement par le rust prêtre juif » Esra'. » Singuliers auteurs du progrès! étranges météorės, avant-coureurs du soleil des lumières !

HENGSTENBERG.
Traduit de l'allemand.

'P. 10. Il dit ircniquement : « Les événemens racontés dans le Pen» tateuque étonnent ceux qui ont le malheur de ne juger que par leur » raison, et dans qui cette raison aveugle n'est pas éclairée par une grâce » particulière. » — A plus forte raison ces événemens choqueraient cet esprit bien fait, pour lequel, selon de Wette, l'inauthenticité du Pentateuque est de prime-abord chose certaine, attendu que ce livre raconte des miracles et des prophéties.

2 Moise dévoilé, p. 9, etc.

Histoire.

HISTOIRE DE LA VIE, DES OUVRAGES ET DES DOCTRINES DE CALVIN, par M. AUDIN, auteur de l'Histoire de Luther.

L'histoire de Luther est entrelacée, pour ainsi dire, dans les mille détails de l'histoire d'Allemagne au 16e siècle, laquelle est peu familière au plus grand nombre des lecteurs. Au contraire, quoiqu'une ville étrangère ait été le principal théâtre des actes de Calvin, la vie de ce sectaire appartient à l'histoire de France. Jean Cauvin, ou Calvin, est né en France. C'est même à Paris qu'il a fait ses premières études, formé ses premières liaisons, prononcé ses premiers discours, imprimé son premier ouvrage. Triste honneur pour Paris et pour la France! Lorsqu'à l'âge de 25 ans Calvin fut obligé de quitter Paris, il avait déjà donné des preuves non équivoques de l'aridité de son cœur et de la bassesse de son caractère. Il avait vu sans sourciller son vicux père mourir dans ses bras; il avait porté en France les premiers coups à cette Église qui l'avait nourri, qui le nourrissait encore; car l'âme peu délicate de Calvin ne se fit aucun scrupule de garder les deux bénéfices qui le faisaient vivre, lorsque déjà depuis longtems il travaillait à détruire cette religion qui lui avait libéralement octroyé ces honorables moyens d'existence.

«Notre idée, dit M. Audin, a été, dans l'Histoire de Luther, de réhabiliter la mémoire des intelligences qui se vouèrent à la défense de l'autorité. Nous avons voulu, dans la biographie de Calvin, prouver que le réfugié de Noyon fut funeste à la civili. sation, à l'art, aux libertés. » La thèse contraire compte tout naturellement Calvin lui-même au nombre de ses défenseurs. A

! Paris, 1841, 2 vol. in-8; Chez Maison, quai des Augustins, 29. III SÉRIE. TOME VI. - No 35. 1842.

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