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» de conserver fidèlement nos saints temples et de les protéger contre » l'imprudence des restaurateurs inhabiles, afin qu'on puisse montrer >> aux siècles futurs ce qu'a pu dans les tems de foi le génie secondé par >> la religion...."

Cette circulaire de l'auguste pontife témoigne de son goût pour les arts et de sa paternelle sollicitude à nourrir dans ses prêtres le zèle intelligent qui renoue la chaîne des tems passés. Le clergé du diocèse de Grenoble répondra avec honneur à cet appel. La terre dauphinoise n'est pas la terre classique des beaux monumens du moyen-âge, mais quoique pauvre de ces magnifiques souvenirs, il en existe assez cependant pour exciter une noble émulation dans les études archéologiques. Monseigneur vient de créer dans son grand séminaire un cours sur cet important sujet. Les jeunes prêtres seront initiés de bonne heure, par cette sage mesure, aux mystérieuses pensées de l'architecture religieuse.

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Bibliographie.

« Les savans et laborieux moines du couvent arménien de la pelite île de Saint-Lazare, près de Venise, auxquels on est déjà redevable de la publication et de la traduction d'un très grand nombre d'anciens ouvrages arméniens d'une haute importance, s'occupent en ce moment à faire une édition de tous les historiens arméniens, depuis le 4o siècle de notre ère jusqu'aujourd'hui. Ce recueil commencera par l'Histoire de la Conversion des Arméniens au Christianisme, par Agal Angelus, prêtre, qui vécut vers le milieu du 4° siècle, et cet ouvrage sera suivi par l'Histoire d'Arménie depuis le commencement du monde (sic) jusqu'à l'an de grâce 440, par Moïse de Khoren, archevêque de Petravart, mort en 492.

L'édition, dont la majeure partie se composera d'œuvres entièrement inédites, aura environ 40 volumes grand in-folio. Le texte armé– nien sera accompagné d'une traduction italienne en regard et de notes et commentaires.

» La direction de cette grande entreprise est confiée à M. Tommaseo, un des linguistes les plus distingués de l'Italie, qui a consacré dix années de sa vie à examiner les manuscrits arméniens des bibliothèques de France, d'Allemagne, d'Angleterre et d'Italie. »

DE PHILOSOPHIE CHRÉTIENNE.

Numéro 35. Novembre 184,2.

Offices de l'église.

L'ANNÉE LITURGIQUE (PREMIÈRE SECTION).

L'AVENT LITURGIQUE.

PAR LE R. P. D. GUÉRANGER, Abbé de Solesmes'.

Lors de la publication du premier volume des Institutions liiurgiques, le R. dom Guéranger annonça, dans sa préface, le projet d'une Année liturgique, travail destiné, disait-il, à mettre les fidèles en état de profiter des secours immenses qu'offre à la piété chrétienne la compréhension des mystères de la liturgie. Cet ouvrage, d'un format commode et portatif, devait surtout aider les fidèles dans l'assistance aux offices divins et tenir lieu des livres ordinaires de prières. Conformément à cette promesse, la première section de l'Année liturgique, parut en 1 vol. in-12, avant la fin de l'année 1841. La plupart des journaux religieux

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1 vol., in-12, de 500 pages, chez Debécourt, libraire, rue des SaintsPères, 69, à Paris. Prix : 3 fr. 75.

2 Ce premier volume a été analysé dans les Annales ; voir les numéros de juin et novembre 1840, et février 1841, t. I, II et II, 3a série. Nous rendrons compte du tome second dans un prochain numéro.

N. B. On a parlé des documents historiques renfermés dans les offices de l'avent dans le tome vII, p. 409.

IIIa SÉRIE. TOMe vi.—N° 35.

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en ont déjà rendu compte. Nous avons préféré différer quelque tems, et attendre, pour le faire connaître à nos lecteurs, l'époque où l'Avent liturgique pourrait leur être plus profitable et leur servir de manuel quotidien.

A la tête de ce volume, l'auteur a placé une préface générale où les idées qui l'ont guidé et le plan général qu'il a suivi, dans la composition de l'Année liturgique, sont exposés avec chaleur et netteté. Elle mérite, sous plus d'un rapport, de fixer l'attention.

Partant du principe du devoir et de l'absolue nécessité de la prière pour l'homme, le révérend auteur n'a point de peine à établir que l'homme, de lui-même, ne sait point prier, qu'il faut absolument que Dieu l'enseigne en lui communiquant son saint esprit. Mais cet esprit divin a été donné à l'Église le jour de la Pentecôte; depuis lors il réside en elle, il l'inspire, il ne l'a plus quittée.

« De là vient, continue dom Guéranger, que, depuis dix-huit siècles, elle ne se tait ni le jour ni la nuit, et sa voix est toujours mélodieuse, sa parole va toujours au cœur de l'Epoux. Tantôt, sous l'impression de cet esprit qui anima le divin psalmiste et les prophètes, elle puise dans les livres de l'ancien peuple le thême de ses chants; tantôt, fille et sœur des saints apôtres, elle entonne les cantiques insérés aux livres de la nouvelle alliance; tantôt, enfin, se souvenant qu'elle aussi a reçu la trompette et la harpe, elle donne passage à l'esprit qui l'anime, et chante à son tour un cantique nouveau'; de cette triple source émane l'élément divin qu'on nomme la Liturgie.

» La prière de l'Église est donc la plus agréable à l'oreille et au cœur de Dieu, et partant la plus puissante. Heureux donc celui qui prie avec l'Eglise, qui associe ses vœux particuliers à ceux de cette épouse chérie de l'Epoux et toujours exaucée! Et c'est pourquoi le Seigneur Jésus nous a appris à dire notre père, et non mon père; donnez-nous, pardonnez-nous, délivrez-nous, et non donnez-moi, pardonnez-moi, délivrez-moi. Aussi, pendant

• Po. 4.

plus de mille ans, voyons-nous que l'Église, qui prie dans ses temples sept fois le jour et encore au milieu de la nuit, ne priait point seule. Les peuples lui faisaient compagnie et se nourrissaient avec délices de la manne cachée sous les paroles et les mystères de la divine Liturgie. »

Heureux siècles de prière et de ferveur, déjà bien loin de nous, mais dont la foi de nos pères avait conservé quelques restes jusqu'en ces derniers tems. Il y a, en effet, soixante ans à peine que « le sol de la chrétienté était encore couvert d'églises et de monastères, qui retentissaient le jour et la nuit des accens de la prière sacrée des âges antiques. Tant de mains levées vers le ciel en faisaient descendre la rosée, dissipaient les orages, assuraient la victoire. Ces serviteurs et ces servantes du Seigneur, qui se répondaient ainsi dans la louange éternelle, étaient députés solennellement par les sociétés encore catholiques d'alors, pour acquitter intégralement le tribut d'hommages et de reconnaissance dû à Dieu, à la glorieuse Vierge Marie et aux Saints. Ces vœux et ces prières formaient le bien commun; chaque fidèle aimait à s'y unir, et si quelque douleur, quelque espérance le conduisait parfois au temple de Dieu, il aimait à y entendre, à quelque heure que ce fût, cette voix infatigable qui montait sans cesse vers le ciel pour le salut de la chrétienté. Bien plus, le chrétien fervent's'y unissait en vaquant à ses fonctions ou à ses affaires, et tous gardaient encore l'intelligence générale des mystères de la Liturgie. >>

Nous voudrions que ce passage tombât sous les yeux de certains hommes, dont quelques-uns se croient bons chrétiens, et qui n'ont jamais compris l'utilité des ordres monastiques spécialement consacrés à la contemplation et à la prière. Grâce au progrès des idées, on admire la plus grande partie des institutions du christianisme, on veut bien applaudir au dévouement des ordres religieux, mais à condition que ces ordres travaillent et s'emploient d'une manière active au bien-être de la société. Quant à ceux qui se vouent à la retraite et aux devoirs de la vie ascétique, on passe facilement condamnation sur leur compte. ertes, il faut que l'esprit chrétien ait été bien profondément

altéré dans les cœurs pour en être arrivés à ce point. Il faut qu'on ait oublié les plus simples notions sur la prière, sa nécessité, le pouvoir de la prière commune, sur la vie d'oraison et de pénitence, sur l'excellence des conseils évangéliques. Vous reprochez au Trapiste de s'user en longues veilles, au lieu de chercher dans le repos de nouvelles forces pour le travail du lendemain; et vous ne vous doutez point que, si vous lui ôtez ces communications incessantes avec Dieu, vous lui ôtez la force de rester deux jours entre les murs de son couvent. Vous demandez à quoi bon des Carmélites et des Chartreux ; et vous ne soupçonnez pas l'influence que la moindre fille du cloître peut exercer sur les décrets divins. Vous semblez ignorer que, nuit et jour, de tous les points de la terre, il monte une nuée de crimes, d'abominations, de sacrilèges, de blasphèmes, et qu'il faut bien, ne fût-ce qu'en vertu de la loi des compensations, certains lieux privilégiés, d'où s'élève un courant de supplications et de larmes, pour éteindre la foudre entre les mains de Dieu. Eh bien, c'est ce courant que ne cessent de lancer vers le ciel, du sommet de leur montagne, les enfans de saint Bruno.-Que font en ce monde de cénobites? pauvres Peu de chose, à la vérité. Ils accomplissent cette parole de leur maître: il faut prier toujours, et ne jumais cesser de prier. Tandis que vous combattez vaillamment au plus fort de la mêlée, ils se contentent de tenir les mains élevées en haut; mais souvenez-vous que tant que Moïse tenait ainsi ses mains étendues, Israël était victorieux, et qu'il tournait lâchement le dos, dès que les bras du prophète tombaient de lassitude.

La prière est la vie de l'Église; c'est l'árme avec laquelle elle triomphe de ses ennemis, c'est l'encens qu'elle fait monter vers le trône éternel, afin d'adorer, de rendre grâces, d'implorer le pardon et d'obtenir sans cesse de nouveaux secours. Et voilà pourquoi l'Église a attaché tant d'importance à la liturgie, qui n'est, selon la signification propre du mot, que la prière solennelle et organisée; voilà pourquoi elle a toujours comblé de ses

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