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quait pour se placer au rang des sciences, où elles n'avaient pas encore le droit de figurer et où on ne les avait classées que par anticipation. C'est donc avec raison que, dès le commencement, on a dit que ce principe fondamental et cette méthode, jusqu'à présent méconnus en philosophie, étaient de nature à changer la face de cette science.

Le livre eût sans doute pu se borner là; mais alors il n'eût embrassé que la partie physique de la philosophie. Pour traiter le sujet dans son intégrité, il a fallu y ajouter la partie morale, et, par conséquent, y donner la théorie de Dieu et celle des êtres immatériels. Là le principe- fait, emprunté à la révélation, est à peu près impuissant. Nous ne savons de Dieu que ce qui en a été révélé, et d'ailleurs il ne saurait y avoir en cette matière des expériences confirmatives de la théorie. Il est vrai que l'auteur avait ici à sa discrétion le riche arsenal théologique et la théologie des écoles. «Mais, dit l'auteur, cette théologie date de cinq ou six >> cents ans : elle n'a été composée telle que nous l'avons que pour >> combattre des hérétiques et des incrédules. Les armes qu'elle >> avait prises dans l'arsenal théologique étaient bien celles dont » il fallait s'armer contre de tels ennemis, mais elle a négligé le » reste. Aujourd'hui ses nouveaux adversaires ne sont ni des hérétiques ni des incrédules, ce sont les panthéistes de Schelling, de Krause, de La Mennais, etc. Pour combattre ces nou» veaux antagonistes, la scolastique est mal armée et son plan stratégique, s'il est permis de dire ainsi, n'a pas été conçu pour » vaincre de pareils ennemis. Demandez-lui en effet la théorie >> des deux natures infinie et finie avec laquelle on tue du pre>> mier coup l'Étre absolu sur lequel tous les panthéismes repo» sent? Elle a négligé d'en parler. Demandez-lui la théorie de » l'infini, avec laquelle on démontre aux panthéistes que leur » univers n'est pas l'univers réalisé ou créé, mais seulement l'idée >> éternelle de Dieu? Elle l'a laissée de côté. Demandez-lui la >> théorie de l'univers invisible ou typique, idée éternelle de Dieu, au moyen de laquelle on comprend plusieurs choses >> essentielles qu'elle n'explique pas et par laquelle on démontre >> aux panthéistes que la réaction de l'univers visible se trouvant

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» irrévocablement arrêtée dans cette idée éternelle de Dieu, il » est absurde de la mettre en doute? C'est à peine si on y en >> trouve quelques légères traces. »>

Obligé de se conformer aux besoins du tems, et ne trouvant point ces théories dans les traités de théologie, l'auteur a dû s'attacher à les développer. Maintenant il est question de voir si tout ce qu'il y dit est en harmonie avec l'enseignement dogmatique. On a déjà attaqué, dans la Revue littéraire et critique, publiée par la Société de St-Paul', le corollaire 4 du liv. Ier et le chap. XI du liv. 6. Dans le corollaire, il y aurait l'hérésie dite ubiquisme, et dans le chap. XI celle du milleranisme. Mais, dans ses additions supplémentaires, l'auteur fait remarquer que cette Société a commis à cet égard deux graves méprises, et qu'il suffit de con'sulter un traité de théologie pour voir que l'hérésie des ubiquitaires et celle des millenaires sont tout autre chose. En sorte qu'il n'y a pas même vestige dans le livre de ces deux prétendues hérésies. Quant à nous, n'ayant pas encore étudié l'ouvrage sous ce point de vue, nous ajournerons à un autre tems nos remarques critiques, s'il devient nécessaire d'en faire. Aujourd'hui notre unique but a été de faire connaître aux lecteurs des Annales cette nouvelle publication philosophique qui mérite une sérieuse attention à cause des conséquences importantes qu'elle peut avoir et dont voici les principales.

1. La première de ces conséquences est que tout le matérialisme de l'édifice athée élevé par les physiciens, les chimistes et les naturalistes modernes s'écroule et disparaît derrière la surprénante fecondité de cette philosophie positive, ou pour mieux dire de cette philosophie anté-diluvienne restituée sur son principe fondamental conservé dans la révélation évangélique. En d'autres mots, que les sciences physiques et naturelles, rendues athées par les soi-disans philosophes du siècle passé, redeviennent chrétiennes, et le deviennent pour toujours; car, par la publication de ce livre, la science et ses futurs progrès se trouvent aujourd'hui renfermés dans le christianisme, de telle sorte que

N° V, mai, p. 228 et suiv,

l'on ne puisse jamais les en séparer et que l'on se trouve forcé d'enseigner l'un et l'autre conjointement, ce qui nous ramène à la manière de voir de l'admirable et saint docteur d'Hippone qui disait, il y a quatre siècles, non aliam esse philosophiam et aliam religionem.

2. La seconde conséquence est que ce livre met, pour ainsi dire, dans la main du clergé ce qu'il désire avec tant de raison et d'ardeur, savoir, d'occuper un rang distingué, ou au moins le rang qui lui convient dans la science. En effet, ce livre démontrant que la science même et ses progrès ultérieurs se trouvent être aujourd'hui renfermés dans le christianisme, quel autre corps pourrait être plus apte que lui à professer cette philosophie et à la faire progresser? Les ecclésiastiques ne possèdent-ils pas infiniment mieux que les laïques la conuaissance du dogme chrétien dont ils sont les dépositaires? Et à cet égard il faut prendre garde de s'abuser. Quand bien même il serait échappé à l'auteur quelque chose d'inexact, d'hérétique même dans la partie morale, comme cette partie morale n'est, à proprement parler, qu'une œuvre de remplissage, il est aisé de l'en faire disparaître · sans porter la moindre atteinte à tout le reste, et il est d'ailleurs loisible à tout le monde de se l'arranger à son gré. Cette partic morale même, quelque imparfaite que l'on puisse la supposer, une fois purgée par la critique de ce qu'elle peut avoir d'imparfait, n'en restera pas moins, parce que son importance pour réfuter les panthéistes et résoudre quelques questions difficiles de théo logie ne permettra pas de la laisser de côté.

3. La troisième conséquence est que ce livre ouvre à la science une route nouvelle dans laquelle il est difficile de penser qu'elle ne fasse pas de grands progrès : car l'auteur n'a pu faire autre chose que donner l'exemple de la parcourir. Livré à ses seuls moyens, et, pour ainsi dire, bridé par l'insuffisance de son instruction bornée, tandis qu'elle eût dû être complète et universelle, il n'a pu la parcourir comme l'auraient fait ces spécialités qui marchent au premier rang et que rien n'égale. Obligé de tout savoir pour traiter son sujet, il n'a fait qu'effleurer la matière, et cependant son livre renferme une foule de choses nou

velles et en avant de la science, principalement sur la lumière et la chaleur.

4. Enfin, la quatrième conséquence est qu'au moyen de cette publication il devient possible à tout bon élève parvenu en philosophie d'apprendre la science universelle en y consacrant deux ou trois ans seulement; car au moyen des théories que renferme la partie physique de ce livre, les expériences se trouvant groupées en grand nombre dans chaque corollaire, les traités si volumineux, si indigestes de la physique et de la chimie cessent de justifier leur titre pour devenir des répertoires d'expériences ou des manuels de la science pratique, répertoires très utiles, sans doute, mais indispensables seulement pour ceux qui se destinent à l'art pharmaceutique ou à celui des manipulations.

Ce qui précède ne donne, sans doute, qu'une idée vague du livre; mais comment analyser un travail qui lui-même n'est qu'une sorte d'exposition analytique d'un traité de philosophie positive à composer? C'est chose absolument impossible. Pour se faire une idée de la facilité avec laquelle tout se déduit du principe fondamental dans la philosophie physique, de la logique sé vère, de la science et de l'érudition que ce livre renferme, il faut non pas seulement le lire, mais l'étudier et le méditer. La science universelle en théorie est là déduite d'un principe jusqu'à présent méconnu et, par conséquent, entièrement ignoré de tout le monde : ce que renferment nos livres n'en fait point partie, et s'il y intervient, ce n'est que pour attester sa vérité. Celui qui se contentera seulement d'en lire le contenu ne pourra trouver dans sa mémoire, après cette lecture, qu'un cahos d'idées nouvelles dans lequel la raison se trouve égarée. On a tout compris, grâce à la précision d'expression et à la lucidité de pensée qui ont présidé à la rédaction de ce travail original, mais l'intelligence se trouve confondue par cette multitude de nouveautés rassemblées en un seul volume, et par le défaut de méditation que chacune d'elles exige pour être bien saisie.

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Nouvelles et Mélanges.

EUROPE.

FRANCE. ISSOUDUN. Découverte d'une basilique chrétienne des premiers siècles. - M. Armand Péremet, en faisant une fouille au pied de la grosse tour d'Issoudun (Indre), sur laquelle il donne des détails fort curieux, a découvert, enfoui sous terre, et presque dans son entier, un édifice qui, comme les cités d'Herculanum et de Pompéi, s'est conservé, par la destruction même, dans toute la pureté de son origine, et qu'il prétend appartenir au 4o ou 5o siècle de notre ère. Cet édifice constitue, selon lui, une de ces petites basiliques ou oratoires que les premiers chrétiens élevaient en l'honneur des saints et des martyrs, et qu'il démontre être le type des églises chrétiennes, accompagnée de la cellule, qui en était presque toujours l'appendice obligé, et dont Grégoire de Tours fait si souvent mention.

M. Armand Péremet est parti de cette découverte comme base pour se livrer à des études qui l'ont mis à même d'entreprendre l'Histoire des temples chrétiens primitifs. Tout fait espérer qu'il saura réparer cette lacune de la science archéologique.

AMÉRIQUE.

ÉTAT DE KENTUCHY. Description de la caverne du Mammouth. -La caverne du Mammouth, ou grande grotte américaine, est un immense souterrain dans la prairie sud de l'Etat de Kentuchy. La description qui suit est due à la plume d'un gentleman très instruit et digne de la plus haute considération, qui est demeuré tout récemment quelque tems sur les lieux.

La caverne a été explorée, suivant l'estimation du guide, sur une étendue de quatorze milles (22 kilomètres 172, 5 lieues 172) en ligne droite. Cette limite des explorations aboutit à une entrée au-delà des montagnes rocheuses. Jusqu'où peuvent-elles s'etendre encore, on l'ignore.

Il paraît que la caverne a été habitée dans des tems reculés, mais probablement par des races éteintes aujourd'hui. On a examiné, en 1813, un corps humain trouvé dans cette caverne, et la nombreuse garde-robe

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