Vous souvenant, mon fils, que, caché sous ce lin, Comme eux vous fûtes pauvre, et comme eux orphelin. JOAS. Je promets d'observer ce que la loi m'ordonne. Mon Dieu, punissez-moi si je vous abandonne. ACTE V. SCENE IV. JOAD, JOSABETH, ZACHARIE, SALOMITH, JOAS, AZARIAS, TROUPE DE PRÊTres et de lÉvites, le chœur. JOAD. Lévites saints, prêtres de notre Dieu, (Ils se cachent tous) Roi, je crois qu'à vos vœux cet espoir est permis, Montez sur votre trône, et.... Mais la porte s'ouvre : Vous changez de couleur, princesse! JOSABETH. (Il tire un rideau.) Ah! sans pâlir, Puis-je voir d'assassins le temple se remplir? Quoi! ne voyez-vous pas quelle nombreuse escorte.... JOAD. Je vois que du saint temple on referme la porte: SCÈNE V. — JOAS, ATHALIE, JOAD, JOSABETH, ABŃER, (Joas est caché derrière le rideau.) ATHALIE, à Joad. Te voilà, séducteur, De ligues, de complots, pernicieux auteur, En l'appui de ton Dieu tu t'étois reposé : Il laisse en mon pouvoir et ton temple et ta vie. 1 Te.... Mais du prix qu'on m'offre il faut me contenter. Cet enfant, ce trésor qu'il faut qu'on me remette, JOAD. Sur-le-champ tu seras satisfaite : Je te les vais montrer l'un et l'autre à la fois. (Le rideau se tire. On voit Joas sur son trône; sa nourrice est à genoux à sa droite; Azarias, l'épée à la main, est debout à sa gauche; et près de lui Zacharie et Salomith sont à genoux sur les degrés du trône; plusieurs lévites, l'épée à la main, sont rangés sur les côtés.) Paroissez, cher enfant, digne sang de nos rois. Vois-tu cette Juive fidèle Dont tu sais bien qu'alors il suçoit la mamelle? Ce temple le reçut, et Dieu l'a conservé. ATHALIE. Ta fourbe, à cet enfant, traître, sera funeste. Soldats du Dieu vivant, défendez votre roi. (Le fond du théâtre s'ouvre : on voit le dedans du temple; et les lévites armés entrent de tous côtés sur la scène.) ATHALIE. Où suis-je? O trahison! ô reine infortunée! D'armes et d'ennemis je suis environnée ! JOAD. Tes yeux cherchent en vain, tu ne peux échapper, ATHALIE. Quoi la peur a glacé mes indignes soldats! Lâche Abner, dans quel piége as-tu conduit mes pas? Lui Joas! lui ton roi! Songez, méchants, songez SCÈNE VI. JOAS, ATHALIE, JOAD, ISMAEL, ET TOUS ISMAEL, à Joad. Seigneur, le temple est libre, et n'a plus d'ennemis : 1. Gédéon, juge d'Israël de 1349 à 1309 avant Jésus-Christ, entra pendant la nuit à la tête de 300 Hébreux dans le camp des Madíanites. Les Madianites surpris et frappés d'une folle terreur se défendirent mal, et furent égorgés ou pris. ATHALIE. Dieu des Juifs, tu l'emportes! Oui, c'est Joas; je cherche en vain à me tromper: (Athalie sort les lévites la suivent.) MOLIÈRE. Jean-Baptiste Poquelin, qui prit plus tard le nom de Molière, naquit à Paris, le 15 janvier 1622. Son père, tapissier valet-de-chambre du roi, lui fit faire ses études au collége de Clermont (Louis-le-Grand), où il eut pour maître le philosophe sensualiste Gassendi, et pour condisciples le celèbre voyageur Bernier, le poëte Hénault, l'épicurien Chapelle et l'écrivain humoriste Cyrano de Bergerac. Poquelin, entraîné par son goût pour le théâtre, s'associa avec quelques jeunes gens de famille qui s'étaient réunis pour jouer la comédie. Ayant échoué à Paris, ils se mirent à courir la province. Cette vie de bohémien littéraire se prolongea pendant treize ans. C'est alors qu'au milieu d'un grand nombre de farces, Molière (c'est le nom de guerre que Poquelin avait adopté) composa l'Étourdi (1653) et le Dépit amoureux (1656). Ce fut en 1658 que Molière reparut à Paris. Il y donna les Précieuses Ridicules (1659), satire d'un travers contemporain, protestation du bon sens contre le langage et les manières affectées d'une coterie de femmes prétentieuses; Sganarelle (1660); l'École des maris et les Fácheux (1661), et l'École des femmes (1662). Don Juan ou le Festin de Pierre (1665) fut une imitation originale d'un drame espagnol. Enfin le 4 juin 1666 parut le Misanthrope, le chefd'œuvre du génie comique. Deux mois après, le Médecin malgré lui rendait au théâtre l'invention très-amusante d'un ancien fabliau, dont nous avons donné plus haut l'analyse (p. 9, 10). Le Tartufe, autre chef-d'œuvre, destiné à une immense popularité, fut joué intégralement pour la première fois le 5 août 1667, pendant l'absence du roi. Le lendemain la représentation en fut interdite : « Monsieur le Premier Président ne voulait pas qu'on le jouât. Le roi fut moins sévère : il permit au Tartufe de reparaître (1669). Vinrent ensuite l'Amphitryon, George Dandin, et l'Avare (1668); Monsieur de Pourceaugnac (1669) et le Bourgeois gentilhomme, le chef-d'œuvre de la comédie bouffonne, les Fourberies de Scapin (1671) et la Comtesse d'Escarbagnas. Le dernier chef-d'œuvre de haute comédie, les Femmes savantes (1672), fut une seconde épreuve du sujet déjà traité par Molière dans les Précieuses Ridicules. « Le génie de Molière, dit É. Geruzez, s'y montre dans toute sa force, et avec un degré de pureté et un éclat de verve supérieur peut-être au Misanthrope, et, si on osait le dire à Tartufe même.... On s'émerveille que le poëte ait trouvé tant de ressources dans un sujet qui n'est pas de premier ordre. » Molière, qui ne devint célèbre que vers quarante ans, ne vécut que jusqu'à cinquante et un. Il mourut en jouant le Malade imaginaire (1663). Il ne fut point de l'Académie. |