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quelle il donnoit de grands éloges

d'inscriptions, toutes agréables et heureuses. En 1801, dans les dé-à la société, sans rétracter ceux

molitions du grand Châtelet, on'a trouvé celle-ci sur un marbre noir:

Hic pœna scelerum ultrices posuere tribunal :
Sontibus undè tremor, civibus undè salus.

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qu'il avoit donnés à Arnauld. Cela ne les satisfit point: il fallut faire une nouvelle pièce, qui parut renfermer encore quelque ambiguité. L'incertitude et la légèreté du poète firent naître plusieurs pieces contre lui. Le père Commire donna son Linguarium; un janséniste ne l'épargna pas davantage dans son Santolius pænitens. Santeul, en voulant se ménager

Bossuet l'ayant sollicité plusieurs fois d'abjurer les muses profanes, il consacra son talent à chanter les mystères et les saints du christianisme. Il fit d'abord plusieurs hymnes pour le bréviaire de Paris. Les Clunistes lui en deman-l'un et l'autre parti, déplut à tous dèrent aussi pour le leur; et cet les deux. Les deux princes de ordre en fut si content, qu'il lui Condé, le père et le fils, étoient donna des lettres de filiation et le au nombre de ses admirateurs ; gratifia d'une pension. Quoique presque tous les grands du royauSanteul eût voué ses talens à des me l'honoroient de leur estime. sujets religieux, il ne pouvoit Louis XIV lui donna des marques s'empêcher de versifier de temps sensibles de la sienne en lui ac en temps sur des sujets profanes. cordant une pension. Le duc de La Quintinie ayant donné ses Ins- Bourbon, gouverneur de Bourtructions pour les Jardins, San-gogne, le menoit ordinairement teul les orna d'un poème, dans lequel les divinités du paganisme jouoient le principal rôle. Bossuet, à qui il avoit promis de n'employer jamais les noms des dieux de la Fable, le traita de parjure. Santeul, sensible à ce reproche, s'excusa par une pièce de vers, à la tête de laquelle il fit mettre une vignette en taille douce. Ongues. Un page étant venu, dans l'y voyoit à genoux, la corde au cou et un flambeau à la main, sur les marches de la porte de l'église de Meaux, y faisant une espèce d'amende honorable. Ce poème satisfit Bossuet; mais le poète eut avec les jésuites une querelle qui fut difficile à éteindre. Le doc

teur Arnauld étant mort en 1694, tous les grands poètes du temps s'empressèrent à faire son épitaphe. Santeul ne fut pas le dernier; sa pièce déplut à plusieurs membres de la compagnie de Jésus. Pour désarmer leur colère, il se hâta d'adresser une lettre au P. Jouvenci, dans la

aux états de cette province. Santeul y trouva la mort le 5 août 1697, à Dijon. Dans un repas, son verre fut malignement infecté d'une forte dose de tabac d'Espagne; et à peine l'eut-il avalé, qu'il fut saisi d'une colique violente qui l'emporta après quatorze heures de douleurs les plus ai

ses derniers momens, s'informer de son état de la part de son altesse monseigneur le duc de Bourbon, Santeul, levant les yeux au ciel, s'écria: Tu solus altissimus! Un jour étant à Notre-Dame, et s'amusant à regarder les anciennes figures en bas-relief de la porte de l'église, il dit à Charles Santeul son frère, en touchant un pilier, et en faisant allusion à l'ancienneté du christianisme : « Mon frère, cela est bien vieux pour être faux. » Certains passages de l'Ecriture le pénétroient d'une crainte qui se lisoit sur sa figure. Tel est ce mot terrible d

prophète Daniel à Balthasar : Posi us est in statera et inventus est minus habens. Son corps fut transporté de Dijon à Paris, dans | l'abbaye de S.-Victor. Rollin orna son tombeau de cette épitaphe:

Quem superi præconem, habuit quem sancta

poetam

Relligio: latet hoc marmore Santolius. Ille etiam heroas, fontesque, et flamina et hortos

Dia rat. At cineres quid juvat iste labor? Fama hominum merces sit versibus aqua profanis :

Mercedem poscunt carmina sacra Deum.

Ci git, que la France regrette,
Du Parnasse chrétien le célèbre poète,
Santeuil, qui sut d'une brillante voix
Célebrer tour-à-tour les fontaines, les bois,
Les héros.... Mais que sert ce travail à ses
manes?

L'estime des humains de son mérite épris,
Peut suffire à ses vers profanes:
Dieu de ses vers sacrés est seul le digne prix.

Un plaisant lui en fit une autre :

Gigi le célèbre Santenil;
Muses et Fous, preuez le deuil.

pu

Quelques traits qui tenoient de ravagance avoient lui mériter cette épitaphe. On raconte qu'avant passé à Citeaux, il pria un religieux de cette abbaye de lui montrer l'appartement de la Mollesse, si bien décrit dans le Lutrin de Boileau « Vous y êtes, répondit le bernardin; mais la Mollesse n'y est plus, la Folie a pris sa place. » La Bruyère l'a peint ainsi, « Voulez-vous quelqu'autre prodige? Concevez un homme facile, doux, complaisant, traitable; et tout d'un coup violent, colère, fougueux, capricieux. Imaginez-vous un homme simple ingénu, crédule, badin, volage, un enfant en cheveux gris; mais permettez-lui de se reeueillir, ou plutôt de se livrer à un génie qui agit en lui, j'ose dire, sans qu'il y prenne part, et comme à son insu: quelle verve!

,

quelle élévation! quelles images ! quelle latinité! Parlez-vous d'une' même personne, me direz-vous? Oui, du même : de Théodas, et de lui seul. Il crie, il s'agite, il se roule à terre, il se relève, il tonne, il éclate; et du milieu de celte tempête il sort une lumière qui brûle et qui réjouit. Disons-le sans figure, il parle comme un fou, et pense comme un homme sage. Il dit ridiculement des choses vraies, et follement des choses sensées et raisonnable. On est surpris de voir naître et éclore le bon sens du sein de la bouffonnerie parmi les grimaces et les contorsions. Qu'ajouterai-je davantage? il dit et il fait mieux qu'il ne sait. Ce sont en lui comme deux ames qui ne se connoissent point, qui ne dépendent point l'une de l'autre, qui ont chacune leur tour, ou leurs fonctions toutes séparées. Il manqueroit un trait à cette peinture si surprenante, si j'oubliois de dire qu'il est toutà-la-fois avide et insatiable de louanges, prêt à se jeter aux yeux de ses critiques, et dans le fond assez docile pour profiter de leur censure. Je commence à me persuader moi-même que j'ai fait le portrait de deux personnages tout différens. Il ne seroit pas même impossible d'en trouver un troisième dans Théodas; car il est bon homme. » En effet, il recevoit ordinairement les avis avec docilité; mais si l'on ne saisissoit pas le moment favorable, il répondoit avec aigreur. On prétend qu'un religieux de Saint-Victor, son confrère, lai montra des vers où se trouvoit le mot quonian, qui est une expression tout à-fait prosaïque. Santeul, pour le railfer, lui récita. tout un Psaume où se trouve vingt fois le mot

quoniam. (Confitemini Domino, quoniam bonus; quoniam in sæculum misericordia ejus; quoniam salutare tuum ; etc.) Ce religieux piqué, lui répliqua sur-le-champ par ces mots de Virgile :

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Alter cum puero, mater conjuncta marito ; Cultello, lymphá, fune, dolore cadunt. Santeul n'attendoit pas qu'on louât ses productions: il en étoit toujours le premier admirateur. Il disoit que « quoiqu'il n'y eût point de salut hors de l'Eglise pour personne, il étoit excepté de cette règle, parce qu'il étoit obligé d'en sortir pour faire le sien, y entendant ses Hymnes avec trop de complaisance,» Boileau, témoin des contorsions et des grimaces qu'il faisoit lorsqu'il déclamoit ses hymnes, fit un jour cette épigramme :

A vɔr de quel air effroyable,

Roulant les yeux, tordant les mains,
Santeul nous lit ses hymnes vains;
Diroit-on pas que c'est le diable
Que Dieu force à louer les saints?

Insanire libet quoniam tibi. Il n'accueilloit pas mieux les avis sur ses mœurs que les censures de ses ouvrages, Bossuet lai ayant fait quelques reproches, finit en disant: «Votre vie est peu édifiante, et si j'étois votre supérieur, je vous enverrois dans une petite cure dire votre bréviaire. Et moi, reprit Santeul, si j'étois roi de France, je vous ferois sortir de votre Germigni, et vous enverrois dans l'île de Pathmos faire une nouvelle Apocalypse. Voici quelques-unes des anecdotes vraies ou fausses,qu'on cite sur son compte. Souvent pressé de se faire ordonner prêtre, il ne fut jamais que sous-diacre. Cela ne l'empêcha pas de prêcher dans un village, un jour que le Ftant à Port-Royal, où l'on chanprédicateur n'avoit pu s'y trouver. toit ses hymnes, un paysan à côté A peine fut-il monté en chaire, de lui ne chantoit pas, mais beuqu'il perdit son sujet de vue, et se gloit Tais-toi, lui dit Santeul, brouilla; il se retira, en disant: tais-toi, boeuf! laisse chanter les « J'avois encore bien des choses à anges... » Ce poète répétoit souvous dire; mais il est inutile de vent, dans son enthousiasme : vous prêcher davantage, vous « Je ne suis qu'un atome, je ne n'en deviendriez pas meilleurs. » suis rien; mais si je savois avoir Santeul fit un jour des vers pour fait un mauvais vers, j'irois toutun écolier, et celui-ci demandant à-l'heure me pendre à la Grève.» à qui il avoit tant d'obligation, (Voyez PERRIER, no. II et RAPIN, le victorin répondit, « Si on te no II.) Quelques-uns de ses rivaux demande qui a fait ces vers, tu ont prétendu néanmoins que l'inn'as qu'à dire que c'est le diable.»> vention de ses poésies n'étoit point Voici le sujet sur lequel travailloit riche; que l'ordre y manquoit; l'écolier. Un jeune enfant, fils que le fonds en étoit sec, le style d'un boucher, prend dans un quelquefois rampant; qu'il s'y mouvement de colère un couteau, trouvoit beaucoup d'antithèses et égorge son cadet; la mère, en puériles, de gallicismes, et surfurie, le jette dans une chaudière tout une enflure insupportable. d'eau bouillante. Hors d'elle-Mais cette censure est trop forte. même, elle se pend; et le père, Quoiqu'il n'ait pas toujours dans saisi d'horreur de ce spectacle, ses vers héroïques la richesse de

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l'expression et du coloris de Rol- | periuntur, apud fratres Barhou, | via Jacobed, sub signo Ciconiarum; cum notis, curá Andreæ Francisci Bilhard, Magistri in artibus Universitatis Parisiensis. Ses Hymnes forment un 4*, volume in-12. Elles ont été traduites en français par l'abbé Poupin, 1760, in-12. On a publié, sons le titre de Santoliana, ses aventures et ses bons mots. Ce recueil est'de La Monnoye. Il en a paru in autre en 1801, 1 vol. in-18, avec des notes et remarques par M. Cousin d'Avalon, dans lequel sont consignées plusieurs anecdotes qui ne se trouvent point dans le premier.

Magloire, en qualité d'ecclésiastique séculier, et se fit autant estimer par ses talens pour la poé

lin et de Commire, et qu'il ait quelques vers durs et des mots inconnus aux anciens, on peut assurer qu'en général sa poésie est riante, naturelle, brillante. Il est vraiment poète. Ses vers se font admirer par la noblesse et l'élévation des sentimens, par la hardiesse et la beauté de l'imagination, par la vivacité des pensées, par l'énergie et la force de l'expression. Voyez COFFIN et RABUSSON. Il a fait des Poésies profanes et des Poésies sacrées. Les premières renferment des inscriptions, des épigrammes et d'autres pièces d'une plus grande étendue. Les secondes consistent dans un grand nombre d'Hymnes, dont II. SANTEUL (Claude), quelques unes renferment de frère du précédent, né à Paris en beaux élans de poésie. Cepen- 1628, et mort dans cette ville le dant un homme d'esprit et de goût 29 septembre 1684, demeura fait d'un de ses plus beaux ouvra-long-temps au séminaire de Saintges en ce genre une critique qu'on pourroit appliquer à quelques autres de ses Hymnes, plus remplies d'espritetd'imagination que d'onction et de sentiment. Il trouve la première strophe de Stupete Gentes! chargée d'antithèses qui se succèdent de trop près : ni Horace, ni Pindare n'ont aucune strophe qui soit dans ce goût. Mais ces poètes trouvoient dans la mythologie antique des images que notre religion interdisoit à Santeul; et il est difficile de n'être pas frappé, dans cette même Hymne critiquée, de ce magnifique début d'un «< Dieu devenu victime, d'un législateur soumis à la loi.» Plusieurs de ses pièces ont été mises en vers français. Ces traductions ont été recueillies dans l'édition de ses OEuvres, en 3 vol. in-12, Paris, 1729, sous ce titre Joannis Baptisto SANTOLII Victorini Operum omnium editio tertia, in qua reliqua Opera nondùm conjunctim edita re

sie

que par son érudition et sa piété; ce qui lui fit donner le nom de Santolius Maglorianus. Il étoit aussi doux que son frère étoit impétueux. On a de lui de belles Hymnes, qu'on conserve en manuscrit dans sa famille, en 2 vol. n-4; et une pièce de

ouvrages

vers, avec

les
de son frère.
III. SANTEUL (Claude), pa-
rent des précédens, marchand et
échevin à Paris, mort vers 1729,
a fait des Hymnes, imprimées à
Paris, 1723, in-8°. Si la facilité
de faire des vers latins étoit héré-
ditaire dans cette famille, le génie
de l'échevin n'ont ni la verve, ni
ne l'étoit point; car les poésies
l'enthousiasme de celles du cha-
noine de Saint-Victor.

* I. SANTI (Jeanne), née à Carpi le 24 janvier 1523, étoit fille de Sigismond Santi, secré

taire d'Albert Pie et de Lucrèce |
Rubbi. Elle épousa Alexandre,
gentilhomme de Bologne, et passa
à Correggio: ce qui lui a souvent
fait donner cette ville pour patrie.
Elle composa quelques poésies
estimées,publiées à Ferrare dans
un recueil d'opuscules.

* II. SANTI DI TITI, peintre italíen, né en 1538 à Florence, mort en 1603. On a beaucoup de beaux Tableaux de cet artiste dans sa ville natale.

* III. SANTI (Augustin de), né

à Mosano dans la Calabre cité

rieure, mort de la peste en 1656, professa quelque temps la philosophie et la théologie à Rome et à Malte. On a de lui un traité, De Trinitate; De Angelis, dans lequel l'auteur veut expliquer des choses qu'il n'entend pas lui

même.

** SANTINELLI (Stanislas),
religieux de la congrégation des
PP. Somasques , né à Venise le 12
mai 1672, et mort le 8 novembre
1748, est auteur de deux volumes
de Sermons,publiés en 1739; d'une
Dissertation de Veterum Roma-
norum nobilitate, Venise, 1707;
Dissertationes, Orationes, Epis-
tolæ et Carmina, Venise, 1734.
Tous ces ouvrages assez médio-
eres, ne méritent
sultés.

pas

d'être con

professeur de rhétorique au séminaire de Subiaco, puis à Florence, et enfin chez les jésuites à Rome. Il fut successivement préfet des exercices spirituels dans le collége germanique, et le collége romain. Ce fut dans ce dernier qu'il mourut le 5 mai 1761. On a de lui quelques Poésies latines assez estimées.

SANTIS. V. DOMINICO, no II. *SANTONINI (le comte César), célèbre avocat, naquit à Venise le 23 décembre 1714. Doué d'un génie subtil et pénétrant, il se fit long-temps admirer dans le barreau par la force de son raisonnement, l'énergie de son éloquence, la pureté de son style. Ses Contestations judiciaires, qui sont en grand nombre, attestent ses talens. Il mourut dans sa ville natale le 26 mai 1774.

le

né à Nole en 1581, enseigna la * SANTORELLO (Antoine), né à Nole en 1581, enseigna la médecine à Naples, où il mourut en 1653. Son talent le fit rechercher par les universités de Pise. de Padoue et deBologne. En 1648 le comte d'Onnatte, vice-roi, rappella à Naples auprès de sa Personne, et le nomma premier de lui, I. De Sanitatis naturá, médecin du royaume. Nous avons libri XXIV, Naples, 1643, in-fol. Vingt-un de ces livres traitent de la physiologie. Le style en est *SANTINI (Charles), savant rebutant par les syllogismes et les jésuite, né le 29 mai 1708, au châ- enthymêmes que l'auteur a enteau de Lama en Corse, étudia tassés les uns sur les autres, pour les belles-lettres à Rome chez les se conformer au langage de l'éjésuites, et la philosophie chez cole, II. Antepraxis medica, in les dominicains. Passionné pour libros XXI, distributa, in quibus la littérature, il approfondit les ca omnia quæ praxim medicam meilleurs poètes anciens et mo- aggressuris prænoscere est necesdernes, latins et italiens. A la sarium, summa brevitate examifleur de l'âge il composa un poè- nantur, Naples, 1622, in-4o meépique, intitulé: Constantin, à 1651, in-fol. III. Post praxis l'imitation de la Jérusalem du medica, seu de medicando de, Tasse, Son talent le fit nommerfuncto liber unus, Naples, 1629,

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