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il n'y a que celle qui faisoit tendre la balle de haut en bas qui puisse être changée, en quelque façon, par la rencontre de la toile; mais à plus forte raison cette toile peut-elle faire changer la détermination perpendiculaire, à laquelle elle est entièrement opposée, qui est simple, et qu'on ne peut pas dire être composée de deux autres, à l'une desquelles elle ne soit point du tout opposée, ainsi qu'elle ne l'est point à celle de gauche à droite, quand la balle est poussée de biais, suivant la ligne AB.

Or, quel changement peut-il arriver en cette détermination de haut en bas, que celui qu'a expliqué M. Descartes, à savoir, que cette balle, en continuant de descendre, avance tantôt plus et tantôt moins vers le bas qu'elle ne faisoit, selon le changement, c'est-à-dire selon l'augmentation ou la diminution que sa vitesse a reçue en B, et selon le rapport que cette vitesse s'est trouvée avoir avec la détermination vers le côté droit, qui a dû toujours demeurer la même, comme j'ai dit plusieurs fois, c'est-à-dire qui a dû faire que la balle ait toujours autant avancé de ce côté-là qu'elle avoit fait auparavant.

Et partant, tant s'en faut que l'absurdité qu'avoit voulu inférer votre sceptique soit une suite de ce qu'a dit M. Descartes, qu'au contraire il se trouve que c'est lui-même qui, au lieu de faire un bon argument, s'est embarrassé dans un sophisme, en

supposant que la détermination de la balle dans une chute perpendiculaire étoit la même, au même sens que celle de gauche à droite est dite être la même quand la balle tombe obliquement.

Que si après cela vous prenez la peine d'examiner la réponse que M. Descartes a faite lui-même au reste des difficultés que votre sceptique lui a autrefois proposées par l'entremise du révérend père Mersenne, et auxquelles il satisfit alors, par une lettre qu'il adressa à M. Midorge, dont je vous ai naguère envoyé la copie, vous trouverez que ce qu'il dit est véritable, à savoir, que votre sceptique s'est trompé, pour avoir parlé de la composition du mouvement en deux divers sens, et inferé de l'un ce qu'il avoit seulement prouvé de l'autre.

Je ne répète point ici ce qu'il en a dit; car, outre qu'il seroit inutile, comme j'en étois là, un de mes amis, appelé M. Rohault, savant mathématicien, et des plus versés que je connoisse en la philosophie de M. Descartes, m'est venu apporter une réponse qu'il a faite à votre lettre au père Mersenne, pensant que M. Descartes n'y avoit point répondu (car je ne lui avois point montré cette lettre à M. Midorge) et que vous n'eussiez reçu de lui aucune réponse, voyant que dans la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire, laquelle je lui avois fait voir, vous continuez vos premières difficultés, et

que dans celle à M. de la Chambre, vous dites avoir autrefois contesté à M. Descartes sa démonstration touchant la réfraction, à lui, dites-vous, viventi atque sentienti, mais qu'il ne vous satisfit jamais. Et pourcequ'il entend beaucoup mieux que moi toutes ces matières, et qu'il a répondu article par article à votredite lettre, je m'abstiendrai de vous ennuyer davantage par mon discours, afin de vous laisser plus de temps pour examiner la réponse qu'il y a faite. S'il me l'eût apportée plus tôt, il nous auroit tous deux soulagés, moi d'écrire d'un sujet qui passe mes forces, et vous de lire une si mauvaise lettre; mais comme c'en étoit déjà fait, je n'ai pas voulu perdre ma peine, et j'ai pensé qu'il valoit mieux vous fatiguer de cette lecture, et vous donner par même moyen des preuves du soin où je m'étois mis de m'acquitter de ce que je vous devois, que de vous laisser venir la pensée que je m'en serois peut-être oublié et que j'aurois été bien aise de m'en décharger sur

un autre.

Au reste, monsieur, je vous prie d'excuser ce qui peut m'être échappé de libre en répondant à votre sceptique, j'aurois agi avec tout un autre respect si j'eusse eu affaire à vous; mais, bien loin de craindre que pour cela vous me refusiez justice, je prends même l'assurance de vous demander quelque grâce; il y a des rencontres où un peu de

faveur n'offense point l'équité; et si en celle-ci vous prenez mon parti, je puis vous assurer qu'en toute autre occasion je serai entièrement à vous, et que vous pourrez faire état d'avoir toujours tout prêt en moi, etc.

RÉPONSE DE M. ROHAULT

A LA LETTRE DE M. DE FERMAT,

QUI CONTIENT SES ANCIENNES OBJECTIONS SUR LA DIOPTRIQUE DE M. DESCARTES.

(Lettre 46 du tome III.)

MONSIEUR,

Je ne sais si le père Mersenne, à qui cette lettre étoit adressée, l'a communiquée à M. Descartes, et si, l'ayant vue, ses occupations l'ont empêché d'y faire réponse; mais il paroît n'y avoir point répondu, parceque M. de Fermat, qui l'avoit écrite il y a environ vingt ans, répète encore à peu près les mêmes difficultés dans une lettre qu'il a écrite depuis peu à un de mes amis. Je m'en vas donc essayer d'y répondre, puisque vous le désirez; et,

pour le faire plus commodement, je suivrai de point en point tous les articles de sa lettre, que j'examinerai les uns après les autres.

Article premier. J'ai vu, etc.

Le premier article ne contient qu'un compliment, dont M. de Fermat a voulu honorer M. Descartes, et dont sa mémoire lui sera toujours redevable.

Article second. Je retranche, etc.

Quand M. Descartes auroit accommodé son medium à sa conclusion, et qu'il auroit divisé la détermination du mouvement d'une certaine manière plutôt que d'une autre, on ne le devroit non plus trouver étrange que si un géomètre s'étoit servi d'une construction plutôt que d'une autre pour l'exécution d'un problème; et l'on ne conteste jamais la voie qu'il a choisie, pourvu qu'il soit venu à bout de ce qu'il avoit entrepris. Au reste, M. Descartes a dû diviser la détermination de la balle qui se meut dans la ligne AB, en une qui fût pendiculaire à la superficie CBE, et en une autre qui lui fût parallèle; parceque, celle-ci ne rencontrant aucune opposition, il étoit assuré qu'elle devoit demeurer la même; et cela lui a été un moyen de trouver la vérité qu'il cherchoit, ce qu'il n'aufaire s'il eût suivi une autre méthode. Article troisième. Je reconnois, etc.

roit

pu

per

M. de Fermat semble favoriser M. Descartes

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