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§ 24. Capitula

reddition

et

forteresses.

Les capitulations pour la reddition des troupes et des forteresses, et des provinces particulières d'un pays, tombent tions pour la naturellement dans les pouvoirs généraux confiés aux com- des troupes mandants de terre et de mer. Les stipulations entre le gouverneur d'une place assiégée et le général ou l'amiral commandant les forces assiégeantes, si elles se rattachent nécessairement à la reddition, n'ont pas besoin de la sanction subséquente de leurs souverains respectifs. Telles sont les stipulations ordinaires pour la sûreté de la religion et les priviléges des habitants; la condition que la garnison ne portera pas les armes contre les vainqueurs pendant un temps limité, et autres clauses semblables, se rattachant particulièrement à la transaction. Mais si le commandant d'une ville fortifiée s'aventure à stipuler la cession perpétuelle de cette place, ou à entrer dans d'autres engagements complétement en dehors de son autorité implicite, sa promesse se réduit à une simple sponsion 1.

La célèbre convention faite par les consuls romains avec les Samnites aux Fourches Caudines était de cette nature. La conduite du sénat romain en désavouant ce traité ignominieux, est approuvée par Grotius et Vattel, qui soutiennent que les Samnites n'avaient pas droit à être placés, in statu quo, parce qu'ils devaient savoir que les consuls romains n'avaient aucune autorisation de faire une pareille convention. Cette considération paraît suffisante pour justifier la conduite des Romains, agissant dans cette circonstance d'après leur politique uniformément implacable, livrant aux Samnites les auteurs du traité, et persévérant dans la guerre jusqu'à ce que ce formidable ennemi fût définitivement subjugué 2.

La convention conclue à Closter-Seven, pendant la

1 Vide ante, pt. III, chap. 1, § 4, p. 229.

2 Voyez le Compte rendu de cette transaction remarquable par Tite-Live.

guerre de sept ans, entre le duc de Cumberland, commandant les forces anglaises en Hanovre, et le maréchal de Richelieu, commandant l'armée française, pour une suspension d'armes dans le nord de l'Allemagne, est un des plus remarquables traités de cette espèce que fournisse l'histoire moderne. Il ne paraît pas résulter des discussions qui eurent lieu entre les deux gouvernements à cette occasion, qu'il y ait eu aucun désaccord entre eux quant aux vrais principes de guerre internationale applicables à ces transactions. La conduite, sinon le langage des deux parties, implique l'admission mutuelle que la convention était de nature à exiger ratification, comme excédant les pouvoirs ordinaires des commandants militaires relatifs à de simples capitulations militaires. La même remarque s'applique à la convention signée à ElArich, en 1800, pour l'évacuation de l'Égypte par l'armée française, quoique la position des deux gouvernements pour la convention de Closter-Seven fût l'inverse de celle d'El-Arich. Dans le premier exemple le gouvernement britannique refusait de permettre l'exécution du dernier traité, en se fondant sur le défaut de pouvoirs de sir Sidney-Smith, et après la bataille d'Héliopolis, il insistait sur son accomplissement par les Français, alors que les circonstances avaient changé et rendu son exécution désormais incompatible avec leur politique et leur intérêt. La bonne foi peut avoir caractérisé la conduite du gouvernement britannique dans ce cas, ainsi que le soutinrent vigoureusement les ministres, dans les discussions parlementaires que fit naître le traité, mais il n'y a néanmoins aucune évidence de perfidie de la part du général Kléber. Sa conduite peut plutôt être comparée à celle du duc de Cumberland à Closter-Seven (et certes elle ne doit pas souffrir de la comparaison), en concluant une convention adaptée aux circonstances existantes, qu'il était de son intérêt de mettre à effet quand elle fut signée, et ensuite

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en refusant de la maintenir quand ces circonstances étaient matériellement changées. Dans ces conventions le temps est important, on peut même dire qu'il est l'essence même du contrat. S'il arrive quelque chose qui rende impraticable son exécution immédiate, le traité devient nul, ou du moins est susceptible d'être changé par de nouvelles négociations'.

§ 25.

Passeports

sauf

conduits

Les passeports, les sauf-conduits, et les licences, sont des documents accordés, pendant la guerre, pour protéger les personnes et les propriétés contre l'action générale des et licences. hostilités. La compétence de l'autorité pour les accorder dépend des principes généraux déjà cités. Cette autorité souveraine peut reposer sur les commandants de terre ou de mer, ou sur certains officiers civils, soit expressément soit d'une manière implicite, résultant inévitablement de la nature et de l'étendue de leur crédit général. De pareils documents doivent être interprétés d'après les mêmes règles de franchise et de bonne foi que les autres actes du souverain pouvoir 2.

§ 26. Licence pour

avec

l'ennemi,

Ainsi une licence accordée par l'État belligérant à ses sujets ou aux sujets de son ennemi, pour poursuivre un commercer commerce interdit par la guerre, a l'effet de dispenser des lois de la guerre, dans toute l'extension qui peut ressortir de la claire interprétation de ses termes. La partie belligérante adverse peut justement considérer de tels documents de protection comme étant per se un motif de capture et de confiscation, mais les tribunaux maritimes de l'État sous l'autorité duquel ils sont accordés, sont forcés de les considérer comme des relâchements légaux à l'état de guerre ordinaire. Une licence est un acte procédant de l'autorité souveraine de l'État, qui seul est com

1 FLASSAN, Histoire de la diplomatie française, t. Vl, p. 97-107. Annual Register, vol. I, p. 209–213, 228–234; vol. XLII, p. (209), p. 223, 233. - State Papers, vol. XLIII, p. (28—34).

2 GROTIUS, de Jure belli ac pacis, lib. III, cap. xx1, § 44. Droit des gens, liv. III, chap. xvп, § 265-277.

VATTEL,

pétent pour décider sur toutes les considérations de nécessité commerciale et politique par lesquelles une pareille exception aux conséquences ordinaires de la guerre doit être contrôlée. Les licences, étant de hauts actes de souveraineté, sont nécessairement stricti juris, et ne doivent pas être poussées plus loin que l'intention de l'autorité qui les accorde n'est supposée les étendre. Non pas qu'elles doivent être interprétées avec une exactitude pédantesque, ou que la plus petite déviation soit regardée comme viciant leur plein effet. L'excès dans la quantité des marchandises permises ne doit pas être considéré comme nuisible jusqu'à un certain point, mais une différence dans la qualité ou la substance de ces marchandises peut être plus significative, parce que la liberté prise d'importer une espèce de marchandise sous la licence d'en importer une autre, peut mener aux plus dangereuses conséquences. Les limitations de temps, de personnes et de lieux sont aussi importantes. Le grand principe dans ces cas est que les sujets ne doivent pas commercer avec l'ennemi, ni les sujets de l'ennemi avec l'État belligérant, sans une permission spéciale du gouvernement. Et un important objet de contrôle que le gouvernement exerce sur un tel commerce, c'est qu'il peut juger de la convenance des personnes et aussi sous quelles restrictions de temps et de lieux une pareille exemption des lois ordinaires de la guerre peut s'étendre. Tels sont les principes généraux exposés par sir W. Scott pour l'interprétation de ces documents. Mais Grotius émet la règle générale que les saufconduits, qui sont des espèces de licences, doivent être franchement interprétés : laxa quam stricta interpretatio admittenda est. Et pendant la dernière guerre les licences furent définitivement interprétées avec une grande framchise dans les cours des prises anglaises'.

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1 CHITTY'S Law of nations, chap. VII. - KENT'S Commentaries on American law, vol. I, p. 463, note 6, 5o ed.

Il fut demandé en quelques circonstances, dans ces cours, jusqu'à quel point ces documents pouvaient protéger contre la capture anglaise, à cause de la nature et de l'étendue de l'autorité des personnes par qui ils étaient délivrés. Le cas le plus important sur ce sujet est celui du Hope, vaisseau américain chargé de blé et de farine, capturé pendant sa traversée des États-Unis aux ports de la Péninsule occupée par les troupes anglaises, et protégé par un acte accordé par le consul britannique à Boston, accompagné de la copie certifiée d'une lettre de l'amiral de la station d'Halifax. En prononçant son jugement sur ce cas, sir W. Scott remarque que l'acte de protection, pour avoir de l'effet, doit venir de ceux qui sont revêtus d'une autorité compétente pour accorder une pareille protection, mais que les papiers en question venaient de personnes non revêtues d'une semblable autorité. Exempter la propriété des ennemis de l'effet des hostilités est un acte trèsgrand d'autorité souveraine. Si cette autorité est quelquefois déléguée à des personnes dans une position subordonnée, il faut qu'elle soit exercée ou par ceux qui ont une commission spéciale à eux accordée pour les affaires particulières, et qui dans le langage légal sont appelés mandataires, ou par les personnes investies d'un tel pouvoir en vertu d'une situation dont ce pouvoir peut être consi-déré comme un accessoire. Il était parfaitement clair qu'aucun consul dans aucun pays, et particulièrement dans le pays de l'ennemi, n'est investi d'un pareil pouvoir en vertu de sa position. Ei rei non præponitur, et alors les actes qui s'y rapportent ne sont pas obligatoires. Et dans aucune station l'amiral ne possède pas non plus cette autorité. II a, il est vrai, un pouvoir relatif aux vaisseaux sous son commandement immédiat. Il peut les empêcher de commettre des actes d'hostilités; mais il ne peut aller au delà. Il ne peut accorder de sauvegarde de cette espèce en

§ 27. Autorité

pour accorder les licences.

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