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l'autre cas, c'est toujours le droit commun à toutes les nations que l'on suit comme la seule règle dont on reconnaisse l'autorité. «Quand Louis XIV,» dit un magistrat anglais, publia sa fameuse ordonnance sur la marine, personne ne supposa qu'il eût la prétention de donner des lois à l'Europe, parce qu'il rassembla et mit en ordre, sous la forme d'un code, les principes du droit des gens. maritimes comme ils étaient entendus en France. Je dis comme ils étaient entendus et reçus en France, car quoique le droit international doive être le même dans tous les pays, comme les tribunaux qui font l'application de ce droit sont indépendants les uns des autres, ils n'est pas possible qu'ils ne soient pas en désaccord sur son interprétation dans les pays divers qui reconnaissent son autorité. A cette époque au moins, il n'était point admis qu'un seul État pût établir ou changer la loi des nations, mais il a été trouvé convenable d'établir certains principes de décision, afin de donner une règle uniforme à leurs propres tribunaux, et en même temps de faire connaître cette règle aux neutres. Aussi les tribunaux français ont-ils bien compris l'esprit et le but des ordonnances de Louis XIV. Ils n'ont pas considéré ces ordonnances comme des lois positives, liant les tribunaux d'une manière absolue, mais seulement comme établissant des présomptions légales, desquelles ils tirent les conclusions sur lesquelles. sont basés leurs jugements en matière de prises'. »

4o Les arrêts des tribunaux internationaux, tels que les Les arrêts commissions mixtes et les tribunaux de prises.

Entre ces deux sources on doit attribuer un plus grand poids aux jugements des commissions mixtes constituées par deux États comme arbitres entre eux, qu'on n'en attribue aux arrêts des cours d'amirauté autorisées à juger

des tribunaux internationaux.

1 Conclusions de sir W. Grant au tribunal d'appel en matière de prises à Londres. (MARSHALL, on Insurance, vol. I, p. 425.)

Opinions

écrites

données confidentiellement par

des légistes

au gouvernement

en temps de guerre la validité des prises, et dont les juges sont nommés par un seul État dont les ordonnances sont obligatoires pour eux.

5o Les opinions écrites et données confidentiellement par des légistes à leur gouvernement. Quand un État forme une réclamation auprès d'un autre État pour des lésions faites à ses propres droits, il agit souvent comme un inde leur pays. dividu agirait en pareil cas. Il consulte ses légistes officiels, et il est guidé par leur avis sur le droit applicable à l'affaire en question. Dans le cas surtout où ces consultations sont contraires au client souverain qui en a référé à l'avis de ses légistes, et où il est assez puissant pour soutenir ses réclamations par la voie des armes, on peut raisonnablement affirmer que le droit des gens a été sincèrement exposé dans l'opinion donnée. Les archives des départements des affaires étrangères de tous les pays contiennent une grande collection de documents semblables, qui, s'ils étaient publiés, formeraient une importante acquisition pour le droit des gens.

Histoire des guerres, etc.,

affaires inter

6o Enfin nous pouvons terminer cette énumération des relatives aux sources du droit international par l'indication de l'histoire nationales. des guerres, des négociations, des traités de paix et d'autres transactions relatives aux affaires internationales.

CHAPITRE II.

DES NATIONS ET DES ÉTATS SOUVERAINS.

§ 1.

Définition

Les nations et les sociétés politiques, qu'on appelle des États, sont les personnes morales soumises au droit inter- de ceux qui

national.

sont soumis au droit internationa!.

§ 2.

Définition

Cicéron, et après lui les publicistes modernes ont défini un État en l'appelant un corps politique ou société d'un État. d'hommes, unis ensemble pour assurer leur sûreté et avantage mutuels par leurs forces combinées'.

Cette définition ne peut être considérée comme exacte qu'en la modifiant par les observations suivantes:

4° 1 ne faut pas l'étendre aux corporations créées par un État, et qui n'existent que sous l'autorité de cet État, quel que soit d'ailleurs l'objet pour lequel les individus composant ces corps politiques se sont réunis ensemble.

C'est ainsi que cette grande association de négociants anglais, sanctionnée d'abord par la couronne et ensuite par le parlement britannique pour faire le commerce des Indes, ne saurait être assimilée à un État; car bien qu'elle exerce les pouvoirs souverains de la guerre et de la paix dans cette partie du monde sans le contrôle direct du gouverne

1

Respublica est cœtus multitudinis, juris consensu et utilitatis communione sociatus. (CICERO, de Republica, lib. I, § 25.)

Potestas civilis est quæ civitati præest. Est autem civitas cœtus perfectus liberorum hominum juris fruendi et communis utilitatis causa sociatus. (GROTIUS, de Jure belli ac pacis, lib. I, chap. 1, § 14, no 4.) - VATTEL, préliminaires, § 1 et liv. I, chap. 1, § 1. BURLAMAQUI, Droit naturel, t. II, part. I, chap. IV.

§ 3.

Du droit in

par rapport

souverains,

ment anglais, elle a cependant toujours été subordonnée à l'autorité supérieure de ce gouvernement. Cette association ou compagnie des Indes représente le gouvernement anglais auprès des princes et des peuples indigènes de cette contrée, tandis que le gouvernement anglais luimême représente la compagnie auprès des autres souverains et des États étrangers.

2o On ne peut pas non plus donner le nom d'État à des associations volontaires de voleurs ou de pirates, bien que ces individus se soient réunis pour assurer leur sûreté et avantage mutuels'.

3o Il faut aussi distinguer un État d'avec une horde nomade de sauvages qui ne constitue pas encore une société civile. L'idée légale d'un État implique nécessairement l'obéissance habituelle de ses membres à des personnes investies de l'autorité suprême, et une habitation fixe ainsi qu'un territoire défini appartenant au peuple qui l'habite.

4o Un État doit aussi dans de certains cas être distingué d'une nation, puisqu'il peut être composé de plusieurs races d'hommes différentes, soumises à la même autorité suprême, comme cela arrive, par exemple, dans l'empire d'Autriche et dans le royaume de Prusse. Il peut aussi 'arriver qu'une même nation soit soumise à divers États, comme la nation polonaise est soumise à la domination de la Russie, de l'Autriche et de la Prusse.

Les princes souverains peuvent être soumis au droit ternational international pour ce qui concerne leurs droits personnels, aux princes ou leurs droits de propriété dépendant de leurs relations personnelles avec des États rains et sujets de ces États. la branche de la science qui rains sous ce rapport.

étrangers ou avec les souveCes relations donnent lieu à traite des droits des souve

1 nec cœtus piratarum aut latronum civitas est, etiam si forte æqualitatem quandam inter se servent, sine qua nullus cœtus posset consistere. (GROTIUS, de Jure belli ac pacis, lib. III, cap. 1, § 44, no 4.)

§ 4. Du droit inter

national par

particuliers

ou aux cor

porations.

Les particuliers ou les corporations peuvent également être soumis au droit international pour ce qui regarde leurs droits personnels, ou de propriété, dépendant de Pers leurs relations avec les États ou les souverains étrangers, ou avec les citoyens ou sujets de ces États. Ces relations donnent lieu à ce qu'on appelle le droit international privé, et plus particulièrement le conflit entre les lois des différents États.

Cependant l'objet propre du droit international est l'en- On se sert semble des relations directes qui existent entre les nations et entre les États.

Dans les pays soumis à un gouvernement absolu ou autocratique, la personne du prince s'identifie naturelle ment avec l'État lui-même: «l'État c'est moi.» De là est venue l'habitude des publicistes de se servir des termes de souverain et d'État comme de synonymes. On se sert également du terme de souverain, dans un sens métaphorique, pour exprimer Pidée d'un État, quelle que soit d'ailleurs la forme de son gouvernement.

des termes de souverain et d'Etat comme de synonymes, c'est-à-dire que le premier de

ces termes métapho

est pris riquement pour le dernier.

$ 5.

veraineté.

La souveraineté est le pouvoir suprême qui régit un De la souÉtat quelconque, soit monarchique, soit républicain, soit mixte. Ce pouvoir suprême peut être exercé ou à l'intérieur ou à l'extérieur du territoire de l'État.

La souveraineté intérieure est celle qui appartient à la nation, ou celle qui a été conférée par elle à son gouvernement d'après les lois fondamentales de l'État. C'est l'objet de ce qu'on appelle le droit public interne, ou plus proprement droit constitutionnel.

De la souveraineté intérieure.

veraineté extérieure.

La souveraineté extérieure est l'indépendance d'une De la sousociété politique à l'égard de toutes les autres sociétés politiques. C'est par l'exercice de cette souveraineté que les relations internationales d'une société politique sont maintenues en paix et en guerre avec les autres sociétés politiques. Le droit qui la règle a été appelé droit public externe, ou plus proprement droit international.

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