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§ 7. Mesures

législatives; jusqu'à quel point

elles sont

nécessaires

à la validité

d'un traité.

Le traité ainsi ratifié est obligatoire pour les États conauxiliaires tractants, indépendamment des mesures auxiliaires législatives qui peuvent être nécessaires de la part de chacun d'eux pour lui donner un effet complet. De sorte que, quand une pareille législation devient nécessaire, en conséquence de quelque limite au pouvoir de traiter exprimée dans les lois fondamentales de l'État, ou résultant nécessairement de la distribution de ses pouvoirs constitutionnels telle, par exemple, la prohibition d'aliéner le domaine national le traité doit être alors considéré comme imparfait dans son effet obligatoire, jusqu'à ce que le consentement de la nation soit donné dans les formes requises par la constitution civile. Un pouvoir général de faire des traités de paix implique nécessairement le pouvoir de décider les termes dans lesquels ils doivent être faits, et parmi eux on peut à juste titre comprendre la cession du territoire public ou autre propriété, aussi bien que celle de la propriété privée renfermée dans le domaine éminent annexé à la souveraineté nationale. S'il n'existe pas de limite exprimée dans les lois fondamentales de l'État, ou résultant nécessairement de la distribution de ses pouvoirs constitutionnels sur l'autorisation de conclure des traités à cet égard, cette autorisation s'étend nécessairement à l'aliénation du domaine public et privé, quand elle est jugée nécessaire ou indispensable '.

Les traités de commerce qui ont l'effet d'altérer les lois existantes de commerce et de navigation des parties contractantes peuvent nécessiter la sanction du pouvoir législatif de chaque État pour leur exécution. Ainsi le traité de commerce d'Utrecht, entre la France et la Grande-Bretagne, qui plaça le commerce des deux pays sur le pied de réciprocité, n'obtint jamais d'effet, à cause du rejet que

1 GROTIUS, de Jure belli ac pacis, lib. III, cap. xx, § 7. Droit des gens, liv. I, chap. xx, § 244; chap. п, § 262-565. Commentaries on American law, vol. I, p. 464. 5th ed.

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fit le parlement anglais du bill proposé pour modifier les lois existantes de commerce et de navigation, et de cette manière les adapter aux stipulations du traité. Dans les traités qui demandent l'appropriation de sommes d'argent à leur exécution, il est de la pratique habituelle du gouvernement anglais de stipuler que le roi recommandera au parlement d'octroyer le consentement nécessaire à cet effet. D'après la constitution des États-Unis, par laquelle les traités faits et ratifiés par le président, avec l'avis et le consentement du sénat, sont déclarés être «la loi suprême du pays, on semble comprendre que le congrès est obligé de dégager la foi nationale ainsi engagée, et d'adopter les lois nécessaires à l'exécution du traité 2.

8.

consentement; jusqu'à quel point elle est

nécessaire

à la validité

"des traités.

Dans les principes de jurisprudence civile reconnus par Liberté de la plupart des pays civilisés, si ce n'est par tous, un contrat obtenu par la violence est nul. La liberté de consentement est nécessaire à la validité de tout engagement, et les contrats obtenus par la force sont nuls, parce que le bienêtre général de la société exige qu'il en soit ainsi. S'ils étaient obligatoires, les faibles seraient constamment forcés, par les menaces ou la violence, à se départir de leurs justes droits. La notoriété de la règle que de tels engagements sont nuls, range les efforts pour les extorquer parmi les crimes les plus rares de l'humanité. D'un autre côté, la conservation de la société veut que les engagements consentis par une nation sous l'empire de la force qu'impliquent la destruction de ses forces militaires, la détresse de son peuple, l'occupation de son territoire par l'ennemi, soient tenus pour obligatoires. En effet, s'il n'en était ainsi, les guerres ne pourraient se terminer que par la soumission et la ruine totales du parti le plus faible, et l'imperfection des considérations, ou l'inégalité des conditions d'un

1 Lord MAHON, History of England from the peace of Utrecht, vol. I, p. 24.

2 KENT'S Commentaries, vol. I, p. 285, 5th ed.

§ 9.

Conventions

nature.

traité entre nations, qui suffiraient pour faire rompre un contrat entre particuliers sous prétexte d'une grossière inégalité ou de lésion énorme, n'entraînent pas une raison suffisante pour refuser l'exécution d'un traité '.

Les conventions générales entre nations peuvent se ditransitoires viser en ce qu'on appelle conventions transitoires et traités perpétuelles de leur proprement dits. Les premières sont perpétuelles de leur nature, de sorte qu'une fois mises à exécution elles subsistent indépendamment de tout changement dans la souveraineté et dans la forme de gouvernement des parties contractantes; et quoique leur opération puisse en quelques circonstances être suspendue pendant la guerre, elles revivent au retour de la paix sans aucune stipulation expresse. Tels sont les traités de cession, de limites, ou d'échange de territoire, ou ceux qui créent une servitude permanente en faveur d'une nation sur le territoire d'une autre 2.

Ainsi le traité de paix de 1783, entre la Grande-Bretagne et les États-Unis, par lequel l'indépendance de ces derniers fut reconnue, empêcha les confiscations futures de propriétés; et le traité de 1794, entre les mêmes parties, confirma les titres des sujets anglais sur leurs propriétés dans les États-Unis, et ceux des citoyens américains sur leurs propriétés en Angleterre, qui autrement eussent pu être confisquées pour être aliénées. D'après ces stipulations la cour suprême des États-Unis arrêta que les titres des sujets anglais et ceux des corporations ayant des propriétés en Amérique, étaient protégés par le traité de paix et confirmés par le traité de 1794, de sorte qu'ils ne pourraient être enlevés par aucun acte législatif intermédiaire ou autre forme de confiscation. En supposant même que les traités cussent été abrogés par la guerre qui éclata

1 SENIOR, Edinburgh Review, no CLVI, art. 4. MARTENS, Précis, etc., liv. II, chap. XII, § 50, 52. GROTIUS, de Jure belli ac pacis, lib. II, sect. XIV, § 4-12.

2 VATTEL, Droit des gens, liv. II, chap. XII, § 192. Précis, etc., liv. II, chap. 1, § 58.

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MARTENS,

entre les deux pays en 1812, il ne s'ensuivrait pas que les droits de propriété déjà accordés par ces traités pussent être abrogés par les hostilités survenantes. L'extinction des traités n'éteindrait pas plus les titres à une propriété foncière acquis ou assurés par leurs stipulations, que le rappel d'une loi civile n'affecterait les droits de propriété établis par elle. Mais indépendamment de ce principe incontestable sur lequel repose la sécurité de toute propriété, la cour n'était pas disposée à admettre la doctrine que les traités demeurent, par la guerre entre les parties contractantes, éteints ipso facto, s'ils ne sont ravivés par un renouvellement exprès ou tacite au retour de la paix. Quelle que soit la latitude de doctrine exposée par les écrivains élémentaires du droit des gens qui traitent en termes généraux ce qui est relatif à notre sujet, on accorda que la doctrine soutenue n'était pas universellement reconnue. Il peut y avoir des traités de nature telle, quant à leur objet et leur importance, que la guerre y mette nécessairement fin; mais quand des traités sont considérés comme arrangement permanent de territoire ou autres droits nationaux, ou renferment dans leurs termes la prévision du cas de guerre survenante, il serait contre tout principe de juste interprétation de les regarder comme éteints par la guerre. Si telle était la loi, le traité même de 1783, en tant qu'il fixe les limites des États-Unis et reconnaît leur indépendance, serait éteint, et ils auraient encore eu à débattre les principes originaires de la révolution. Une telle interprétation ne fut jamais avancée, et elle serait si monstrueuse, qu'elle renverserait tout raisonnement. La cour conclut donc que les traités stipulant des droits permanents et des arrangements généraux, et visant évidemment à une durée perpétuelle, pour en agir aussi bien en temps de guerre qu'en temps de paix, ne cessaient pas pour cause de guerre, mais étaient tout au plus seulement suspendus pendant qu'elle durait; et à

Controverse entre les gou

moins que les parties n'y renoncent, ou ne fassent des stipulations nouvelles et contradictoires, les traités sont remis en vigueur au retour de la paix'.

Par l'article 3 du traité de paix de 1783, entre les vernements États-Unis et la Grande-Bretagne, il fut convenu «que le relativement peuple des États-Unis continuerait à jouir, sans être in

américain

et anglais,

au droit de

pêche sur les quiété, du droit de pêcher toute espèce de poissons sur possessions le Grand - Banc, et sur tous les autres bancs de Terre

côtes des

anglaises

l'Amérique

septentrio

nale.

dans Neuve; de même que dans le golfe Saint-Laurent, et dans tous autres endroits de la mer où les habitants des deux pays avaient auparavant l'habitude de pêcher; et qu'aussi les habitants des États-Unis seraient libres de pêcher du poisson de toute espèce sur toute la côte de Terre-Neuve où le feraient les pêcheurs anglais (mais non pas de faire sécher ou d'apprêter ce poisson sur cette ile), et sur les côtes, dans les baies et criques de toutes les autres possessions de S. M. britannique en Amérique; que les pêcheurs américains auraient la liberté de faire sécher et d'apprêter le poisson dans toutes les baies, hâvres et criques dans les établissements de la Nouvelle-Écosse, des iles Madeleine et du Labrador, tant que ces endroits resteraient vacants; mais qu'aussitôt qu'il y aurait des établissements, soit dans tous ces endroits, soit dans l'un d'eux, il ne serait plus permis aux susdits pêcheurs d'y faire sécher ou apprêter le poisson sans le consentement préalable à cet effet des habitants, propriétaires ou possesseurs du sol. »

Pendant les négociations à Gand, en 1814, les plénipotentiaires anglais donnèrent avis que leur gouvernement << n'avait pas l'intention d'accorder gratuitement aux États

1 WHEATON'S Reports, vol. VIII, p. 464. - The society for the Propagation of the Gospel in Foreign Parts, v. the Town of New Haven. Le même principe fut soutenu par la cour de la chancellerie anglaise à l'égard des citoyens américains avant des terres dans la GrandeBretagne, d'après le traité de 1794. In Sutton v. Sutton, Russell and Milne Rep., p. 663.

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