Page images
PDF
EPUB

mière est digne de l'empire. » § 19. On appelle encore espèce, ce qui est placé sous le genre donné; et c'est ainsi qu'on dit habituellement que l'homme est une espèce de l'animal, l'animal étant pris pour genre. Le blanc est une espèce de la couleur, comme le triangle est une espèce de la figure. § 20. Que si dans notre définition du genre nous parlons aussi de l'espèce, en disant que le genre est l'attribut qui s'applique essentiellement à plusieurs termes différant en espèce, et si nous ajoutons que l'espèce est ce qui est placé sous le genre donné, il faut bien savoir que le genre, étant le genre de quelque chose, comme l'espèce est l'espèce de quelque chose, l'un est relatif à l'autre, et qu'il faut de toute nécessité employer réciproquement l'un dans la définition de l'autre. § 21. On a donc pu définir aussi l'espèce en disant qu'elle est ce qui est classé sous le genre, et qu'elle est ce à quoi le genre est attribué essentiellement. On peut dire encore que l'espèce est l'attribut s'appliquant essentiellement à plusieurs termes qui diffèrent entr'eux numériquement. § 22. Cette définition dernière conviendrait à l'espèce spécialissime, c'est-à-dire, qui n'est plus qu'espèce, et qui n'est plus genre. Les autres définitions conviendraient aussi aux espèces qui ne sont pas spécialissimes.

$ 20. Que si... Porphyre a défini plus haut § 6 le genre par l'espèce, il définit ici l'espèce par le genre: on pourrait donc lui objecter qu'il fait une pétition de principe il répond que genre et espèce sont des termes relatifs qui ne peuvent se définir que l'un par l'autre.

8 21. Numériquement, c'est-àdire formant chacun une unité dis

tincte.

$ 22. L'espèce spécialissime, Celle qui n'a plus après elle que des individus - et qui n'est plus genre, les §§ suivants expliquent ceci très-clairement.

genre. Au

§ 23. Nous pourrons éclaircir ceci en faisant la remarque suivante : Dans chaque Catégorie, il y a certains termes qui sont généralissimes, d'autres spécialissimes; puis entre ces deux extrêmes, des plus génériques et des plus spécifiques, il y a d'autres termes qui sont tout à la fois genres et espèces. Le terme généralissime est celui au-dessus duquel il ne peut plus y avoir de genre qui le dépasse; le terme spécialissime est celui après le quel il ne peut pas y avoir d'espèce qui lui soit inférieure. Entre le plus générique et le plus spécifique, il y a d'autres termes qui sont à la fois genres et espèces, relativement, il est vrai, à des termes différents. § 24. Montrons clairement ce que nous voulons dire sur une seule Catégorie. La substance est elle-même dessous d'elle est le corps, au-dessous du corps, le corps animé sous lequel est l'animal; au-dessous de l'animal, l'animal raisonnable sous lequel est l'homme; sous l'homme, Socrate, Platon, et tous les hommes en particulier. De tous ces termes, la substance est le plus générique, le seul qui ne soit que genre. L'homme est le plus spécifique, le seul qui ne soit qu'espèce. Le corps est une espèce de la substance, mais c'est le genre de corps animé. Corps animé est lui-même une espèce du corps; mais c'est le genre d'animal. Auimal à son tour, est une espèce de corps animé; mais c'est le genre d'animal raisonnable. Animal raisonnable est une espèce d'animal, et genre d'homme. Quant à l'homme, il est bien une espèce de l'animal; mais il n'est plus le genre des hommes individuels; il est simplement es

§ 23. Généralissimes qui n'ont plus de genre au-dessus d'eux.

Comme nous l'avons dit, dans les 88 précédents.

pèce; et tout ce qui, placé avant les individus, leur est attribué immédiatement, n'est qu'espèce, et cesse d'être geure. De même donc que la substance, qui est placée au plus haut, parce qu'il n'y a pas de genre avant elle, est le terme généralissime, de même, l'homme qui est une espèce après laquelle il n'y a plus d'autre espèce, ni aucun terme qui puisse être divisé en espèces, puisqu'il n'y a plus que des individus, et l'on entend par individus, Socrate, Platon, ou telle chose blanche par exemple, de même, dis-je, l'homme n'est plus qu'espèce; il est la dernière espèce, et comme nous l'avons dit, l'espèce spécialissime. Quant aux intermédiaires, ils sont espèce de ce qui les précède, genre de ce qui les suit. § 25. Ils ont donc deux rapports, l'un à ce qui les précède, et c'est ce qui les fait espèces des termes antérieurs ; l'autre à ce qui les suit, et c'est ce qui les fait genres des termes postérieurs.

§ 26. Les extrêmes au contraire n'ont qu'un seul rapport. Le terme généralissime n'a de rapport qu'aux termes placés au-dessous de lui, puisqu'il est le genre le plus élevé de tous. Il ne peut pas avoir de rapport avec ce qui serait avant lui, puisqu'il est le terme le plus élevé, le principe premier, et comme nous l'avons dit, le genre au-dessus duquel il n'y a plus de genre qui le dépasse. § 27. Le terme spécialissime n'a, lui aussi, qu'un seul rapport; et c'est avec les termes qui le précèdent et dont il est l'espèce; mais le rapport qu'il soutient avec les termes qui le suivent est identique; car il est appelé aussi l'espèce des individus. Il est l'espèce des individus parce qu'il les comprend; il est l'espèce des termes antérieurs parce qu'il est compris

par eux. § 28. On définit donc le genre généralissime, en disant qu'il est genre et n'est pas espèce, et qu'il est ce au-dessus de quoi il n'y a plus de genre qui le dépasse. § 29. Et l'on définit l'espèce spécialissime, en disant qu'elle est ce qui est espèce et n'est pas genre, ce qui étant espèce ne peut plus être divisé en espèces, et encore ce qui est l'attribut essentiel de plusieurs termes ne différant entr'eux que numériquement.

§ 30. Quant aux intermédiaires placés entre les extrêmes, on les appelle genres et espèces subordonnés, et l'on admet que chacun d'eux peut être genre et espèce, mais, il est vrai, relativement à des termes divers. C'est ainsi que tous les termes antérieurs aux plus spécifiques, à remonter jusqu'au plus générique, sont appelés genres et espèces subordonnés. § 31. Ainsi Agamemnon est Atride, Pélopide, Tantalide, et se rattache enfin à Jupiter. § 32. Dans les généalogies c'est à un seul auteur, et par exemple Jupiter, que le plus souvent on rapporte l'origine. Mais il n'en est pas ainsi des genres et des espèces; car l'être n'est pas le genre commun de tout; tout n'est pas homogène relativement à un seul terme qui serait le genre le plus élevé, comme le montre bien Aristote. Mais il faut admettre, comme dans les Catégories, que les dix premiers genres sont comme dix principes premiers, et bien qu'on puisse les dénommer tous du nom d'être, ce sera par homonymie, comme le remarque Aristote, et non

$ 31. A Jupiter qui est enfin le père des dieux et des hommes et est supposé, du moins ici, n'avoir pas de père.

Aristote, Métaphys., liv. 5, ch. 28, p. 1024, b, 15, édition de Berlin.

Par homonymie et non point synonymiquement, voir le début des

$ 32. Comme le montre bien Catégories, ch. 1, 88 1 et 2.

point synonymiquement. Loin de là, si l'être était le genre de tout, toutes choses seraient appelées êtres synonymiquement. Mais comme il y a dix genres primitifs, cette communauté d'appellation est purement verbale, et ne va pas jusqu'à la définition qu'on donnerait de cette appellation. Les genres généralissimes sont donc au nombre de dix. § 33. Les termes spécialissimes sont en un certain nombre qui n'est pas non plus infini.

§ 34. Quant aux individus qui viennent après les termes les plus spécifiques, ils sont infinis. § 35. Aussi Platon recommandait-il, quand on descend des termes les plus génériques aux plus spécifiques, de s'arrêter à cette limite, et de descendre en suivant les intermédiaires qu'on divise suivant les différences spécifiques, sans s'inquiéter des termes infinis pour lesquels il n'y a pas de science possible. § 36. Quand on descend aux termes spécialissimes, il faut nécessairement par la division produire la multiplicité; quand au contraire on remonte aux plus génériques, on réduit nécessairement la multiplicité à l'unité; l'espèce en effet, et le genre encore davantage, ramènent plusieurs termes à une seule et unique nature. Les termes particuliers et individuels au contraire dispersent l'unité en multitude. C'est ainsi que par la participation à l'espèce, tous les hommes, quelque nombreux qu'ils sont, n'en font qu'un; et par les hommes particuliers et individuels, cet homme unique et commun devient plusieurs. Le particulier

$35. Aussi Platon, on peut voir sur ces recommandations de Platon, entre autres passages, le

Phèdre, p. 97 et 110, Sophiste, p. 345 et 347, Répub., liv. 6, p. 62, etc., trad. de M, Gousin.

« PreviousContinue »