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siècle.

Goths. La bataille s'engagea vers midi; elle fut longue et sanglante. Les Goths furent vaincus. Sixième Totila, après avoir fait de vains efforts pour rallier ses soldats, fut contraint de fuir luimême pour la première fois, accompagné de peu de personnes. Il se retira dans Capra, village éloigné de huit milles du champ de bataille; il y mourut quelque temps après, d'une blessure reçue, ou dans la bataille, ou dans sa fuite. Les Goths ralliés autour de lui, l'enterrèrent sans pompe dans cet endroit.

* Si on en croit Procope, Totila fut défait par sa faute, pour avoir défendu à son infanterie de se servir d'aucune autre arme offensive que de la demi-pique ou du javelot. Procope avait quitté l'Italie avec Bélisaire; et, fidèle à son plan de jeter une sorte de ridicule sur les princes goths, il n'a pas fait difficulté d'adopter un ouï-dire qui favorisait ses vues, et que le bon sens devait lui faire rejeter. Narsès se hâta d'envoyer à Constantinople la cuirasse de Totila, teinte de sang, avec sa couronne enrichie de pierreries. L'empereur, assis au milieu du sénat, reçut à ses pieds les dépouille d'un prince qui lui était supérieur en plusieurs genres de mérite.

Sixième

siècle.

CHAPITRE XXIII.

Theia est élu Roi des Goths.

LES Goths échappés à la bataille, s'étant rassemblés à Pavie, choisirent pour leur roi un général nommé Theia. Ce prince s'empare des trésors déposés par son prédécesseur avait dans cette ville; il en emploie une partie à lever des troupes: il fait offrir de grandes sommes aux Français qui, sous la conduite de Bucelin, s'étaient établis dans la Ligurie; mais ils ne songeaient qu'à profiter des dépouilles des Goths.

Narsès, avec son armée victorieuse, continuait sa route vers Rome. Il s'empare de Narni, de Spolette, de Pérouse. Rome est enlevée par escalade; les Goths restés à la garde de cette capitale, se voyant en trop petit nombre pour la défendre, s'étaient retirés, avec leurs effets les plus précieux, dans une petite enceinte qu'ils avaient formée, et qui, s'étendant du mole d'Adrien jusqu'aux murs de la ville, renfermait le pont sur lequel on passait le Tibre en cet endroit; ils furent obligés de se rendre. C'était la cinquième fois que Rome était prise

sous le règne de Justinien. Bélisaire et Totila s'en étaient emparés chacun deux fois.

Narses, maître de Rome, continuait ses conquêtes au midi de l'Italie: il s'empara successivement de Porto, de Népi, de Pietra-Pertusa, de Tarente, et vint mettre le siége devant Cumes, que l'on savait renfermer une partie des trésors de Totila.

Theïa, pour sauver cette place, ayant rassemblé son armée au mois de décembre 552, s'avançait vers les Apennins, Narsės avait fait occuper les passages vers la Toscane. Theïa, averti de cet obstacle, et jugeant que la route la plus longue lui deviendrait la plus facile, suivit les côtes de la mer Adriatique, et vint en Campanie par le Picenum et le pays des Samnités. Il campa au pied du mont Vésuve, au bord de la Dragonne, s'empara d'un pont qui se trouvait à cet endroit, et en fortifia les deux extrémités.

Narses arrivait presque en même temps. Il s'arrête auprès de Nocera. Les Goths recevaient des vivres par mer; mais leur flotte ayant été livrée aux Romains par celui qui la comman dait, les Goths commencèrent à sentir la disette. On était au mois de mars 553, et depuis deux mois, les armées se trouvaient en présence: Theïa, manquant de subsistances, prit le parti

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siècle,

de se retirer sur des hauteurs escarpées, qu'on Sixième nommait alors les montagnes de lait, à cause siècle. des nombreux troupeaux qui s'engraissaient

dans ces pâturages. La difficulté du terrain, et la crainte de s'éloigner de la flotte qui nourrissait l'armée romaine, empêchait Narses de suivre Theia.

CHAPITRE X XI V.

Bataille du Vésuve. -Mort de Theia.

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Le défaut de subsistances obligea bientôt les Goths d'abandonner ce poste. Leur unique ressource est d'en venir aux mains. Malgré l'infério rité de leur nombre, ils se jettent sur les Romains avec l'impétuosité des tigres. Ce fut d'abord un choc confus, où les combattans, sans division d'escadrons et de bataillons, sans être disposés par rangs et par files, se chargeaient, se repoussaient en foule. Les Goths ayant renvoyé leurs chevaux, forment un bataillon serré; les Romains les imitent. Theïa marche le premier aux ennemis, et suivi de l'élite des Goths, il renverse tout ce qui se pré

sente sur son passage. Ce prince avait déja plusieurs fois changé de bouclier, lorsque, ne pouvant qu'à peine faire usage du sien, chargé de douze javelots, il appela son écuyer pour lui en fournir un nouveau dans le prompt mouvement qu'il fit pour le prendre, sa poitrine étant restée découverte, il fut percé d'une flèche qui lui ôta la vie. Les Romains qui l'environnaient lui coupèrent la tête et la présentèrent, au bout d'une lance, aux deux armées.

Ce spectacle, au lieu de mettre les Goths en fuite, avait embrasé leur rage. Les deux armées passèrent la nuit sur le champ de bataille, sans que la victoire fût décidée. Le combat recommença avec le jour. Les Goths, sans chef, ne prenant d'ordre que de leur désespoir, couraient au-devant du péril; leurs blessures semblaient redoubler leurs forces; ils s'attachaient aux Romains, les entraînaient dans leur chute, ils mouraient en les déchirant. Cette cruelle mêlée dura jusqu'à la nuit.

Les Goths se retirent enfin fumans de carnage, et encore ivres de sang et de fureur. Le -repos qui succédait à deux journées si meurtrières, leur fit sentir leur faiblesse; ils consentirent à mettre bas les armes, à condition

Sixième

siècle.

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