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présente sous un point de vue propre à rassurer ceux qui en sont atteints; et, dans un petit nombre de pages, il leur offre des conseils qui peuvent leur être fort utiles.

La goutte, d'après l'auteur, est occasionnée par la présence de l'acide urique, qui, dans certains cas, s'accumule dans le sang, où il forme des urates dont le dépôt s'opère dans différentes parties de notre organisme. C'est principalement sur les articulations que se porte cet acide à peu près insoluble, et, comme corps étranger, il y exerce une compression qui détermine les douleurs de la goutte. S'il envahit le cerveau, les poumons ou le cœur, il occasionne une crise qu'on appelle goutte remontée, et qui souvent entraîne la mort. Enfin, s'il s'accumule sur les reins, il engendre la gravelle dont le principe par conséquent est le même que celui de la goutte. Mais, quelle est la cause de la formation de l'acide urique dans le sang? L'auteur l'attribue à une altération de la nutrition, et cette altération résulte de la nature même des aliments dont on fait usage. L'acide urique se manifeste lorsque la proportion des aliments plastiques est trop grande par rapport aux aliments respiratoires. On sait que les aliments respiratoires ne contiennent que du carbone et de l'hydrogène, et qu'ils sont uniquement destinés à entretenir le jeu de la respiration; ce sont principalement les graisses, la fécule et le sucre. Les aliments plastiques au contraire, qui, presque tous sont tirés du règne animal, renferment la fibrine et l'albumine, matières azotées absolument nécessaires pour réparer les pertes continuelles de notre substance. Pour éviter la goutte, il suffit d'établir un juste équilibre entre la nourri

ture animale et celle qui est tirée de la graisse, de la fécule et des fruits.

Au reste, d'après M. de Montdézert, cette maladie est toujours susceptible de guérison, lors même qu'elle est héréditaire, pourvu qu'il n'y ait point désorganisation. Mais le traitement en est quelquefois long et difficile, et celui qui en est atteint doit s'imposer un régime sévère. Il ne doit faire usage que d'une nourriture légère, et il faut surtout qu'il renonce complètement à l'eau-de-vie et aux liqueurs alcooliques. Si ces substances sont funestes aux goutteux, cela tient à ce que les excitants sont toujours contraires dans les maladies inflammatoires. Mais ne pourrait-on point trouver encore une autre cause de leur influence défavorable, en considérant que l'alcool, qui n'est point susceptible d'assimilation, a, comme l'acide urique, de la tendance à se porter sur les articulations, où il se rencontre avec lui; et que, d'un autre côté, l'acide urique, quoique légèrement soluble dans l'eau, est tout-à-fait insoluble dans l'alcool?

Pour éliminer cet acide, en opérant sa dissolution, M. de Montdézert prescrit l'usage habituel du bicarbonate de soude en petite quantité dans l'eau mélangée au vin, dont le malade fait sa boisson. Mais c'est surtout l'acide benzoïque, substance inoffensive retirée du benjoin, qu'il considère comme le véritable dissolvant, et dans lequel il voit en quelque sorte un remède spécifique de la goutte. Ce fut le docteur Maudeleny qui l'essaya d'abord sous la forme de benzoate de soude, dans le traitement de la goutte et de la gravelle. Mais c'est M. de Mont

dézert qui a le plus contribué à en répandre l'usage à Paris, et qui, à cette préparation chimique, a ajouté pour certains cas, celle des benzoates de chaux, de magnésie, de potasse de fer et d'ammoniaque.

Avant de passer à son traité d'hygiène, qu'il me soit permis de présenter d'abord sur cette science quelques considérations.

Il serait à désirer que l'hygiène, qui a pour but de conserver la santé et de préserver des maladies, ne fût étrangère à personne, et que, dans tous les établissements où l'on s'occupe d'éducation, on en fit connaître au moins les premiers éléments. A la différence des connaissances médicales, dont l'application doit être réservée exclusivement aux médecins, on ne saurait trop vulgariser tout ce qui est relatif aux règles de l'hygiène. Cependant, malgré leur utilité, elles ne sont connues que d'un petit nombre d'hommes; et l'on pourrait affirmer que la plupart d'entre eux ne deviennent malades que par suite de leur ignorance. Si les autres animaux sont dirigés par l'instinct, qui leur fait découvrir d'une manière sûre ce qui leur convient le mieux, l'homme au contraire ne peut s'en rapporter à son goût, quand il s'agit de son alimentation. Ce serait un trèsmauvais guide, et souvent les substances les plus nuisibles sont celles qui ont pour nous le plus d'attrait. Il serait impossible de calculer le nombre de ceux qui, sans le savoir, altèrent leur santé et abrègent leur existence par l'usage de l'eau-de-vie et des autres excitants. Le tabac pris sous toutes les formes n'est pas moins pernicieux. Comme narcotique, il a pour effet d'affaiblir l'organisme, et sa fumée intro

duite dans les poumons dispose aux congestions de cet organe. Cependant, quoique ses partisans conviennent eux-mêmes qu'il ne peut faire aucun bien, son usage n'en est pas moins devenu général. Les hommes, ainsi que l'a dit M. Flourens, ne meurent pas, ils se tuent. Combien d'autres dangers la connaissance de l'hygiène ne pourrait-elle pas nous faire éviter? Elle nous apprendrait à quel point l'air concentré et chargé d'acide carbonique qu'on respire dans toutes les grandes réunions, est pernicieux pour la santé. Nous saurions par elle que l'usage, si fréquent en Normandie, des boissons acides ne peut que débiliter l'estomac au lieu de le fortifier; qu'il faut éviter d'habiter des appartements humides ou exposés au nord; enfin, que les odeurs elles-mêmes ne sont pas indifférentes, puisque les émanations des fleurs très-odorantes peuvent, dans un local étroit, déterminer l'asphyxie, tandis que celles de l'éther et du goudron végétal peuvent être très-favorables. Mais je me borne à ce simple aperçu, qui doit suffire pour donner une idée de l'utilité de cette science.

Ce fut peu de temps après avoir été reçu docteur en médecine que M. de Montdézert obtint, au concours, la place de professeur d'hygiène de l'Association polytechnique; et ses leçons, qui furent imprimées successivement dans le journal hebdomadaire La Science pour tous, obtinrent un succès légitime. Peu de temps avant sa mort, il les avait réunies dans un traité qui devait être publié en plusieurs volumes, dont le premier seulement a paru. Dans cet ouvrage, que j'ai entre les mains, on trouve autant de physiologie que d'hygiène. Avant d'indiquer ce qui est le plus

favorable à la santé, il convenait, en effet, de donner d'abord quelques notions sur les fonctions de chacun de nos organes. Du reste, je ne chercherai point à en présenter une analyse qui m'entraînerait dans de trop longs détails, et je me bornerai à en faire un éloge général. Sans doute, il existait déjà un certain nombre de traités sur cette matière; mais, comme les autres branches de la médecine, l'hygiène s'enrichit chaque jour de nouvelles observations; et, dans son ouvrage, l'auteur a le mérite d'avoir exposé d'une manière claire et méthodique ce qui constitue l'état actuel d'une science qu'il a su mettre à la portée de tous. Or, vulgariser l'hygiène, et par elle indiquer les moyens les plus sûrs de conserver la santé, n'est-ce pas contribuer au bonheur de l'humanité ?

M. de Montdézert a, en outre, publié un mémoire sut l'ozone ou oxygène électrisé, dont les propriétés excitantes pourraient, d'après lui, être employées avec avantage dans le traitement de la goutte et du diabète sucré, puisque ces maladies ont souvent pour principe un défaut d'oxygénation. D'un autre côté, comme l'ozone a pour effet de neutraliser les miasmes et de purifier l'air, il pourrait encore recevoir une heureuse application en assainissant les salles des malades dans les hôpitaux. Sur le rapport présenté par M. Chatin, ce mémoire fut favorablement accueilli par l'Académie de médecine de Paris, qui encouragea le jeune auteur à poursuivre ses études sur cet important sujet.

Mais de toutes les recherches auxquelles s'était livré M. de Montdézert, ce furent celles qui avaient pour objet le traitement de la goutte qui contribuè

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