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se durcissaient ces couches primordiales, ces granits qui forment, dans toute son étendue, la première base des terrains déposés dans la suite.

<< Et Dieu dit : Que la lumière soit, et la lumière fut... Et il sé› para la lumière des ténèbres, et il appela la lumière le jour'...

Il crée le jour, le tems, si l'on veut, ou du moins les successions de tems dont nous pouvons commencer à nous faire quelque idée...

Les grands jours de la création commencent.

Au second de ces jours, Dieu commence à effectuer les grandes divisions de la matière.

Au troisième, la terre et la mer sont séparées, les herbes apparaissent, puis les arbres, c'est-à-dire, sans doute, les plantes les plus simples d'abord, les plus parfaites ensuite; c'est la marche constante de la Divinité dans le plan de création sensible que nous étudions en ce moment, et c'est l'interprétation que la géologie trouve imprimée dans le grand livre qu'elle s'applaudit d'avoir découvert.

Au quatrième, tous les corps célestes ont reçu leur forme et leur coordination réciproque.

Le cinquième, les mers se peuplent; création des poissons, des reptiles, des oiseaux.

Le sixième, animaux terrestres, mammifères.

Enfin l'homme... Masculum et fæminam creavit eos... benedixitque illis...

Tel est l'ordre de création que nous révèle Moïse, et que la science moderne a été obligée de reconnaître après lui3.

Gen., v. 3, 4, 5.

Les végétaux qui ont rempli de leurs empreintes les plus anciennes couches sont d'une organisation extrêmement simple, tels que les acotylédons et les monocotylédons. Ces familles ne sont presque composées que de végétaux herbacés. Les dicotylédons, auxquels appartiennent la plupart des espèces arborescentes, sont plus récens. La Genèse a donc bien placé herbas avant arbores.

3. Élevé dans toute la science des Égyptiens, mais supérieur à son siècle, Moise nous a laissé une cosmogonic dont l'exactitude se vérific chaque jour d'une manière admirable. Les observations géologiques récentes s'accordent

Les couches les plus profondes sur toute l'étendue de la terre représentent encore aujourd'hui la masse informe et nue ( inanis et vacua); la vie n'était point alors sur le globe... Ces granits, ces schistes, ces roches primitives, ont été formés dans un liquide immense. C'était l'abîme de l'Écriture.

Ces premières couches, qui sont comme le squelette de la terre, ont été recouvertes depuis par d'autres formées des débris des règnes végétal et animal, qui se sont succédé dans l'ordre assigné par la Genèse avec des traces de grandes révolutions qui semblent avoir précédé et suivi chaque ordre de création. Peut-être est-ce la nuit dont parle le texte sacré, laquelle a précédé les jours et les

a suivis.

Dans ces couches successives, qui composent ce qu'on appelle le monde fossile, on n'a point trouvé l'homme: — et en effet l'Écriture nous apprend qu'il a paru le dernier.

Ainsi la science géologique, qui, à sa naissance, ne cherchait dans les entrailles de la terre que des armes pour combattre la révélation, après avoir parcouru un cercle immense, n'a trouvé que ce qui était écrit à la « première page du premier volume du premier des livres, selon l'expression de M. Nodier

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Seulement elle est conduite à regarder les jours de la création comme des époques dont la mesure n'est point connue de l'homme. Cela est-il contre la foi?... Non.

Tout ce qu'il importe de savoir de cette opinion, dit l'auteur des savantes Conférences sur la Religion, c'est qu'elle n'est pas condamnée, et qu'on peut la défendre sans blesser en rien la doctrine orthodoxe. Saint Augusin dit expressément1 qu'il ne faut pas se hater de prononcer sur la nature des jours de la création, ni d'affirmer qu'ils fussent semblables à ceux dont se compose la semaine ordinaire; et, dans le plus fini de ses ouvrages, dans la Cité de Dieu, il dit encore qu'il nous est difficile, et même impos

parfaitement avec la Genèse sur l'ordre dans lequel ont été successivement créés tous les êtres organisés. Ce sont les paroles de l'homme qui tenait naguère parmi nous le sceptre des sciences naturelles, de Cuvier. Voir l'Universel. Avril, 1830.

De Gen. ad litteram, lib. iv, c. 27, n. 44.

sible d'imaginer, à plus forte raison de dire quelle est la nature de ces jours'. »

Dans la Genèse même, à la fin du récit de l'œuvre de la création, telles sont, dit l'auteur sacré, les générations du ciel et de la terre alors qu'ils furent créés, au jour où Jéhovah-Elohim(Dominus Deus) fit l'un et l'autre. Ici l'historien sacré appelle un jour ce qu'il a partagé en six jours au commencement de son récit. On peut ajouter : nos grandes divisions de tems, àges, périodes, ères, époques, étaient peu familières aux premiers hommes, ou même n'existaient pas dans les langues très-anciennes... Et puis l'Écriture sainte est la parole du Seigneur, qui voit les successions des siècles comme un seul jour. Mille ans à ses yeux, dit le Prophète, sont comme le jour d'hier qui a déjà passé ; et cette grande manière de s'exprimer est restée dans le style de l'Écriture sainte. Saint Paul, en expliquant le passage: Hodiè si vocem ejus audieritis..., appelle un jour, hodie, tout le tems qui est donné à l'homme, voyageur sur la terre.

Et nous-mêmes, avec l'Église, nous appelons le jour de l'Éternité le jour éternel, cette ère du bonheur sans fin qui est promise aux enfans de Dieu.

Fac lucis usuræ brevi

Eterna succedat dies ».

Mais avec cette explication, me dira-t-on, on peut reculer autant que l'on veut l'origine du monde.

La révélation et la science s'accordent à établir invinciblement que l'homme est nouveau sur la terre, et que son âge ne remonte pas au delà de l'époque fixée par les Livres saints. Pour les jours de la création qui ont précédé sa naissance, Fouillez, dit l'auteur des Conférences précitées, fouillez dans les entrailles de la

Qui dies cujusmodi sint, aut perdifficile nobis, aut etiam impossibile est cogitare, quantò magis dicere. De Civit. Dei, 1. x1, c. 6. Voir Conférences sur la religion, par Mgr l'évêque d'Hermopolis, t. 11, conf. 2.

2 Hunc nempè nobis præparas,

Nobis reservas hunc diem

Quem vix adumbrat splendida
Flammantis astri claritas....

O quandò lucescet tuus
Qui nescit occasum dies...!

terre: si vos recherches constatent d'une manière évidente que le globe avec ses plantes et ses animaux doit être de beaucoup plus ancien que le genre humain, la Genèse n'aura rien de contraire à cette découverte... Il vous est permis de voir dans chacun des six jours autant de périodes indéterminées..... et alors vos déconvertes seraient le commentaire explicatif d'un passage dont le sens n'est pas entièrement fixé. ›

M. Nodier a dit sur tout cela des choses à la fois justes et sublimes et dans sa Palingénésie et dans son article sur la Fin du genre humain ' ; mais est-il également permis de regarder avec lui l'œuvre de la création comme incomplète, inachevée, comme se

Le lecteur verra sans doute avec intérêt les passages suivans, que nous regrettons de ne pouvoir lui offrir avec plus d'étendue:

D'après ce que j'ai dit..., surgirent, l'on après l'autre, du chaos ou de la ‣ matière confuse, les cieux, la terre et les eaux; puis les herbes qui vêtirent › le monde, puis des habitans dans ces eaux, des animaux à cette terre, et, › par-dessus tout, l'homme. Cette cosmogonie n'est pas difficile à trouver, me

D

› dira-t-on, c'est celle de la Genèse. Elle est encore ailleurs heureusement, elle › est dans la découverte des sciences, qui n'ont pas eu le bonheur qu'enviait › Alphonse de Portugal: elles ne sont point parvenues à faire leur univers avec plus de bonheur et d'habileté que Dieu. Je vous donne ce système à votre › choix, au nom de Moïse et de la révélation, ou au nom de M. Cuvier et de la • géologie.

› Il est vrai que tout ceci s'accomplit en six jours dans la Genèse, et cela n'est *pas trop philosophique, au calcul de l'Observatoire ; mais qui sait à quel astre › inconnu le Dieu de Moïse, blanchissant le firmament de cette poussière dont › il l'a semé, daignait mesurer les jours de sa création? Ce soleil des soleils, ee flambeau inextinguible de l'espace dont rien n'indique ni l'orient ní l'occident, › dont aucune créatore n'a salué ni l'aube ni le crépuscule, ce luminaire de • l'éternité dont le cours embrasse à jamais un cercle qui n'a ni centre ni cireon• férence, l'avez-vous vu?.......» De la fin prochaine du genre humain. Revue de Paris, t. xxv; OEuvres de l'auteur, t. v, p. 301.

Il serait inutile aujourd'hui, dit-il ailleurs, de revenir longuement sur les ⚫ hautes dérisions dont la Genèse a été l'objet dans le triste siècle des philo>sophes. Deux mots suffiront pour les réduire à leur juste valeur.

A

> 1o Les jours de la Genèse n'étaient point composés de 24 heures terrestres. La distribution quotidienne de nos heures est en raison de notre globe... Donc les rapports avec l'astre qui lui mesure le jour n'étaient point encore établis... quand la lumière fut faite par une intelligence qui n'a point précisément, ⚫ comme l'Institut, son orient à Bercy, son occident à Vaugirard. Les jours de

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continuant encore, et ne devant recevoir sa dernière perfection qu'au grand jour qui sera par excellence le jour du Seigneur.

Je crois qu'on le peut dans un sens très-catholique, mais que je soumets entièrement à mes maîtres dans la foi.

Des auteurs très-pieux, théologiens exacts et généralement respectés, se servent habituellement de ces expressions: que l'homme est une créature commencée, incomplète..., et autres semblables. Avant eux, je trouve cette même pensée exprimée d'une manière énergique dans cette phrase d'un apôtre, que j'essaierais de traduire si j'avais le talent d'un M. de Maistre ou de M. Nodier': «Vo

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la création ont donc été calculés sur la marche d'un autre soleil, qui n'est point celui de l'homme et dont aucun homme ne connaît le cours,>

2o Si vous trouvez quelquefois que l'expression de l'Écriture n'est pas assez dans le langage de la science, par exemple, dans l'objection si vulgaire du commandement fait au soleil par Josué et dans mille autres..., rappelez-vous que l'astronomie, la physique et l'histoire naturelle de la Bible ne sont point des > faits dogmatiques : ce sont des faits apparens. Ces notions ont été coordon› nées, avec une mesure sublime, à l'intelligence humaine, et prises par conséquent dans la portée des facultés moyennes de l'humanité. Elles sont tout ce ⚫ qu'elles doivent être, parce qu'elles sont faites pour l'homme, et pour l'homme primitif, dont un enseignement plus complet aurait forcé la nature, et c'est ⚫ leur imperfection apparente qui fait leur spécialité....

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> J'ai été douteur et même incrédule, parce que je ne voyais dans la vie de » l'homme que des répartitions injustement inégales pendant qu'elle dure, et › qu'un vide affreux à sa fin. J'ai refusé dans mon cœur aveugle de connaître et › d'avouer Dieu, parce que sa suprême sagesse avait mesuré une révélation in> complète à nos organes incomplets... Depuis que le grand cercle de la créa⚫tion s'est accompli à mes yeux... j'ai pris pitié de mes erreurs.

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M. Nodier nous pardonnera de lui faire perdre en l'abrégeant quelque chose de cette grandeur de poésie, de ce bonheur d'expression qui le caractérisent; nous ne pouvons indiquer que le germe de ses pensées. Voir Revue de Paris, août 1832. De la Paling. hum., ou bien OEuvres de l'auteur, t. v, p. 337.

Plusieurs traductions récentes portent: Car c'est volontairement qu'il nous ⚫ a engendrés par la parole de la vérité, afin que nous fussions comme les pré• misses de ses créatures. Il nous semble qu'il y a quelque chose de plus dans le Initium aliquod, àrapɣáv revu, de saint Jacques. Nous préférons la traduction du P. Amelotte, qui s'exprime ainsi : Afin que nous soyons le commenmencement de sa créature. » (Note du Directeur.)

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