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cet illustre solitaire au regard terrible, au visage éclatant comme le soleil. De quelle horrible imprécation ne peut-il pas m'accabler dans sa colère, s'il vient à soupçonner le motif de mon arrivée ! Que ne désignes-tu plutôt pour cette périlleuse entreprise Ourvassí, Ménaká, Rhambhá, Misra-Késsi et autres nymphes de ta cour, toutes si fières de leurs charmes? >

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‹ —- Non, lui répondit le divin époux de Satchí; ces nymphes doivent rester près de moi : c'est en toi que j'espère, beauté céleste; cependant je te donnerai pour venir à ton aide l'Amour, le Printems et le Zéphire.

La nymphe aux doux regards, rassurée par ces paroles flatteuses, traverse aussitôt l'Éther avec ses trois compagnons, et ils descendent dans la forêt aux environs de l'ermitage de Kandou. Ils errent quelque tems sous ces vastes ombrages, qui leur rappellent l'éternelle verdure des jardins enchantés d'Indra. Partout y souriait la nature : ce n'étaient que fruits, que fleurs, que mélodieux concerts. Là, leur vue s'arrête sur un manguier superbe ; ici, sur un citronnier aux fruits d'or; plus loin de hauts palmiers attirent leurs regards : le bananier, le grenadier, le figuier aux larges feuilles, leur prêtent tour à tour la fraîcheur de leur ombre. › Perchés sur leurs rameaux flexibles, un peuple d'oiseaux aussi variés dans leur plumage que dans leur chant flattaient également et l'oreille et les yeux.

› De distance en distance, des étangs limpides, des ruisseaux purs comme le cristal, embellis par les coupes d'azur et de pourpre du nénufar sacré, étaient sillonnés avec grace par des couples de cygnes d'une blancheur éblouissante et une foule d'oiseaux aquatiques amis de l'ombre et de la fraîcheur.

› Pramnotchâ ne pouvait se lasser de contempler ce ravissant spectacle: cependant elle rappelle au Zéphire, au Printems et à l'Amour, l'objet de leur voyage, et les engage à agir de concert pour la faire réussir dans son entreprise. Elle-même aussitôt s'apprête à déployer toutes les ressources de la séduction.

« Ah! ah! s'écrie-t-elle, nous allons donc le voir, cet intrépide conducteur du char de Brahma, qui se vante de tenir sous le joug le coursier fougueux de ses sens!... Oh! que je crains pour lui que dans cette rencontre les rênes n'échappent de ses mains!.....

Oui! fût-il Brahmâ, Vichnou, le dur Siva lui-même, son cœur éprouvera aujourd'hui ce que peuvent les traits de l'Amour! ›

› En achevant ces mots, elle se rend vers l'ermitage, où, par la puissance du saint anachorète, les bêtes les plus farouches se sentaient dépouillées de leur férocité. A l'écart, sur le bord du fleuve, elle mêle aux chants du kokila sa voix enchanteresse, et fait entendre un cantique de louanges.

› Au même instant, le Printems répand de nouveaux charmes sur toute la nature: le kokila soupire avec plus de douceur; une harmonie indicible jette l'âme dans une langueur voluptueuse. Chargé de tous les parfums des monts Malayas, sa patrie, le Zéphire agite mollement les airs, jonchant partout la terre des fleurs les plus odorantes ; et l'Amour armé de ses flèches brûlantes s'approchant de Kandou, fait pénétrer dans ses veines un feu qui

le dévore.

› Frappé des chants mélodieux qui parviennent à son oreille, déjà ivre d'amour et dans le plus grand trouble, il vole vers le lieu d'où partent ces accens. Il reste comme stupéfait à la vue des charmes que Pramnotchâ déploie à ses regards.

¿Qui es-tu? quelle est ton origine, femme adorable, lui dit-il, toi dont la taille élégante, les sourcils si délicatement arqués, le sourire enchanteur, he me laissent plus maître de mà raison? Dis-moi la vérité, je t'en conjure. »

¿Tu vois en moi, lui répondit Pramnotchâ, la plus humble des servantes, occupée seulement à cueillir ces fleurs.... Maître, donnemoi promptement tes ordres dis, que puis-je faire qui te soit agréable? ›

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› A ces douces paroles, toute la fermeté de Kandou acheva de s'évanouir, et, prenant aussitôt la jeune nymphe par la main, il la fit entrer dans son ermitage.

› Alors l'Amour, le Printems et le Zéphire regagnèrent les régions éthérées, et racontèrent aux dieux enchantés la réussite de leur stratagème.

› Cependant Kandou, par le pouvoir surnaturel que ses austérités lui avaient acquis, se métamorphose à l'instant en un jeune homme d'une beauté toute divine. Des vêtemens célestes, des guirlandes semblables à celles dont se parent les dieux, réhaussent én

core l'éclat de ses charmes; et la nymphe, qui croyait seulement le séduire, se sentit séduite à son tour.

› Jeûnes, ablutions, prières, sacrifices, méditations profondes, devoirs envers les dieux, tout est mis en oubli. Uniquement occupé de sa passion, le pauvre ermite ne songeait pas à l'échec porté à sa pénitence. Plongé dans les plaisirs, les jours se succédaient sans qu'il s'en aperçut.

› Plusieurs mois s'étaient ainsi écoulés dans un ravissement continuel, lorsque Pramnotchâ lui témoigna le désir de retourner au céleste séjour, sa patrie; mais Kandou, plus épris que jamais, la conjure de demeurer encore. La nymphe cède, et au bout de quelque tems elle lui déclare de nouveau ses intentions. Mêmes instances de la part de l'ermite, qui cherche à la retenir. Pramnotchâ, dans la crainte d'attirer sur sa tête une imprécation redoutable, prolonge encore son séjour, et trouve dans Kandou un amant de plus en plus passionné. Il ne la quittait pas un instant; aussi fut-elle singulièrement surprise un soir en le voyant se lever brusquement de ses côtés, et précipiter ses pas vers un bocage consacré.

Et quelle pensée vous agite donc? lui demanda-t-elle aussitôt.» — «Ne vois-tu pas, repondit Kandou, que le jour est près de finir? Je vole faire le sacrifice du soir de peur de commettre la moindre faute dans l'accomplissement de mes devoirs.>

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- Eh bien! homme consommé dans la sagesse, que vous importe donc ce jour, de préférence à tant d'autres? Allez, quand celui-ci se passerait encore sans être fêté, comme tous ceux qui durant de grands mois viennent de s'écouler pour vous, qui, dites-le-moi, pourrait y faire la moindre attention, et s'en scandaliser?>

- Mais, répliqua l'anachorète, lorsque c'est ce matin même, ↑ femme charmante, que je t'ai aperçue sur le bord du fleuve, que je t'ai reçue dans mon ermitage, et que voici le premier soir temoin de ta présence en ces lieux.... dis-moi, que signifie ce langage et ce rire moqueur que j'aperçois sur tes lèvres ? >

( - Et comment, lui répondit-elle, ne pas sourire de votre erreur, quand depuis ce matin dont vous parlez, voici qu'une révolution de l'année est en grande partie écoulée ! ›

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Quoi! serait-ce donc la vérité qui sortirait de ta bouche, ò nymphe trop séduisante? ou plutôt ne serait-ce pas un pur badinage? car il me semble que je n'ai encore passé qu'un seul jour avec toi?>

-Oh! pourriez-vous me soupçonner d'user de mensonge envers un aussi vénérable brahmane, un saint ermite qui a fait vœu de ne jamais s'écarter un instant du chemin suivi par les sages?>

(- O malheur! malheur sur moi, s'écrie alors l'infortuné brahmane, dont les yeux sont enfin dessillés. O fruit à jamais perdu du ma longue pénitence! Toutes ces œuvres méritoires, toutes ces actions conformes à la doctrine des Védas sont donc anéanties par la séduction d'une femme! Fuis loin de moi, pertide! va, ta mission est accomplie !>

A. B.

Education.

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PLAN GÉNÉRAL

DE TOUTES LES CONNAISSANCES QUI DOIVENT ENTRER
DANS L'ÉDUCATION DE L'HOMME.

Signes certains du discrédit des doctrines philosophiques dans l'esprit de la jeunesse.- Bon accueil fait aux doctrines catholiques, professées par M. Frère à la Sorbonne. Exposé d'un cours d'instruction scientifique et chretienne.Tableau synoptique de ce cours.

Nos lecteurs ne sont pas sans avoir entendu parler du Cours d'Écriture-Sainte qu'un de nos prêtres catholiques, M. l'abbé Frère, a fait l'année dernière à la Sorbonne, avec un concours d'auditeurs et un succès qui ont dù exciter plus d'une fois l'étonnement et peut-être l'envie de ces professeurs qui dans la même maison enseignent le doute, l'éclectisme et la philosophie à la nombreuse jeunesse qui vient chercher à Paris la science et l'instruction. Pour la première fois depuis bien longtems, une voix pleine de la parole antique, pleine de science sacrée, véritable écho du Verbe de Dieu, s'y faisait entendre, et une instruction vraiment chrétienne, une instruction catholique était donnée à la jeunesse. Aussi, vous eussiez vu cette jeunesse, qui désertait les écoles philosophiques, accourir auprès du professeur catholique, et s'étonner de voir une science si complète, des paroles remplies de tant de vie, de force et de liberté sortir de la bouche d'un prêtre. Il faut bien que cette désertion ait été grande, et que ce mouvement ait été prononcé, puisque nous voyons en ce mo

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