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» de la pensée humaine, mais n'accordez à aucune la foi aveugle › que vous ne devez qu'à la parole de Dieu. A mesure que vous › approfondirez tous ces systèmes, vous verrez que la vérité complète n'est nulle part, mais que tous renferment quelque vérité ; › par conséquent dans ces monumens du passé vous ne pouvez es› pérer de trouver que des fragmens de science qui, nous l'espé› rons, recueillis quelque jour par la main du génie, posés sur la › base de la foi, serviront à élever un monument qui répondra au › développement actuel de l'esprit humain; mais qui, lorsque › l'esprit humain se sera développé de nouveau, se trouvera in› complet à son tour. Car l'objet de la philosophie, l'explication › des vérités infinies que l'homme possède par la foi, ne peut être D pleinement atteint, même dans le ciel; l'homme alors sous le › rapport de l'intelligence ne serait plus seulement semblable › mais égal à Dieu; la philosophie est donc de sa nature un science > imparfaite, toujours en ébauche, une science progressive, qui > tend d'âge en âge vers un but qui recule et s'enfuit devant elle › dans les abîmes de l'infini. »

» Les bases de notre enseignement historique se déduisent assez clairement des principes que nous venons d'établir.

On voit en effet que pour nous le lien des sociétés temporelles ne peut se former que dans la société spirituelle; qu'il ne peut être autre que cette loi éternelle de justice connue de l'homme par la révélation, conservée dans le monde avant Jésus-Christ par la tradition, et, depuis Jésus-Christ, expliquée aux peuples par l'Église.

› Là, et là seulement, se trouve le principe de l'existence et des développemens de l'ordre social.

› Donc l'union des sociétés temporelles avec la société spirituelle est leur état normal naturel.

› Supposez la société temporelle unie à la société spirituelle: les peuples savent ce qu'est le pouvoir; il représente Dieu, en qui seul réside le droit primitif de commander à l'homme; le devoir d'obéir est dès lors compris par la conscience. Ils savent quelle elle est la règle, quelle est la limite du pouvoir; elle est, dans la loi de Dieu, obligatoire pour le souverain comme pour les sujets. Ils savent par conséquent ce qu'est la liberté. C'est le

droit qu'ont les peuples comme les individus de perfectionner d'âge en âge les conditions de leur existence. Ils savent où est le terme de ces perfectionnemens progressifs et le type que les sociétés temporelles doivent s'efforcer de réaliser sans pouvoir jamais l'atteindre. Ce type est dans la société du ciel. Là se manifeste à nous la perfection de l'ordre et de la liberté, dans l'harmonie spontanée de toutes les volontés qui vont s'identifier de plus en plus, pendant toute l'éternité, avec la volonté infinie de Dieu.

› Donc, ici-bas deux conditions du développement de la société temporelle, l'ordre et la liberté se perfectionnent de plus en plus par une conformité croissante de l'action du pouvoir avec la loi de Dieu et un accord de plus en plus parfait de la volonté des sujets avec l'action du pouvoir; l'idée du droit prévalant de jour en jour et rendant l'usage de la force moins nécessaire. Les sociétés temporelles trouvent évidemment ces deux conditions du progrès dans leur union avec la société spirituelle, qui tend sans cesse à développer l'intelligence et la conscience des souverains comme des sujets en développant le règne de la loi de Dieu. Donc, les peuples unis à l'Église, quel que soit leur point de départ, avanceront dans les voies de l'ordre, de la liberté, du véritable progrès social. › Ceci est l'histoire du monde pendant quinze siècles.

› Supposez que la société temporelle se sépare de la société spirituelle, les peuples ne savent ce qu'est le pouvoir. Car le sceau que Dieu avait imprimé sur son front s'efface peu à peu; il ne reste qu'un titre humain; et comment faire comprendre à l'homme qu'il soit tenu d'obéir à l'homme?

› Ils ne savent plus quelle est la règle du pouvoir; car ils ne peuvent la placer que, ou dans les caprices du souverain, et les voilà courbés sous la verge du despotisme, ou dans les caprices de la multitude, et le lien social est brisé par les mains sanglantes de l'anarchie. Où chercheront-ils la définition de la liberté? qui leur montrera le but où doivent tendre toutes les sociétés humaines? Autant d'hommes, autant de rêves, autant de creuses chimères de perfection sociale que l'on verra errer comme des ombres au milieu des ruines de l'éditice social; et, lorsque l'ambition, l'orgueil viendront animer ces ombres, les ruines s'agiteront, le sol tremblera, et l'on TOME VII. No 39. - 2e édition 1842.

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verra apparaître de nouveau le fantôme des révolutions, avec toutes les calamités, avec tous les crimes qui forment son cortège sinistre. Donc, les sociétés temporelles qui se séparent de la société spirituelle perdent les conditions du progrès et quelquefois leur point de départ; on les verra marcher, à travers les combats sanglans d'une licence sans frein, d'un pouvoir sans règle à une décadence inévitable.

› Ceci est en partie, et avec des modifications qu'il est inutile d'indiquer, l'histoire du monde depuis trois cents ans.

› Et c'est pourquoi nos regrets, comme nos espérances, nous reportent sans cesse vers cette époque de foi, vers ces grands siècles auxquels nous n'envions pas des formes vieillies et à jamais brisées, mais auxquels nous voudrions emprunter ces immuables principes, bases nécessaires de toutes les formes sociales que le cours des révolutions ne brisent pas; ces conditions éternelles d'ordre qu'une fausse philosophie a fait méconnaître à la société, mais auxquelles la société reviendra, parce qu'il n'appartient pas à la pensée de l'homme de fermer à l'humanité le chemin des immortelles destinées qu'ont tracé devant elles les pensées de Dieu.

› Si je n'avais déjà dépassé de beaucoup les limites dans lesquelles j'aurais voulu me renfermer, j'essaierais de montrer comment les mêmes principes dominent et éclairent notre enseignement littéraire.

▾ Mais il est tems de nous arrêter; je n'ajoute qu'un mot en finissant.

Si la route que suit l'humanité est telle que nous avons cru la voir, à la lumière de la révélation, si nous ne nous sommes point trompés en essayant de lire vos devoirs dans les caractères des tems où nous sommes ; l'homme, ce point qui disparaît dans l'espace de la durée, cet atômé perdu dans l'univers, l'homme est cependant une grande chose, comme disaient les anciens, magna res homo; car sa passagère existence est liée par de merveilleux rapports au passé, à l'avenir, à tout le plan de l'univers. Le chrétien est surtout une chose grande de nos jours où le passé est une énigme dont il a seul l'intelligence, l'avenir un problème qu'il peut seul résoudre, le monde tout entier une grande ruine qui ne

peut être relevée que par ses mains. Bénissez Dieu de vous avoir fait naître à cette époque si solennelle de la vie de l'humanité, l'avoir fait luire sur vous toutes les lumières qui vous découvrent votre magnifique mission, de vous avoir par là associés de plus près à l'exécution de ses éternelles pensées; de vous avoir choisis parmi les instrumens dont il prétend se servir pour donner une nouvelle forme à cet édifice de la société humaine, qui, ébauché à l'origine du monde, cimenté depuis par le sang de l'Homme-Dieu et assis sur la base de son infaillible parole, battu sans cesse par les orages des révolutions, souvent ébranlé, toujours affermi d'une manière miraculeuse, grandit, se développe, monte, de siècle en siècle, jusqu'à ce qu'il aille recevoir son couronnement des mains de Dieu dans les hauteurs du ciel et de l'éternité. »

L'Abbé DE SALINIS.

yeux

de nos

Dans le prochain Numéro nous mettrons sous les lecteurs le plan d'éducation tracé par M. l'abbé Frère dans l'ouvrage que nous annonçons aujourd'hui, ainsi que le tableau qu'il y a joint des objets de l'éducation, classés d'après les rapports de l'homme avec la Divinité, avec lui-même, avec lá société et avec la nature 1.

Nous publierons aussi un article de Th. Foisset sur le parti què l'on doit tirer de la dernière loi sur l'instruction primaire pour l'amélioration de l'éducation du peuple ›.

Voir ci-après p. 310.
Voir ci-après p. 287.

A. B.

ww

Histoire.

ROME ANCIENNE ET ROME MODERNE.

Description de Rome nouvelle. Restes de sa splendeur première — Peuples qui l'ont dévastéc. — Prophéties qui avaient prédit son humiliation. — Les causes de sa chute. — Considérations sur Rome catholique.

Rome n'est pas seulement la ville des arts et la ville antique; mais c'est encore la ville des miracles et la ville des martyrs; objet non-seulement des prophéties antiques, mais encore des prophéties nouvelles, celles du Testament nouveau. Il nous appartient donc, comme nous l'avons fait de Jérusalem, de Tyr et de Babylone', il nous appartient, dis-je, après avoir lu dans nous Livres la parole du Verbe antique et du Verbe nouveau, de connaître quelles preuves cette parole, qui ne doit pas retourner vide et inutile, a laissées de son passage, quelles traces il reste encore de la splendeur première de cette puissance qui fit taire la terre devant elle, afin qu'un plus grand silence se fit sous le ciel pour entendre la voix qui, du gibet planté sur le Golgotha, annonça que tout serait attiré au crucifié, qui rendait alors le dernier soupir.

Or, en effet tout a été attiré à ce roi de nouvelle espèce, qui en même tems qu'il poussait ce cri, choisissait la ville maîtresse de l'univers pour être le siége de son successeur, pauvre pêcheur galiléen, qui alors, épouvanté du supplice dont il était témoin,

Voir ce que nous avons dit de l'état de ces villes, Nos 5, 8 et 25, t. I, p. 316; t. II, p. 106, t. V, p. 53 (59, 2o éd.).

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